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 Insane [Howard] | Terminé

Morghann Earl
L'étrange sous la normalité : Enfant cadet du Patriarche Earl, il est un héritage refusé, s'extrayant de la nécrose gangrénée de sa famille.
Tell me More : Jumeau d'Howard - Fils de Pryam
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Morghann Earl
Tintement de métal sur le verre. Par quatre fois il avait recommencé. A chaque tentative le même résultat revenait, comme si on voulait l'accabler un peu plus. La première fois, ce fut sans surprise mais avec beaucoup de tristesse. La seconde avec désespoir, la troisième avec colère, la quatrième avec rage. Une rage ! Il frappa la paillasse tant ça l'agaçait, quelque chose le contrariait sans qu'il ne parvienne à déterminer ce que c'était. Du moins au début. Les secondes passaient et lui trépassait à cette idée. Pryam avait été un monstre à l'égard d'Anthony, c'était un fait. Mais sa famille entière l'était ! Tout ceux qui avaient vu le ventre de Victoria se gonfler ! Tout ceux qui avait vu qu'aucune naissance ne fut jamais célébrée et que dans les limbes d'un secret ce rejet avait était gardé sous silence... Toutes ces années... MONSTRES ! Ils étaient tous des monstres ! Des monstres avec leur pureté, leur raisonnement biaisé par une antique volonté ! De noir drapée, noblesse affirmée mais de honte aucunement affligée ! Famille fourbe, dégénérée ! Que de malsaines intentions et lui-même dans tout cela, peut-être tout aussi bien corrompu. Une valse des pantins et à ses mains, ses pieds, sa tête, n'était-il pas tenu par des ficelles ? Ne dansait-il pas au rythme de leurs violons macabres ? Il inspira, profondément, à la quête de son calme évaporé. Il était seul dans le laboratoire mais il  suffisait que quelqu'un entre et le trouve en pareil état... Il jeta le contenu de ses expériences renouvelées, enfouit ses 4 tests dans une enveloppe kraft pour Howard et poursuivit avec le reste sans pour autant véritablement parvenir à se concentrer. Son esprit s'évadait, ses mains tremblaient, si bel et si bien qu'il en laissa ses échantillons sur place après un étiquetage difficile, pour pouvoir reprendre le lendemain. Il quitta sa blouse et son poste pour la journée dès que l'horloge annonça 17h. D'ordinaire, il restait bien plus longtemps... Mais aujourd'hui, il ne le pouvait pas.

Au château régnait une sorte de tension latente, peut-être parce que son frère et lui voulaient s'éloigner de la demeure familiale. Et ça ne pouvait pas être un mal de sortir d'ici. Il n'arrivait qu'à peine à les regarder en face, surtout ceux qui avaient l'âge de son père ou plus... Car il en était certain : ils savaient. Peut-être ignoraient-ils que cet enfant rejeté était aujourd'hui connu sous le nom du Réanimateur... Mais ils l'avaient abandonné. Il réclama auprès des domestiques qu'on lui dise où se trouvait Howard, on lui indiqua l'un des petits salons. Peut-être discutait-il avec quelqu'un... Serrant son enveloppe contre lui et entra dans un silence religieux. Il n'y avait personne d'autre que son jumeau, l'entretien avait du s'achever ou son frère se reposait-il. Il ferma la porte derrière lui et la verrouilla par magie. D'un pas lent, il s'avançait dans la pièce, sans rompre le silence si ce n'était par effleurement de ses chaussettes sur le parquet grinçant ou sur l'épais tapis pourpre. Il laissa ses prunelles noires se reposer sur la silhouette assise dans le canapé, sa présence l'envahissait, il aimait à le savoir si près. Une part de lui-même s'en trouvait apaisée et pourtant, lorsqu'il arriva face à lui, il ne sut lui parler, étouffé par sa prestance et le poids qu'il avait sur lui. Sans quitter ses obsidiennes, il lui tendit l'enveloppe. Des tests de parentés, entre deux personnes, toujours les mêmes : Anthony Evans et Morghann Earl. Il avait répété l'expérience, on pouvait sentir comme une compulsion, un désespoir à trouver et retrouver le même résultat. Il avait voulu que la science le détrompe de tout le discours du Réanimateur. Mais la science lui confirmait qu'il était bien son frère, et celui de Howard également. Ces feuilles étaient particulières, elles étaient manuscrites là où on les trouvait souvent rédigée par ordinateur : il n'avait voulu laissé aucune trace.

Lorsqu'Howard prit l'enveloppe, Morghann laissa sa main retomber le long de son corps puis détourna son visage à la mine abattue avant de s'éloigner, regard capté par les flammes dévorantes de la cheminée. Défait de l'emprise visuelle hypnotisante de son aîné, il sembla retrouver ses facultés à s'exprimer, aussi le fit-il aussi intelligiblement qu'il le pouvait, dans un souffle qui lui coûtait tant d'efforts : « Anthony Evans. Le Réanimateur est un Oublié. » Il posa ses deux mains sur l'âtre de la cheminée pour s'y appuyer, sombrant définitivement dans sa contemplation brûlante : « Un Oublié de la famille Earl. » compléta-t-il alors que le dégoût commençait à se marquer dans son discours avant de se parer d'une tristesse : « Le premier des héritiers et pourtant jamais célébré. Rares sont les officiants nécromants qui ne sont pas élus... Mais lorsqu'ils naissent, leur nom est oublié. Plus que destitué, il a été humilié. De notre père, le petit jouet qui se relève en s'écriant 'vengeance' et se persuade de la détenir, à tord ou  à raison, je ne saurais te le dire. Il veut briser le Secret de l'envers tout entier dont il a été écarté, pour bien des raisons et une, plus que d'autres, s'en trouve être notre famille, son pilier. » Il ferma les yeux, les flammes lui avait brûlé une grande partie des larmes pour qu'il puisse encore supporter de les garder ouverts. « Voilà, ce qu'il est, mon frère. Un humain. Dévorant une âme à présent en miettes. Ça n'est pourtant pas un terme, rien que le prélude de son œuvre. Il va s'évader. » Il acheva dans un souffle emprunt d'une empathie à l'égard des victimes : « Et il tuera à nouveau. »

Ven 8 Jan - 22:51
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Howard Earl
L'étrange sous la normalité :
Je suis l'héritier de la branche principale des Earl, je suis un Nécromant et un membre du secret. Je le protège et le soutient. C'est dans mon intérêt.

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Howard Earl
Le Sacrifié

Confortable silence, seulement rompu par les craquements occasionnels du feu dans la cheminée, par le chant tranquille du bois qui se consumait pour de sa chalur le bercer. Décembre soufflait dans chaque bise glacée, dans chaque flocon de neige empli de pureté ou souillé par les excrétions de l'humanité. Décembre rampait aux fenêtres désormais voilées par la buée qui s'y accumulait, formant d'étranges nébuleuses aux entrelacs fantasques, aux dessins imagés ; Décembre rampait aux portes et aux caves, tentant de se glisser entre les pierres du vieux château, pour venir, de ses ergots, marbrer leur chair exposée. Ce n'était pas un hivers singulièrement esthétique ou iconique. La neige ne tombait pas en quantité, et elle se teintait, se transformait dans les rues en traces brunies, en résidus dédaignés ; et le vent iodé chassait une partie de la majesté dont la lande aurait dû se parer. Comme une parure sublimée par les difficiles conditions climatiques, que l'on aurait évincé. Restait le froid, mordant, féroce, qui semblait défier le souffle marin plus tempéré.

Un froid qui, malheureusement, apposait sur lui le sceau de sa propriété. Il souffrait, sa jambe le torturait plus qu'il ne l'aurait imaginé, le condamnant à s'enfermer, à se terrer entre les murs de cette demeure exécrée. Il le fallait, pour tenter d'atténuer le supplice. Et bien que cela le désolait, il ne pouvait que plier face à ce besoin viscéral d'un confort minimal. La présente journée semblait lui être l'une des pires en date, alors même que Décembre n'était qu'à peine entamé. L'aube l'avait découvert brisé, fendu en deux, les nerfs hurlant sous la férocité de l'assaut qui l'avait laissé tremblant, recroquevillé, les doigts transformés en serres et sur les draps et sa jambe refermés, incapable de se contrôler alors même que le contact aggravait pourtant son supplice, le visage de larmes baigné... Des heures entières, il était ainsi resté, pantin désarticulé, échoué sur la grève de sa géhenne. Des heures entières, avant que son impalpable tortionnaire ne semble sacrifier à un geste de bonté et, grand seigneur, ne souffle sur lui un répit passager.

Se relever n'avait pas été, pour autant, aisé. Il s'était traîné hors de sa couche, il s'était lentement, péniblement préparé, interdisant aux serviteurs de sa famille de pénétrer dans le sanctuaire qui dissimulait, un tant soit peu, son infirmité. Puis, une fois présentable, il s'était laissé aller. Une dose, puis une autre. Ne l'avait-il pas mérité ? La drogue avait adoucit cette matinée déjà bien entamée, soufflant la douleur hors de son cerveau comme un miracle inespéré. Il s'était installé dans le petit salon, et un feu avait commandé. Son corps, même sous l'effet de l'illégale substance semblait glacé, il tremblait, sourdement, crispé pour éviter de trop le montrer. Assit dans le canapé luxueux, on lui avait apporté une collation légère, spécialement composée par ses soins, gardant en tête que l'ingestion de temps de de drogue affectait son appétit et sa capacité à absorber les mets qu'il dégustait. En compagnie d'un ouvrage longtemps mit de côté, il avait laissé les heures défiler, le ciel s'obscurcir. Dehors, le vent sifflait, hurlait. Le château grondait.

Un moment, son esprit s'était évadé de la prison de son corps, avait glissé sur celle de papier, pour finalement planer au loin. Perdue la notion du temps, rien n'aurait pu l'empêcher de s'étioler sous l'effet de la puissante substance qu'il avait avalé. Puis il avait atterrit, ramené à la réalité par la présence de sa filleule avec qui, un moment il avait discuté, supportant la compagnie de son chaperon par la même occasion. Leah était une enfant éveillée, bien que déjà dotée de la rigueur exigée par sa parenté. Son éducation était déjà débutée depuis plusieurs années, et elle s'en sortait avec honneur et fierté. Elle voulait l'écouter, il ne pouvait que s'y plier. Mais lorsqu'elle fut partie, ce fut la morosité qui emplit le vide laissé. Il resta un moment seul, à regarder les flammes danser, avant que son esprit ne glisse une fois encore, et ce jusqu'à l'apparition de son cadet. Il ne l'entendit pas arriver, le regard lointain, l'expression songeuse, pâle comme un spectre muet. Ce fut uniquement lorsque sa silhouette emplie une vision troublée qu'il revint à lui pour l'observer.

Sombres prunelles sur lui apposées, sans un geste ou une parole pour le saluer. Lui n'émettait pas davantage de son, mélodie malaisée d'un discourt longtemps usé. Il prit les enveloppes sans lui demander de quoi il s'agissait, se redressa davantage, avec un bref instant, le soulagement de voir que la drogue faisait encore effet. Une à une, il les ouvrit, lu ce qu'elles contenaient. Puis, lorsque la dernière ligne de la dernière lettre fut consommée, il en fit un ensemble net et sans débordements, se leva, une main sur l'accoudoir de bois, s'approcha du feu en contournant son cadet et un déposa la liasse de papier. Toujours muet. Pas un sort, pas une seule rune, mais un geste, lent, posé, et discret, par son frère dissimulé. Le feu flamba dans un souffle, semblant respirer, et les analyses, avec leurs enveloppes, furent consumées. Un souffle bienvenu dispersa ce qu'il en restait, tandis que, sur le linteau il s'appuyait. Une fois certain que les traces des nouvelles apportées ne pourraient être retrouvées, il retourna à son canapé, s'installa.

La nouvelle était choquante, dérangeante, et pourtant, il tardait à s'exprimer. La raison en était simple, il réfléchissait. Réfléchissait à ce que l'identité de cet homme impliquait, et la manière dont il fallait aborder le problème que, désormais, il lui posait personnellement. Cet homme était un Earl de naissance, le seul Oublié que la famille comptait, de ce qu'il en savait. Une souillure dans la lignée, une souillure qui les affaiblissaient tous. Si véritablement Morghann ne se fourvoyait pas, alors sa destitution était naturelle, et guère surprenante. En revanche, quelque chose d'autre semblait surprenant. Très surprenant, même. « Pourquoi n'est-il pas mort...  » Ses premiers mots depuis plusieurs heures. Des mots funèbres, mais sérieux et préoccupés. Son regard se fait harpon, flèche enténébrée, acérée par les questionnements. « Il souille la famille, il affaiblit notre puissance, nous parasite de son existence, même en étant loin de nous...  » Il énonçait tout cela avec calme, lenteur, sans passion « ...alors pourquoi Pryam ne l'a-t-il pas tué ?  » Une phrase répétée, clarifiée, et placée avec fermeté. Oui, pourquoi ne l'avait-il pas tué ?

« Jouer ne lui ressemble pas, de ce que nous en savons. A défaut de pouvoir réparer la faute, dissimuler définitivement l'humiliation aurait pourtant été la meilleure façon de procéder. Le tuer, quand il n'était qu'un nourrisson. Pourquoi l'avoir laissé vivre dans ce cas ? Par respect du sang ? Je n'y crois pas, pas un instant  » Il s'interrompit de nouveau. N'ayant pas de réponse à une telle question et doutant que son cadet puisse en fournir l'ombre d'un extrait. Pryam seul, ou leur mère, aurait pu répondre, mais les interroger aurait été avouer savoir la vérité. Et chez les Earl, une vérité que l'on voulait dissimuler était dangereuse à dévoiler, même aux principaux concernés. En un sens, c'était également vrai à leur encontre. « Ou à défaut, s'il désirait le conserver, pourquoi ne pas en faire un exemple à nos yeux, nous monter contre lui ?  » Il y avait trop d'incohérences, à ses yeux, dans la situation présente, trop de choses qui ne pouvaient se lier les unes ou autres en un chemin logique et raisonné. L'identité du Réanimateur lui semblait le sommet d'un iceberg encore à explorer... ou bien était-il simplement trop méfiant, trop paranoïaque à leur égard ?

Soupire discret, sans pourtant que son visage trahisse davantage de ses pensées. Outre ces soudaines interrogations, il y avait une autre certitude qui le taraudait, une certitude qu'au grès de ses cheminements de pensées, il souffla sans le remarquer : « Il peut m'empêcher d'hériter...  » Cette simple pensée lui retourna l'estomac, l'insupporta. Hériter du titre de patriarche était l'une des seules choses, l'une des seules valeurs auxquelles il se raccrochait. Durant tout ce temps, il avait construit tous ses projets sur la certitude qu'une fois ses parents et leur génération vaincus, il hériterait et conduirait différemment sa famille. Mais avec l'apparition d'un frère aîné, il voyait soudain ses prétentions au trône s'effriter. Son attention revint lentement à son frère, et il lui tendit une main, l'invitant à s'approcher, lui-même se relevant pour clore une part de la distance qui les séparait. « Qu'est-ce qui t'afflige, mon frère ? Son destin, ou ce qu'il a l'intention de faire ?  » Son frère, il fallait le lui rappeler. Son frère à lui, et à personne d'autre, peut importe du sang la parenté. Il frôla son visage. « Si ce sont ses actes, tu sais déjà comment l'arrêter  » Le tuer, comme il aurait dû l'être.

Dim 10 Jan - 13:33
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Morghann Earl
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Morghann Earl
Ses yeux noirs s'ouvrirent à l'approche de son frère, comme aimantés à sa présence. Pas un mot toutefois, le silence s'étirait et se prolongeait sans qu'il ne se sente en capacité de le rompre à nouveau. Les résultats furent brûlés, les flammes dévoraient sa fraternité, celle qu'il ne connaissait que depuis cette matinée. Preuves détruites, c'était un secret qui se polissait, celle de leur conjointe découverte sur le premier fils de leur père. Un secret comme beaucoup furent formés en cette demeure, des secrets parfois épouvantables, parfois inéluctables, souvent les deux en même temps. Morghann le suivit du regard, sans quitter sa place. Il patientait, loin de vouloir le bousculer dans ses réflexions. Lui-même était encore perdu alors qu'il le savait depuis plusieurs heures. Ses mots, en réponse, lui glacèrent de sang. Ses obsidiennes retombèrent sur les flammes, lentement, pas assuré de pouvoir en accepter d'avantage. Pourquoi se sentait-il troublé par ces propos ? Leur violence ? Leur froideur ? Les suivants furent pires encore, quand bien même il avait cru toucher déjà de bien sombres sommets. Pryam ne l'avait pas tué, certes, en cela le fait était exotique pour un homme qui n'hésitait pas à massacrer ou faire massacrer lorsqu'un obstacle, à lui, osait se présenter. Mais... Ça n'avait franchement pas été la première chose qui avait chatouillé son esprit lorsqu'il l'avait appris ? Peut-être était-il alors trop empathique, trop tourné vers ses sentiments là où Howard se montrait sous un jour pragmatique... Pourtant, Morghann n'aurait su se positionner sur le caractère bon ou mauvais de ces deux pôles. Il se sentait... Si accablé. Il ne répondit pas aux questions de son aîné. Il avait quelques suppositions sur le sujet, mais elles n'étaient justement que de simples hypothèses vers lesquelles il aurait été hasardeux de se tourner.

Son corps se raidit lorsque Howard souligna la possibilité qu'il se fasse détrôner. Une part de lui se voulait inquiète, terrorisée même par cette éventualité sournoise à laquelle il craignait d'être confronté. Une seconde part de lui-même s'insurgeait contre cette réplique égocentrique que son maître abandonnait. Sa respiration en fut coupée, quelques secondes, avant qu'il ne reprenne un rythme aussi régulier que possible. Du coin de l’œil, il vit la main de son aîné se tendre vers lui, mais il demeurait figé, stoïque, le visage rongé par la lumière des flammes qui dansaient. Il marqua un sursaut en sentant sa main près de son visage sans qu'il ne l'ait vue approcher, et instinctivement, contre elle, il vint lentement accoler sa joue, son regard s'accrocha au sien, prise après prise, il se reprenait et, à lui, se remettait. Il se noyait dans les lacs d'encre, s'oubliait lui-même. Ses sentiments sombraient, s'effaçaient au profit de la volonté de son aîné, qu'elle seule soit satisfaite. Le reste, pour si peu, comptait. Ce qui l'affligeait n'avait en définitive aucune importance en comparaison à ce qu'Howard attendait. Il lui accordait le droit au meurtre si le cadet ne pouvait supporter le sang qu'Anthony verserait. Il lui accordait, sans aucune retenue, alors qu'il pouvait y avoir encore tant de choses à découvrir à son sujet... Alors pourquoi le sacrifier ? Pour le caprice d'un cadet ? Non, Morghann ne le croyait. C'était dans l'intérêt d'Howard que de faire disparaître Anthony, il ne faisait que retourner la situation pour que le plus jeune se sente l'auteur propre de cette décision. Mais il ne l'était. S'il avait vraiment voulu tuer Anthony... Il aurait été tellement plus simple de lui arracher la vie au cours de leur entretien et camoufler ceci en défaillance cardiaque.

Il lui faisait face, ses prunelles se teintèrent d'une certaine tristesse, avoisinant la déception mais sans attendre toutefois, il relevait l'une des ses mains. Ses doigts se maculèrent d'un sang sombre venu de nulle part et inondant sa dextre jusqu'au poignet. Fort heureusement, les manches de sa chemise étaient relevées au niveau de ses coudes. C'était le sang qu'il n'avait pas eu sur les mains, un peu plus tôt et qui, lorsque la sentence tombait l'accablait des marques d'un meurtrier... Il ne le quittait du regard, ce frère tant aimé, assurément hypnotisé, sous le joug de sa dominance. Et pourtant, il ne parvint pas à saisir son cœur. L'organe lui échappait, contre sa volonté. Il abandonna, le sang sembla se faire absorber par sa peau avant de disparaître. Morghann fronça les sourcils sans comprendre. Dans les ténèbres de ses prunelles, un fantôme l'habitait et il sembla soudain ailleurs, transporté. Il fixait Howard, mais comme un aveugle, ne le voyait. Sa vision était hébergée par l'un des esprits qu'il avait pour allié et qu'il avait greffé à Anthony avant de le quitter. « Il a brisé mes chaînes. » Il pencha lentement la tête, se pressant d'avantage contre la main d'Howard. Il avait l'air étrange, presque effrayé et blessé par ce qu'il voyait. « Il est si pâle... » Un souffle, presque en désespoir. Quel idiot ne faisait donc pas cet Oublié, usant des dernières forces que son âme en lambeaux lui permettait, le laissant terriblement faible. Morghann ne lui avait-il pas dit qu'il reviendrait le voir. Il lui serait tout autant possible de mettre un terme à son existence à cet instant-là. Il ne faisait que repousser une échéance à présent certaine... Ou presque.

La présence dans ses yeux s'estompa, et à celle d'Howard, il se confronta. N'avait-il pas trahi son propre sentiment à l'égard du Réanimateur par sa peine exprimée ici ? « Ce qui m'afflige... ? » Son frère voulait-il vraiment entendre la vérité, le fond de sa pensée ? Cela risquait de ne pas lui plaire, ou seulement pour moitié. Il était trop tard pour y renoncer. Howard l'avait interrogé et il ne lui avait fourni qu'une réponse partielle dans son comportement. « Son passé. » Ce destin tragique, ce rejet, ce que son père et toute sa famille avait fait... Et qu'Howard semblait prendre pour normal.  « Son présent. » Dans un asile enfermé, si faible, si détruit, si fou. « Son avenir. » Et le sang qu'il verserait encore demain. Il devait l'avouer, ça le dérangeait, il le craignait et paradoxalement, se sentait tout bonnement incapable de l'arrêter de manière aussi radicale. Il aurait voulu le raisonner, l'entraver pour que de morts il n'y ait pas à nouveau, sans pour autant compromettre la survie d'Anthony. Capricieux, il ne voulait ni l'un ni l'autre : il voulait les deux. « Tes mots. » acheva-t-il d'une voix tremblante. Il posa sa main sur la sienne, pour s'assurer de pouvoir la garder et pour rassurer son frère que, quand bien même, il l'aimait. « Cela aurait pu être moi, en lieu et  place de lui. Aurais-tu réclamé mon trépas ? M'aurais-tu abandonné ? M'aurais tu regardé comme une souillure à ton nom ? » Il en était blessé, sans même que son jumeau n'ait répondu quoi que ce soit. Il était certain dans détenir la réponse et il ne voulait pas l'entendre. « Cela aurait pu être toi... Aurais-je du te rejeter, t'éliminer ? Aurais-je du poser mon regard sur toi sans chercher à te comprendre ? Sans chercher à apaiser ta peine ? » Il secoua négativement la tête, la mine désolée : « Je ne l'aurais pu auprès de toi, comme je ne le peux à son égard. Dussé-je te décevoir à ces mots. »

Il ne parvenait pas à détourner le regard, ni même à baisser les yeux : « Kessy n'était pas une sorcière. Mon propre fils, mon propre sang, ne l'était pas d'avantage. A eux, je me suis lié, et toutes ces années, tu ne m'en as pas détourné. Comment le pourrais-je aujourd'hui en des circonstances similaires ? Il est mon sang, il est mon frère. Il est le tien également. » Il entraînait la main de son frère vers sa gorge, frémissant au mouvement de ses doigts sur sa peau : « Il peut t'empêcher d'hériter... Oui. Si tu le désires, je le tuerai. » Promesse assurée. « N'espère toutefois nullement que je puisse le faire de ma propre volonté, c'est la tienne que j'exécuterai. » Et c'était la sienne qu'il aurait exécutée un peu plus tôt si le cœur du Réanimateur ne lui avait pas échappé. Il s'en voulait d'avoir à exprimer une volonté si différente et assurément déraisonnable, et dans un même temps, il lui confirmait qu'il était tout à fait capable de juguler ses propres désirs au profit des siens, dusse-t-il en pâtir et s'écrouler sous les remords. Il était las, terrassé et lorsqu'il approcha son visage de celui d'Howard, ce fut un front brûlant, fiévreux qu'il lui offrait, collé au sien. Sa tête lui semblait lourde : il avait passé l'après-midi à ressasser les propos d'Anthony. Il n'aspirait qu'à la paix, au réconfort qu'il savait pouvoir trouver dans la seule présence de son jumeau. Il fermait les yeux, il tremblait légèrement : « A ce jour encore, Pryam n'est pas décidé à le tuer. Il voulait le mettre hors jeu par une opération cérébrale. C'est ce qu'Anthony m'a dit, je n'ai pas encore pu le vérifier comme je l'ai fait pour notre parenté. » Mais Anthony ne lui avait pas tant menti. « Je ne sais pas ce que fabrique notre père mais... Pourquoi s'ennuyer de la fatalité d'un héritier désigné par l'âge le plus élevé... Quand on peut avoir le choix parmi trois ? Quitte à en briser ou tuer quelques uns pour s'assurer de sa postérité. Après Anthony, il n'était pas bien certain de pouvoir obtenir un second héritier mâle. Il a pu le garder trois années à l'issue desquelles nous sommes nés. Si grande joie, comble de sa notoriété mais vois ce que nous sommes. Grand bien lui fasse de l'avoir conservé : Anthony est l'épée de Damoclès qu'il peut brandir au dessus de ta tête. Et je suis l'autre épée, celle qu'il veut utiliser pour te défaire. Il l'a gardé en vie et m'a laissé partir avec toi à l'étranger pour mieux te juguler lorsque tu reviendrais. »

Morghann laissa son front glisser à sa tempe, le long de sa joue avant de le poser sur son épaule, la mine affreusement triste. Il respirait aussi calmement qu'il le pouvait, ce qui n'était pas une mince affaire. « J'aimerais revenir sur ce que je t'ai demandé, si tu me le permets... Je ne saurai être ton Roi. » Il s'écarta lentement de lui, sans lâcher sa main. Il l’entraîna avec lui alors qu'il allait finalement s’asseoir dans le canapé, par compassion envers son frère et sa jambe douloureuse : « Ne me sauves pas. » Car leur père, sans nul doute, s'attendrait à cela. En son for intérieur, Morghann l'avait déjà accepté : il était prêt à périr qui cela pouvait apporter à Howard la victoire qu'il attendait. Il releva ses prunelles sur ce maître qui le surplombait, il en tremblait, il en jubilait.

