Les poulains de Last End [Sarah]

"- Sarah ?"

L'après-midi s'écoulait avec une lenteur qui laissait imaginer Chronos comme un dieu excessivement paresseux, actuellement affalé dans son canapé. Max ne devait pas être loin de lui ressembler. La principale différence était que, pour Max, ce n'était pas volontaire, et loin d'être de la paresse (et que plutôt qu'un canapé, c'était un fauteuil). L'heure du repas passée, l'instant de flottement qui inévitablement suivait paraissait s'éterniser. Max s'entraînait à la lecture, se faisant les crocs sur un magazine pour jeunes humains; ce qui, dans le même temps, lui permettait d'apprendre quelques anecdotes sur leur monde et mode de fonctionnement. Mais l'heure n'était plus à la lecture: l'heure était aux jeux ! Alors pourquoi tout était aussi calme ? Il n'y avait aucun bruit, pas même dehors. Le tic-tac qu'émettait la grande horloge de bois sombre était bien esseulé - et rappelait à l'each la terrible absence de son maître.
Il y avait plein de choses à faire, pourtant ! Jouer sagement dans sa chambre, aller se balader dehors... Il aurait même pu aller voir Isha, si ce dernier n'était occupé aujourd'hui. Mais ces derniers temps, Max se sentait tout chose. Comme si découvrir de nouveaux objets avait moins d'intérêt, comme si briser ces mêmes objets était moins drôle, comme si entendre Sarah râler avait perdu de son cachet. Ce n'était pas une vie d'each, ça ! L'occasion ne s'était pas encore présentée d'en parler à son maître et, à vrai dire, ce n'était peut-être pas une bonne idée. Max vivait toujours avec la peur de l'abandon. Si Eurynome s'apercevait que sa monture était malade, que ferait-il ? Mieux valait d'abord tenter de s'en sortir seul.
Croyant percevoir un grognement plus ou moins lointain, Max déduisit que son appel avait été entendu, et que Sarah devait être dans le coin. Peut-être que son plan pourrait marcher...

Sa forme humaine se leva donc, dans un élan de courage, laissant sa lecture sur un coin de guéridon, avant de s'orienter vers sa chambre. L'antre aux mille merveilles... Que de babioles diverses s'entassaient là désormais ! Mais la babiole qui intéressait Max aujourd'hui avait une place toute particulière: c'était son cadeau de Noël ! Ses papattes se saisirent donc de ce bel instrument: en admirant la silhouette effilée, le poids léger, les doubles hélices... Comme on le lui avait appris, Max changea les piles, mettant celles rechargées dans la machine et sa manettes, laquelle arborait fièrement deux joysticks. Hauteur et direction. Ayant récupéré cela, l'each enfila ses bottes, un manteau vaguement chaud, d'aller tranquillement vers le bureau et Sarah, et toquer à la porte.

"- Sarah... Tu ne veux pas faire une pause ?"

Sa mine était celle d'un grand enfant, une mine un peu penaude, qui demandait tout gentiment, presque avec un peu d'inquiétude. L'hélicoptère contre son coeur ne laissait aucun doute, néanmoins, sur la demande à venir.

"- Pour jouer avec moi... S'il-te-plait. Juste cinq minutes, allez..."

C'était désormais une supplique, accompagnée de petits mouvements d'épaules et de papillonnements de paupières sur un grand regard brillant.

C'est fou ce que tout était calme ces derniers jours... Après avoir reçu ses cadeaux de noël directement par le Père Noël pendant son bain, Sarah n'en avait cru qu'à moitié jusqu'à ce qu'elle le contempla de ses propres yeux : Max avait finit de faire ses bêtises. La première semaine avait été sans anicroche et dans un silence reposant mais il fallut que la seconde s'écoule pour que la rouquine comprenne vraiment que son vœu avait été exaucé : pendant un mois, l'each ne ferait aucune bêtise, il sera même plus sage qu'une image ! Impressionnant ! D'ailleurs, c'était fou la vitesse à laquelle ses migraines s'étaient estompées... Alors qu'elle en avait au minimum une fois par jour, voilà que la dernière remontait à au moins... Et bien... Euh... Depuis la remise des cadeaux en fait.

Tout simplement stupéfiant...

Délaissant le visionnage du paysage par sa fenêtre, Sarah se remit dans ses dossiers en souriant, l'esprit beaucoup plus apaisé alors qu'elle termina tranquillement son travail. Peut-être même qu'elle arriverait à prendre de l'avance vu que le patron était partit faire elle ne savait quoi... Et elle ne savait pas du tout ce que faisait Max d'ailleurs mais ce calme et cette paix, rassurée par la longévité des objets de valeurs, lui suffisait largement.

Enfin jusqu'à ce qu'un appel la sortit de ses pensées... Il aurait été étonnant que l'each soit tranquille davantage. Mais bon, elle ne devrait pas grogner, ça faisait quand même deux semaines qu'elle n'avait pas entendu parler de lui... Allez, essayons d'être gentil un minimum, ça ne payait pas de mine après tout. Quand elle entendu le grincement de la porte de son bureau, elle leva son nez de ses papiers et le regarda calmement, soupirant discrètement.

Entendons-nous bien, jamais elle ne fera une annonce officielle, même pas sous la menace et la torture elle le dirait !, mais le manque des conneries de Max donnait un certain vide et une absence d'intérêt dans la vie de tous les jours. C'est fou ça... Mais en fait, notre rouquin s'ennuyait, tout simplement. Et de voir la bouille de l'each toute tristounette et malheureuse, si ennuyée et mélancolique, au bord du désespoir absolu... Bah ça l'emmerdait profondément. C'est vrai qu'il semblait vraiment dans un état lamentable, si vide de vie, une marionnette dont on venait de couper les ficelles... C'était profondément déprimant de voir cet être si morne hanter le domaine du maître...

Du coup, si l'habitude lui aurait fait dire non pour l'envoyer paître assez vertement, et bien, étonnamment, elle se contenta de le regarder longuement avant de refermer les pages de son dossier et de se lever. Il valait mieux ne rien dire, elle se surprenait elle-même... Calmement, elle se rendit dans sa chambre pour récupérer son manteau et ses bottes, les enfilant avant d'aller chercher une grosse écharpe bien épaisse qu'elle enroula autour du coup de Max histoire qu'il n'attrape pas froid en plus de sa morosité. Il était déjà bien atteint comme ça...

Une fois qu'elle jugea le poney assez couvert, elle ouvrit la porte et marcha tranquillement jusqu'au parc du manoir en vérifiant bien qu'il était à ses côtés avant de l'observer en silence jouer avec son cadeau de noël.

L'écharpe lui donnait l'impression d'avoir un cou plus gros que son ventre tant elle était épaisse, tant son visage manquait de se noyer dans le tissu. C'était encombrant, et Max ne voyait pas l'intérêt d'un tel attirail ! Le froid, c'était un détail, et son manteau lui suffisait amplement à ne pas en être handicapé. Quelques grognements de mécontentement émanèrent donc de l'amas de tissu, mais sans insistance. Il n'aurait pas fallu que Sarah revienne sur sa décision, et qu'au lieu d'une écharpe ce soit la solitude qui soit passée autour de son cou pour le réchauffer !