Dim 10 Jan - 19:43
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Howard Earl
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Howard Earl
Le Sacrifié

Il le regardait, l'observait sans un mot, sans un son ni une réaction, quand bien-même il désapprouvait grandement la façon dont son frère se comportait. Immobile, même lorsque l'on en venait à le solliciter, il l'observait, le jauger. De nombreux sentiments grondaient, mais c'était de marbre qu'il paraissait tandis qu'en s'avançant, il venait le saisir au menton, de deux doigts assurés. Son regard plongea dans le sien tandis qu'avec un calme impavide, il assénait : « Dans ce cas, peut-être devrais-je te tuer tout de suite et être débarrassé immédiatement de la menace que tu pourrais représenter... qu'en dis-tu ? » Des mots durs, pourtant dépourvus d'agressivité. Ce qu'il venait de lui dire, il ne le pensait pas, pas même un instant, et pourtant il n'avait pas hésité à le lui infligé, se doutant d'ailleurs parfaitement de ce qu'il lui ferait ainsi endurer. Cela n'avait pas suffit à le faire reculer, bien au contraire, cela l'avait encouragé. Il y avait une leçon derrière ses mots, que lui seul pouvait décider de saisir ou d'abandonner. Un long moment, il continua de le regarder ainsi, composé, paisible d'apparence, avant qu'il ne se détourne de nouveau, pour retourner près des flammes dont la chaleur adoucissait les tourments de son corps perclus. Une main sur la pierre du puissant linteau, il observait les flammes qui dansaient.

« C'est inepte, Morghann. Tout ce que je fais, je le fais pour toi et pour personne d'autre, si je ne te sauve pas... si je ne te protège pas, à quoi cela servirait-il ? Si tu devais périr, que crois-tu qu'il adviendrait ? » Il se tourna à demi, le regardant du coin de l'oeil, les traits complètement détendus. Il était las, battu par la cruauté de sa propre existence et par les derniers événements, il était éreinté de sa journée, mais se tenait toujours droit, toujours là, pour ce frère qui semblait se noyer. Et en un sens, il se sentait progressivement s'apaiser, plus tranquille qu'il ne l'avait été au cours des derniers mois passés. Il esquissa l'ombre d'un sourire, qui pourtant, rapidement, disparut « Si tu devais me faire défaut, mourir, qu'est-ce qui me retiendrait de m'offrir tout entier au néant, ou de conclure un pacte pour te ressusciter ? Même ma volonté est bien peu de choses en comparaison de ta valeur à mes yeux, et tu le sais » Il secouait la tête, lentement, paternel plus que fraternel, semblant observer son turbulent enfant qui s'agitait. Quels tourments il s'infligeait... ces questions à la logique infondée, ces élucubrations, ce sentiment et ses paroles, comme s'il cherchait, en fin de compte à se dédouaner, à se rassurer, voir à trouver une excuse suffisante pour l'arrêter.

L'arrêter... lui, ou bien ce qui, en lui, rampait et semblait le ronger doucement ? Cette fièvre pleine de fébrilité. Et pourtant, lui-même en était dépourvu et un bref instant, il se demanda... était-ce là ce que son père ressentait ? Ce détachement, cette impression de ne pas être éclaboussé des passions du monde ? Si c'était le cas, il ne pouvait que le regretter, quoi qu'en l'état, cela lui serait sans doute une sûreté. « Es-tu si perturbé que tu t'oublie, ou bien as-tu une si mauvaise image de moi, cher frère ? » Sa voix était de velours, accompagnant les flammes dans leurs chuintements, s'y mêlant comme une douce symphonie prônant l'apaisement. « Je n'ai jamais eu besoin d'un intermédiaire pour tuer. Donner la mort est un raffinement que l'on m'a très tôt inculqué » Les flammes dansaient, l'appelait, dans ses yeux se reflétaient, éphémères feux follets... Son frère n'imaginait pas à quel point il n'avait pas besoin d'un garde, d'un assassin, il n'imaginait pas à quel point il s'était préparé pour cette guerre sans la moindre once de pitié. Un léger soupire s'échappa de ses lèvres, alors qu'il délaissait ces pensées pour reprendre à voix haute : « J'étais sincère, je n'essayais pas de te faire faire quelque chose en mon nom. Pourquoi aurais-je même besoin de t'induire ainsi, si je le voulais... tu ne me refuserais pas, tu l'as dit toi même »

Non, il n'aurait pas agit ainsi. Il savait que Morghann n'aurait pas refusé, sous peine de perdre définitivement ce à quoi il tenait : lui. Parce qu'il n'accepterait nulle trahison de sa part, nul refus. « Est-ce le sang, qui fait de nous des frères, Morghann ? Parce qu'il a ton sang, tu le considère comme ta parenté ? Par la loi, sans doute, il l'est, mais en ton cœur... qu'a-t-il fait pour toi, qui lui ferait mériter ce que tu lui donne si généreusement ? » Etait-ce lui qui avait souffert pour sa liberté ? Lui qui l'avait protégé et veillé ? Non... ce n'était pas le Réanimateur, qui l'avait aidé, et libéré. C'était lui, et personne d'autre. Et pourtant, il se refusait, par fierté, à le faire remarquer à voix haute, ne souhaitant pas paraître jaloux, alors même qu'il l'était... que de jalousie, il en crevait. Mais ainsi il était et demeurait. Rien ne pouvait changer cela, du moins était-ce ce qu'il pensait. Rien ne pouvait l'empêcher d'aspirer à ce qui lui revenait de droit, à ses yeux en tout cas. « Il n'est pas mon frère. Et je ne t'en détourne pas plus que je ne t'ai détourné de ta... femme, et de ton fils. Mais contrairement à eux, cet homme n'est pas ma famille et ne mérite rien de ma part. Je ne te détourne pas de lui, mais pas plus que ton épouse je ne le respecte ou l'agrée. Et s'il vient à se mettre sur mon chemin je l'exécuterais sans l'ombre d'un regret » Pour lui, il n'était rien du tout, il l'avait affirmé.

Croisant les bras, il se contenta de rester là, devant l'âtre, sa silhouette projetant une ombre immense dans la pièce chichement éclairée. Devait-il lui faire la leçon ? Est-ce que cela avait la moindre importance ? Il ne comprendrait pas sa façon de voir les choses. Il était trop impliqué. « Et s'il te perturbe, alors fais de même. Mon affirmation ne change pas, en cela. Quand à son histoire, qu'elle soit future ou passée... » Il haussa les épaules, un geste étranger pour cet homme si bien éduqué. Et pourtant cela résumait assez bien ce qu'il en pensait. Oh il aurait pu courir après les informations comme Alice après son lapin blanc, mais quelle utilité cela aurait ? Pour l'instant, il était un pion indépendant que personne n'avait attendu. Il faudrait le surveiller, avant toute autre chose. Mais pour le moment, c'était son ascendant sur Morghann qui l'inquiétait vraiment. Il semblait se l'être complètement approprié. Et il ne voulait pas le lui abandonner. Se détournant de l'âtre, il refit face à Morghann, droit et digne, et lui accorda un sourire mesuré et plein d'assurance, de fermeté. S'approchant de nouveau, il vint se tenir face à lui.

« Je ne le laisserais pas me voler ce qui est mien, qu'il soit mon aîné ou non. Quel que son passé... la misère sociale prend bien des formes, aucune n'est plus enviable que les autres, je ne traiterais pas ses épreuves avant les tiennes » Une main frôlant ses cheveux « C'est pour toi que je combat Morghann, et pour personne d'autre » Et n'était-ce pas pour lui que Morghann combattait ? Il pencha sensiblement la tête sur le côté, l'étudiant toujours de son sombre regard, billes d'obsidienne polie. « Il t'a profondément perturbé pour que tu abandonnes si aisément ce que tu m'as pourtant demandé si ardemment. Ne veux-tu réellement être mon roi ? Devrais-je donc offrir cette place de choix à cet homme de qui tu sembles soudain entiché ? Ou peut-être devrais-je la laisser à Eurynome, qui semble me la réclamer... » C'était un coup bas de sa part, mais c'était plus pour le taquiner et le faire réagir, que pour l'enfoncer, contrairement à ses habitudes bien ancrées. Sa main vint lui caresser la joue, flatter sa gorge, comme il l'aurait fait en un geste intime... ou celui qu'à un animal de compagnie il aurait dédié. Il n'en était pas moins affectueux pour autant.

Puis, lentement, il s'installa, s'asseyant lentement, noblement, à ses côtés, récupérant le livre que, sur la large banquette, il avait récupéré. « Du Vermiis Mysteri, les mystères du vers. Un ouvrage splendide, lorsque l'on désire aborder une autre facette de la nécromancie que celle, institutionnalisée, de notre famille. C'est Pryam qui me l'avait offert, pour mes cinq ans, pour fêter l'éveil de mes dons. Je m suis toujours demandé pourquoi était-ce celui-ci qu'il avait choisit et pas un autre.... » Il observa la couverture, passant ses doigts sur la lourde reliure gravée « Il est extrêmement rare, tu sais » Il secouait lentement, légèrement, la tête, en un geste ressemblant à de la déception « Il n'en existe que trois exemplaires originaux, et une dizaine de traductions. Deux des originaux se trouvent sous ce toit. L'un entre mes mains, l'autre dans une bibliothèque secrète sécurisée par Pryam en personne.... » Silence un long instant, tandis que son regard dessinait les complexes entrelacs de la reliure terriblement usée, mais encore criante d'hérésie et de folie. Puis, lentement, son regard glissa vers son frère, habité, cette fois, par quelque chose d'indéfinissable et de sévère, prédatrice impression caressant lentement au coin du cerveau, jouant sur les instincts animaux. Sa voix était posée, douce et ténue, et son tranchant, pourtant, semblait à peine gainé.

« Comment a-t-il brisé ton emprise ? »


Sam 16 Jan - 23:37
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Morghann Earl
L'étrange sous la normalité : Enfant cadet du Patriarche Earl, il est un héritage refusé, s'extrayant de la nécrose gangrénée de sa famille.
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Morghann Earl
Comment faisait-il pour se montrer aussi calme ? Comment faisait-il pour ne pas être décontenancé par les nouvelles qu'il lui rapportait ? Morghann en était tant chamboulé. Il n'osait imaginer un seul instant que cette histoire abracadabrante puisse être possible et pourtant, nul mensonge dans la parenté de sang qui à Anthony le liait. Le cadet leva les yeux vers son aîné lorsque son menton fut dirigé, patin entre ses mains de maître. Frémissement, tremblement latent comme le fantôme de son asservissement, et accablé qu'il fut des mots tranchants qu'on lui servait. Le tuer. Quelques secondes, il s'était mis à songer qu'il puisse s'agir d'une idée géniale, garantissant la pérennité de son frère si ce danger venait à être écarté. Il n'avait pas répondu, prunelles vides et ternes quand il le regardait, alors que depuis quelques mois il l'avait habitué à quelques folies droguées. Il avait baissé les yeux, attendant vraisemblablement que le châtiment s'abatte... En vain. A mesure que le temps s'égrainait dans le sablier, la vérité, plus pure, germait comme une plante mal arrosée et de soleil privée, qui en terre hostile avait du mal à grandir. Howard ne croyait pas le moins du monde à ce qu'avait dit Anthony. Ou s'il y croyait, il le niait, refusant de délaisser Morghann pour quelques victoires que ce soit. Non, il ne voulait pas l'éliminer. Cruelle question pourtant lui avait-il posé, pour qu'il réalise par l'absurde l'essence même de ses propos. Certains diraient qu'il s'agissait d'un mal nécessaire. Son jumeau s'écartait pour quelques pas vers la cheminée, tout son être criait contre cette proximité abandonnée. Il n'aurait su le réclamer, le supplier.

Dans un automatisme huilé, de son regard, il le suivait, observait sa posture droite et noble là où lui ne devait plus ressembler à l'Earl qu'il devait montrer. Plus tendre, ces mots-là le touchaient et avaient le don d'apaiser les remuants tourments qui le plaçaient en déroute. Tendre harmonie qu'à ses maux bravait. Il s'y laissa hypnotiser, emporter, ne retenant pas ce désir de s'y conformer, malléable esprit. Ivre, il l'entendait, se fustigeant de ses croyances erronées, plaçant son aîné en habile manipulateur alors qu'il n'avait besoin d'aucune de ces farces, du moins, pas avec lui. Il détourna le regard, masquant sa honte, égaré ente ses deux frères aînés, ne sachant qui croire, ne sachant comment danser. Si même il pouvait considérer Anthony comme son frère. Un soupir léger et lorsqu'il ouvrait les yeux, Howard se tenait face à lui cherchant à qui offrir le rôle de Roi si ce n'était au cadet. Les deux propositions le firent sortir de ses gonds : « Howard ! » Il grondait, jalousie absolument pas dissimulée. Pure, rude, violente. Elle provenait directement de son cœur, sans barrière, sans faux semblant. Qu'Eurynome aille au Diable ! Quant à Anthony, n'avait-il pas dit qu'il l'indifférait un peu plus tôt au point de lui ôter la vie dans le moindre regret ? Amère contre lui-même, il détournait à nouveau son regard alors que son frère s'installait à ses côtés. Cela le ferait certainement rire sous cape. Morghann, lui, n'en riait pas. Une part de lui-même réclamait cet honneur avec ardeur, l'autre craignait d'être le fléau de son joueur. Cela le rongeait, le dévorait, sans qu'il le trouve le moyen d'y échapper. Il aimait son frère et de lui, voulait l'être en retour, ne cédant sa place à aucune autre personne, pour quelques motifs que ce soit... c'est alors seulement que sa demande d'abandon lui parut excessivement égoïste.

Le sorcier porta son attention sur le livre dont on lui parlait, sans qu'il ne sache le motif exact de cette discussion. Les Earl savait tant noyer le poisson. Il n'y avait pas à douter : la vérité serait probablement révélée. Morghann plia ses jambes, les pieds sur le canapé, les avant-bras sur ses genoux parvenus à hauteur de visage, les mains tombant mollement dans le vide. La dernière question se fit tranchante, sans relation avec ce livre, du moins pas en apparence. « Je ne sais pas vraiment comment cela fonctionne. Il semble consommer une âme qui n'est pas la sienne et a rongé celle qu'il possède. Je suppose qu'avec cela il avait le pouvoir de contrer mon action. » Parole posée, enfin, ses yeux parcourraient le profil de son aîné, à défaut de pouvoir le dévorer, il se contentait de son adoration rassurante. « Il m'a dit de rendre visite à Isha Carter. Que par lui, j'apprendrai. Il a une boutique au marché des Trolls. » Il tendit une main vers le livre que détenait son frère pour le saisir, lentement. Il en caressa la reliure, sans y trouver autant d'attrait que le faisait sûrement son frère, et certainement Ayzebel si elle voyait cet ouvrage. « Il m'a mis en garde contre ce que j'y trouverai, contre l'idée qui pourrait être folle de le suivre dans la voie qu'il a empruntée. Je suis prêt à le croire.. Pour tout bénéfice, il y a un prix un payer. » Morghann ouvrit les premières pages du livre, la lecture de son jumeau lui revenait en flashs. Pour une fois, il trouvait cette manifestation dérangeante. Il était déjà dans un bien piteux état pour s'offrir le luxe d'une migraine. Après les trois premières pages, il ferma le lire, abruptement, et ses yeux également avant de se laisser emporter dans ses souvenirs qui n'étaient pas les siens. Un soupir avant qu'il n'annonce : « J'irai. » Quand il trouverait le temps. Il rouvrit les paupières portant sur Howard un regard interrogateur cherchant après sa volonté. Regard qui se fana à mesure qu'il réalisait qu'il s'y rendrait même si son frère désapprouvait l'idée, tant qu'il ne lui interdisait, il prendrait cette liberté. Il voulait savoir ce qui se tramait.

Délicatement, il reposa l'ouvrage sur les jambes de son jumeau : « Qui possède le troisième ? » demanda-t-il alors, s'interrogeant sur l'étalage incomplet des possesseurs d'originaux. « J'aurai voulu te répondre qu'il t'a donné celui-ci pour que tu apprennes à voir ce que fait ta famille et ce qu'il est possible de faire, autrement. » Comme pour l'éveiller à cette rébellion qu'il menait, rejoignant l'idée d'Anthony, celle qui indiquait qu'Howard ne pouvait engager cette bataille que parce que Pryam le tolérait. L'ironie serait de songer qu'il l'avait orchestré depuis la plus tendre enfance de son cher frère. « Mais je peine à l'imaginer jouir à la douleur d'une balle tirée dans son propre pied. » Bref sourire, presque aussitôt effacé, il secouait la tête de gauche à droite comme pour chasser ses pensées. Anthony avait faux pour beaucoup et Morghann l'avait suivi dans son raisonnement sans un instant le remettre en question, ou pas assez toutefois. Une inspiration, d'angoisse étouffée alors que son regard s'évadait, droit devant lui, dans le vide, il se perdait. « J'aurais aimé que tu sois avec moi, ce matin... » Un souffle, épuisé, caressant les limbes d'un désespoir prononcé. Il aurait tant aimé l'avoir à ses côtés pour le reconduire plus tôt sur le chemin de la raison qu'il ne faisait qu'entrevoir à présent, démêlant ses dires de la réalité. « D'une façon ou d'une autre. » Il entendait là que sa présence physique n'était pas nécessaire, quand bien même elle aurait été appréciée. La vérité était que c'était son être qui lui avait fait défaut. Il rappelait à son bon souvenir ce désir d'unir leurs esprits.

« Il était si pessimiste... Si désabusé... Dans ses croyances, il abjurait, persuadé qu'il était de tenir pour vrai, la réalité. Il la détient peut-être, en partie, mêlant raison et folie, entrelaçant vérité et suppositions. Dans ses élucubrations, je m'interroge sur celles qui pourraient rejoindre le monde du réel. Certaines me font peur. » Comme voir son frère devenir un démon, être l'outil qui fera tomber Howard au combat... Sa voix devenait un murmure, perdu entre le conscient et l'inconscient de ce qu'il prononçait : « Je te demande pardon, Howard... Mes propos étaient égoïstes. » Il craignait tant d'être la faiblesse de son frère, le conduisant à sa perte lorsque la bataille viendrait. Il n'aurait su l'accepter, ni sans remettre. Tant par la peine... Que pour un besoin physique et biologique : Howard était devenu sa drogue et il s'en rendait bien compte, même s'il ne luttait d'aucune manière. Il en avait délaissé l'idée que la douleur serait réciproque et que son frère l'aimait suffisamment pour se perdre s'il ne parvenait à le sauver. Morghann laissa sa tête lentement tomber sur l'épaule d'Howard. Son regard morne se ferma, il inspirait posément l'odeur de son frère, se laissait envahir par le confort de sa présence : « Il n'a rien fait pour moi. Il en avait toutefois un semblant de volonté qui n'a pu s'exprimer au fil des années, par notre père entravé. J'aimerais lui laisser une possibilité de le faire si tel est son désir à mon égard... A notre égard. Je ne saurais le juger aussi rudement que tu le fais. Je ne peux lui reprocher de n'avoir pu me parler alors qu'il était bâillonné. » Silencieux un instant, il se redressa avant de lui faire face. Il leva une main, effleurant du bout des doigts son front, sa tempe, sa joue, sous ses longs cheveux, subjugué par la grandeur qui se dégageait de lui.

« Il ne t'arrivera jamais à la cheville, Howard. Il ne fera jamais le dixième de ce que tu as fait pour moi et je ne veux lui accorder autant que je te donne. Il est mon frère mais toi, tu es bien plus que cela et tu le sais. » Voilà quelques mois qu'ils avaient franchi un autre cap que celui de la fraternité débordant sur la domination et la dépendance. Il était son maître et sa drogue, il était son gardien, son protecteur. « Je ne saurai survivre à ta dernière expiration alors que je pourrai perdurer à la sienne. Tu es mon Roi, il n'est qu'un Fou dont j'ignore la couleur. » Un sourire qui s'éteignait aussitôt : « Prends mon âme, mon esprit. Je sais que tu es jaloux, alors détache-moi de son influence au profit de la tienne. Je ne veux plus être dans cet état. Je ne veux plus douter et je ne veux pas être à lui. »

Mar 19 Jan - 23:18
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Howard Earl
L'étrange sous la normalité :
Je suis l'héritier de la branche principale des Earl, je suis un Nécromant et un membre du secret. Je le protège et le soutient. C'est dans mon intérêt.

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Howard Earl
Le Sacrifié

Au moins était-il réceptif, c'était un élément de satisfaction dans cet océan de déception. Morghann se comportait bien. Certes, tout ne lui plaisait pas, mais son cadet était en droit de faire ce que bon lui plaisait avec la liberté que son maître lui accordait. Il irait au marché des Trolls, à cela, il pouvait agréer. Hochant lentement la tête, il répondit : « Je n'y vois aucun inconvénient. Si l'adresse qu'il t'a donné est celle d'un vendeur d'âmes, comme cela semble être sous-entendu, il nous faut le savoir. Néanmoins, et bien que cela m'irrite de devoir lui donner raison, sois prudent. Quiconque traite avec les âmes désincarnées ne peut qu'être dangereux » Il ne désirait pas que son frère finisse il ne savait où, arraché à son corps pour servir il ne savait quel dessein obscure, perdu à jamais et hors de sa portée. Pour toute chose, il y avait effectivement un prix à payer, son jumeau avait parfaitement raison, et il se demandait quel était celui qu'Anthony Evans devait payer, pour donner un tel avertissement à un individu dont il n'avait que faire. Et inévitablement, s'interroger à ce sujet le renvoyait à ses propres intérêts et au prix qu'il devrait probablement payer pour ce qu'Elie avait encore à enseigner. Etait-il alors du même acabit que son soit-disant aîné... ? Non, il s'y refusait, son orgueil autant que sa raison s'y refusait. Il ne pouvait lui ressembler. Il ne devait pas lui ressembler...

« Je ne sais pas » Il ne savait vraiment pas, mais il soupçonnait fortement Elie, évidemment. C'était le genre d'ouvrage que le démon devrait apprécier. Toutefois, il ne saurait en jurer. Sans doute devrait-il, à l'occasion, fureter dans les bibliothèques de son tuteur pour découvrir le fin mot de cette histoire. En temps et en heures, certainement, mais pas pour l'instant. Pour l'instant, il réconfortait son frère, qui semblait profondément le nécessiter. « J'en suis certain » Et néanmoins, il n'avait pas été là, et ne serait pas toujours là.... Cela, il avait été contraint de l'accepter. Morghann disparaissait parfois, sans explications, que ce soit pour travailler ou durant ses moments de repos. Il lui était impossible de le contrôler en permanence, quant bien même il détestait l'admettre, et haïssait l'idée. S'il l'avait pu, il l'aurait gardé tout près, à lui complètement enchaîné, mais il ne pouvait céder à cette pulsion qui le taraudait. Non seulement il ne pouvait et ne voulait y céder, mais en plus de cela, le garder trop enchaîné serait pour tous deux un danger. Il devrait le supporter.... au moins physiquement. Au moins jusqu'à ce que par l'esprit, ils soient liés. Alors, il ne pourrait plus fuir, plus se cacher, plus rien lui dissimuler, il ne pourrait... plus s'esquiver. Il l'aurait tout entier. Il l'entourerait, dévorerait ce qui lui restait d'individualité....

Cette simple idée manqua lui arracher un frisson carnassier, qu'il retint tant bien que mal. A la place, il écoutait, tentant de se reconcentrer. Fort heureusement, le sujet était suffisamment sérieux pour qu'il n'ait aucune difficulté à s'exécuter. Silencieux, il l'observait. Morghann avait peur, Morghann doutait. Tout cela en raison de ce que le Réanimateur lui avait seriné. Habile qu'il était, du moins il le semblait. Pour cela, il lui en voulait. Pour cela Anthony paierait. Pour cela... il souffrirait, si devant lui il apparaissait. « Si telle est ta décision... » Il ne l'appréciait pas, et ne la soutiendrait pas, mais lui en laissait l'opportunité. Lui aussi était un égoïste, bien plus que son cadet. Il le savait.Impossible de lui offrir une chance comme Morghann le voulait, il serait incapable de l'accepter, incapable d'ouvrir son cœur pour lui permettre d'y pénétrer. Il le refusait. Si véritablement Anthony avait la moindre envie de l'approcher, ce dont il doutait, il lui faudrait vaincre la forteresse qu'il était sans la moindre aide et sans encouragements. Ainsi seulement aurait-il la moindre chance, et encore lui faudrait-il fatalement abandonner ses prétentions au trône Earl si tant est qu'il en ait. Hors de question de perdre ce pourquoi il se battait.

Et il semblait bien qu'il avait été percé à jour. Morghann essayait de le contenter et de l'apaiser... mais il n'était pas aussi facilement amadoué. Un soupire, sous tension, frémissant... « Non, tu es à moi, et à personne d'autre » Il aimait à l'affirmer, faible qu'il était « Je suis terriblement égoïste moi-même, mais je ne peux te partager. Je suis jaloux oui, et je ne pense qu'à nous, mais peut-on vraiment m'en blâmer ? » Question rhétorique, il ne se laisserait blâmer par personne, pas même son cadet. Intouchable qu'il était, il se refusait aux jugements des tiers intéressés, le lion ne se souciant guère de l'avis des agnelets. « Tu as juré m'aimer... tu as dis que tu m'aimais, moi et seulement moi... » Son regard d'un noir intense se fit plus abyssal encore, plus lumineux dans sa noirceur d'encre. « Je vais sceller tes mots, mon frère... les sceller en toi, au plus profond de toi... » Un fin sourire se dessina sur ses lèvres, prédateur qu'il était. Il se releva, lentement, toute question liée au Réanimateur oubliée pour l'heure. L'invitant à le suivre, il prit son ouvrage sous un bras, sa canne de l'autre, et en sa compagnie, les lieux quitta. Ils ne pouvaient effectuer cela ici....

Lentement, ils traversèrent les hautes pièces du château, puis le parc, vers ce lieu dans lequel il avait pourtant juré de ne pas retourner. Mais quel lieu était mieux dissimulé, protégé, que celui-ci, pour ce qu'ils prévoyaient ? Le caveau avait changé. Il l'avait préparé. Tout était prêt pour le rituel qui devait les lier, y comprit les précieux ouvrages sur lesquels reposeraient les nœuds magiques destinés à supporter le poids du long processus, les nœuds qui l'alimenterait en énergie durant l'acte... La pénombre était ponctuée de lueurs ambrées, bougies solitaires, auras solaires dans l'obscurité. Au sol, les cercles étaient déjà tracés, parfaitement exécutés, emprunts d'une minutie confinant à la folie. « … ôtes tes vêtements. Tu es la pièce maîtresse de ce rituel, je dois te marquer comme telle » Sa voix, dans le silence profond des lieux, semblait prendre un écho éthéré, alors que, près de l'autel il se tenait. Mains sur la pierre froide posées, regard sur lui ancré, tentant de ne rien montrer de la jubilation qui en lui bouillonnait... « ôtes les Morghann... laisse moi te travailler... » Encore une fois, mais ce serait alors pour un propos plus glorieux, et plus excitant encore...

Le rappel de ce qu'ils avaient accomplit brisait sa respiration, mettait son corps sous tension, et pourtant il ne voulait pas s'abaisser à apprécier la torture infligée. Malgré les tressaillements incontrôlables, malgré le tiraillement de son bas ventre, il ne voulait se concentrer que sur leur lien à venir, ce dont ils jouiraient...


Dim 24 Jan - 0:13
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Morghann Earl
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Morghann Earl
Il agréait. Il ne s'en trouvait entravé et il en était satisfait. Morghann s'interrogeait sur ce que serait Isha Carter, ce qu'il vendait, ce qu'il fabriquait. De prudence il devrait redoubler, et en son for intérieur, il redoutait ce qu'il découvrirait. Tant qu'il s'agisse d'avantages certains, sans cela Anthony aurait assurément refusé de se plonger dans cet abysse de conséquences dans lequel il ne désirait plonger son cadet, pire, il l'en dissuadait. Le cadet acquiesça de la tête, songeur. Il aimait contempler la manière dont Howard définissait sa liberté. Il le laissait pour beaucoup vaquer et Morghann savait toutefois que du jour au lendemain, il pourrait être confronté à la disparition soudaine d'Anthony si pour son jumeau, leur aîné devenait trop encombrant. Piètre liberté que celle-ci et pourtant il en jouirait tant qu'elle existerait et lorsqu'elle relâcherait son dernier souffle, il en trouverait une autre, voyageant au gré des désirs de son frère.

Ses propos possessifs lui ôtèrent le souffle, avant qu'il ne se reprenne, haletant doucement. Ses obsidiennes, dans les siennes, s'abandonnaient, éprouvant du plaisir au contact de ses griffes sauvagement enfoncées dans sa chair. Ces griffes qui le marquaient de sa domination, de son appartenance. Ses lacérations verbales lui firent entrouvrir les lèvres, laissant s'échapper un souffle chaud, aussi calme qu'il le pouvait et pourtant, qu'Howard en soit assuré : son cadet aimait. Morghann aurait été prêt à lui en réclamer encore et il n'était pas même certain qu'au sein des arguments qui le poussaient à marcher vers Anthony, il ne se trouvait pas ce désir carnassier d'en rendre son jumeau jaloux. Il voulait qu'il le retienne, qu'il se manifeste, qu'il le moleste, lui arrache la peau pour s'assurer, qu'à ses côtés, il demeurerait. A son air prédateur, Morghann jubilait, proie qui s'offrait sans la moindre retenue. Sans nul doute que, de la chaîne alimentaire, il était le plus étrange spécimen. Oh non... Il n'en blâmerait pas Howard. Jamais. Qu'il continue. Qu'il ne s'arrête pas. Qu'il s’essouffle à la tâche tant que, par lui, et lui seul, il pourrait être possédé, il en était satisfait. Et pas un instant, il ne se demandait si son sentiment avait chu dans l'anormal. Il en avait cure. Que tous ces cadres et ces normes aillent au Diable ! Qu'ils brûlent en enfer et laisse leur union s'enliser dans les méandres d'une hérésie puissante ! Aucun d'entre ces gens de jugements ne pourraient comprendre combien il aimait son frère, combien, pour lui, il pourrait dépenser, ruinant jusqu'à sa propre existence pour sa jouissance. Aucun d'entre eux ne sauraient entendre, avec exactitude, les battements malsains de son cœur aliéné. Aucun ne pourraient entrevoir les innombrables possibilités qu'offraient sa condition, opprobre à la bienséance et coupable à la décadence. Aucun n'aurait la folie suffisante, la maladie apaisante que de se savoir procédé et réclamé, attaché et décharné. Aucun ne saurait plaire à l'animalité féroce de ses instincts étranges, aucun n'aurait la perfection de son aîné. Il était son unique vœu, son plus violent caprice, sa plus dévorante pulsion. Il réclamait le métal de ses chaînes à ses poignets. Il demandait au temps d'y laisser la marque bleuté de son asservissement sempiternel. Oh non... Personne ne pourrait comprendre. Personne d'autre qu'Howard lui-même.

Morghann se leva, suivant son frère en silence. Il exaltait à l'idée que ce lien allait ce soir être fondé, reconstruit, approfondi. Il tremblait d'une attente révolue, contemplant avec aise les derniers grains s'écouler de la partie haute de leur sablier. Qu'il scelle son amour, pour lui, déjà bien ancré. Qu'il le renforce, qu'il le rendre irréfragable, inébranlable, incorruptible. Qu'il l'attache à lui, solidement, et qu'à jamais il ne puisse se libérer. Qu'il l'enchaîne, qu'il le retienne. Il le voulait. Dans le caveau, sa respiration chaude se faisait buée et lorsqu'au décor changé il était confronté, il haletait d'avantage, bien qu'il œuvrait de bonne besogne à le masquer. Décor sublime, il en était flatté car à chacune de ces lignes, chacun de ces cercles et de ces ouvrages, il voyait son frère pour lui s'affairer. De longues heures avait du être le fruit de son travail vers son cadet tourné, orienté, obnubilé. Morghann ne voyait alors pas les traces de rituels, mais le temps écoulé où Howard n'avait pensé qu'à lui. Qu'à eux. Qu'à ce lien qui serait leur et la satisfaction qu'il leur apporterait. Morghann s'était mis à trembler, frissonnant de froid autant que de désir. Pourtant lorsqu'Howard lui demanda de se déshabiller, il n'hésita pas un seul instant. Il se défit de ce qui l'abritait de la morsure de l'hiver, certain qu'Howard le protégerait s'il venait à en être bleu de peau. Il s'avança vers l'autel où il deviendrait à nouveau l'agneau, et posa ses mains sur la pierre glaciale, faisant face à son aîné. Il se laissa corrompre, probablement plus encore, s’éternisant dans sa contemplation. Il détruisait les barrières de son esprit, une à une, noyé dans l'abysse ténébreux de ses yeux. Il s'allongea et s'étendit sur le dos, contracté au contact de la pierre gelée. Et puis, abandonné à son attente, il délaissait les tremblements inutiles de son corps. Les yeux clos, il se détendait, laissant à Howard le soin d'officier, tandis que lui s'évertuait à ne lui offrir aucune résistance. Si son aîné devait pénétrer son esprit, l'aise lui serait complète s'il le laissait entrer. Il le voulait, il l'attendait, l'espérait. Il y avait même à parier qu'au lieu d'avoir à forcer quoi que ce soit, Howard se retrouve à être aspiré par le désir de son cadet. « Je t'aime Howard... » souffla-t-il bas et pourtant, dans le caveau, cela résonnait, se heurtant aux parois, ricochant jusqu'au silence. Il l'aimait, promesse qu'il faisait, promesse qu'Howard scellerait en lui. Il les pensait ses mots, il ne voulait jamais les oublier.

Lun 25 Jan - 21:23
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Howard Earl
L'étrange sous la normalité :
Je suis l'héritier de la branche principale des Earl, je suis un Nécromant et un membre du secret. Je le protège et le soutient. C'est dans mon intérêt.

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Howard Earl
Le Sacrifié

C'était de la grande magie qu'il s'apprêtait à contrôler. C'était un acte d'une délicatesse absolue qu'il prétendait effectuer. Un acte à l'impact immense, et à l'impensable portée. Il s'agissait d'une manipulation d'une extrême précision, un mont à gravir, plus déraisonnable qu'une statue de cristal en plein zoo abandonnée. Bien des sorciers ne parvenaient pas à de tels sommets, et ceux qui jouissaient de cette consécration le devait bien souvent à une vie entière d'implications et de recherches à la minutie éreintée. Pourtant, il ne désirait nulle gloire, nulle reconnaissance. Ce qu'il désirait, ce n'était rien moins que de réussir là où d'autres avaient échoué. Surmonter l'insurmontable tabou que représentait la domination d'une âme encore attachée à un corps vivant, que l'on désirait graver et travailler sans pour autant l’abîmer. Elle devait conserver son intégrité, autant que cela se pouvait. Il s'agissait de la sublimer, par la volontaire possession. La souiller serait une condamnation. En outre, il était conscient des difficultés, et de ce qui pourrait advenir s'il échouait. Les possibilités que son frère n'en ressorte pas indemne existaient, elles étaient mêmes nombreuses. Et elles auraient dû l'effrayer. En un sens, elles le faisaient. Mais cela ne signifiait pas qu'il reculerait devant l'obstacle. Il désirait plus que tout effectuer ce rituel. Il désirait plus que tout ce qui en résulterait, s'il réussissait.

Et pour être certain de se donner toutes les chances possibles, il avait minutieusement préparé les lieux. Le caveau était, dans ses moindres recoins, destiné à un seul projet. Tout avait été conçu pour que rien ne soit cédé à un trouble hasard. La seule défaillance pouvant encore exister viendrait d'eux, uniquement d'eux. Ils seraient seuls artisans de leur chute, ou de leur félicité. Et pourtant, son ambition se paraît déjà de déraison. Plus encore que le simple souhait de se voir à son frère attaché, il émettait, tant par ses préparations que le rituel qu'il conduirait, un souhait presque impensable. L'usance originelle aux ténèbres se dédiait, sortilège sombre, à la noire destinée. Et pourtant, il défiait bien davantage que cette seule affinité, bien davantage que les troubles qu'elle pouvait engendrer. Il défiait la nature profonde de la magie même, un acte presque contre nature mais n'était-il pas lui-même un être contre-nature en un sens ? Il ne désirait pas user de l'obscurité du trépas pour couronner cette union tant désirée. Pour autant, il ne pouvait s'en affranchir en totalité, se trouvant contraint à la création d'un processus hybride, ni bon ni mauvais. Un processus à leur image, un processus qui leur ressemblait. Aussi était-ce à l'encontre des ouvrages-piliers que d'un très vieil exemplaire des paroles sacrées il se munissait. Les mots obscures en lui étaient ancrés, bien moins ceux des saints vénérés.

Outils par le froid glacés, qu'il prenait en ses mains nues, subissant la morsure du gel sans se plaindre, accompagnant son cadet. Le contact presque douloureux lui servait de rappel, lui servait de point d'ancrage. Il ne devait pas s'oublier. Officiant il était, et ne devait pas faillir. Couteau de cérémonie dans une main, bougie sacrée dans l'autre, il se pencha sur le corps fraternel ainsi sacrifié. Avec lenteur et minutie il travailla, la main sûre qui ne tremblait pas, les gestes aisés du chirurgien attentif et appliqué. Pourtant, malgré l'aisance née de tant d'années de pratique, il restait méfiant, et refusait de se presser. Chaque symbole, chaque cercle était vital, venant compléter l'ensemble dont le caveau s'ornait. La caresse sourde de la lame acérée s'alternait avec le baisé brûlant de la cire qui scellait la magie, l'en recouvrait. L'image, pour tout observateur extérieur, ne devait guère paraître attirante et pourtant le lent rituel n'était pas dénué de beauté. Une étrange beauté, certes, toute de magie pétrie, de secrets nourrie, de promesses bercée. Une icône du bizarre à laquelle il se vouait et s'offrait. Le temps s'écoula, reprenant une course qui semblait s'être arrêtée, mais son cheminement les oublia. Souffle perdu, qui dans l'aura hivernale provoquait une grise exhalaison, tandis qu'il parachevait son œuvre au singulier apprêt.

Puis, enfin, après un temps qu'il ne pouvait définir, le cercle fut complet, sa clef venant confortablement se loger dans l'écrin prévu à cet effet. Se redressant sur cette vision, il l'observa un bref moment, désirant prendre son temps, et savourer chaque instant de leur union. Son souffle profond faisait s'élever sensiblement son torse, chaque fois qu'il inspirait, geste calqué sur celui de son frère qui grelottait. Mais le froid serait bientôt le dernier de leurs soucis. Ajoutant l'ultime détail, il déposa son couteau de côté, sur un bol d'eau saline, tandis que de bougies, il entourait son cadet. De ses lèvres bleuies s'écoulaient, comme un impalpable ruisselet, les premières notes d'une ode à l'unité. Prière épurée, sourde litanie de son cœur esseulé. Des mots argentins pour une rengaine pourtant noircie, contraste magnifié par la justesse des notes d'une âme qui balançait entre lumière et obscurité. En cette heure, rien au monde n'aurait mieux put définir ce qu'il était. Créature torturée, à mi-chemin, qui en tout instant vacillait. Sa voix douce glissait dans le silence, semblant s'y évaporer. Pourtant la magie s'agitait, lentement, comme un flot mourant, comme une rivière perturbée. Elle s'éveillait lentement, pouvoir latent.

Il la sentait en son corps tout entier, sentait l'énergie qui dans ses veines pulsait, promesse d'un bonheur à portée de main. Oraison sublime qui lentement grandissait, soulevant peu à peu l'océan qui sur la ville reposait. Respecter les étapes était d'une vitale importance, en ce rituel d'envergure et il savait qu'il devait se méfier. C'était donc avec mille précautions qu'il agissait, élevant lentement le flot qui les baignait pour former le méandre duquel ils allaient s'imbiber. Puis, lorsqu'enfin il sentit le nexus autours de lui pulser, cœur palpitant qu'il contrôlait, qui de puissance le saoulait, il tâcha d'avancer. La force de cet appel était sans commune mesure, pareille à nulle autre qu'il eut put expérimenter. Il sentait la tête lui tourner, légère comme sous l'effet d'un puissant alcool. Désinhibé pendant un moment, ce fut sous un œil neuf qu'il considéra son cadet, avant de se contraindre à poursuivre la cérémonie qui l'attendait. Son corps gorgé de la force d'une étoile sembla un bref instant transcendé tandis que dans l'océan il puisait, tandis que les murs de son esprit se fracassaient, se brisaient. Piège de cristal pour une âme qui se rebellait.

Il lui fallait son entière volonté, et plus encore, pour parvenir à diriger son esprit et la force qu'il ne contrôlait qu'à peine vers sa parenté. Lentement, il vint sur lui ses mains apposer. La lueur qui l'entourait se répandit doucement dans le corps de son frère, tandis qu'il se sentait en avant basculer. Le premier instant de la sensation le fit paniquer, et instinctivement, il voulut se retenir, un équilibre retrouver. Déjà, il se tendait, tentait de se jeter vers l'arrière, mais le brusque geste le fit vaciller, perdant la notion d'agilité déjà fort limitée. Il faillit s'écrouler et son esprit se perdit un bref instant, paniqué. La magie lui échappa, vint froisser la réalité, avant qu'il ne parvienne à se remettre et ne la concentre de nouveau avec fermeté. Ce fut néanmoins plus difficile, moins aisé, comme si les bénéfices de son lent travail s'étaient en partie évaporés. Peut-être aurait-il dû arrêter, mais il s'y refusait, et à nouveau, il apposa ses mains, se laissant cette fois entraîner. Son esprit sembla quitter son corps, traversant l'espace pour venir en lui se loger.

Filament de lueur aux tons de clair-obscur, il vint à lui se nouer, s’entrelacer en une danse lente, ondoyante. Il sentit son frère, le sentit comme s'il était lui, une même substance illuminée, de magie bercée... Un moment, il se laissa bercer, enivré, puis plongea plus profondément encore. Ce fut son âme qu'il ressenti bientôt, puissante lueur, énergie palpitante à quelques immatériels pas de lui, saveur unique, inique, de splendeur forgée, éternelle empyrée. Cette puissance était différente, étrangère, et elle lui tourna la tête plus encore que la magie tirée du nexus qu'il avait éveillé. Il aurait voulut la dévorer, la consommer, la consumée. Il ne le fit pas, s'attachant, en un effort surhumain, à se détourner de son attrait pour la transcender, cette âme illuminée. Il la sentit réagir à son contact, et en elle s'infiltra lentement, voulant la toucher, sa surface matérialiser. Le contact le noya, alors qu'il sentait sa propre âme, son propre esprit, s'ouvrirent largement, tel qu'il l'avait désiré mais sans savoir comment le provoquer. Suffoqué, il ne put que se laisser emplir autant qu'il emplissait, son corps tremblant de la tête aux pieds. Devant ses yeux, tout n'était que lueurs, filaments et métaphores, utopies fondamentales auxquels sa magie avait donnée la vie.

Souffle oublié, froid rejeté, ne restait que l'écho synchrone de leurs deux entités baignées dans le fluide primordial d'un monde oublié. Il le sentait alors comme s'il était lui, il le sentait en lui et autour de lui. Sans formes physiques, tout n'était qu'une extase métaphysique enivrante, grisante. Mais dans le reliquat de volonté qui lui restait et refusait de se perdre avec son frère, il parvint à se forcer, à reprendre les rennes du flot sur lequel ils voguaient, et le diriger, afin d’œuvrer à nouveau, comme un architecte, comme un bâtisseur éthéré... Lentement, péniblement, il se mit en besogne, gravant l'essence même de son cadet.


Mar 26 Jan - 20:46
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Morghann Earl
L'étrange sous la normalité : Enfant cadet du Patriarche Earl, il est un héritage refusé, s'extrayant de la nécrose gangrénée de sa famille.
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Morghann Earl
Étendu sur la pierre glaciale, Morghann s'échinait à préserver son sang froid, laissant au loin sa crainte et ses tourments. Il ouvrait lentement les paupières pour contempler cet aîné qui le surplombait. La lumière tremblante et ambrée des bougies lui allouait une allure irréelle et majestueuse. Il était royal, et même bien au delà de ça : il était divin. Il tressaillait au tranchant de la larme en surface de sa peau, mordu par son froid et brûlé, cautérisé à la cire sacrée. Il jugulait ses réactions, ses sursauts, qui auraient pu compromettre la perfection de ce que son jumeau traçait. Howard avait l'air parfaitement concentré et Morghann prenait plaisir, ainsi, à l'observer, ressentant le privilège de l'élu à qui le droit était donné de pouvoir être témoin de ce qu'il exécutait. Plus que spectateur, il était même la matière première sur laquelle il travaillait, il était la forme malléable qu'il modèlerait à son gré. Les dents serrées, il endurait chaque ligne, chaque cercle, chaque symbole avec dignité. Plus que dans sa chair, c'était dans son esprit qu'ils se gravaient, laissant la marque indélébile du sort que son frère invoquerait et pourtant, là où il devrait s'en sentir torturé, c'était un sentiment plus chaleureux qui l'envahissait, rendant son souffle plus chaud encore. Son torse se soulevait de façon lente et profonde, la fièvre l'emportait. Sa tête se faisait lourde, et pourtant, de lui, il ne détachait le regard, bien trop absorbé qu'il était, bien trop attaché pour l'abandonner là. Le froideur de l'autel lui octroyait cette possibilité, veillant à garder la tête hors de l'eau dans la dérive... Il aurait voulu se laisser envahir et posséder. Il avait désiré s'abandonner, à lui pleinement, et dans l'inconscience, plonger. Mais pour rien au monde, il ne voulait manquer cela. Son frère œuvrait pour lui, sur lui, ondulant une lame transcendante.

Cela cessa alors, après un temps éternel, perdu à deux pas de la folie. Son jumeau l'observait. Il aurait pu en rougir s'il avait été une pucelle effarouchée, mais de pudeur, il manquait affreusement. Plus que cela, il se délectait d'être celui qui captait son regard, le centre de son attention. Il l'avait, pour lui et lui seul, ces secondes, ces minutes lui appartenaient et il s'en délectait. Il les savourait avec une sagesse exemplaire, comme on déguste un vin millésimé. Et lorsqu'Howard entama les incantations, il vibra au son de sa voix et aux assauts de la magie. Il se laissa sombrer, emporter, ses mots le berçaient, son ton grave l'apaisait, le dominait. Il se laissait saisir, dévorer sans craindre les pays lointains où Howard pourrait le conduire. De confiance abusée, il aurait pu périr, mais son frère ne le voulait, il en était assuré. Il l'aimait et de tout son être, il semblait soudain comblé par sa réciprocité, tant est qu'il le désirait, il le voulait, il l'attendait. Cage de verre qui en éclats volait, son esprit l'attirait, l'absorbait, avec une violence si déroutante qu'il sentit son frère vaciller. Il le relâcha aussitôt, réalisant honteusement combien il était coupable de cet échec. Du moins le pensait-il. Qu'importe la vérité, c'était d'une honte pécheresse dont il était affligé et rien au monde n'aurait pu lui faire croire qu'Howard avait pu reculer, abandonner. Jamais, il ne le délaisserait. Ses tourments fondèrent en apaisement au deuxième assaut lancé. Son esprit ouvert, il se maîtrisait, veillant à ne pas s'agripper à lui comme une groupie déséquilibrée.

Comme il était ardu de ronger son frein quand on était un fanatique adorateur et que le divin pénétrait son enveloppe spirituelle. Il en était transcendé et pourtant ne pouvait, ne devait céder à la jouissance. Qu'adviendrait-il ? Déstabilisait-il encore son frère à l’œuvre ? Il se faisait violence mais son torse, sous les mains de son aîné, se soulevait avec ardeur, abrupte et freinée à la fois. Le souffle rompu, il le sentait voyager en lui, en son cœur, auprès de son essence, caressant ses idéologies, ses rêves, ses expériences comme s'ils étaient les siennes. Il sentait la gravure dont il ornait son âme, comme autant de lacérations et de cajoleries en un temps commun. L'acte contre-nature le torturait, ses lèvres s'ouvraient mais le cri ne s'échappait, comme contraint à l'interdit d'expression. Il se le refusait, une nouvelle fois, jugulant avec intensité la douleur qu'il s'infligeait. Il s'offrait, il lui avait promis, il lui avait demandé, il y avait consenti, à cette soumission. Il refusait de rompre sa parole, de faiblir. Une main, qu'il plaqua sur ses propres lèvres, vint le trahir. Il se faisait taire, se maintenait au silence et tremblait comme une feuille. Alors seulement son âme vint se blottir contre son esprit, l'entravant pour partie telle une vierge à sa première fois réclamant un faible 'doucement' alors qu'Howard y allait déjà bien lentement et avec milles précautions. Morghann avait l'art de lui réclamer l'impossible en ce lieu. Il se consolait contre lui, pansait sa douleur, calmait ses tremblements. En drogue, il se servait, et au plus proche de son âme se piquait. A la transcendance il cédait, ivre qu'il était de lui, de son maître adoré. Son étreinte se faisait plus tendre, bien moindrement crispée, elle était dévouée et passionnée. Elle était une ode à l'amour qu'il lui portait et lentement il le relâchait, laissait son artiste peindre la toile de leur extravagance en toute liberté. Il frissonnait au passage de son pinceau, s'émerveillait à chaque couleur. Cela aurait pu être l’œuvre la plus laide du monde qu'il l'aurait trouvé sublime parce qu'elle portait la signature de son maître. Sa dévotion s'encrait et s'ancrait et peu à peu, à ce geste, il jubilait. Il y trouvait sa place, son confort, son plaisir. Son euphorie toxicomane le grisait et il exaltait.

Sur son autel, le sacrifié se tendait mais de craintes, il n'avait. Sa confiance frôlait l'absolu et la plante de ses pieds contre la pierre glissait, remontait vers ses hanches. Ses cuisses avec son dos formait un angle parfait pour camoufler sa honte, son pêché mais ce n'était qu'une qualité qui se tarirait : il ne pourrait jusqu'à son terme se cacher. Et quand bien même, il ne pouvait renoncer à l'embrasser, qu'importe le blasphème, seul Howard pourrait le remarquer. Il lisait les tables de lois que son frère lui confiait, à son âme attachées. Il s'en imprégnait, s'y allouait et s'y conformait. D'offrandes, il le couvrait, et de son être tout entier il avait la science. Il lui laissait tout, ne gardait rien pour secret, jusqu'à ce qui déplairait à son aîné, il montrait, exposait, tête baissée, remis à son souverain jugement. Avec patience fiévreuse et fébrile, il le laissait achever ses écrits, se délectait d'eux. Il quémanda un « Encore... » passionné, les reins chauds de satisfaction. Qu'il grave encore son âme, qu'il le dévore tout entier ou qu'il le conduise à lui comme il lui avait annoncé, Morghann en réclamait plus, capricieusement, comme si sa servilité n'était pas suffisamment inscrite en lui. Plus que tout néanmoins, il voulait son attention, le garder près de lui à forger leur union fusionnelle. Il se l'accaparait, réclamait sa proximité de manière enfiévrée. Le cadet lui appartenait, de soumission couronné, et il voulait incarner sa préférence, sa plus puissante alliance et son unique mariage.