Max ne remua pas, donc, prit juste soin d'écarter l'hélicoptère de la zone dangereuse où l'écharpe menaçait de l'abîmer. Sage, il fallut que Sarah ouvre la porte pour que ses pas suivent les siens. Même dehors, le long de la route, aucune folie ne fut exécutée. L'hélicoptère resta sagement sous son bras. Pas question d'en jouer avec les passants qui venaient, et les voitures: son jouet était bien trop précieux ! L'each resta également silencieux, craignant toujours de perdre Sarah sans même avoir eu le temps de profiter de cette sortie si rare. À vrai dire… C'était bien la première partagée ainsi entre eux. Habituellement, Sarah ne lui accordait d'attention que parce que le devoir le nécessitait. Ils servaient le même maître, mais avaient des façons d'être si différentes que passer un moment agréable en présence de l'autre était difficilement envisageable. Max avait dévisagé la silhouette de Sarah, profitant d'un instant où le regard de l'humaine se portait dans une direction opposée. Qu'est-ce qui avait bien pu changer ? Etait-ce elle, ou était-ce sa propre personne ?
Un bref instant, l'idée lui vint que Sarah ait pu sentir que ce n'était pas la grande forme, et l'avoir pris en pitié. Y songeant, l'each prit immédiatement une mine renfrognée, sans raison apparente. De la pitié ! Hors de question ! C'était ce que l'on accordait aux faibles, la pitié, à ceux qui ne savaient s'en sortir par eux-mêmes… Bon, pas moyen de savoir si c'était bien ça. Max reprit assez vite sa mine habituelle.

Lorsque le parc fut en vue, l'each dépassa son aînée humaine pour y arriver avant elle. Là, l'hélicoptère fut posé à terre, et allumé. La manette, allumée également, commença à diriger le petit appareil, l'amenant dans les airs, plus ou moins adroitement. Les "regarde, Sarah, regarde !" se multiplièrent, l'each voulant poser l'hélicoptère sur un banc, ou effrayer un oiseau ou chien avec, ce qui lui arrachait de vrais gloussements de rire. Mais bientôt, l'hélicoptère se posa non loin d'eux, et Max vint mettre la manette entre les mains de Sarah.

"- À toi !"

Maintenant, l'hélicoptère devait voler sans avoir besoin de ses papattes pour le guider. Max voulait courir après ! Et admirer les maladresses que Sarah ferait, fatalement. Ses doigts vinrent guider les siens dans un premier temps, lui montrant comment choisir la hauteur de l'animal, comment le diriger. Dès qu'elle eut reçu toutes les instructions, l'each commença à suivre le petit appareil dans certains de ses vols, amortissant son atterrissage de temps à autre.

"- Eh, Sarah ! Si tu l'envoies dans un gamin, c'est cent points ! Et si j'arrive à l'attraper… C'est cent points pour moi !"

Peu à peu, Max retrouvait son énergie et la lumière qui était sienne. Quelque part, ce n'était pas parce que les bêtises lui étaient interdites qu'elles étaient interdites à Sarah !

Il avait bien émis quelques protestations à l'écharpe mais sans plus que ça dans le fond... C'est fou à quel point il était devenu docile cet enquiquineur ! D'un côté, ça plaisait beaucoup à son instinct de prédatrice, mais d'un autre côté... Qu'est-ce que c'était chiant de le voir en mode larve, c'était ennuyant et elle s'ennuyait ! Mais bon, sait-on jamais, cette sortie lui ferait peut-être plaisir et le motivera un peu plus ? On verra bien.

De toute façon, jamais elle n'avouerait à haute voix que l'each lui manquait...

Remontant le col de son manteau pour se protéger du vent frais d'hiver, elle vérifia qu'il était près avant de lui ouvrir la porte pour la refermer derrière eux, marchant tranquillement jusqu'au parc en regardant distraitement ce qu'il se passait autour d'eux, les mains dans les poches alors qu'elle s'avançait tranquillement sans se presser. Elle ne sortit de ses pensées que lorsqu'elle vit une petite fusée trottiner un peu plus vite pour la dépasser et commencer à bidouiller avec son jouet, semblant de meilleur humeur. Trouvant un banc, elle croisa ses longues jambes, cuissardes talons aiguilles, fixant silencieusement Max qui tenait énormément à lui montrer toutes ses pitreries.

Pour un peu, il serait presque attendrissant... Ça devait ressembler à ça quand une mère regardait son fils... Enfin elle le supposait en tout cas.