Jeu 28 Jan - 23:57
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Howard Earl
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Howard Earl
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Il ne pouvait nullement reculer, à présent, se devant d'achever son ouvrage quoi qu'il arrive. Et il ne désirait nullement reculer. Ce qu'il désirait, c'était réussir. Ce qu'il désirait, c'était faire de ce rituel un chef-d'oeuvre que jamais il ne regretterait. Chaque transcendant instant lui coûtait, ses nerfs, sa raison et sa volonté étaient mis à l'épreuve, sous tension, mais il refusait de vaciller. Précautionneux, Howard arpentait ces terres inexplorées avec autant de délicatesse que de fermeté, faisant sienne son intégrité, possédant son essence à son plus intime degrés. Sensations étrangères, pour un apatride du cœur, qui l'emplissait, l'étonnait et l'effrayait... Jamais encore une chance pareille ne lui avait été donnée, d'approcher le fluide le plus pure et le plus puissant qui, sur terre, avait éclot, avait été cultivé. Et plus encore celui qui constituait son frère, l'être qu'il chérissait le plus en ce monde. Et qui en cet instant, le tuait.... Cela n'avait en rien semblé lui être destiné lorsqu'il s'était enfoncé dans cette pure blancheur à l'aura d'absolue puissance, qui représentait ceux à quoi il avait aspiré. Il n'avait pas pensé qu'il absorberait sa conscience et ce qui le constituait, ses souvenirs et sentiments, c'était pourtant ce qui, devant ses 'yeux' surpris se déroulait. Et cela le détruisait... ce qu'il voyait, il ne s'y était pas attendu. Ce qu'il voyait, il l'avait, en un sens, redouté. Il avait espéré être détrompé.

Mais il ne l'était pas. Il ne pouvait reculer, même face à ce qu'il voyait, et qui le révulsait. Prit entre deux feus, il lui fallait supporter les visions, tout en poursuivant ses efforts destinés à graver en lui sa domination couronnée. Serrant les dents (mais le faisait-il réellement?) il acheva progressivement son œuvre, le laissa enfin reposer, tentant de se remettre de ce qu'il venait d'endurer. Mais la magie était encore là, palpitante, et son frère n'était pas parfaitement muselé. Pas encore parfaitement enchaîné... Non, il n'avait, finalement, pas achevé son œuvre, il lui restait encore à officier. Encore ? En aurait-il seulement la force ? Il l'aurait, ne pouvant, ne voulant l'abandonner. Et dans le bouillonnement amer de ses tripes, il plia, la magie semblant cette fois céder avec plaisir à sa volonté. Il plongea sur lui, en lui, féroce, plein d'une sauvagerie vengeresse, expiatrice. Pures et sombres intentions mêlées, leurs âmes se confondirent en un tourbillon de puissance et de sentiments... Ses gravures scrupuleuses furent bientôt accompagnées de griffures profondes et passionnées, sommaires. Il se refusait à abandonner, il se refusait à oublier, pardonner, accepter. Il se refusait à libérer la moindre parcelle de cette âme qui s'offrait, le tentant et l'insultant de concert en une cacophonie véhémente qui en cet instant brisait sa résistance.

Il le martyrisait, à lui l'attirait comme une proie dépourvue de défenses et de volonté. Il cherchait à l'absorber de force, à ne faire de lui plus qu'une extension de son être, sans volonté, sans rien de son individualité. Il voulait annihiler ces souvenirs et ses pensées... Il voulait voir tout ce qui le tentait ou l'offensait disparaître. Et ce fut le cas, pendant un bref instant, d'un battement de cœur le temps, tout ne devint plus que lueur blanche, une immolation qui se voulait de l'hérésie née, et pourtant, de sainteté suintait, en un refus de l'ultime souillure qu'il produisait. Tout sembla disparaître, la tension le quitta et pendant ce long flottement, il ne fut plus ni lui ni Morghann, mais une entité sans... identité, sans intellect individualisé... Transcendé, il sembla à lui, à eux, attirer l'ensemble des esprits qui en ces terres reposaient. Choeur intemporel, issu des centaines de générations Earls, qui en eux résonna en un chant dément, les secouant et le faisant lâcher prise. L'impact psychique fut terrible, si terrible qu'il s'effondra à terre dans un cri incontrôlable, tremblant. La magie retomba avec fracas, faisant un bref moment trembler la falaise, se dissipant comme des vagues de pestilence. Le flot s'était imprégné de ses sentiments mitigés, de sa férocité...

De nouveau lui-même, mais choqué, il resta un long moment allongé. Son esprit était engourdit, figé autours du noyaux du lien qui en lui s'ancrait, tandis qu'à l'autre bout, il sentait son frère bien présent, son âme qui pulsait. Il avait réussit... mais en cet instant il était incapable d'exulter. Il était trop choqué. Ravis de son lien, fier de sa victoire et de leur union tout juste créée... mais révulsé de ce qu'il avait vu et sentit. Son esprit froid et rangé ne pouvait supporter ces images, son corps intouché ne pouvait que se révolter, se sentir salit et souillé... Il paniquait, il se sentait malade, et empoisonné au cœur même de son être. Prit d'un spasme, il se plaqua une main sur la bouche pour s'empêcher de vomir, et se roulant en boule, adoptant sans le vouloir une étrange position fœtale. Yeux fermés, son esprit en deux se scindait... en un sens, il rageait, voulant avoir la force de se relever et de s'occuper de son frère, une part de lui le désirait ardemment, se défaire des liens de sa psyché pour le choyer. Mais l'autre partie de lui, instinctive, animale, le bloquait, l'emprisonnait, outragée et violentée par ce qu'il avait expérimenté. Peu importait que ces images et souvenirs appartenaient à son frère, il les avait vécu comme sien et ne pouvait s'en défaire. Paniqué devant cette réaction à la violence insoupçonnée, il se noyait, pataugeait.....


Sam 30 Jan - 20:43
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Morghann Earl
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Morghann Earl
Ce qu'il lui montrait, Morghann le faisait avec une certaine crainte. Le jugement d'Howard avait une très grand importance aux yeux du cadet et lui dévoiler sa vie, son enfance, son adolescence, ses déboires d'étudiants, son mariage était comme se mettre à nu. Il était certain qu'Howard désapprouverait certains épisodes de son existence, ceux qui sortaient du cadre bien institué de leur famille. Pourtant il le faisait, parce qu'il avait appris que son frère saurait à minima les tolérer à défaut de comprendre et d'agréer. Il les avait toujours toléré. Il avait laissé son cadet vivre plus libre que, lui, ne l'avait jamais été... Morghann avait profité de cette longueur de laisse, probablement plus que son jumeau pouvait s'y attendre. Seulement maintenant, il le voyait, il saurait. Sagement, il patientait, l'âme progressivement gravée du sort qui les servirait, il observait, anesthésié par une drogue d'excellente qualité. Il n'avait pas pour habitude de consommer du Earl tout les jours, encore moins de son propre jumeau. Lorsqu'enfin ce moment venait, il s'en délectait, en devenait docile à souhait, plus malléable et offert qu'il ne l'aurait été naturellement.

Un cri fit vibrer leur caveau, un cri terrible et puissant lorsque de lacérations son âme était sauvagement accablée, les griffes dans sa chair s'ancraient plus lourdement qu'il s'y était attendu. Il voyait en Howard le primitif animal s’acharnant sur sa proie. Vengeance ou sadisme, il ne le savait, mais la violence dont faisait état son aîné le terrorisait au plus profond de lui-même. Il ne s'était guère attendu à cette réaction. Howard avait toujours toléré ce qu'il était. Alors pourquoi cette réaction soudain ? Pourquoi cette punition ? Tétanisé, il demeurait figé, victime incapable de se rebeller. Il y avait renoncé, le soir de leurs retrouvailles. Il avait juré, il avait promis qu'il lui appartenait. Il n'avait pu prévoir ces funestes oraisons. Une part de lui même se sentait affreusement trahie, blasphémée, trompée. Cette part-ci saignait et les coups vindicatifs de son aîné y aidaient assurément. Une autre part de lui-même, déraisonnée, louait cet instant comme une consécration. Howard le possédait et Morghann se félicitait de sa capacité à se laisser dévorer sans broncher le moins du monde. Sa volonté était de fer à ce sujet, buté et borné qu'il était. Il acceptait et en jouissait. Il avait son frère, pour lui uniquement et Howard le désirait, il s'accrochait sauvagement à lui et il en jubilait. La douleur n'était qu'accessoire, elle semblait même nécessaire. La folie le lui soufflait et il gobait avec innocence. Un cri fit donc vibrer le tombeau, un cri à mi-chemin entre une souffrance chaotique et un plaisir malsain. Il délirait, ivre de joie et torturé, son front, son corps étaient devenus si brûlants que le froid qui régnait en ce lieu lui semblait soudain bien lointain. Son âme pleurait, saignait et se délectait à la fois, le plongeant dans un état si proche du trouble névrosé, hystérique. Son aliénation n'avait jamais était aussi marquée. A lui, il s'accrochait également, avec plus de tendresse, avec le désir fou de le maintenir contre lui, de favoriser le massacre dont il était la chair martyre.

Il cessa de respirer, le souffle lui manquait au divin instant de leur fusion. Le sorcier se crispa, exaltant, transporté dans un tourbillon d'émotions dépareillées. Il tremblait affreusement, de spasmes affligé et puis, l'air entra à nouveau dans ses poumons, le brûlant. Il respirait très vite, comme une femme sur le point d'accoucher. Il suffoquait comme si à la gorge, on l'étreignait. Etait-ce Howard ? Il ne voulait y croire. Son jumeau voulait l'avoir, le posséder, le dominer mais jamais... Non, jamais, il ne chercherait sa mort. Il y eut un flottement, où il se sentit brusquement plus calme, frémissant à la Voix des morts, défunts de sa famille... Leur son était assommant mais Morghann y avait été habitué depuis 35 années avant qu'Elie Mortimer ne l'en prive. Au moins, ainsi, Howard comprendrait à quel point sa drogue était puissante, fracassante. Bien qu'ici décuplée, son essence, sa gravité était la même. La tension retomba. Morghann ferma les yeux, effondré. Sur la pierre froide de l'autel pourtant, sa température ne chutait.

Il ouvrait ses yeux, la vue embrumée, comme sur le point de faire une overdose. La pièce tanguait, à moins que ce ne soit lui. « Howard... ? » Voix rauque, comme après une mauvaise soirée étudiante à avoir ingurgité tant d'alcool que le crâne se fend en deux. Pas de réponse, il regardait autour de lui, sans parvenir à bouger véritablement. Son frère n'était pas là. Il ne comprenait pas. Howard n'aurait pu le laisser dans cet état, après leur rituel. Il se glissa sur le flanc, vers la sortie. La cire sur son torse s'écaillait dans le mouvement. Il laissa ses jambes tomber hors de l'autel pour s'asseoir. Sa tête lui tournait, il posa une main sur son front brûlant, en proie au vertige et patienta un instant que cela passe. Il inspirait lentement, profondément. Une main tendue vers ses vêtements, il les appela à lui. Se relevant, membres crispés, tendus, il enfila boxer et pantalon dans un mouvement des plus lents, ankylosé. Il n'avait qu'une seule envie : retrouver son jumeau au plus vite. Son cœur battait à la chamade, incapable de se contrôler mais... Il entendit respirer. Il se leva brusquement, contourna l'autel et hurla catastrophé : « Howard ! » Son frère, étendu au sol, prostré. Ses premiers gestes furent purement médicaux bien que tremblants et affolés, veillant à ce que tout aille pour le mieux vitalement. Une fois rassuré, écroulé à ses côtés, il le saisit, le redressa et l'amena tout contre lui. Son torse se mouvait, haletant de panique, contre le dos de son frère. Il passait ses bras autour de lui, l'étreignait avec fermeté, une main à plat sur son cœur pour garder à l’œil cette constante palpitante. Morghann respirait fort, le nez enfoui dans son cou où il déposait un baiser, comme si ça pouvait réveiller sa belle au bois dormant.

« Howard... Howard... » *Howard...* Litanie désespérée, qui, dans son esprit s'était infiltrée, pour aller le chercher, même si pour cela il devrait le tirer de force. Son âme vint contre la sienne se blottir, l'encercler, l'apaiser... Cherchant désespérément ce qui causait son trouble *C'est fini, tu as réussi... Je suis si fier... Reviens à toi, reviens moi, je t'en prie.* De son bout de museau d'âme, il le poussa avec douceur et tendresse, comme pour le stimuler, le faire avancer... Le réparer. *Parle-moi... Qu'as-tu ? Pitié, dis quelque chose...* Ses paroles se brisaient alors que nerveusement, dans le caveau, il le berçait. Le mouvement était lent, épuisé, mais présent. *Je ne voulais pas que ça te fasse du mal. Ça ne devait pas te faire du mal, le rituel...*

Dim 31 Jan - 23:05
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Howard Earl
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Je suis l'héritier de la branche principale des Earl, je suis un Nécromant et un membre du secret. Je le protège et le soutient. C'est dans mon intérêt.

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Howard Earl
Le Sacrifié

La sensation de son corps contre le sien le révulsait, et pourtant il n'avait pas la force de le repousser. Son esprit perturbé avait engendré un chaos impossible à apaiser... du moins était-ce là la peur qu'il ressentait, cette peur qui, s'alliant au dégoût, menaçait de le submerger. Il tremblait, feuille au vent de la panique ballottée. Les appels inquiets de son frère résonnait en lui, fulguraient contre ses tempes et pourtant, il ne parvenait pas à former la moindre pensée cohérente nécessaire à l'apaiser ou à le conforter. Il voulait répondre, il aurait voulu se cacher et le réconforter mais se perdait. Si mal... il se sentait si mal, comme si sa peau avait été traînée dans la boue. Combien aurait-il donné pour réussir à laver cette sensation de souillure, de saleté qui l'emplissait, qui lui donnait l'impression de s'infiltrer tout au fond de lui. Combien aurait-il donné pour oublier ce qui le rongeait ? Il étouffait ! Un mélange de panique, d'horreur et de culpabilité dans lequel il finit, dans un geste désespéré, par l'attirer.

Il l'attira dans le furieux tourbillon de ses pensées déformées, de ces sentiments instinctifs et révoltés. Des sentiments qu'il n'avait pas fait naître mais qui étaient pourtant siens, comme des enfants rejetés. Des rejetons qui alors le dévorait. Le noyau nerveux de son être irradiait, en deux moitiés scindé, l'une cherchant à le contacter, à l'aider, l'autre ne cherchant rien de plus qu'un soulagement pour sa souffrance exacerbée. Des images et des sensations brouillées se disloquaient dans leurs consciences réunis, fragments de ce qu'il avait vu du passé de Morghann. Le tourbillon de tout ce qu'il avait absorbé était pavé des épaves et des écueils de ces moments d’horreurs. Il avait su que ce qu'il verrait ne pourrait lui plaire, et il l'avait accepté, mais c'était autre chose, l'intimité du partage, qui avait créé sa répulsion, par la force du rituel encore exaltée. Les visions et les ressentis tirés d'intimes instants de la vie de son cadet l'avait profondément choqué, pire encore, au travers du rituel, il se les était approprié... sans savoir ce qui l'attendait.

Il n'avait jamais réussit à se satisfaire d'un contact physique, n'avait jamais réussit à l'apprécier. Non parce qu'il le refusait, mais parce qu'en lui, quelque chose ne s'était pas naturellement constitué, le laissant démunie et frileux à cet égard. Jamais il n'avait cherché à changer cela, à se soigner... et aujourd'hui, il en payait le prix. Et il était non seulement incapable de le supporter pour lui-même, mais la simple idée que quiconque puisse avoir la bassesse de profiter de son inestimable cadet lui était plus intolérable encore. Morghann était précieux, intouchable à ses yeux... aucun être n'avait les prétentions nécessaires à le lui enlever. Il était sien et il devait le rester. Mais en cela également, il se lamentait, l'ayant blessé alors qu'il cédait à la noirceur de ses travers. Jamais il n'avait désiré que cela prenne une telle tournure, et pourtant il y était confronté, malade qu'il était. Il ne pouvait l'ignorer.

Lentement, la tempête sembla se calmer, s'assagir, le laissant épuisé, frémissant et brisé mais l'esprit à nouveau bien présent et, penaud, son âme vint se nicher contre la sienne...Dans le silence soudain sépulcral, que ne brisaient que leurs respirations, il essaya de parler, la nausée encore présente même si apaisée. « Je...» Se forçant aux mots qui rechignaient, il se crispa, un douloureux élancement dans sa jambe blessée « Je suis désolé...je suis... » Malade oui. Il l'était, mais s'en voulait. S'il avait simplement pu le lui cacher. Le regard dans le vide, il resta là un long moment, sans bouger, sans oser bouger, figé entre soulagement et peine. En un sens, il ne voulait pas voir, surtout pas lui, craignant ce qu'il découvrirait. Ses tremblements se faisaient sourds, plus discrets. « J'ai cru te tuer »

L'idée le révulsait presque plus encore que le reste et cette fois, il essaya de s'arracher à son étreinte et ne réussit qu'à s'arracher une plainte qu'il étrangla dans sa gorge de toutes ses forces, se courbant de nouveau. « J'ai cru... j'ai vu... » L'impact de la magie sur lui, en supplément du reste, le rendait fiévreux. Il avait froid, et pourtant il se sentait bouillant, et sa respiration était terriblement douloureuse... Une de ses mains vint toucher celle de son frère, s'écarta comme s'il avait été brûlé, pour revenir plus lentement et recommencer. Il ne parvenait pas à accepter de le toucher, tout en désirant ardemment le pouvoir. « Morghann... ? »

Lun 1 Fév - 19:45
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Morghann Earl
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Morghann Earl
Le silence s'éternisait. Son silence, celui d'Howard auquel il avait plus d'une fois été confronté et qui, cette fois, le dérangeait, l'effrayait. Il aurait voulu qu'il se réveille pour lui dire que tout allait bien, qu'il était seulement, uniquement, fatigué par l'exploit qu'il venait de produire, de magie dressée. Il le berçait lentement, machinalement, se berçait dans un même instant, se demandant si ce n'était pas pour s'apaiser lui-même qu'il opérait ce mouvement. Sa respiration était forte, dans son cou. Il essayait de se calmer, de faire cesser ses tremblements incontrôlés. Il l'appelait, il ne voulait pas le perdre, pas maintenant, pas ainsi. Il le refusait, il en souffrait. D'un coup, il inspira et on ne l'entendit pas recracher son air. Son esprit s'était fait happer, transporter, il ne savait où. Il reconnaissait ses souvenirs, ceux qu'il savait qu'Howard peinerait à accepter. Il s'attendait à se faire de nouveau martyriser pour eux, mais la violence ne vint pas. En lieu et place de cela, il était lui. Il était son aîné, avec ses sentiments, cet étouffement, cette répulsion à l'idée avoir vécu ce que Morghann avait fait. Son cœur se soulevait, il voulait hurler, mais en lui, cela restait bloqué. Il se sentait sale, souillé, brûlé à l'envie de frotter sa peau pour la laver de ces affreux péchés, se l'arracher pour qu'il n'y en ait plus aucune trace. Il se sentait mal, il se sentait honteux et blasphémé. Il se sentait bien plus que cela, les sentiments qui submergeaient son frère étaient pour beaucoup instinctifs. Il le comprenait. Recouvrant ses propres états d'âmes, Morghann se sentait à la fois abattu et honteux de ce qu'il était. Il n'en avait jamais ressenti la gêne par le passé... Mais eu égard de la façon dont cela brisait son aîné... Il s'en voulait. Il savait pourtant qu'Howard l'avait toléré, permis. Il lui avait demandé de ne pas se perdre, de rester celui qu'il était. Son jumeau n'aurait simplement pas voulu vivre la vie que le cadet avait menée. Et lui infliger, même de manière imprévue, le culpabilisait. S'il n'avait pas eu ses déboires, Howard serait dans un bien meilleur état à l'heure qu'il était.

Lorsqu'il entendit la voix de son frère, une part de lui en fut soulagée, l'autre part s'efforçait de garder la tête haute face aux propos qu'on lui tenait. Le tuer ? L'aurait-il vraiment tué ? Aurait-il pu être fou au point d'aller jusqu'à l'irréparable ? Il avait voulu lui arracher ces souvenirs, les lui ôter, pour préserver sa pureté. Un acte désespéré, il l'espérait, dicté par l'amour qu'il avait pour lui ? Il ne savait comment le comprendre, comment l'accepter. La confiance aveugle qu'il avait en lui s'irritait, s'écaillait, quand bien même il voulait la lui laisser, pleine et entière. Il se rétractait, tremblant, désarçonné. Les yeux fermés, dans son cou, il ne bougeait, trop tendu pour le faire, trop terrorisé pour reprendre la parole quand bien même son frère l'appelait. Seule sa respiration devenue lente montrait qu'il était toujours vivant. Contrarié, le sentiment de trahison ne voulait le quitter, couplé à une peur déraisonnée. Il ne lâchait toutefois son aîné et son étreinte ne s'était nullement amoindrie. Il l'avait laissé le toucher et par échec s'écarter. Il savait bien ce qu'il avait, sans pouvoir vraiment mettre de nom dessus et sans connaître le moyen de le soigner. « Oui. » fit-il enfin, après quelques longues secondes, uniquement pour répondre à l'appel de son nom, sans dévoiler ce qui pouvait bien le secouer. Son âme terrorisée vint contre celle, penaude, de son aîné. Ils avaient l'air de deux chatons apeurés et abattus, tachant de partager un maigre abri contre la violente pluie qui les inondait. « Je... Je vais bien... » Bredouilla-t-il, mais le ton tremblant de sa voix montrait combien il mentait. Il n'allait pas bien, il était terrorisé d'avoir placé sa confiance entre les mains d'une personne qui pouvait le tuer en ne l'aimant que trop.

Il tâcha en vain de se ressaisir et finit par s'expliquer : « Je n'ai rien fait pour t'en empêcher... Je... Je pensais que tu me punissais pour ce que j'avais fait, ce que j'avais vécu. » Il savait que ça lui déplairait, mais il n'avait jamais songé qu'il puisse réagir avec autant de violence. Howard avait toujours su être mesuré et faire la différence entre ce qui était bon ou ne l'était, pour lui-même, ainsi que pour son cadet. Chaque perception était toujours parfaitement compartimentée. La magie employée avait mis sans dessus dessous ce prodigieux classement, tout avait été biaisé, il le savait. Il ne pouvait lui reprocher. Il n'en demeurait pas moins terrorisé. « Je ne comprenais pas pourquoi : tu n'avais jamais réagi ainsi. Tu... » M'as fait peur ? Sa voix tremblait suffisamment pour le lui dire. « Tu es mon maître. » Alors il n'avait rien dit, songeant qu'Howard saurait ce qu'il faisait, saurait s'arrêter, si ce n'était pour Morghann, au moins égoïstement pour se préserver. « Je l'acceptais. Je me satisfaisais de tes marques, de tes griffes. » Il parlait au passé. Le présent était contraire : il aurait voulu se panser, mais il était bien ardu de soigner des blessures infligées à une âme. Il les avait aimées, un très court moment, jusqu'à ces aveux, pour ce qu'elles représentaient : sa domination. « Mais ce ne sont que les lambeaux de la folie, en vérité, notre folie. » Leur hérésie à deux. Leur étreinte malsaine, dévorante, bestiale et instinctive. Désorienté, Morghann revenait à son point d'ancrage, son essence même. Il revenait à ses mots gravés en son âme : il aimait son frère. Plus que tout au monde, rien n'avait assez de valeur pour le remplacer. Il ne voulait rien d'autre, seulement lui, alors la folie, il l'acceptait. Il sortait de sa léthargie, étouffait ses tremblements, sa crainte, ses tourments. Il les annihilait, les niait, les assassinait. Ils n'étaient pas compatibles avec son amour. Il releva la tête, les lèvres près de son oreille pour murmurer un claquant : « Je m'en moque. » Il était sûrement encore plus malade que lui, et cette fois, il ne mentait pas. D'un geste geste de la main, il appelait son manteau par télékinésie et vint en couvrir son aîné. Un sourire, proie de la démence, s'étirait sur ses lèvres. Il savait ce qui avait causé toute cette situation, le point de départ, le dysfonctionnement initial.