Par contre, elle le toisa en haussant un sourcil quand il lui fourra la manette dans les mains. Non mais il était sérieux là ? Elle avait une tête de gamine jouant aux machins volants ? En plus c'était même pas un jeu qu'elle aimait.

« … Si tu veux. »

Bon, ne le contrarions pas sinon ça l'embêterait encore plus notre petite sorcière. Elle voyait d'ici et gros comme une maison sa moue de désespoir absolu, le regard tremblant et mouillé, reniflant en serrant piteusement son jouet contre son torse frêle... Effrayant. Soupirant, Sarah en regardant les manettes, écoutant les instructions avant de faire des essais, une moue agacée aux lèvres alors qu'elle n'y arrive pas du premier coup.

Ce que ça pouvait être agaçant !

Claqué la langue, énervée, elle se redressa sur le banc en croisant ses jambes dans l'autre sens avant de sourire de satisfaction : il n'était pas dit qu'un jouet allait la dominer de façon si humiliante ! Non mais dites donc ! Faisant des cercles pour tester et vérifier que c'était bon et se tourna pour regarder Max en haussant de nouveau le sourcil.

« Essais donc de l'attraper. Tu n'auras aucun point tellement je suis plus doué que toi à ce jeu. »

Sarah fit une petite danse du sourcil dans sa direction avant de mettre l'appareil en altitude et de le faire aller à toute vitesse pour faire courir Max, toujours stoïque et digne, toute en retenu et en distinction, contrairement à lui.

Max galopait après l'hélicoptère, tout de joy, tout bondissant et couinant. Ses bonds faisaient jaillir la neige autour de ses jambes comme si elle n'avait été que de l'eau, laissaient des traces sans formes sur l'étendue blanche. De temps à autre, son faible corps d'humain tentait maladroitement de se propulser dans les airs, sans jamais parvenir à s'élever comme l'aurait fait son corps d'origine. Jamais jusqu'alors cela ne lui avait sauté aux yeux. Petit à petit, l'each réalisait que marquer des points allait être plus complexe que prévu. Loin d'abandonner tout de suite, ses grandes papattes s'appuyèrent sur divers supports, bancs, cailloux, murets et arbres, pour se donner un peu d'élan et s'élancer un peu plus haut. Cela fut insuffisant. Mentalement, Max se retrouva à maudire plusieurs fois l'écharpe énorme qui l'encombrait, et son manteau, et tous ces habits humains ! C'étaient sans doute ceux-là qui l'empêchaient de bondir de façon convenable !

Après un bref instant durant lequel Sarah s'était amusée à le faire courir en rond, Max marqua une petite pose, reprenant son souffle, assis dans la neige. L'eau glaciale qui imbiba son pantalon ne parut pas l'ennuyer. Son regard passa tout autour d'eux. C'était malheureux tout de même, tous ces humains, là, qui passaient, et qui l'empêchaient de jouer tranquillement, sous forme poney...! Ah si le Secret venait à être révélé, un avantage serait que potentiellement ses transformation n'aurait plus à se faire dans l'ombre. Peut-être... Mais ce n'était pas assez convaincant. Max voulait que ses proies puissent encore venir à sa rencontre de façon inoccente, sans savoir... Et à cette fin, le Secret était vital.
Tous ces humains, tous ces humains... Ah, peut-être pas celui-là. Max l'examina de haut en bas, de bas en haut, comme un objet que l'on s'apprête à acquérir et dont on vérifierait l'état. La peau très pâle l'avait alarmé. L'absence d'ombre confirma son hypothèse. Vampire. Copain ! Car c'était bien connu: les copains du Secret jouaient plus facilement que les humains ignares. En tout cas, ils posaient moins de questions.

Dès lors, ce fut la fin. L'each se remit vite debout sur ses papattes, son sourire retrouvé, et s'élança vers ce pauvre individu qui n'avait sans doute rien demandé. L'attrapant par le poignet, sans bonjour ni s'il-vous-plait, si ce n'était ses petits yeux papillonnants, charmeurs. Lui faisant lever la main, Max héla Sarah:

"- Eh, Sarah ! Mille points et un tube de colle si tu touches monsieur-javel !"

Relâchant ledit javel, avec un mouvement d'épaules d'enfant faussement sage, l'each s'excusa à sa façon:

"- Soyez fort. La douleur n'est qu'une sensation."

Les maigres rayons du soleil hivernal venaient caresser la veste de Guillermain alors qu’il marchait nonchalamment dans les rues enneigées. Il avait longtemps cru que ceux-ci le consumeraient s’il osait veiller trop tard (ou trop tôt, selon l’heure du réveil) et qu’il se faisait rattraper par l’aube mais il avait appris par le plus pur des hasards que ce n’était qu’une fable destinée à protéger le Secret. Oh bien sûr il ne sortait pas souvent et il faisait toujours attention à ce que le temps soit maussade pour que sa différence n’éclate pas de façon trop éclatante, mais il aimait s’accorder de temps en temps de petites promenades fortuites, au calme. Bien qu’insensible au froid il avait tout de même enfilé un pantalon épais en tissus et un pull aux motifs ridicules comme on en voit si souvent en période de noël. Malheureusement celui-ci était dissimulé par la veste d’hiver de Guillermain qui était dans des tons plus sobres et collant plus à l’idée des vêtements que devrait porter un vampire. Ses gants de cuir étaient assortis à la veste. La seule touche fantaisiste visible de son attirail était son écharpe aux couleurs rouge et or, qu’il portait négligemment autour du cou. Ainsi il n’attirait pas trop les regards et il pouvait se fondre plus facilement dans la foule pour profiter de cette journée qui s’annonçait délectable.

Sans ombres au tableau (ni au sol d’ailleurs, mais la neige serait son meilleur atout pour se camoufler) il avait décidé de profiter d’un bref temps de répit, d’un court temps libre pour revisiter la Grande Place une énième fois. Pas vraiment pour observer l’architecture des lieux car il la connaissait par cœur depuis le temps, mais plutôt pour s’imprégner de cette bonne humeur flottante dans l’air pendant cette période d’après fêtes, ce parfum de féérie qui n’était pas (que) magique pour une fois. C’est pourquoi ses pas menèrent le vampire dans une position plus en retrait d’où il pouvait aisément observer les gens qui sortaient en famille la tête remplis de résolutions mais aussi les bambins qui se réunissaient pour partager leur émerveillement face à la foultitude de nouveaux jouets qui allaient les aider à bâtir de nouvelles aventures. Parmi toute cette masse bouillonnante de vie il y avait aussi des couples, heureux de pouvoir s’échapper pendant quelques heures de la belle-famille de l’un pour avoir un instant qui n’appartient qu’à eux.

Son regard s’était perdu dans la contemplation lorsque son portable vibra. Il regarda le message et se rendit compte de l’heure. Il n’était pas pressé mais il aimait être à son club en avance, aussi se mit-il en mouvement. Ce n’est qu’arrivé à l’autre bout de la grand place qu’un jeune homme gracile vint l’aborder. Enfin aborder… C’était vite dit, la personne lui avait saisi la main sans autre forme de procès et l’avait levée à la manière d’un arbitre à la fin d’un match de catch. Il n’avait pas eu le temps de réagir que celui-ci hélait déjà sa compagne. Il les avait vus arriver, ce couple étrange et atypique. Au vus des comportements, ils avaient dû fêter noël dans sa famille à elle, et les frasques de son compagnon ne devait pas vraiment plaire à ses parents.
Guillermain cligna des yeux pour être sûr d’avoir bien compris ce que venait de lui dire cette étrange personne qui avait enfin lâché son bras avant d’entendre le petit vrombissement de l’hélicoptère avec lequel ils jouaient depuis le début. L’engin s’approchait dangereusement du vampire et il devait choisir vite. Certes il aurait pu disparaître mais au milieu de la foule, il devait déjà paraître étrange (sans que les gens n’arrivent forcément à voir pourquoi, on pense rarement à chercher l’ombre d’une personne) et l’hurluberlue avec ses grands cris avait déjà fait se retourner quelques têtes. Il aurait aussi bien pu briser le jouet d’un revers de main, mais ça risquait de faire un esclandre et il n’en voulait pas. Glissant à la dernière seconde il passa sous l’objet volant et profita du temps qu’il fallait pour faire faire un demi-tour à l’engin pour venir s’assoir à côté de la jeune femme.