« Je t'aiderai, si tu me laisse le faire... » Il souffla chaudement, de façon très légère dans son cou, pour le faire réagir, ressentir. « Je t'habituerai à mon contact. Progressivement. Cela te dérangera sûrement au début et puis, normalement, tu finiras par ne plus y faire attention. » Avec mille précautions, il glissait le bout de son nez dans son cou, s'y enfouissant. Il aimait son odeur, la chaleur de sa peau enfiévrée. Il appréciait tant sa proximité et se trouvait blessé à l'idée qu'en retour il puisse irriter son frère. Il approcha sa main de la sienne, la laissant à portée sans pour autant le toucher, ni même l'effleurer. « Je ne te demande pas de l'accepter de tous... Pour le moment, tolère-moi. Juste moi. » Rien que lui. Son égoïsme aurait voulu que qu'il ne s'ouvre jamais aux autres, mais pour le bien de son frère, s'il voulait l'aider, le soigner, le construire, il faudrait qu'il l'accepte. Il n'osait y songer, niait, se portait sur le présent. « Tu me possèdes. Pleinement. Ce n'est pas ma main, c'est la tienne. Alors prends-la, garde-la. »

Mer 3 Fév - 16:13
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Howard Earl
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Howard Earl
Le Sacrifié

Il s'était rarement sentit aussi mal, aussi attéré. Oh, il avait déjà connu cette sensation profonde d'affaissement, il avait déjà cru plus d'une fois avoir atteint le fond, le bout du gouffre, et s'en être relevé... il avait toujours pensé qu'il parviendrait à remonter quoi qu'il arrive, par la force de sa volonté. Mais il s'agissait d'un instant si singulier, d'une révélation si profonde et si dérangeante, qu'il n'était pas certain de s'en remettre. Et pourtant, il l'avait déjà effleurée, cette perturbante vérité. Et dans son ignorance, avait pensé qu'il ne s'agissait que d'une jeune pousse, qu'il ne lui serait pas malaisé de contrôler, de juguler, voir d'oublier, dans le noir de ses pensées. Naïf espoir, souhait écervelé. Cette expérience lui avait prouvé qu'il ne pourrait jouir de pareille espérance, qu'il souffrirait de s'y accrocher. La magie lui avait prouvé qu'il ne s'agissait pas, comme il l'avait pensé, d'une jeune pousse tout juste plantée... C'était une plante grimpante, profondément implantée, un lierre venimeux qui, en lui, s'enroulait, lentement mais sûrement, depuis déjà longtemps. Depuis qu'à lui-même, il avait renoncé. Maléfique il était, à l'obscurité destinée, quand bien même, futilement sans doute, il essayait d'y échapper.

Il ne voulait pas céder, il ne voulait pas sombrer. Il se refusait à n'être qu'un spectre humain aux vices attaché, parodie d'homme impossible à sauver. Mais en l'instant, alors même que son frère lui tendait la main, il ne parvenait à quitter cette atroce impression d'abattement, d'abandon qui l'avait enfermé. Incapable qu'il était d'en l'instant sa défiance affirmer. Il ne pouvait pas gagner... il ne croyait pas pouvoir gagner. Défaite déjà ancrée... et plus encore que cela, la certitude, en lui nichée, qu'il ne pouvait à son frère s'accrocher, même si cela aurait pu, sinon le sauver, au moins délayer sa décadence encore quelques années. La pente était si raide, il le sentait, la plante en lui si férocement ancrée... que pouvait-il réellement accomplir, face à une telle destinée ? Muet, intérieurement glacé, il avait légèrement tourné la tête, vers la main qu'on lui offrait, interdit et effrayé. Et s'il le blessait de nouveau ? Et s'il essayait de le tuer ? De souffler sa vie, comme une petite chandelle ? Quand il repensait à leur discussion dans le salon, il en aurait presque éclaté de rire. Quelle paraissait lointaine, alors même qu'elle était proche.... s'il avait su, à ce moment-là, il n'aurait pas insisté auprès de son cadet.

Si alors, il avait su à quel point il était contaminé, il l'aurait repoussé, mis en sécurité, même s'il savait que Morghann en souffrirait. Au début du moins. Pourtant il ne voulait pas l'abandonner... mais qu'y pouvait-il ? Sa main frôla la sienne, tremblante, furtive. «  Je... » Sa voix était brisée, si loin de ce qu'elle était d'habitude, l'ombre d'elle même, comme lui se sentait, tout entier. «  Je suis un monstre... » C'était un murmure, un chuchotis, dont il ne savait même pas s'il était physique ou spirituel, tant il était discret, sourd et pourtant léger. «  Je n'ai jamais voulu te faire de mal... jamais... je... » Il inspira doucement. Sa gorge était douloureusement irritée. Inspirer et déglutir semblaient être d'insurmontables efforts. Il y était forcé, gestes nécessaires à son corps et sa vie, mais cela le suppliciait. Comme de parler... sang se déversant d'une plaie qu'il s'était lui-même causé. «  Préférerais mourir que de te faire du mal... pourtant je t'en ai fait... » Et il en était dévasté. Et donnerait n'importe quoi pour effacer ce qu'il avait causé. Son sang, son âme, sa force... tout. Rien ne valait son cadet. Rien ne valait ce qu'il avait brisé...

Pourtant Morghann continuait de l'approcher. Et la part alors consciente de son être ne parvenait nullement à comprendre cette logique, alors même qu'il l'avait gravement menacé... Sa main frôlait encore la sienne, comme un animal farouche se refusant à abaisser totalement la méfiance qu'un étranger lui inspirait. «  J'ai l'impression de la sentir sur ta peau... » avoua-t-il, toujours penaud. Cela l'insupportait. Il se forçait, sentait la nausée qui revenait. Pouvait-il seulement se plaindre, lui qui méritait la cangue, la crainte, l'accusation sacrée pour des actes destructeurs, pour ce qui, en lui, avait tant grandit, avait tant croit que cela semblait soudain un mont le dissimulant de son ombre. De sa latente menace. Lui qui aurait alors dû se rendre, immédiatement, comprendre que la purification valait mieux que irraisonné, que la mort de ce qu'il chérissait. Le cœur au bord des lèvres, il posa la main sur la sienne, la poigne si frêle que Morghann aurait pu la briser d'un geste. Pour sa plus grande honte, son ultime horreur, il ne parvenait pas un instant à juguler les tremblements qui parcouraient le dextre...

Cloche creuse, il vibrait au rythme de son instinctif dégoût, et de ses craintes passionnées. Ses lèvres s'entre-ouvrirent alors, laissant échapper une difficile exhalaison, qu'il espérait au moins muette. Ses mots en revanche ne le furent pas, alors qu'il essayait de se tourner pour l'observer, encore craintif, terrorisé à l'idée de ce qu'il allait voir, abattu à l'idée de ce qu'il allait dire... «  Tu... devrais me laisser » Sa voix par l'abandon portée se faisait plus ferme, mais prête à se fracasser. Détermination à la façade ébranlée « Tu devrais rester avec elle... tu serais mieux, ainsi tu... » Qu'il se haïssait, qu'il haïssait la certitude du besoin qu'il énonçait et auquel il se sacrifiait «  Part... ne t'accroche plus à moi. Tu peux... refaire ta vie avec elle... avoir une vraie famille et... oublier... tout... tu peux saisir un nouveau futur, dans lequel tu ne souffriras plus. Avec un peu de temps, tu l'aimeras et tu ne regretteras plus rien » Il hocha la tête légèrement, par à-coup, comme s'il agréait à ses propres dires, ou à ceux de l'étranger qui usait de sa bouche pour s'exprimer «  Je vous protégerais de loin. Comme je l'ai toujours fais pour toi. Ça ne me dérange pas... c'est mon devoir »

Ainsi, il n'aurait plus jamais à craindre de le blesser. La boule dans sa gorge, le loquet sur son cœur et ses poumons, tout semblait s'alourdir comme du plomb. Il déglutit difficilement, avec l'impression que le fluide ne passerait jamais. Il étouffait ! Il étouffait... Et il avait l'impression que sa tête s'allégeait comme sous l'effet d'une forte dose d'alcool. Mais pas dans le bon sens. «  Je te suis nocif quoi que je fasse, et même si je ne l'étais pas, je ne peux rien te donner que tu mériterais... Jamais nous ne pourrons nous afficher, jamais nous ne pourrons... » Quoi ? Il ne savait même pas, le sang continuait de s'écoulait, mais il n'en comprenait même plus la couleur «  Je ne partage rien de ce que tu as avec elle. Que puis-je donc te donner ? Je ne sais pas ce que je m'étais imaginé, à vouloir près de moi te garder... Tout ça... tout ça... ça te retient en arrière... ça te fait basculer avec moi... je ne veux pas que tu sois comme moi, Morghann... je ne... je veux... » Il ne savait plus, les mots étaient des poignards qu'il plantait dans son propre corps, dans sa propre âme. «  Part... avec elle... tu le peux encore, loin de Last-end, loin de... tout ça, loin de moi... tu ne me perdras jamais... mais tu te sauvegarderas... »

Sa poigne sur sa main s'était raffermie, tout en semblant vouloir s'esquiver, preuve de ce qui, en deux, le scindait. Preuve de la dualité de ce qu'il ressentait, de ce qu'il voulait. Près de lui le conserver, loin de lui le protéger. «  Regarde ce que je suis... Regarde ce que je fais... Re... » sa tête était de plus en plus légère, elle tournait. Trop tard il comprit que ce qui le maintenait conscience était une adrénaline qui à présent s'évadait, le quittait. La fatigue le gagnait. Une nuit trop courte, une journée droguée et à présent l'act magique, et toutes ces émotions, cela commençait à le taxer, le drainer... Il s'interrompit, cherchant son souffle, cherchant la moindre lueur, que jamais il ne trouvait. Il aurait tant voulu s'évader....

Jeu 4 Fév - 20:25
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Morghann Earl
Sa main était venue frôler la sienne, Morghann s'en sentit soulagé et consolé. Il le voyait essayer, s'aventurer, un sourire aux lèvres, le plus jeune se montrait patient, autant que son jumeau avait pu l'être devant ses propres turbulences. Il le regardait faire, hésiter et tenter, approcher avec la méfiance d'un animal farouche qui acceptait, pourtant de soumettre à sa demande. Il se satisfaisait de la volonté que son aîné mettait dans son invitation, il allait contre sa nature, contre ses désirs, pour lui. Il en était ému, assez attendri, malgré les propos que son frère tenait. Il refusait de croire qu'il était un monstre, pas envers lui. Il lui avait accordé le bénéfice de l'accident, de l'erreur. Howard ne l'avait pas fait de son propre chef. Il n'avait jamais voulu lui faire du mal et Morghann ne le savait que trop pour ne pas en tenir compte. Il aurait voulu le réconforter, lui dire que ça irait, mais tout resta bloqué dans sa gorge. Il s'en sentait incapable. Bien sûr qu'il était blessé, et peut-être que cela n'irait pas... mais il s'en moquait. Il voulait faire en sorte de le soigner, enrailler ce mal qui le rongeait pour que cela finisse par ne plus être un obstacle, ni la moindre contrainte entre eux deux. Sa main tremblait affreusement sur la sienne. Morghann enlaça fermement ses doigts entre les siens, tâchant de le calmer du mieux qu'il le pouvait. Lorsque son frère lui en fit sentir l'envie, il l'aida à se retourner, vers lui s'orienter. Le cadet lui adressait un sourire tendre et bienveillant, un sourire qui tomba en miette, seconde après seconde, un sourire qu'on disséquait pour ne laisser que du sang et de la souffrance. Son visage se marquait lentement d'une peine destructrice à mesure que son aîné lui demandait de partir, sa peau devenait pâle, il peinait à déglutir, cœur au bord des lèvres. Le sourire avait disparu, ses lèvres s'entre-ouvraient pour laisser échapper un faible souffle saccadé. Il ne voulait entendre ce qu'il entendait : son frère divaguait, il en était certain... Mais embrasser cette requête le ravageait. Comme sous le joug d'une bombe, il était pulvérisé et se désintégrait, se perdait.

Tout son corps s'était mis à trembler, de mille couteaux poignardé, les nerfs irrités, irradiés sans aucune empathie. Il suffoquait, il avait resserré son étreinte et le gardait contre lui, front contre le sien, gémissant des « Non. » en litanie désespérée, pour l'arrêter, le faire changer d'avis. Il le répétait, le suppliait, l'implorait, mais rien ne semblait le perturber, le freiner dans le débit de ses paroles pourtant difficiles. Morghann réalisa qu'il les berçait à nouveau, comme si cela pouvait les apaiser tout deux, Howard dans sa demande, Morghann dans sa souffrance. « Chhh... Tais-toi... » conjura-t-il, faible, assommé avant d'hurler pour couvrir les mots de son aîné : « TAIS TOI ! TAIS TOI ! » Hystérique, il tremblait, le serrait contre lui, criait son trop plein de sentiments, mais ça ne suffisait à faire sortir la douleur qui le crispait. Il ne voulait pas partir, il voulait rester à ses côtés, toujours. Il refusait ce qu'on lui réclamait, même si pour son bien orienté. Il ne le voulait, ça le détruisait. Capricieux enfant, il en était accablé et terrassé. Faible, il priait : « Pitié... Je t'en supplie, arrête... Tu me... » Tues ? Il fondit en sanglots, des larmes brûlantes cuisaient ses joues blêmes et terminaient leurs chutes sur la visage de son frère. Lui qui ne pleurait que les défunts, c'était sa propre mort sur laquelle il se lamentait, assassiné et annihilé. Âme en peine, navire en pleine mer qui savait ses chances de survie suffisamment faibles pour crier à l'agonie et fixer les étoiles dans le ciel pour la dernière fois de son existence. Il avait saisi l'épaule de son frère entre ses mâchoires qu'il serrait avec violence et hurlait à plein poumons la folie qui le dévorait. Il ne parvenait à calmer les tremblements de son corps, il frémissait jusque dans les confins les plus reculés de son esprit. Tout son être était secoué, envahi : ça n'était pas possible, son frère ne pouvait le rejeter. Plutôt que de sombrer, il niait cette volonté. Elle était fausse, elle n'avait pas lieu d'exister : son frère l'aimait et voulait le garder. Il refusait le reste et ce fut probablement ce qui le maintint éveillé.

Il lui fallut quelques minutes pour revenir  à lui, son frère serré tout contre lui : il refusait de le lâcher. La conscience de son aîné semblait s'être altérée. Assommé, faible, voix évaporée, Morghann s'attarda sur son visage, y cherchant la force de se relever. Il laissa son jumeau à terre, le temps d’appeler à lui sa chemise et de l'enfiler, histoire d'avoir l'air un minimum digne. Ils ne pouvaient pas rester dans cet état ici, il fallait rentrer. Les bougies semblaient crier leur agonie : combien de temps étaient-ils restés ici ? Il saisit son aîné pour le porter, telle une demoiselle égarée, l'allégeant d'une très grande partie de son poids par télékinésie. Le retour vers le château fut des plus pénibles. Il s'engagea dans un passage secret pour rentrer et se faufiler sans être vu jusque dans sa chambre. Là, il posa son frère sur son lit et prit un instant pour regagner son souffle, à genoux, à son chevet. D'une main encore tremblante, névrosée, il caressait ses cheveux. Il s'appuya sur le matelas pour se relever, pas mal-aisés que jusqu'à l'armoire, il traînait. Avec deux pyjamas, il revint près d'Howard, lui défit ses chaussures. Il se pencha sur lui pour déboutonner sa chemise, avec une lenteur à mi-chemin entre la passion et la fatigue. Il le redressa contre lui, assis, pour terminer de le changer, et tant bien que mal, lui enfila l'un de ses T-shirt. Il reposa son corps dans le lit et fila dans la chambre adjacente, celle de son frère, pour prendre de quoi droguer son aîné et apaiser sa douleur. Il lui défit le pantalon, lui ôta et lui injecta en intramusculaire une dose un peu plus lourde qu'à l'ordinaire pour qu'il puisse se remettre et dormir ou du moins être assommé. Il lui enfila un bas de pyjama avant de le couvrir.

Dans la salle de bain, il se retira la cire qu'il avait sur le torse. Sa chair y était collée, il rouvrait les plaies un peu plus tôt causées, étouffant ses cris de souffrance : ce n'était rien à côté de ce qu'il avait enduré dans le caveau. Il nettoya le sang qui coulait sous l'eau purificatrice de la douche, sans parvenir à profiter de la chaleur. Il ne pensait qu'à son frère, en était obnubilé et les propos affreux qu'il lui avait tenu raisonnaient dans son esprit torturé. Manquant de s'endormir de fatigue, il ne tarda pas à rejoindre son frère, dans ses draps, qu'importe ce qu'Howard en penserait. Il ordonna à ses sbires fantomatiques de tout verrouiller, de ne laisser personne entrer pour briser leur intimité. Il saisit sa main avec force, sans la lâcher, ne voulant en aucun cas voir son jumeau lui échapper. Aucun d'eux ne partiraient : ensemble il étaient nés, et avec lui, il voulait vivre son éternité. Il l'aimait, il l'aimait tellement qu'il s'en aliénait. Il l'aimait tant qu'il ne parvenait à trouver le sommeil, les nerfs demeurant à fleur de peau sans qu'il ne puisse étouffer sa peur de séparation, comme si un membre de son propre corps allait lui manquer. Il ne cessait de vérifier qu'Howard se trouvait toujours à ses côtés, chaque minute, chaque heure. Quelques temps avant de l'aube de naisse, il finit par saisir l'une des doses qui calmaient la jambe de son frère pour la diluer dans de l'eau et l'avaler. Il lui fallut quelques minutes pour sombrer, le décor dans la pénombre tanguait, le visage de son frère, lui seul, demeurait, portrait de son adoration démesurée. Il oubliait la souffrance, il oubliait cette demande de le quitter : elle n'avait jamais exister, elle n'existerait jamais. Dans les limbes, il la congédiait et pourtant, elle revenait le hanter, comme une maîtresse qui n'en avait pas eu assez.

Les rayons du soleil le firent grogner, une moue sur son visage vint se former puis il ouvrit les yeux pour constater que même dans son plus profond sommeil, il n'avait pas relâché la main de son aîné. Il la tenait avec force : sa peur, sûrement, l'avait maintenu de la sorte. Il rampa comme un serpent – ou une grosse larve- jusqu'à poser son oreille contre le cœur encore battant de celui qui partageait, de gré ou de force, son lit. Il se soulageait d'entendre ce symptôme palpitant de vie, il se laissa bercer par sa mélodie, emporté, toujours sous le joug de la drogue. Les yeux clos, il laissait les doigts de sa main libre parcourir son torse et son ventre, valsant au gré des formes de ses muscles, sans savoir où il allait, il en avait seulement envie et ça l'amusait. Il le trouvait beau, bien équilibré : « Tu es parfait... » murmure hérétique, souffle aliéné, ivre de lui, de son désir de lui appartenir. Son maître était parfait, un monstre parfait, l'incarnation de leur folie à la perfection. Difficilement, il se hissait, jusqu'à avoir son visage en face du sien, juste au dessus. Il sursauta en voyant les yeux noirs d'Howard. Il ne dormait pas ? L'avait-il réveillé ou l'était-il bien avant ? Il finit par lui faire un large sourire, les yeux marqués de veinures rouges, aveu de la drogue qu'il avait prise, sa main libre vint très lentement lui caresser les cheveux : « Bonjour... Tu... » Il perdit brusquement son sourire, un vertige brouilla sa vue et il se reposa lentement sur lui, fort heureusement, sans écraser sa jambe blessée. Dans son cou, il secouait la tête de gauche à droite, les paroles de son frère lui revenaient encore, comme une profonde blessure qu'il ne parvenait pas à panser : c'était-ce pas jusqu'à son âme qu'il avait été griffé ? « Dis-moi que tu m'aimes... Dis-moi que tu veux me garder. Je t'en supplie, ne me jette pas. Je veux... Je te veux. Je veux rester à tes côtés. Je préfère mille fois vivre avec ce risque que tu représentes... Que de passer mon existence à juguler mes sentiments... Tu l'as gravé dans mon âme, ne crois pas un seul instant que je pourrai l'oublier, que je pourrai mener une vie normale. C'est faux. Tu sais que c'est faux. »

Il se redressa, sur ses mains s'appuyait, au dessus de lui, le regard rempli de mélancolie : « Ne me renvoie pas dans ma tour d'ivoire, je n'y tiendrai pas en place... Tu me l'avais promis, tu m'avais dit que je pouvais rester, près de toi. Je t'appartiens, je ne peux pas te voler. Mon serment est gravé dans mon âme, celle que tu possèdes à tout jamais. » Son nez frôlait le sien : il ne parlait plus, il murmurait, comme s'il avait peur qu'on les entende : « C'est trop tard... Laisse-moi rester. » Il baisa sa joue, comme pour l'amadouer, la drogue l'empêchait de juguler ses sentiments et ses désirs comme il le faudrait : « Je t'aime Howard, je n'aime que toi. Je ne peux aimer que toi. C'est ce que tu voulais, ce que tu as écrit. Tu le sais. Tu sais que je ne peux pas partir. Que ça me détruirait. Que je ne peux plus vivre sans toi. » Ses lèvres menaçaient d'effleurer les siennes au terme de ses paroles, d'un geste vain et entravé il tentait de saisir celles qui lui faisaient face, sans les toucher. Il jugulait un baiser qu'il désirait avec ardeur. Il aurait voulu lui montrer qu'ils n'avaient pas besoin de s'afficher, qu'ils pouvaient faire ce qu'ils voulaient dans leur intimité, que personne ne leur dirait rien. Il rêvait d'une liberté, hors de cette muselière qui le retenait. Il fantasmait, ressentait la passion, le désir éhonté, tirant sur la laisse comme un chien enragé. La gifle ne saurait tarder, mais il s'en moquait, il ne pouvait avoir d'avantage mal que ce qu'il souffrait déjà. Il serrait sa main, celle qu'il avait tenue toute la nuit sans faillir et brisa les chaînes qui le refrénait. Il déroba à son jumeau la virginité de ses lèvres, rongé par une maladie fiévreuse et incestueuse. Son âme blessée, torturée, gravée de leur union vint se blottir contre la sienne, montrant des plaies béantes qu'il cherchait désespérément à panser. Il voulait son amour, sa proximité, persuadé qu'il s'agissait de son remède. Il l'embrassait, étouffait sa douleur... Il voulait tellement que ça cesse, que ça se taise... Le silence.

Ven 5 Fév - 18:08
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Howard Earl
L'étrange sous la normalité :
Je suis l'héritier de la branche principale des Earl, je suis un Nécromant et un membre du secret. Je le protège et le soutient. C'est dans mon intérêt.

Tell me More : J'ai un jumeau, Morghann, et je suis le pupille d'Eurynome
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Howard Earl
Le Sacrifié

L'inconscience l'avait finalement saisit. A quel moment exactement ? Impossible de le déterminer... Sur les rives d'un comateux sommeil il avait vogué, incapable de s'exprimer de nouveau, incapable de bouger, de cesser de trembler, prit d'un froid qui lui pénétrait les os. Puis, au détour d'un cahot, il était tombé. Le poids semblait, par le fond l'entraîner, corps lourd et esprit vidé, ou était-ce l'inverse ? Emporté dans le royaume de Morphée, des songes sans couleurs et sans formes l'assaillaient. Et lorsqu'il rouvrit les yeux, ce fut avec l'impression d'un poids immense écrasé sur la poitrine. Son corps lui faisait mal, les os fourbus protestaient... Il mit un long moment à pleinement revenir à lui, la vue brouillée, la gorge sèche, une migraine persistante s'amusant à lui gratter les tempes. Le lieu où il se trouvait lui était inconnu pour le moment, peut-être tout simplement parce qu'il avait du mal à visualiser son entourage.... en revanche, il sentait la proximité à laquelle il semblait sujet, et cela venait le confondre et le tourmenter. Il partageait son lit ? Qui partageait son lit ? Pourquoi il y avait-il quelqu'un avec lui ? L'idée était répugnante et affreusement gênante. Et elle amenait l'angoisse de savoir ce qui avait bien pu conduire à cela et qui était au courant. Des pensées seulement à demi formées, confuses et chaotiques, mais qui le prenait à la gorge.

Et soudain, alors qu'il appelait ce qui lui restait d'énergie pour bouger, se laisser hors des draps tomber, le visage de son frère apparu dans son champ de vision brouillé. Morghann ? Ainsi c'était lui qui... la gêne était à son comble, et l'incompréhension, ainsi qu'une profonde tristesse. Il n'avait pas écouté. Il n'avait pas accepté sa demande de départ. Il était resté, se mettait en danger. Pourquoi ? Pourquoi s'infligeait-il cela ? Pourquoi... leur infligeait-il cela à tous deux ? Essayait-il simplement de délayer l'inévitable, quitte à ce que tous deux en soient torturés ? Non, non il ne pouvait croire cela... mais il ne comprenait pas ! Et les mots... les mots qu'il prononçait étaient comme des couperets. Ils faisaient si mal, par ce qu'ils annonçaient. Si mal... parce qu'il n'avait nullement la force de le lui redemander. Cela lui avait tellement coûté, de le faire une fois déjà. Il ne parviendrait pas à recommencer, tant cela le brisait de le faire. D'abandonner ses prétentions à pouvoir jouir de sa présence et de son intérêt. Son frère s'accrochait... cela aurait dû lui plaire, mais il craignait pour sa vie, et il craignait pour leur futur. S'il demeurait près de lui, tous deux en souffriraient. Mais il n'avait plus en cet instant la volonté de le chasser, moins encore en comprenant que son cadet se fourvoyait.

Et cela lui serrait le cœur comme l'étau d'un inquisiteur. Il aurait voulu le détromper, mais avait du mal à faire vibrer sa voix, comme un instrument de musique ébréché. Et la proximité n'avait pour effet que de davantage l'étouffer. Il aurait voulu lui dire qu'il se trompait, il aurait voulut lui dire de s'éloigner... que son acceptation suite au rituel ne signifiait nullement qu'il pouvait se montrer si proche et si intime, que cela le gênait horriblement et l'effrayait... mais aucun son ne quittait ses lèvres. Il l'observait, simplement, muet et inquiet, se demandant jusqu'où cela irait, scindé qu'il était entre horreur et satisfaction éhontée. Des pensées et ressentis balayés lorsque ses lèvres furent assaillies et qu'il retint à grand peine la panique fièvreuse qui menaçait le dévorer, le consumer en un rien de temps. Immobile, incapable de bouger que ce soit physiologiquement ou par sa volonté, il subissait, incapable de vraiment savoir quoi faire. Il restait immobile, frappé, craignant presque que le moindre geste aggraverait encore une situation déjà compliquée. Le contact était inquiétant, étranger... lui qui dansait avec la mort ne parvenait tout simplement pas à se défaire d'une crainte religieuse à l'égard d'une telle approche.