- C’est fou les progrès de la technologie, vous ne pensez pas ?

Soyons honnête, bien qu'elle ne l'avouerait jamais même sous la torture, le Max gonflant à souhait lui manquait. La maison paraissait tellement silencieuse et vide, si froide... Sarah détestait cette ambiance. Du coup, quand il était venu la voir avec sa petite moue et son regard tout mouillé, elle n'avait pas eu le cœur de lui refuser ça... C'est pas pour autant qu'elle s'attendrissait et se laissait aller hein ! Elle ne pensait seulement qu'à son bien-être mentale et personnel, rien de plus ! Et encore moins des humeurs du poney des marais ! Non mais dites donc ! Elle était une whiteman tout de même ! Enfin.

Du coup, ils partirent tous deux au parc du coin, marchant tranquillement et bien couvert pour le temps légèrement humide et frais de l'hiver pour l'instant doux. S'asseyant sur un banc, croisant ses jambes en époussetant du bout du de la main gantée, la rousse regarda en silence l'each jouer avec son hélicoptère avant de se prêter plus ou moins avec bonne volonté à son jeu. Si ça pouvait lui faire plaisir... En tout cas, elle trouva cela finalement amusant quand elle trouva une utilité à ce jeu : faire tourner le destrier en bourrique pendant des longues minutes. Qu'est-ce que c'était bon...

Alors qu'il prenait une pause, l'hélicoptère sagement tournant autour de sa tête, Sarah haussa un sourcil de surprise en le voyant kidnapper littéralement quelqu'un. Allons bon... Qu'est-ce qu'il mijotait ? Elle devait essayer de viser l'homme avec le jouet ? M'enfin, si ça lui faisait plaisir. Elle haussa les épaules et mit l'hélicoptère en marche, avant de se mettre à sourire quand il se glissa sous le jouet pour s'asseoir à ses côtés. Frimeur... Mais ça avait le mérite de la faire sourire pour le coup.

« Au plus grand désespoir de mon patron et de moi-même. Mais, étant donné qu'il est sage, on peut bien se permettre d'être plus souple avec lui. »

S'adossant contre le banc, elle s'amusa à poursuivre Max pour se remettre à le faire courir. C'était un jeu qu'elle appréciait énormément.

« Je suis d'ailleurs navré qu'il vous ait prit pour cible, il a des manières qui lui sont propres et il est difficile de le garder concentré sur quelque chose plus de cinq minutes. »

Un sourire amusé, elle se tourna pour le regarder attentivement. Il avait une drôle d'allure celui-là... Quelque chose en lui faisait résonner en elle ses sombres instincts... Mais quoi, elle ne savait pas.

« Je suis Sarah Whiteman et lui c'est Max Adams. Enchanté monsieur... ? »

Peut-être le connaissait-elle ?

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{hrp: désolée pour le retard les enfants :/ j'espère que ça vous va sinon n'hésitez pas à me le dire :)}

Oh bah non, eh ! Max émit une sorte de petit cri/grognement mécontent. Ignorant si les humains pouvaient faire preuve d'autant de souplesse et de rapidité, ne pouvant donc hurler à la triche, l'each pestait mentalement après l'injustice dans le mouvement du vampire. S'il n'y mettait pas du sien, comment ses camarades pourraient jouer dans de bonnes conditions ? En plus, pour une fois, la trajectoire de Sarah était correcte ! Quelques instants plus tôt, cette trajectoire s'était faite malhabile, ou étrangement répétitive. Mais là, cette courbe, cette précision, cette détermination…! C'était un sacrilège !

La mine boudeuse et agacée, Max enfonça ses mains dans les poches de son manteau, donna un coup de pied rageur dans un peu de neige (coup de pied qui, en revanche, singeait plus les gestes d'impatience équins que les joueurs de ballon humains, cherchant à s'enfoncer dans le sol plutôt que vers le ciel). Ses pas le rapprochèrent du duo qui s'était formé sur le banc. Un bref instant Max songea que si le bonhomme espérait quelque lien avec Sarah, il serait sans doute bon de lui évoquer le fait qu'elle avait déjà eu quatre maris. L'instant suivant lui rappela qu'entre vampire et sorcière, la liaison n'aurait que peu de sens.
Attendez: Sarah venait de parler de sagesse ? Et… C'était pour cela qu'elle jouait avec lui ? Max observa ses mains, en proie à de profondes pensées sur ce qui était advenu de sa vie, et ce qui devait advenir. La sagesse.. C'était donc cela ? Cette sensation horrible et persistante qui freinait ses gestes et rendait le monde fade ? C'était le nom de sa maladie. Son coeur la refusait: sa vie ne continuerait qu'après une guérison salvatrice.

Il fallait néanmoins le reconnaître, cette maladie présentait ses avantages, dans ce qu'elle permettait d'obtenir. Sans doute était-il possible de concilier ces avantages avec sa guérison. De plus subtiles moyens, des manigances pour cacher ses jeux. Oui, ce devait être possible… Mais avant de penser à ces plans de façon plus approfondie, Max fut déconcentré par le passage d'un hélicoptère, que son regard et son attention suivirent instinctivement, confirmant sans le vouloir ce qu'énonçait alors Sarah quant à sa concentration.
Néanmoins, avoir ainsi songé avait apaisé l'énergie qui normalement galopait en ses jambes -avec l'aide, peut-être, d'un peu de fatigue. L'each ne poursuivit pas le petit jouet. D'autres envies étaient venues prendre le dessus, plus directes que celles qui pouvaient être réfléchies dans les ombres nocturnes, aux instants de calme et de solitude. Max voulait… Voler. Bon, cette envie-là resterait frustration jusqu'à ce que le sort lui permette d'imiter Pégase. En revanche, l'envie de contrôler, de voir ses gestes influer sur un objet distant… Cette envie-là pouvait être assouvie.

"- Sarah ? Je peux reprendre la manette ?"

Sans attendre son avis, la petite télécommande quitta les mains de Sarah pour se réfugier au creux des mains de Max. L'each s'assit, sagement, aux pieds -sur les pieds- de ses deux camarades, tendant l'oreille à leurs histoires d'adultes sans en donner l'air.

Son entrée en matière avait fait mouche et cela amusa quelque peu le vampire. Pourtant il ne se mit pas à rire, c’est tout juste si on put déceler une ombre de sourire au moment où il s’assit. L’avantage des bancs c’est que leur ombre est assez imposante pour masquer l’absence de celle d’un vampire, du moins dans les conditions climatiques où Guillermain avait décidé de sortir. Il trouva la femme charmante mais se concentra en même temps qu’elle sur le petit appareil télécommandé qu’elle faisait virevolter nonchalamment.
Au ton qu’elle employait Guillermain avait une idée un peu plus précise du genre de couple que formaient ces deux étranges comparses, il éprouvait une sorte de compassion mêlée de nostalgie en voyant ce couple si plein de jeunesse et de joie de vivre au grand jour. C’est ce moment que choisit Sarah pour se présenter à lui. Ils n’étaient visiblement pas encore marié, ce qui n’avait rien d’étonnant au final, ils étaient encore jeunes et les mœurs avaient évoluées depuis sa propre jeunesse.