L'âme de son frère vint se blottir contre la sienne, et il ne la repoussa pas, l'accueillant même instinctivement... mais il releva alors gauchement les mains pour les poser sur le torse de son cadet. Un geste qu'il n'aurait jamais osé en un autre temps, et une autre circonstance, mais auquel il se forçait, pressant faiblement pour lui intimer de reculer, de le relâcher. La honte et la sensation de souillure qui étaient les compagnes de chaque touché qu'il n'avait commandité se ruèrent sur son esprit à l'agonie, et il essaya maladroitement de le dissimuler. Son être tintait, carillonnait de ses sensations déséquilibrées. Ce fut pourtant une réaction purement physique qui sembla lui offrir un instant de répit, non moins douloureuse accalmie alors qu'il se redressait sensiblement en toussant. Ses yeux luisirent, vitreux de larmes contenues, avant qu'il ne parvienne à retrouver un lambeau de souffle et qu'il ne déglutisse avec difficulté, la gorgée serrée. Son corps crispé par la proximité non souhaitée irradiait de douleur, tandis qu'il se forçait, essayait de parler, d’émettre un son différant du croassement rauque et brisé.

Son environnement était plus clair à présent, mais il s'en moquait. Un instant glacé, le second brûlant, il essaya de prendre un peu de distance, la respiration rauque, mais ne parvint qu'à se faire mal, la douleur le foudroyant, immédiate, rapide, et bientôt disparue pour ne laisser qu'un picotement désagréable... retombant sur son oreiller, il ferma des yeux irrités. Ouvrant doucement la bouche, il forma un nom, sans que sa voix ne produise plus qu'un vague râle. Il se força, ses tempes palpitantes de souffrance migraineuse : « Morghann... » Il voulait au moins le rassurer, ne pouvant le blâmer de ce qu'il venait de lui faire subir puisque c'était sa faute s'il l'avait provoqué. « Je nte... » Sa bouche était sèche et pâteuse à la fois, et il dû presque crier pour réussir à produire le moindre son réellement compréhensible, audible... « Je ne te... rejette pas... » Mais il se trompait, oh qu'il se trompait... il aurait tant voulu disposer de sa pleine conscience, de toute sa tête, pour lui expliquer. Pour lui dire la vérité sur son souhait, celui qu'en lui il avait gravé. Il ne l'avait pas contraint... il n'avait jamais désiré forcer. Ce n'était pas ainsi qu'il percevait leur échange.

Une main levée, qu'il revint placer sur sa poitrine, sur son cœur quand bien même il aurait voulu s'arracher la peau pour la nettoyer. Il cherchait leur ancrage. Ce qui les reliait. Le prenant en main, quoi que de métaphorique façon, il chercha à éveiller ce qu'il avait construit, créé, non comme une irraison alambiquée, mais comme le pur désire de ce qu'il souhaitait offrir à son cadet. Un bref instant, une étincelle de lueur vint les percer, emplir leurs plaies, mourant aussitôt, de sa faiblesse tuée. Sa main retomba et il se sentit à nouveau glisser dans l'inconscience qui l'appelait, ou la semi-conscience, semi-réalitée déformée... Ses lèvres à nouveau formèrent le nom de son frère. Il se faisait violence pour trouver la force de se relever, de rejeter la friabilité de son corps éprouvé pour lui, uniquement pour lui, pour le protéger de ces noires pensées tordues et brouillées. Mais il était réellement à bout de force et devait s'avouer vaincu.

Sam 6 Fév - 17:54
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Morghann Earl
L'étrange sous la normalité : Enfant cadet du Patriarche Earl, il est un héritage refusé, s'extrayant de la nécrose gangrénée de sa famille.
Tell me More : Jumeau d'Howard - Fils de Pryam
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Morghann Earl
Sous lui, Morghann sentait son frère figé, son cœur se serrait sur un baiser sans retour, sans réponse. Il ne savait s'il devait s'en affoler ou s'en résoudre à penser que c'était normal, que son frère avait raison et que lui délirait. A défaut de savoir choisir, il saisit les deux réflexions en un seul imbroglio. Il était terrorisé, tant par son propre geste que pour sa folie. Stupide folie, avait-il cru alors que son frère était aussi malade que lui ? Main sur son torse, c'était faible, mais on le repoussait. Il relâchait ses lèvres assaillies, les yeux remplis de doute, de honte et de douleur. Il le fixait, sans comprendre, la respiration haletante, la vision troublée par la drogue de son aîné. Le décor se mouvait, il ne savait plus s'il était debout ou encore couché, peut-être même assis ? Son front le brûlait, sa tête se scindait, son dos l'irradiait. Il se crispait, reculait de son jumeau, retombait sur le flanc, à ses côtés, le regard vitreux, l'expression égarée. Il ne le rejetait ? Vraiment ? Il s'en insurgeait, voulant lui hurler que si, il le rejetait, il lui demandait de partir, ne pas rester à ses côtés, pour une raison pleine d'élucubrations, d'une vision de l'avenir erronée : on aurait dit Anthony dans son pessimisme borné ! Morghann ne voulait pas le fuir, s'agrippant à lui comme une huître à son rocher. Il ne savait plus ce qu'il devait penser, croire, imaginer. Il ne savait quelle voie emprunter, son âme lacérée refusait de le laisser en paix, quand bien même il la blottissait contre celle d'Howard avec une force telle qu'on aurait cru qu'elle recherchait l'impossible fusion. Il se faisait violent, aveugle à toutes les raisons qui aurait plus rationnellement l'expliquer, terrorisé à l'idée que son frère ne veuille le laisser entrer en lui. Épuise et accablé, son âme se rétracta, s'éloignant de la sienne, repoussant quiconque viendrait le chercher. Morghann se recroquevillait sur lui-même, et près de lui s'endormait.

Ça ne dura que quelques heures, pendant lesquelles ses sbires fantomatiques avaient repoussé les domestiques voulant entrer. Sa vue était brouillée mais ça ne mit qu'une poignée de secondes avant de dissiper ce brouillard épais. Assis, les pieds hors du lit, dos à son frère, il avait les mains sur les tempes et cette sensation horrible qui perdurait, celle d'être déchiré et mis en lambeaux. Il sentait les lacérations que son aîné avait laissées sur son âme, lacérations qu'il avait voulu nier, faire comme si elles n'existaient et à son jumeau, fusionner. L'échec était d'autant plus cuisant que ça lui rappelait combien il était meurtri et ne pouvait rien y faire. Il avait mal, c'était en lui et il n'avait rien pour recoudre les plaies. Il se levait et il sentait ses muscles se tendre, comme s'il les étirait au delà de leur capacités normales. Il contournait le lit, sans un regard pour son frère, le cœur au bord des lèvres, sa vision se pavait de milliers de points noirs et une fois dans la salle de bain, porte fermée, il vomissait tout ce qu'il n'avait pas mangé. Secoué de spasmes violents, son estomac lui semblait se contracter pour ne former qu'une boule, une masse terrible qui lui pesait. Il aurait voulu hurler, mais le faire dans ce château aurait été mille fois interprété. Il ne le pouvait, se contenait, se faisait violence. Il avait déplacé Howard jusque dans sa propre chambre, sans le toucher, sans l'approcher. D'adresse télékinésique, il se paraît pour mener son aîné à l'abri des regards. Il était resté éloigné, sans avoir la moindre idée de ce qu'il devait faire pour qu'il aille mieux. Howard semblait en proie à.. Une disparition de sa propre magie ? De sombres images, en lui se formait, celle d'un Howard, comme un Anthony, par Pryam, rejeté. Deux fils sans magie aucune, sans puissance, deux fils dont il ne voulait. Tuerait-il Howard pour se débarrasser de ce fardeau ? Morghann en tremblait. Son âme était recroquevillée dans un coin de son esprit, empêchant Howard d'approcher, montrant crocs et griffes s'il le fallait.

Il avait fait appel à un Khan pour venir au chevet de son maître qui le terrorisait. Dans son fauteuil, de loin, il veillait, observait cet homme prodiguer des soins sacrés pour ce qu'il lui expliquait être une sorte de grippe magique. Morghann ne s'était que brièvement approché que pour poser une main sur l'épaule du représentant de la famille Khan et lui transférer de sa puissance, de sa magie, pour qu'elle soit catalysée et utilisée pour soigner son si précieux frère. Au départ du guérisseur, Morghann était retourné dans son fauteuil, silencieux, ses noires prunelles fixant maladivement son aîné étendu, égaré entre la peur et l'amour. Il avait refusé à quiconque d'entrer, protégeant cette chambre comme un sanctuaire sacré dans lequel le divin reposait. Il n'acceptait surtout pas qu'un autre membre de la famille Earl puisse contempler leurs états. Le cadet n'avait pas mangé, refusant d'avaler la moindre nourriture. Rien ne lui faisait envie, pire : tout l’écœurait. Quant à Howard, il semblait plongé dans une bien trop grande léthargie pour avaler quoique ce soit. Ne le voyant pas se lever, il avait fini par mettre son aîné sous perfusion, lui offrant alimentation, drogue et médicaments dans un même temps. Puis il avait passé tout le reste de l'après-midi à ruminer et ronger son frein. Il s'inquiétait de son état, bien que ses signes vitaux commençaient à montrer des indices positifs de reprise. Il se montrait de plus en plus irascible auprès des domestiques, grognant contre chaque imperfection, contre leur lenteur à lui apporter ce qu'il demandait : pourquoi ne pouvait-on lui donner simplement dans la seconde qui suivait ? Il ne doutait pas que son comportement remonte bien assez vite aux oreilles de son paternel... Mais étrangement, il n'avait pas vu celui-ci pointer le bout de son museau. Ça l'agaçait d'avantage même si en un sens, ça le sauvait : il aurait eu du mal à survivre s'il avait avoué ses quatre vérités à Pryam sous le coup de la colère et de la peur.

En début de soirée, il s'était approché du chevet avec une bassine d'eau claire et un linge. Il l'avait découvert à nu, que ça lui plaise ou non, et il l'avait lavé. Ses mains tremblaient à chaque passage, chaque approche de son corps, révulsé, colérique et blessé. Tant de sentiments en lui fusionnaient : il aurait voulu dévorer sa chair et la faire sienne, il aurait voulu lui faire du mal, lui planter au corps les mêmes griffes qu'on lui avait planté dans l'âme, il aurait voulu le garder, pour lui et rien que pour lui, à tout jamais. Ses mains tremblaient et lorsqu'il vit qu'Howard était réveillé, il hurla, aussi sec qu'agressif : « TAIS-TOI ! ». Il le coupait, lui interdisait à parole, même s'il n'avait pas eu l'intention de la prendre, à lui, son maître. Il ne voulait pas l'entendre. Sa voix chevrotait à l'instar de son corps entier. Il couvrit son bas et sur son buste passa une pommade grise que le Khan lui avait laissée. Ses doigts, au contact de sa peau, se crispaient. La douleur le lançait comme si Howard était en train de s'amuser à mettre ses mains en lambeaux, comme si elles saignaient. Il retirait ses dextres, elles étaient saines, alors il les reposait, massait sa peau pour faire rentrer le produit. Il sursautait par moment, souffrance l’assaillant. Ça avait une odeur d'eucalyptus et de sapin juste coupé. Mais en beaucoup plus fort, plus nuancé que ce qu'on pouvait trouver dans les pharmacies humaines. On lui avait dit que ça reposerait son frère. Il ne le regardait pas, il observait ses propres mains travailler, s'efforçait de les maintenir à l'ouvrage plutôt que de montrer tant de spasmes incontrôlables. Son souffle était fort, saccadé, il suffoquait. Ses mains remontaient jusqu'à sa gorge, l'encerclait, l'envie latente de resserrer quand pourtant, il ne le désirait et puis, une surprise, un effroi, il se retirait, le rhabillait, le couvrait, et dans son fauteuil retournait s’exiler.

Sur la table de chevet, la bougie sacrée s'achevait, la flamme y mourrait. Elle se noya dans la cire pour les plonger dans l'obscurité. Morghann fermait les yeux, sans mot dire. Il détestait l'état dans lequel il était, si plein de tourments et refusant l'approche de l'âme de son frère. Il s'éloignait du plus qu'il le pouvait. Il ne comprenait pas ce qu'Howard voulait, ce qu'il attendrait de lui. S'il le voulait, le rejetait, l'aimait et pourtant voulait le tenir loin de lui ? Il comprenait ce jugement, cette volonté... Mais il la refusait farouchement. Il en était effrayé, son jumeau le terrorisait... Mais il ne voulait partir, l'aimant trop pour le laisser, quand bien même ça n'était pas le meilleur choix pour sa propre sécurité. De froid et de peur, il grelottait, roulé en boule dans un siège trop peu confortable pour dormir. Il ne l'approchait, parfois, dans la nuit, que pour lui prodiguer des soins, vérifier que sa perfusion l'alimentait, la rechargeait au besoin. Il veillait avec une minutie proche de la perfection et s'éveillait aux premières lueurs de l'aube. Courbaturé, il se relevait et machinalement officiait, sans regarder son aîné. Se concentrer sur ce que ses mains faisaient l'aidait à ne pas trembler. Une nouvelle fois, il lui retirait son haut, les gestes adoucis en comparaison à la veille et sur son buste, étalait la crème, la faisait entrer dans sa peau. Lentement, il lui remettait son haut, son souffle profond et chaotique rappelait l'existence d'une affligeante angoisse. Il ne se sentait pas capable d'affronter son regard. Le sien était si plein de honte, de détresse et de douleur. Il jeta un regard sur son fauteuil... mais termina par faire le tour du lit pour s'allonger à ses côtés, hors des draps il grelottait. D'une position fœtale, il se consolait, au bord le plus extrême du lit, pour être le plus éloigné de son aîné. Il courrait après un sommeil qui ne viendrait et son âme, toujours, montrait griffes et crocs, prête à en découdre si Howard l'approchait de trop près. Il n'avait pas bougé, une heure durant, peut-être deux ou bien trois. Son corps était ankylosé mais ce qui l'avait réveillé, c'était les mouvements de son frère. Il bougeait : « Reste couché... » souffla-t-il, bas et les quelques tremblements fragiles de sa voix étaient les traces d'une maladie refoulée : il n'hésiterai pas à l'hurler à nouveau pour se faire entendre et obéir. Howard avait besoin de repos. « Comment te sens-tu ? » demanda-t-il, sans avoir bougé d'un iota. Il était tétanisé.

Dim 7 Fév - 16:18
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Howard Earl
L'étrange sous la normalité :
Je suis l'héritier de la branche principale des Earl, je suis un Nécromant et un membre du secret. Je le protège et le soutient. C'est dans mon intérêt.

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Howard Earl
Le Sacrifié

Séquestré. Qui l'aurait pensé ? Par son propre frère, qui plus est. Qui l'aurait cru, qui l'aurait pensé ? La violente révélation l'avait choqué, pire réellement effrayé. Lui qui ne l'était pas souvent, cette fois c'était gagné. Mais que pouvait-il y avoir de plus terrifiant que ses craintes confirmées, sous ses yeux incarnées ? Il l'avait si profondément blessé qu'il en perdait toute raison, et ce qu'il avait pensé n'être qu'un attachement certes inné mais apaisant, s'était soudain transformé en un cauchemar éveillé. Qu'avait-il donc fait, fou qu'il était ? Oui, fou. Sans doute d'une folie un peu différente de celle de son cadet, mais de démence néanmoins il souffrait. C'était sa faute, entièrement sa faute. Mais qu'aurait-il réellement pu y faire ? Il lui avait fallu essayer, au moins une fois. Pour lui, pour son bonheur, pour son futur, quitte à s'en arracher le cœur pour ne plus souffrir de l'injustice à laquelle il sacrifiait. Ne l'avait-pas comprit à défaut de l'accepter ? Non... non il était au delà de ça. Mais cet au-delà le glaçait et l'irritait tout à la fois. Pendant un temps qu'il ne saurait déterminer, il avait vogué entre éveil et inconscience, le corps et l'esprit en feu, vidé de la moindre force. Mais il allait un peu mieux. Il allait de mieux en mieux. Ses instants d'éveil se faisaient plus nombreux, même si par instant, il manquait de lucidité. Son corps, doucement, semblait se remettre, se fortifier. Pourtant il était encore loin d'être capable de quitter son lit pour parader comme il le devait en temps qu'héritier de la famille Earl. Mais il l'était assez pour à nouveau former des phrases intelligibles et pour comprendre l'atroce situation qu'il avait créé...

Il s'en voulait, réellement. Contrit, il l'était. Mais pour autant, il n'acceptait pas les extrémités auxquelles son frère se vouait... Son contact lui faisait plus horreur encore qu'auparavant, son inaptitude à l'éviter le torturait plus profondément que toutes les inquisitions espagnoles réunies. Et la moindre de ses actions, le plus infime mouvement, semblait emplit d'une bouillante folie, menaçant de virer à la violence. Une violence que, sans doute, il aurait mérité, mais qu'il refusait. Et c'était d'autant plus compliqué qu'en l'état, il savait déjà qu'il ne pourrait maîtriser son cadet, lui qui pourtant aurait pu le vaincre si de magie il avait disposé. Mais magie semblait entre ses doigts s'effriter, et son corps affaiblit et brisé ne pouvait rivaliser. Son corps entier hurlait, et il n'avait qu'une envie : en sortir, le quitter, quitte pour ça à en mourir. Il savait que c'était son handicap qui parlait, son affliction, mais il n'avait qu'à peine la capacité à l'endiguer, alors avec Morghann si proche et soudain si sauvage, si étranger... Il ne le reconnaissait plus. Était-ce vraiment son frère, ou une créature qui sous sa peau c'était glissée ? Il avait l'impression de le sentir, même de si loin, féroce gardien, prédateur qui n'hésiterait pas à le contraindre encore une fois. Il se souvenait vaguement, dans ses délires, d'avoir tenter parler, bouger, partir... sans y parvenir. Il avait à présent l'impression qu'il ne pouvait lui échapper, et sa propre faiblesse lui était haïssable.

Il était resté ainsi, faisable seulement à moitié semblant de se reposer. Il ne dormait pas mais son esprit voguait. C'était de la volonté qu'il essayait de réunir, c'était du courage, de la force... la force de lui tenir tête, de reprendre sa place de maître et de le museler. De sortir de ce lit en pleine possession de ses moyens. Son corps engourdit était presque insensible, et une autre angoisse finit par monter : celle de ne plus pouvoir jouir de sa motricité. Même handicapé, il pouvait marcher, mais être paralysé ? Non... non. Il ne voulait pas y penser. Il ne devait pas y penser. Mais cela l'avait finalement fait bouger, attirant immédiatement l'attention de son cadet, exactement ce qu'il cherchait à éviter. Il inspira le plus profondément qu'il pouvait, se refusant à se figer aux mots prononcés. Ce qu'il fit pourtant, instinctivement. Il était épuisé, en réalité, il n'avait aucun moyen de réaliser ce qu'il désirait, et pourtant ; l'entendre lui parler ainsi bouscula ses pensées encore fragilisées. Il n'avait pas voulu bouger, il voulait seulement être certain qu'il était encore... mais quelle importance ? Lancé et par l'adrénaline soudain violemment secoué, il était à présent bien décidé à sortir de ce lit et à le défier, quitte à en mourir. Le coup d'oeil défiant qu'il lui lança, alors qu'il hurlait à nouveau, était encore vitreux, mais cette fois décidé. Il en avait mal à la tête, encore, et avait l'impression de flamber, mais il se tortilla, des décharges de souffrance dans tout le corps, jusqu'à tomber par terre.

La souffrance lui arracha un son primaire, animal, qu'il ne réussit pas à contrôler. Viscéral, il s'échappait de sa gorge pour tout ceux qu'il avait jugulé et le traversé comme un pal... le pliant en deux. Il s'était fourvoyé, son esprit n'était pas assez clair, il était même encore embrouillé. Pourtant il ne voulait pas abandonner, il se refusait à lui céder, se refusait à plier. Il voulait sa magie, il voulait sa force, la seule qu'il avait réellement possédé, et qu'on semblait lui avoir retiré... ou bien l'avait-il sacrifié ? Pourtant la nécromancie ne pouvait nullement l'aider. Elle ne lui serait d'aucune utilité, face à Morghann. Face à cette situation. Il cherchait, désespérément, quelque chose, une idée, à laquelle se raccrocher, une lueur d'espoir, la moindre qui voudrait bien se montrer. Désespéré, il en vint même à chercher la foi de sa mère, celle des scandinaves, qui vénéraient l'ancien panthéon nordique. Il avait besoin de croire, il avait besoin d'espoir, d'une lueur, car la sienne semblait s'être dissipée, évaporée... détruite sans doute de ses propres mains. Il priait toute chose qui pourrait l'entendre et le prendre en pitié, lui qui avait simplement voulut offrir à son frère ce qu'il estimait être son droit le plus légitime : une vie loin de sa néfaste influence. Déglutissant difficilement, il essaya de bouger de nouveau, le corps tremblant violemment sous les décharges et pulsations de douleur. Il n'avait nullement voulu que cela se passe ainsi !

S'il avait su... Mais ça ne servait à rien n'est-ce pas ? Ses actions, comme ses prières, étaient vides de sens, et lui impuissant à présent, une esquif dans la tempête. Il allait abandonner. Il le sentait, il n'avait pas la santé et la force de résister, en l'instant. Pourtant, quelque chose ,dans la tourmente, le retint, l'empêchant de sombrer de nouveau tout à fait. Il n'y cru pas, tant cela avait été bref, mais il l'avait sentit, cette présence, cette force en lui. Prêtée, allouée... ses tremblements diminuaient, lentement. «  Aide moi... » finit-il par dire, par l'inspiration guidée. Il avait du sang de Sihvonen, mais n'aurait jamais cru avoir droit à la protection des puissances que la famille de sa mère vénérait. Pourtant son cœur en palpitait et il en aurait fondu en larmes tant ce reliquat d'espérance le soulageait. En vérité... il en pleurait. Les larmes roulaient sur ses joues, ses yeux étaient plus rouges encore qu'auparavant et il hoquetait doucement, mais sa voix était plus claire et plus tranquille. Apaisée d'une façon qu'il ne pouvait vraiment comprendre en l'instant, comme une poupée manipulée. «  Je me sens mieux mais il faut que je me rafraîchisse...une douche... aide-moi à me relever, je... ne peux y arriver seul. J'ai besoin de toi » Il sentait qu'il devait parler, qu'il devait dire ces mots-là. Il sentait... qu'il fallait essayer de l'amadouer. «  J'ai besoin de toi, Morghann » répéta-t-il, plus clairement encore, malgré la souffrance que cela lui causait, le corps irradié.

Son regard était vide. Il ajouta, d'une voix plus tremblante, plus éphémère, presque un souffle, une aile de papillon : «  Et de l'air frais... s'il te plait, ouvre la fenêtre. J'étouffe... ouvre la et... aide moi à me relever » Il s'apprêtait. En un sens, il était désolé de devoir encore le malmener. Mais il n'avait pas le choix, si sa contrition était réelle, il se devait de passer par cela avant toute autre chose. De l'énergie, de la magie d'une source qu'il ne connaissait pas mais qui le soutenait, pour un bref moment, juste le temps de remettre en ordre ce qu'il avait causé, dans la mesure ou cela était possible. Juste de quoi l'atteindre quand il approcherait, atteindre son âme des mains que, sur lui il apposerait. Le chemin clairement tracé pour un esprit fatigué qui ne comprenait rien mais qui se laissait manipuler. Infime lueur, mourante et pourtant prête à bondir, dans ses paumes nichée... elle attendait, son corps pour calice récepteur, sa pensée, sa prière insensée pour catalyseur.

Dim 7 Fév - 23:52
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Morghann Earl
L'étrange sous la normalité : Enfant cadet du Patriarche Earl, il est un héritage refusé, s'extrayant de la nécrose gangrénée de sa famille.
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Morghann Earl
Howard continuait de bouger, sourd à son ordre pourtant si calmement clamé. Il ne voulait courber l'échine, se recoucher et Morghann sentait en lui une violente colère monter. Il voulait l'étouffer, par peur que cela ne puisse causer du mal à son aîné, mais son âme blessée ne le tolérait. Le cadet se redressa brusquement, le corps comme animé par une autre volonté que la sienne propre. Dans ses yeux, l'excès et la fureur s'enlaçaient, la tempête prenait de l'intensité : « JE T'AI ORDONNE DE RESTER COUCHE ! » hurla-t-il à son encontre, fougue irascible qui se déchaînait, alors que son corps impétueusement tremblait, son être entier s'agitait, se gorgeait à l’effervescence courroucé. Son prisonnier n’obéissait, outrepassant les consignes de ce qu'il exigeait, de ce qu'il accepterait de lui qui avait eu l'idée de le rejeter après l'avoir fait tant souffrir. Il lui avait offert son âme pleine, entière, sans aucune résistance pour se la voir blasphémée de la sorte, puis rejeté, mis à la porte. Jamais ! Que le ciel et l'enfer lui soient témoins : jamais, il ne partirait, jamais il ne s'éloignerait de son frère et jamais Howard ne pourrait lui-même s'enfuir, peu importe si là était son désir ! Il lui appartenait, ils s'appartenaient. Furieux, il se levait alors qu'Howard venait de tomber. Son cri l'ébranla et sa sensibilité à son égard en pâtissait. S'il n'avait qu'écouté son cœur, il se serait jeté à ses côtés pour lui porter assistance... mais il n'écoutait que trop son cœur et il saignait. Tant est qu'il se retrouva figé, incapable du moindre mouvement qu'il s'agisse de rage ou d'affection à l'égard de son si précieux jumeau. Des sbires fantomatiques étaient apparus pour saisir Howard, le redresser, l'asseoir sur le lit. L'un d'entre eux lui défit la perfusion avant qu'il ne se blesser avec d'une quelconque manière. Droit, prince torturé, il l'observait, le toisait, féroce dans son expression, violent dans son regard. « N'essaie pas de t'enfuir... » lui avait-il alors soufflé ce qui, en lui grondait comme une bête dissimulée. « Tu m'appartiens. » Nécrosé jusqu'à l'âme, il ignorait quel sort il pourrait lui réserver et déjà, les nouvelles paroles d'Howard le torturaient. Il avait besoin de lui, il voulait son aide et lui, se sentait bien trop faible pour la lui fournir. Ça n'empêchait pas ses mots de le persécuter, de résonner dans son esprit comme une supplique infernale qui le scindait en deux part de lui même.

Il s'approchait de la fenêtre, lentement en tourna la poignée, l'entre-ouvrit très légèrement. Il sentait l'air frais de l'hiver inonder son visage et ce fut soudain la panique. Il referma le tout abruptement, respirant chaotiquement, tremblant comme une feuille sous un bien sadique vent. « Non... » scandait-il entre deux respirations défaites. Il étouffait à cette idée, celle que lui soufflait son esprit obsédé : son frère allait partir, son frère allait s'échapper. Il n'avait pas le droit, il ne pouvait pas le laisser seul. Il posait son front brûlant contre la vitre glaciale, comme si cela pouvait lui démêler ces idées folles qui le suppliciaient. Mais ça ne venait. Dans son dos, une image fantomatique s'était dressée, s'était matérialisée, en nuances de gris sublimée. Elle avait quitté le poste que Morghann lui avait consigné. Ayzebel ne craignait rien sur l'instant, du moins, il lui semblait. Son allié du monde vivant était en bien pire posture. Annabelle était une petite femme, frêle, mais dans son port altier, la perfection de son habillage des années 30, la noblesse charismatique dont elle témoignait avaient toujours fait d'elle une très grande femme. N'avait-elle donc pas été, jadis, la mère de Lord Pryam Earl, cet homme siégeant en roi au Cénacle ? Ses boucles brunes étaient parfaitement coiffées, des perles blanches ornaient sa gorge et des perles noires formaient ses yeux, nécromancienne en son temps, Earl à tout jamais. *Mon enfant...* fit-elle pour Howard et Morghann tressaillit au son de sa voix. Hypnotisé, il ouvrait la fenêtre et laissait l'air frais s'engouffrer dans la chambre. D'un geste seigneurial de la main, elle congédiait les deux gorilles qui tenaient l'aîné gémellaire. Il fallait croire que même dans l'au-delà, elle s'était faite cette place de maîtresse qui lui allait bien. Elle s'assit aux côtés d'Howard, sa présence était fraîche et d'un bras, elle l'encerclait, comme pour le retenir de vaciller. Son regard abyssal, sur lui, se portait, elle ne le lâchait pas un instant. Elle était la proximité que Morghann se refusait d'avoir avec lui, elle était son porte-parole, son entité. Morghann s'était retourné et portait son attention sur son frère. Ses noires prunelles étaient accompagnées de veinures rouges sang. Le manque de sommeil sûrement. Et la folie en supplément. Il était pâle, aussi blême que la mort, malade.

Les paroles de son frère lui tournaient la tête, il s'était approché, d'un pas lent. Son aîné avait besoin d'aide, Morghann lui devait, non ? Il lui devait sûrement. Il l'aimait, il voulait tellement qu'il aille mieux : il l'avait soigné, il avait pris soin de lui, il l'avait veillé toute la nuit. Même si cela avait été de manière compulsive, il l'avait fait pour lui. « Une douche... » répéta-t-il, las. « Oui, une douche... » Souffle pâle, amertume et crainte, il s'approchait de lui, comme un animal terrorisé. « Je vais t'y emmener... Mais... reste avec moi, ne t'en vas pas... je t'en supplie. » Il avait le regard d'un chien qu'on venait d'écraser et qui suppliait qu'on vienne l’euthanasier dans les plus brefs délais. Il avançait, la présence d'Annabelle le rassurait dans une certaine mesure, mais il tremblait. Tête baissée, il venait le prendre par la taille, se penchant pour moitié et sursauta à la main qui, inattendue, sur son torse, se posait. Il était trop tard pour se décoller, comme s'il avait mis le pied dans un sable mouvant et tentait en vain, de s'en défaire. Howard tenait son âme, il avait beau feuler, dos rond, griffes et crocs en armes, il était pris et ne parvenait à se défaire. Il paniquait, l'angoisse montait, sa folie l'engouffrait vers des profondeurs infernales. Son frère allait le mettre hors d'état de le retenir, il le savait, il voulait partir, ça n'était qu'un : « TRAITRE !! » qu'il lui crachait au visage, véhément, aliéné, terrorisé. Affolé, ses deux mains s'étaient refermées sur celle d'Howard, son regard avait croisé le sien et s'y était noyé. Annabelle avait glissé derrière Howard, posant ses deux mains fantomatiques sur ses épaules pour l'empêcher de choir et lui apporter son soutien. Le cadet ne sut combien de temps ça avait duré. Il se souvenait avoir crié puis s'être étouffé. Il se souvenait l'avoir supplié de le relâcher, lui avoir demandé de rester à ses côtés, ses prières avaient été empruntes de déraison, d'extravagantes divagations et d'ivres idolâtries. Épuisé, ses genoux avaient touché le sol, et son front reposait sur les cuisses de son frère, il répétait en litanie désespérée qu'il l'aimait et qu'il ne voulait pas partir. Chevalier mourant aux pieds de son prince, il ne bougeait, il avait tant pleuré, son âme éperdue ne savait plus où se trouvait la noblesse des larmes qu'il n'avait jadis jamais versées pour d'autres que les défunts. Mais cette fois, c'était eux qu'il avait pleuré. Il avait pleuré sa honte, sa détresse, leur relation discordante. Il avait pleuré son frère jusqu'à ce que son âme, consolidée, réalise qu'il n'était pas parti, qu'il était là, qu'il ne l'avait pas abandonné.

Lentement, il ôtait ses mains des jambes de son frère et relevait la tête, honteusement vers lui. Les abysses de ses yeux gonflés et rougis par les larmes imploraient son pardon, sa miséricorde. Il avait mal agi, et ne saurai que trop l'appuyer, c'était sa faute, pleine et entière et il refusait qu'Howard en supporte le fardeau. « C'était un accident, Howard. Un accident. Ce genre de choses arrivent, avec ou sans toi à mes côtés. Cela peut se reproduire, oui... Tout comme jamais se réitérer. » Lui, comme Anthony, quand cesseraient-ils de voir leur avenir si noir, si mauvais ? Ne pouvaient-ils vivre, un peu, avec cet espoir, cette lueur, que l'avenir puisse aussi s'éclairer ? « Je jetterai toutes les tours d'ivoire sur un bûcher si aucune d'elles ne permet à mon gardien d'être, lui aussi, à l'abri, à mes côtés. Te souviens-tu ? » Il parlait bas, voix fébrile et rappelait pour quelle raison il était revenu à Last End au début du mois de septembre. Sa volonté n'avait jamais changé à ce sujet : « Je ne peux pas... te laisser en sacrifice pour ma cause, pour mon unique bien-être. Je ne pourrais pas vivre en sachant ce que je te laisse en arrière. A mes yeux, tu n'es pas que mon gardien, tu es bien plus que cela. Tellement plus... Je t'en prie, ne te réduis pas à ce rôle. Tu mérites mieux que ça. Laisse-moi t'offrir mieux que ça. » Il baissait les yeux et la tête dans un même mouvement solennel, priant à ses pieds, il n'avait pas la force de se relever. Il voulait l'étreindre, mais il n'avait que trop abusé de sa proximité avec Howard alors, de ses propres mains, il se couvrait les épaules, en proie à la solitude.

Lun 8 Fév - 16:46
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Howard Earl
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Howard Earl
Le Sacrifié

La présence d'Annabelle le rassurait, et il en avait grand besoin, faible et choqué qu'il était. Elle lui prodiguait ce qui lui manquait encore un peu, ce qui vacillait encore dans la lueur qui l'envahissait et le réconfortait. Il réussirait, il le fallait. Il ne pouvait se permettre de douter et échouer, ou la noirceur qui happait Morghann finirait sans doute par le tuer. Par les tuer, tous les deux et par sa faute. Une faute qu'il devait expier. Le voir ainsi, lui qu'il souhaitait pourtant protéger, le détruisait, le broyait jusqu'à l'essence. C'était lui qui l'avait mit dans cet état en cherchant à le protéger, et cela ne faisait que confirmer qu'il était nocif pour lui. Pourtant ce n'était pas sur cela qu'il devait pour l'instant se concentrer, mais bien sur sa guérison car il le savait, il devait absolument parvenir à l'apaiser. Ce serait difficile, encore plus délicat et malaisé que précédemment tout simplement parce que l'énergie dont il disposait n'était pas vraiment la sienne, qu'il n'avait aucune préparation et qu'il était à peine cohérent mais... quel choix avait-il ? Aucun, soufflait cette voix en lui, autoritaire mais juste, qui ne le jugeait pas mais ne le préservait pas de la vérité. Aucun autre choix, ce devait être fait et ce serait fait s'il désirait avoir un lendemain, et s'il désirait plus encore que son frère en ait un. Alors il le laissa approcher, malgré la frayeur bien ancrée...

Il le laissa approcher, et quand il fut à sa merci, il se refusa à hésiter. Posant une main tremblante sur son cœur il l'accrocha, attrapa son être, son âme et se refusa à le lâcher, quand bien même il se débattait. Dents serrées, mains illuminées, il se jeta à corps perdu dans ce qu'il devait accomplir, ignorant le hurlement de son cadet qui se débattait, ne se concentrant que sur le flot qu'il contrôlait, ou qui le contrôlait, plus vraisemblablement. Pour soutenir le choc, il s'était plaqué contre lui, ses propres limites balayées pendant un moment. Soutenu par Annabelle, il fit tout son possible pour guérir Morghann, pour effacer les marques qu'il lui avait laissé... Les souffrances de son frère le tourmentait encore, et il se serait refusé à lui en infliger de nouvelles, même bénéfiques, s'il n'y avait été à présent obligé. La force venue en lui se nichée était impérieuse et bien trop puissante pour qu'il la défie. Marionnette dont seule la volonté avait engendré ce carnage, il se laissait traversé, transpercé par la lumière qui l'aveuglait. Sourd et aveugle dans cette explosion blanche, pourtant si différente de celle de l'âme qu'il avait souillé, il se fit intransigeant aux suppliques et aux litanies de sa parenté, uniquement focalisé sur sa guérison. Ultime oraison.

Toute notion du temps perdu, il ne sut que son ouvrage et la force qui, en lui diminuait, avec la lueur déclinante qui, bientôt, laissa place à l'obscurité. Des points blancs dansaient devant ses yeux, et il sentait par instant le sol se dérober, ses mains hurlaient l'agonie tandis qu'il se laissait retomber sur le lit, assit il ne savait trop comment, sans doute par la volonté et l'aide d'Annabelle. Son frère était courbé contre lui, mais son être complètement engourdit ne le ressentait pas comme une agression en l'instant. Il était épuisé, mais, peu à peu, alors qu'il reprenait conscience, la réalisation que son corps s'était en parti apaisé lui apparue comme un miracle inespéré. Ses os n'étaient plus fourbus, et même s'il était épuisé, les mains au supplice et une migraine latente au creux des tempes, il se sentait un peu mieux... Assez pour supporter ce qui arriverait, il le sentait. Comme il sentait que c'était là sa récompense pour avoir refusé de reculer. Le poids de son frère prenait lentement sens, comme la lourdeur de leur âme partagée. Le soupire qui quitta ses lèvres était comme un vomissement, l'extraction d'un air malsain encore logé au creux des poumons, avec tous les noirs sentiments qui l'avait emplit.

Pour moitié, il n'osait bouger, ne voulant rompre le charme qui semblait avoir opéré. Pourtant ce fut lui qui, le premier, sembla se réveiller... mais les mots qu'il prononçait n'étaient pas de ceux qu'il pouvait accepter. Il était trop ébranlé, trop choqué, trop... La gifle partit sans qu'il ne le veuille, retentissante, et qui lui arracha pourtant à lui un cri de douleur quand un éclaire supplicié lui traversa le bras, faisant à nouveau exploser devant ses yeux des étincelles. Mais cette fois, c'était une douleur bien réelle, bien mortelle, et qui lui arracha un élan nauséeux tandis qu'il regardait le dos de sa main ensanglantée. Non, une simple gifle ne pouvait causer cela. Haletant, il ne resta pourtant pas concentré sur cela, et répondit d'une voix étranglée : « Si c'est ma faute ! Tu ne comprend pas... » Pressant ses mains contre son bas ventre en se pliant sur elle en un geste instinctivement protecteur, les cheveux en bataille et le teint livide, il siffla bas : « Je voulais te protéger ! C'est vrai je... je sais déjà que j'ai du mal en moi. Mais il n'y avait pas que ça » Ce n'était pas son habitude de se livrer ainsi, mais ce qui l'avait traversé ne l'avait clairement pas épargné « Je suis jaloux Morghann, je...Je n'arrive pas, je ne peux pas m'y faire... »

Il prit sur lui, inspira pour bloquer tant sa respiration que ses muscles, puis reprit en se retenant autant qu'il le pouvait : « Tout ce que j'ai vu de toi, je n'y suis qu'un étranger, et même aujourd'hui, je voudrais te réclamer pour moi mais je ne le peux car en plus de te voir aspirer à cette liberté qu'après de moi du sacrifie, je suis incapable de te rendre pleinement ce que tu espérerais. Je t'aime c'est vrai, mais je ne suis pas... je suis ce que je suis Morghann. Tu sais comment je suis, tu sais ce qui m'enchaîne et tu... je ne peux pas simplement m'y faire, je ne peux pas simplement arrêter de penser que tu serais simplement mieux avec elle et loin de moi. Ça ne te plait pas mais c'est pourtant vrai... et ça me fait mal, ça me fait mal de savoir tout ces moments que tu passais avec elle alors que je me demandais si tu travaillais...Alors comment puis-je réellement m’octroyer un rôle quelconque qui ne soit pas celui de gardien quand chaque décision que je suis contraint de perdre, te garder comme te chasser, me torture ? » Il serrait ses mains, espérant que la douleur physique chasserait celle qui allait l'étreindre et qu'il refusait. C'était si sot... si stupide ! « Je me suis toujours refuser à te demander quoi que ce soit, à t'interdire quoi que ce soit si ce n'était pas un danger direct pour ta santé... je ne pourrais et ne voudrais le faire, encore maintenant... »

Il ne pouvait comprendre. Il ne pouvait savoir ce qu'il endurait... sa veille auprès de lui, ses complots, sa présence à Last-End... « Je voudrais partir... partir et ne plus jamais revenir, simplement habiter ici est intolérable ! Et auprès de tous... j'accepte d'être votre pilier, à tous, mais je me supporte seul, je me suis toujours supporter. Cela fait longtemps que j'ai abandonné l'idée d'avoir quoi que ce soit qui soit réellement à moi, réellement ce que je souhaitais... » Sa voix tremblait, plus sincère, plus réelle qu'elle ne l'avait jamais été, ou si peu souvent «Personne ne sait qui je suis ! Personne ne s'y est intéressé ! On veut voir de moi ce qu'on attend... jamais ce que je suis, jamais ce que je voudrais réellement ! Je ne suis qu'un réceptacle pour des désirs et des pensées... » Ses mains saignaient, les draps s'imbibaient, les runes scaldiques sur ses mains scintillaient du résidu de magie qui l'obligeait à vider son sac, nettoyer son cœur « Je haïs ce monde... Je le haïs si profondément, dans mon cœur. Mais je n'écoute jamais mon cœur, j'écoute ma raison, parce que je le dois, parce que j'y suis contraint, même si ça doit m'assassiner ! » Ses tempes palpitaient, délirait-il de nouveau ? « Et toi... toi que veux-tu m'offrir ? Qu'est-ce que tu veux m'offrir de mieux quand tout me paraît cendre et amertume ? Je n'ai rien Morghann !!! Absolument rien ! »

Il hurlait presque, ou avait l'impression de hurler, entre deux sanglots étouffés. Était-ce ses larmes ? Des larmes qui envahissaient la pièce, pleuvaient comme un orage silencieux sur eux, l'eau se répandant partout sans qu'il le voit vraiment : « Je sais... je sais que tu veux bien faire... je sais que tu m'aimes et que tu ne me veux pas de mal... je sais je sais je sais... tes intentions, tes souhaits... mais la seule chose, la seule chose que j'ai, ma seule fierté c'est de pouvoir te protéger !! C'est la seule chose... qui me console qui... » Il niait et acceptait en même temps, perturbé «  me permet de me dire que tout ça en vaut un peu la peine » Lui... et un peu Elie aussi, surtout récemment, quelque chose chez le démon avait changé. Et il l'avait remarqué, apprécié « J'ai voulu... tu n'as pas compris... je... j'ai usé d'une autre magie... pour ton âme j'ai... je ne voulais pas te souiller ! Alors j'ai juste... prit mon souhait, mon souhait de te protéger, de te garder sauf, je l'ai mis sur ton âme... je voulais simplement... je ne voulais pas te forcer, je ne t'ai pas forcé... je n'ai rien imposé j'ai juste... ce n'est pas de la magie noire, p-pas de la magie nécro-mantique... j'en ai... un peu usé, pour la base seulement ; mais rien d'autre j'ai... je voulais te faire baigner dans la lumière, t'éloigner de mes dangers à tout jamais ET REGARDE CE QUE J AI FAIS !!! »

Un jaillissement d'eau gronda en plein milieu de la pièce, comme venue de quelque profondeur abyssale, et éclaboussa les murs et le plafond, se glissant sous les portes pour se répandre dans le reste du château, déferlant comme la peine de ces vingt dernières années qu'il avait profondément enfouit...


Lun 8 Fév - 23:36
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Morghann Earl
L'étrange sous la normalité : Enfant cadet du Patriarche Earl, il est un héritage refusé, s'extrayant de la nécrose gangrénée de sa famille.
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Morghann Earl
Il ne l'avait pas vue venir, cette gifle. Ni de loin, ni de près et lorsqu'elle claqua sa joue, il en sursauta, laissant échapper un grognement sourd. Il le frappait ? Depuis quand le frappait-il ? Lui qui avait toujours été mesuré... Tête baissée, Morghann ne répondait, se fixant à l'idée qu'il l'avait probablement méritée. Les mots, ces mots qui venaient soudain de son frère, ils coulaient comme un torrent infernal, sans fin aucune. Jamais, de toute son existence, il ne l'avait entendu ainsi s'exprimer. Ses paroles le touchaient, il en était transcendé, comme traversé d'un violent éclair de part en part. Ça l'électrisait si violemment qu'il en demeura figé, incapable de la moindre expression, du moindre mouvement. La pluie tombait sur eux, sans qu'il ne sache comment ni pourquoi, même s'il s'en doutait, ça ne pouvait venir que Howard. Une puissance lui échappait et voguait au grès de ses émotions. Prunelles noires sur son jumeau, Morghann était trempé jusqu'à l'os, ne réagissant qu'à peine à ce soudain geyser si ce n'était d'un sursaut. C'est Pryam qui n'allait pas être content qu'on fasse un grand ménage de printemps en plein hiver dans son château. Pour sûr, ils allaient devoir s'expliquer sur cette fantaisie. Mais pour l'heure, Howard remplissait son esprit entier. Le cadet saisit les draps et le matelas près de son frère pour s'y accrocher, s'y tirer et quand bien même il ne parvint pas à se relever, il y posa la tête, le souffle saccadé. Ses yeux se fermaient sur les draps blancs trempés, il le cherchait, son âme faisait ce chemin, vers la sienne, elle se projetait et près de lui arrivait. Et quand, enfin elle se trouvait à ses côtés, elle étreignait la sienne avec une passion sans artifice, elle l'embrassait sans retenue, sous une fièvre idyllique. Il ne pouvait le toucher physiquement, mais s'ils s'aimaient, il le savait, ça il le pouvait. Elle restait tout contre son homologue liée, une seconde, peut-être même une éternité. Il rouvrait les yeux, mais son âme, elle, restait, près de lui, en son creux bien logée. Elle refusait de le quitter. « Tu es... Tu es magnifique, Howard. » Sa voix n'était qu'une souffle, pâle, si bas, mais il savait qu'il l'entendrait. « Je t'avais... réclamé d'ôter ton masque mais je... ne pensais pas... Non, je ne pensais pas... Tu n'as rien d'un monstre... Tu as tes vices, tes ancrages mais tu... n'as rien d'un monstre... ta dévotion, ton abnégation... hors du commun... » Ses noires prunelles étaient ouvertes mais elles fixaient le vide devant elle, à moins qu'il ne s'agisse de sa propre main serrée dans les draps. « T-tu peux hurler, me frapper tant que tu voudras mais... c'est vrai. Tu es magnifique, tes nuances de gris sont extraordinaires. »

Il fermait ses yeux, son âme étendue contre la sienne, il en tremblait sensiblement. Ça ne se voyait probablement pas à l’œil nu. Sa psyché se tendait, souffrance pleine et entière, il savait qu'Howard le sentirait : « Je partirai. » Il déglutissait péniblement, respirait chaotiquement, et répétait : « Je partirai avec elle, loin d'ici, loin de toi mais... n’exulte en aucun cas, car tu en souffriras, tu déchanteras... Il me faut te le dire, pour te préserver : je ne serai pas heureux. Crois-moi... Si j'avais pu l'être, je ne serai pas à Last End aujourd'hui. Je voulais... J'ai voulu te parler de Kessy et Andrew... A l'opéra. Je n'ai... jamais été aussi heureux qu'à leur trépas, j'étais libre... libre, tu vois ? » Propos si horribles et pourtant... « J'ai essayé d'avoir cette vie normale, de la construire, de toi, m'éloigner. J'ai construit des murailles entre toi et moi, des tours et des remparts pour t'exclure de mon existence, j'avais si peur de toi... J'ai voulu cette vie normale que tu n'étais pas. J'ai voulu y goûter. Je te mentirai en te disant que je n'ai pas apprécié cette existence, que je ne l'apprécie pas encore aujourd'hui. Oui, je la recherche, cette lueur, loin des devoirs et responsabilités de mon propre sang, je la savoure mais... Mais... » Il suffoquait et s'interrompit le temps de se calmer. Son souffle saccadé se temporisait, sous la pluie qui ne cessait de tomber. Il avait le sentiment qu'il devait vider son sac, qu'il pourrait s'inquiéter de toute cette eau par la suite. « Pendant près de vingt années, j'ai construit, je m'y suis efforcé et quand tu es parti, je savais que tu ne reviendrais pas avant des mois, peut-être même des années... Je me suis trouvé tellement démuni face à ces murailles, ces tours, ces remparts que j'avais élevés. Je voulais les détruire, les exploser, les briser. Je m'en voulais seulement de les avoir un jour érigés... Et puis ils sont tombés d'eux-même lorsqu'ils sont morts... La peine, la douleur, n'ont duré qu'un temps et lorsque j'étais de nouveau près de toi, c'était fini... Cela s'évaporait et aujourd'hui je n'en ai plus rien. Je n'ai que toi. » Il retenait un souffle profond, refusait de céder, il voulait poursuivre, lui dire. Il voulait qu'il comprenne. « Et je ne pense qu'à toi... Si souvent, à présent que nous sommes liés, tu le sentiras, tu le sauras...et tu n'auras pas assez de tes doigts pour compter le nombre de fois où je viendrai me blottir contre toi en une seule journée. Je ne l'aime pas. Je ne les ai jamais aimé. Ils étaient un plaisir, une satisfaction, une liberté hors des principes de notre famille. Ayzebel n'est pas d'avantage. J'aime être avec elle... Elle me fait sourire, je me sens bien. Toute cette protection dont je bénéficie... A défaut d'être capable de te la rendre, je lui offre. C'est ma manière de payer mais elle n'est pas toi et ne le sera jamais. »

Morghann levait une main, l'approchait de celle ensanglantée de son aîné mais n'osait le toucher, pas même l’effleurer. Il reposa sa main sur le matelas et, le cœur serré, son âme l'étreignait encore, embrassait ses contours de lumière et s'offrait, se donnait. « J'aimerais te rendre heureux, te satisfaire, te faire sourire... Mais je ne t'offre que des larmes et du sang... Je partirai, je l’emmènerai avec moi, nous irons très loin pour que tu te sentes mieux. » Il serrait les mâchoires, l'une contre l'autre et puis il s'était vraiment mis à trembler cette fois, il fermait les yeux, se laissait emporter, le cœur au bord des lèvres, fragile et épuisé. Son âme s'enroulait contre la sienne, la berçait, la caressait, l'embrassait et à elle se confiait : *C'est toi que je voudrais emmener loin d'ici, t'arracher à tes devoirs, tes obligations... Toi que je voudrais soigner, m'occuper, comprendre... A toi que je voudrais montrer la lumière, faire jaillit cette lueur en toi et te garder... Juste toi et moi, et plus rien d'autre... Tu es ma vie, mon souffle... Tu es tout ce dont j'ai besoin et je t'aime tellement.* Il effleurait les formes de son âme jumelle, éperdu. Il aurait  aimé garder Howard et Ayzebel, ensemble, à ses côtés. L'un comme l'autre lui apportait un bien différent, un bonheur différent... Mais à trancher entre les deux, c'est vers son frère qu'il se tournait sans la moindre once d'hésitation, envoyant tout le reste en l'air : ça n'avait plus aucune importance. Sa poigne se serrait sur les draps : « Mon amour... » Une supplique, la dernière, pour lui demander de rester, près de lui... ou avec lui, partir loin d'ici. Il se sentait tellement égoïste, il n'avait pas envie de le quitter.

Mar 9 Fév - 19:54
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Howard Earl
L'étrange sous la normalité :
Je suis l'héritier de la branche principale des Earl, je suis un Nécromant et un membre du secret. Je le protège et le soutient. C'est dans mon intérêt.

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Howard Earl
Le Sacrifié

Tour à tour, ses mots glaçaient, surprenaient, suppliciaient... une farandole d'émotions qui, pourtant, semblaient soudain un peu moins lourdes, un peu moins obscures. Ce n'était pas la panacée, loin de cela même, chaque parole l'inquiétait, mais au moins avait-il l'impression de pouvoir davantage se supporter, simplement pour avoir cracher tout le venin contenu dans cette plaie qui ne cessait pas de s'infecter. Pourtant, l'eau ne cessait pas de tomber, les trempant tous deux jusqu'aux os sans que l'un ou l'autre ne fasse le moindre geste pour s'en protéger. Howard était toujours recroquevillé sur lui-même mais il avait tourné la tête vers son cadet qui s'exprimait, et l'observait d'un regard troublé par ce qu'il entendait. Son cœur et sa gorge se serraient tandis qu'il laissait les mots et leur sens le pénétrer, et finalement, au bout d'un long moment, il se noua de nouveau sur lui-même, comme une bête blessée... « M'aimer.... » L'idée était à la fois un espoir et une lubie saugrenue. Mais surtout, elle semblait si peu en accord avec des pans entiers de son existence... et de ses idées. Il aurait voulu ne rien dire, quitte à de nouveau souffrir, mais la force qui le poussait à se dévoiler était plus forte que tout. « Et quand l'as-tu décidé ? Lorsque tu es avec elle tu sembles penser que ton affection pour moi n'est que fraternelle, pourtant aujourd'hui tu... clames m'aider ? De cette façon ? » Yeux fermés, traits crispés, il se concentra sur sa douleur physique pour esquiver celle de son psyché « Est-ce seulement vrai ? Es-tu certain de ce que tu ressens ? Ou n'est-ce... » Qu'une façon de vouloir l'enchaîner ? Plus douce, moins brutale et violente, mais non moins tyrannique... La confiance qu'il avait été ébranlée, quant bien même il savait que tout cela était sa faute personnelle.

Il ne voulait pas qu'il parte, au fond. Bien sûr que non, il le voulait auprès de lui... mais il le voulait avec lui et pour lui, hors il savait déjà que ce ne serait pas le cas, et il savait tout aussi bien que ça ne pouvait être le cas, que c'était naturel... et il plierait. Non, il ne voulait pas qu'il parte, il voulait qu'il reste. Mais s'il restait cela lui ferait mal et s'il partait il aurait aussi mal. C'était une torture qui ne semblait pas un instant vouloir s'arrêter... Et il ne trouvait aucune solution en l'instant. « Je... n'ai pas envie de te frapper. C'est parti tout seul, je n'ai pas pu m'arrêter. Je n'ai pas envie de te frapper, je n'ai envie de rien d'autre que de pouvoir trouver une sortie à cette situation impossible » D'une honnêteté crue qu'il ne pouvait contrôler, il continua : « C'est un embrouillamini... tout cet écheveau n'a absolument aucun sens Morghann, tu... » Il s'arrêta en plein milieu de sa phrase, soupira lourdement et secoua légèrement la tête comme en signe d'abandon. Pourtant il continua : « Je ne veux pas que tu partes... mais c'est si compliqué, si douloureux que pour une fois dans ma vie j'ai simplement envie d'être égoïste... et j'arrive encore à m'en vouloir de l'être » Et à présent, tout ce qu'il lui avait dit sonnait horriblement mal. Peut-être était-ce simplement le pessimisme en lui qui parlait, voulait trouver des raisons de s'apaiser dans son départ... après tout s'il n'était là que pour lui faire apprécier la lumière, s'il n'était qu'une ombre utile, qu'est-ce que cela valait, changeait ? Elle le faisait sourire, pas lui, elle le faisait se sentir bien, pas lui... lui n'en était pas capable. Il n'avait pas même de nom à mettre sur ce qu'il pouvait bien lui apporter. Comment pouvait-il seulement croire qu'il le supporterait ? C'était son peu de fierté qui s'effondrait...

Mais la vérité était encore ailleurs... « Je ne sais pas... sourire, être heureux, je n'ai pas appris à l'être et mon devoir ne me le permets pas... je suis l'héritier de cette famille, je deviendrais roi... et alors je serais au service de mon peuple. Mes propres sentiments n'ont jamais comptés en cela alors... comment le pourraient-ils seulement ? Encore aujourd'hui même si je m'écoutais je souffrirais. C'est un cercle vicieux, un cercle sans fin... et pourtant si tu me les enlevais... je n'aurais plus rien Morghann, je ne serais plus rien. Je n'aurais ni repère ni raison d'exister, rien pour me guider ou me motiver...on ne se suffit pas à nous mêmes c'est une illusion... et puis je... » Il se mordit la lèvre jusqu'au sang, se l'ouvrant largement et continuant pourtant de parler, agité de tremblements « Je la vois, la lumière mais je n'y ai pas droit... je ne la comprend pas, je ne peux me permettre d'y céder c'est... » C'était le déluge. Il pleuvait de plus en plus, le bruit couvrant en partie sa voix. « Et je te sent Morghann ! Je sens tes pensées, je sens tes idées, je te sens tout entier ! Comment peux-tu même m'affirmer que je suis tout ce qu'il te faut alors que tu souhaite la garder ! Là maintenant ! Comment peux-tu... » Et ça le blessait, ça le froissait et l'attristait, et pourtant même ainsi, il n'arrivait pas à le chasser. A le renvoyer. « Et moi ? À quoi ai-je droit ? Qu'ai-je alors si tu n'as que moi ? » Mais il n'attendait fondamentalement aucune réponse. Dans le silence soudain et profond, la pluie torrentielle s'apaisa lentement et son âme finit par s'ouvrir à la présence de sa jumelle.

Vaincu, il ne fit aucunement attention à son entourage et s'allongea, dans un état second, soufflant simplement un « reste » bas et épuisé. Moralement cette fois. Se vider lui avait fait du bien mais l'avait épuisé, et il l'était d'autant plus de n'avoir aucune porte de sortie réelle, la seule se présentant étant de lui laisser sa liberté et d'accepter d'en souffrir une fois encore. Il l'observait de son regard épuisé, laissant ses cheveux dégoutter sur ses joues sans réagir, sans résister... Pourtant, une dernière goutte de sang glissa de son cœur ouvert pour se répandre doucement, sans un bruit : « Je n'ai jamais eu un réel instant qui nous soit donné. Qui soit simplement à nous sans que nous ayons besoin de nous inquiéter... je n'ai même pas eu ça... » Par sa faute personnelle encore une fois. Mais il en faisait le deuil. Un deuil compliqué... « reste » répéta-t-il, sincère mais épuisé... Il allait fermer les yeux lorsqu'une petite boule duveteuse se glissa d'une porte ouverte de ses appartements pour venir les rejoindre, ondulant doucement d'une queue qui reprenait de son volume. Un doux miaulement retentit, comme une supplique d'apaisement après ces échanges douloureux....

Mer 10 Fév - 23:17
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Morghann Earl
L'étrange sous la normalité : Enfant cadet du Patriarche Earl, il est un héritage refusé, s'extrayant de la nécrose gangrénée de sa famille.
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Morghann Earl
Il se sentait accablé, les premiers mots de son frère venaient l'assassiner, tuer les paroles que, pour lui, il avait versées. Il l'aimait, oui. Il ne savait expliquer, pourquoi, depuis quand, ou comment. Il le sentait, en lui, grandissant et plus encore lorsqu'il contemplait le visage de son jumeau aujourd'hui. Un visage qu'il n'avait jusqu'alors jamais connu : un visage sans masque. Alors ce qu'il lui rétorquait lui faisait mal. Il sentait tout son être se crisper, son souffle se couper, son cœur se serrer et l'ébranler jusqu'à l'âme. Pourquoi ne pouvait-il le croire ? Pourquoi Howard voyait-il en lui soudain un félon malintentionné ? C'était un coup de couteau qu'il se prenait, sans prévention aucune et le sang coulait. Quand auraient-ils fini de se faire du mal ? Au fond n'était-ce pas lui, Morghann, le problème ? Ses couples étaient dysfonctionnels au possible. Avec Ayzebel, leur univers s’enflammait à chaque instant et avec Howard... C'était pire et ça lui faisait d'autant plus mal qu'il était persuadé de ses propres sentiments. Il peinait à déglutir, se projeter même dans l'idée de reprendre sa respiration. Il avait envie d'hurler, pour lui faire entendre raison. Il voulait se blottir contre lui, chercher le réconfort... Mais il ne le pouvait, en souffrance, il se l'interdisait.

L'inspiration fut brûlante dans ses poumons et pourtant nécessaire s'il ne voulait pas défaillir. Un instant, il s'était laissé porter par l'idée que ça n'aurait aucune importance, aucune incidence, qu'il ne voulait pas continuer pour être aussi nocif à l'égard de son aîné. Et puis les propos d'Howard avaient poursuivi leur flux, l'emportant dans sa tourmente, sursautant à ses reproches, supplicié, accablé, il ne savait comment y mettre un terme. Il ne savait lui parler, quels mots prononcer car, au fond, son frère ne le croyait pas, avait vu en lui un tortionnaire. Que pouvait-il avancer ? Que pouvait-il ajouter si ce n'était s'ouvrir le cœur pour lui montrer et encaisser par la suite un nouveau rejet ? Pire encore, c'étaient les ténèbres qui entouraient son jumeau tant aimé qui l'achevaient. Il aurait voulu lui dire que rien n'était figé, qu'après aujourd'hui, après cette sincérité, l'avenir ne pourrait plus être pareil. Qu'avec leur lien, sublimement crée, ils pourraient franchir des frontières, voyager sur des terres jusqu'alors inexplorées. Il avait l'espoir, peut-être sot et futile. Il avait l'espoir et en brûlait de douleur de constater combien Howard en était dénué.

Et puis son âme s'était ouverte à la sienne. Il n'avait pas osé approcher et sa demande de rester le plongea dans une satisfaction coupable, un bonheur à sens unique. Elle souffrait, sa parenté, et lui, ne pouvait se contenter d'ainsi observer sa lente destruction, son existence vaine enfouie dans un rôle. Il n'était pas lui, il était le roi, comme un comédien ayant trop appris son personnage au point de ne plus pouvoir sans défaire une fois le rideau tombé... Ou peut-être était-ce parce que le rideau ne tomberait jamais. Morghann ne pouvait toutefois pas trancher les cordes qui le retenait à se rôle sans le faire souffrir encore. Pourquoi fallait-il que tout ne soit que souffrance ?! Pourquoi n'y avait-il seulement une voie ?! Pourquoi Morghann les voyait et Howard pas ? Pourquoi s'aveuglait-il à ce point et pourquoi pensait-il que son devoir soit forcément incompatible avec son plaisir personnel ? Un miaulement, Morghann ouvrait enfin les yeux, laissant le chaton approcher et le gratifiant d'une caresse désolée à son égard. Le calme... Oui, un peu de calme. Ses yeux se refermaient et son âme vers la sienne s'évadait encore, cherchant son étreinte, sa douceur. * Ouvre les yeux et regarde... Regarde ce que nous avons... Ce lien. Unique. Ici, personne ne nous fera jamais de mal. Ici, ils ne peuvent nous atteindre. Tu as déjà ce que tu cherches et tes instants de bonheur sont souvent à portée de mains... Saisis-les. Saisis-moi. Tu m'as, moi, si tu le désires. Si c'est ce que tu veux... * Mais ça n'était pas ce qu'il voulait. Il ne l'avait pas cru. Il ne l'avait pas écouté.

Comme il le pouvait, il se hissa sur le lit tant bien que mal et la scène avait du être bien pathétique d'un œil extérieur. Mais, à l'exception du chaton, il n'y avait pas de témoin. Là, il put aller se noyer dans les abysses de ses yeux, s'y perdre quelques secondes, enténébré et trembler sensiblement. * Tu n'as pris de mes pensées que ce qui te contrariait. Elle est ma satisfaction. Mais tu l'es bien plus encore et tu le sais... tu t'aveugles, trop persuadé que tu es de ne me faire que du mal. Ta présence, ta prestance... Avec elle, je me sens bien. Toi, tu me transcendes. Sens comme je tremble...  Tu sais, avant même que je te touche, que j'en tremble. * Il approchait sa main, avec douceur, de sa sienne, un bref instant, quelques secondes à son contact, le juste temps pour qu'il sente comme au restaurant, et puis il se retira. * Tu sais que j'en tremble à chaque fois depuis... Depuis quand ? Je n'en sais rien. Y a-t-il besoin d'un commencement ? Je le sais, là maintenant. Et qu'est ce qu'un sourire qu'elle me donne à côté de ça... * Son âme raffermit alors son étreinte sur la sienne. Ça, ce sentiment là, il n'avait aucun nom, il n'avait pas de prix mais il en avait un, il vaudrait bien d'avantage qu'un sourire. * Tu n'as pris de mes pensées que ce qui te contrariait. Je voudrais la garder oui... Mais je la sacrifierai sur notre autel si cela pouvait nous apaiser... T'apaiser. Je suis à toi... * Il ferma les yeux et déglutit. Il ne le voudrait, lui, il avait rejeté cet amour-là, alors peut-être accepterait-il... * Tu as Elie. * Douloureuse plaie, elle saignait, mais il la sacrifiait, c'était nécessaire. Pour Howard. N'avait-il seulement jamais rien fait pour lui, pour son plaisir et son bonheur à lui ? * Tu vas aller avec lui. Tu vas respirer. Et... * Devait-il continuer ? * Je veux que tu le fasses pour toi. Pour ton bonheur. Pas pour... Négocier avec lui. Je... ne veux plus entendre les Voix. Elles m'ont rendues sourd si longtemps. J'ai envie de t'entendre, toi, à présent... Alors tu vas aller avec lui... Et tu souriras, je sais... au fond de toi qu'il te fait, lui, sourire... * Il le jalousait, autant que son frère jalousait Ayzebel, si ce n'était plus : Morghann avait des raisons très personnelles de haïr et d'en vouloir à Elie.

Lentement, il rouvrait ses yeux vides sur les siens, la gorge nouée. Il n'avait pas réussi à parler. Seulement maintenant, il réalisait qu'il n'avait pas ouvert la bouche. * Tu te trompes Howard... Tu as droit à la lumière. Elle n'est pas en permanence incompatible avec ta souveraineté. Parfois oui, c'est vrai. Mais pas à tout jamais. Si tu ne sais la comprendre... Efforce-toi et tu y gagneras. Son langage n'est pas compliqué, tu finiras par l'apprivoiser. Et si quelques mots te résistent, je te les apprendrai... * Ses yeux se couvraient d'un voile sombre, torturé, sur un visage de marbre * …. Ou Elie t'apprendra. * Un froid lui parcourait l'échine, léchait son dos et le mordait. Ce devait être la fenêtre et le vent glacial de l'hiver, sur lui, trempé, mais... Cette douleur là... Il préférait sentir celle-ci qu'une autre plus sournoise et dévastatrice en son cœur.

Jeu 11 Fév - 15:58
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Howard Earl
L'étrange sous la normalité :
Je suis l'héritier de la branche principale des Earl, je suis un Nécromant et un membre du secret. Je le protège et le soutient. C'est dans mon intérêt.

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Howard Earl
Le Sacrifié

Il avait tant de mal à lui accorder sa confiance, tant de mal à le croire alors même qu'il avait vu toutes ses pensées et son passé. Mais plus encore que cela... il s'en voulait, contrit et désolé à ses paroles, parce que peut importe ce qu'il voulait, il ne voulait pas que l'on sacrifie qui qu ce soit pour lui. Sans doute était-ce en cela la principale raison qui le gagnait, le vainquait... Il était trop honnête pour l'accepter. Et il lui en voulait de ce qu'il affirmait, quant bien même il en était le moteur, la source. La suite pourtant, l'épuisa encore davantage, même si en un sens cela apaisait une partie de ce qu'il ressentait. Morghann était si persuadé de tant de choses, par sa tour d’ivoire trop longtemps protégé.... sa faute également. S'il l'avait un peu moins dorloté, il se serait davantage confronté au monde que lui supportait et aurait davantage comprit... que tout cela n'avait nullement lieu d'être. Et pourtant, part de ce qu'il entendait venait d'un acte qu'il n'avait encore jamais expérimenté, et cela seul le retenait de se refermer comme une huître et de simplement ne plus l'écouter. A la place de quoi il se redressa légèrement, sur son bras et secoua un peu la tête, avant de rétorquer d'une voix calmée par la fatigue : « Elie est mon mentor... » Il sentait qu'il lui fallait clarifier immédiatement les choses « Je n'ai aucune... attirance de cette sorte pour lui, ou pour quiconque » Le fait que Morghann se force à accepter la proximité du démon alors même que cela le détruisait était un acte qui le touchait énormément et apaisait grandement ses reproches. Jamais encore son frère n'avait agit ainsi, et si la magie l'y poussait toujours, c'était avant tout sa volonté que de tempérer les sentiments du cadet. « Je le respecte et l'admire énormément, je le jalouse aussi... Il est mon mentor, et parfois, il est un ami. Quelqu'un... quelqu'un qui m'apaise et me fait m'améliorer, à côté de qui je peux de nouveau être un enfant, un mortel jeune et qui a à apprendre... » Il baissa un instant les yeux avant de les relever « Une personne qui m'offre de m'apprendre à peindre, moi qui ne sait pas manier un pinceau... pour qui mon potentiel n'est pas simplement celui d'un sorcier... oui, il est une personne comme cela pour moi... Je l'apprécie et je le déteste à la fois... mais je ne le lorgne pas... ainsi »

Il en était même mal à l'aise et se serra sensiblement sur lui-même. « Mais je doute qu'il m'apprenne à voir la lumière, quant bien même je le voudrais. C'est un démon, mieux vaux ne pas l'oublier » Que son frère le voit comme lui voyait son amante lui paraissait ubuesque... Il n'avait et n'aurait aucun contact charnel jamais avec Eurynome. Quant à l'aimer... il n'en était pas question, ce n'était pas cela qu'il ressentait. Il se sentait simplement bien avec lui, même si cela était à nuancer. Il occupait une place particulière dans son cœur, mais n'était certes pas couronné de pareil affection. Et ce serait, plus encore... indécent, dérangeant et... il se questionnerait. Lentement, il souleva une main, l'approcha de la sienne, doigts tremblants et à l'instant où il toucha sa peau, il recula, comme électrisé, foudroyé, se mettant à trembler avec une violence effrayée. Il déglutit et se fit violence pour recommencer, une fois, deux fois, jusqu'à être capable de lui prendre la main. En serait-il seulement capable à l'avenir, lorsque les choses se tasseraient, après ce qu'il s'était passé ? Il avait beau essayer, son âme avait beau l'accepter et l'accueillir, il n'en restait pas moins que les marques perduraient... « Ces pensées... elles n'en étaient pas moins vraies... tu n'es pas plus en paix avec tes propres idées contraires que je ne le suis... et tu n'es pas... je ne sais pas » Soupire lourd. Etait-il en paix avec ce qu'il disait ressentir ? Vraiment ? Ses précédents actes avaient beau être provoqués par la souffrance de son âme... la base, elle, existait. Et il ne souhaitait nullement l'encourager, ni la raviver. Il ne serait pas en paix avant longtemps. « J'irais oui... je n'avais nulle intention de revenir sur cela. Mais toi, tu... n'espère pas trop de tout cela » Avait-il sourit des attentions d'Elie ? Il n'en avait aucun souvenir si c'était le cas. Cela n'avait d'ailleurs guère d'importance. S'il ne parvenait pas à s'en souvenir et qu'il y avait effectivement eut un précédent, c'était que celui-ci n'était pas suffisant...

Finalement, il ferma un instant les yeux, laissa le silence sur lui couler un long moment avant de déclarer : « Je suis incapable d'y voir clair en l'instant. Je suis fatigué, épuisé, ébranlé... et toi aussi. Tout cela... a besoin d'être décanté, digéré et pensé. Nous avons tous les deux besoin de lécher nos plaies avant toute autre chose, et ré apprendre à agir l'un envers l'autre... Nous avons besoin... de nous comprendre, de nous apprivoiser, impossible de forcer l'autre tu le sais. Et tu sais... tu le sais désormais, je n'ai nulle notion d'amour tel que tu le voudrais, je suis malade et éprouvé... et différent, simplement. Je ne peux rien offrir de plus que ce que je viens de donner... je prendrais sur moi et je m’accommoderais de ce que j'aurais... du moins j'essayerais... que puis-je dire d'autre ? » Une nouvelle exhalaison le quitta, aussi douloureuse que salvatrice. L'expression de calme sans joie aucune, mais paisible, qui lui vint s'accompagna d'un simple souffle : « Mais je doute jamais cesser de souffrir... » Il n'y était pas destiné. Parce que ce qui pourrait lui être un bonheur venait avec le prix du confort d'autrui et jamais il ne voudrait faire pareil tort à qui que ce soit, surtout pas quand il était incapable de l'apprécier à sa juste valeur. « Peu importe. C'est assez... j'ai besoin de repos. Tu as besoin de repos... » Son contact s'allégea contre ses doigts, sans qu'il les retire tout à fait, ne sachant trop s'il devait le chasser de son côté ou l'y conserver. Finalement il déglutit, et profita d'être bien trop abattu pour éprouver encore du dégoût, pour lui prendre simplement la main.

Jeu 11 Fév - 23:12
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Morghann Earl
L'étrange sous la normalité : Enfant cadet du Patriarche Earl, il est un héritage refusé, s'extrayant de la nécrose gangrénée de sa famille.
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Morghann Earl
Une part de lui avait voulu se soulager à l'idée qu'Elie ne puisse attirer son frère d'une quelconque manière. La ciselure était nette, sans accro, parfaitement imperméable. Elie était son mentor, parfois un ami. Une part de lui éprouvait cette satisfaction possessive, crainte étouffée que de voir son frère lui être ravi, par un démon de surcroît, et par celui qui lui avait déjà fait tant de mal depuis sa naissance même. Une autre part de lui se décourageait de pouvoir un jour soigner son frère, si nul ne pouvait lui montrer la lumière alors il craignait de ne jamais pouvoir l'extirper du sable mouvant dans lequel Howard était si enlisé. Satisfaction et déception à la fois, l'un étouffant l'autre et créant l'autre en un cercle vicieux dont Morghann ne voyait pas le bout. Alors non, il lui faudrait être honnête : il n'était pas au clair avec ses propres sentiments. Partagé, il se trouvait entre deux feux, deux désirs opposés que rien, ou si peu, ne semblait pouvoir coordonner. Il avait le sentiment d'avancer dans le brouillard. C'était éprouvant et il n'avait pas la moindre idée de ce à quoi il aboutirait finalement. Son cœur se serra, lourdement, dans sa poitrine à l'entendre lui dire qu'il ne pouvait aimer, l'aimer en retour, de la même manière que le cadet l'espérait. Si elle était douce, la claque demeurait ce qu'elle était par essence : quelque chose d'ébranlant, et dont il n'était pas tout à fait certain de sortir indemne. Il s'interrogeait lourdement sur ses sentiments, recherchait si d’amalgame ils n'étaient pas le fruit, ou de folie, d'une bizarrerie. Tout n'était que cacophonie, au loin de l'harmonie à laquelle il avait toujours aspiré. Il se sentait lourd, le cœur aux aboies, délirait-il pleinement ?

La main de son jumeau eut du mal à se refermer sur la sienne et il ne savait que trop bien se contenter des efforts qu'il faisait pour lui, pour le toucher. Patient, il avait observé ses doigts, cette dextre tremblante et l'avait laissé faire. Il fallait que ça vienne de lui. Le forcer n'avait jamais été la meilleure de solution et s'il en avait été capable, il en aurait fondu en sanglot lorsque sa main cessa de s'enfuir pour rester là, enlacée à la sienne. Doucement, sans force, il avait confirmé son étreinte. La fenêtre s'était fermée, dans son dos, et, alors qu'ils reposaient sur les draps humides, une couette sortit de l'armoire pour les couvrir tout deux et les protéger un tant soit peu. Deux perles noires s'étaient noyées dans celles qui lui faisaient face, sombrant dans ses abîmes, sans promesse de retour. Sa main, au creux de la sienne, il laissait au loin ce qui alourdissait son cœur, il abdiquait. Il avait perdu. En son for intérieur, il espérait toujours, comme un bateau aux voiles déchirées, la coque percée mais qui ne coulait pas... Pas encore. Peut-être lui ferait-il découvrir l'amour, son sens, sa vérité. Cela prendrait des jours, des mois, sûrement des années. Il ne voulait pas abandonner. Abdiquer pour cette fois était suffisamment douloureux, abandonner définitivement aurait été sa perte. Chien abattu, il léchait ses plaies, et pourtant, sensiblement, à sa présence il tremblait. Il fermait les yeux sur l'avenir et se contentait du présent. Il avait son jumeau à ses côtés, sa main dans la sienne. « Je me sens bien... Là... » fit-il alors, emporté par le sommeil.

Mar 16 Fév - 20:40
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Insane [Howard] | Terminé
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