« Enchanté, je me nomme Guillermain Adama, quelle heureuse rencontre, c’est la magie de noël ! »

« Ne vous en faîtes pas, tout le monde peut accepter une petite taquinerie en cette période hivernale n’est-ce pas ? »

Le barman arborait un sourire enjôleur alors que le jeune homme venait s’installer à leurs pieds. Il avait une attitude bizarre ce garçon, Guillermain se serait attendu à ce qu’il se montre protecteur, possessif voir même jaloux alors qu’il discutait avec son aimé mais non, il se comportait bien sagement comme l’aurait fait un gosse ayant eu le droit de sortir pour noël. Cette fameuse Sarah lui avait-elle fait peur ? Il en doutait mais il y avait eu comme un changement d’attitude assez brutal chez cet éphèbe et le vampire avait déjà pu voir ce genre de contrecoup. Décidément la fin d’année est la meilleure période de l’année.

« Je tiens un nightclub aux quartiers des plaisirs, si un jour vous souhaitez danser plutôt que de sortir en couple n’hésitez pas à passer. Vous habitez Last End depuis longtemps ou c’est juste un voyage de noël ? »

La question était adressée aux deux personnes mais Guillermain avait la prémonition que le dénommé Max attendrait l’aval de sa compagne pour s’exprimer.

De le voir grommeler de protestation alors que la pauvre victime esquiva habilement l'hélicoptère, cela fit rire la sorcière qui voyait Max fixer boudeusement sa proie. Alors qu'il revenait vers eux, l'attention de la rousse fut distraite par son compagnon de banc qui se mit à lui parler, hochant la tête en délaissant un peu le jouet et son propriétaire. Enfin, jusqu'à ce qu'il lui parle de nouveau. Se détournant pour l'observer, elle lui laissa reprendre les manettes sans discuter, plissant légèrement le nez en le voyant redevenir tout morne et tristounet. Hmm... Vivement la fin du mois ! Du coup, même pas elle protesta quand Max s'assit littéralement sur leurs pieds, caressant juste distraitement ses mèches avant de le regarder faire bouger l'engin volant tout en continuant de discuter avec l'homme qui les avait rejoint.

« La magie de Noël ? Oui assurément, Monsieur Adama. »

Un petit rire cristallin aux lèvres, la rousse continuait pourtant de fixer Max.

« Bien entendu. En temps normal vous auriez eu d'ailleurs un meilleur public mais il a le sang froid pour le moment. »

Du sang... Il n'avait pas d'ombre ! Son regard s'écarquilla légèrement avant de se faire plus acéré, ne disant rien. Alors donc, un vampire discutait tranquillement avec eux... Pourquoi pas après tout, il était de bonne compagnie. Sans compter qu'il possédait un certain charme plutôt agréable. Mais sa réplique d'après eut le mérite de lui court-circuiter les neurones !

« Je vous demande pardonner ?! »

Gloussant et toussant, Sarah finit par secouer la tête en levant les yeux au ciel, essuyant une larme de rire.

« Je suis libre comme l'air de ce côté très cher : Max n'est absolument pas du tout mon compagnon. Il possède en temps normal un karma et un caractère qui me navre totalement. »

Mais ça ne l'empêchait pas d’ébouriffer affectueusement la crinière de l'each. Et c'était juste pour lui remonter le moral ! C'est pas du tout avec de la vraie affection ! Non mais oh ! Le nez légèrement pincé, elle délogea ses pieds de dessous son fessier équin pour croiser les jambes dans l'autre sens, replaçant ses pieds sous Max.

« Mais sinon oui, je connais plutôt bien le quartier des plaisirs. Comment se nomme votre club ? Je viendrais sûrement y faire un tour à l'occasion... »

Le regard pétillant de chaleur et de prédation, Sarah se tourna vers lui pour l'observer attentivement, pensive.

« J'ai toujours grandit à Last End pour ma part. Et vous ? Cela fait longtemps que vous êtes établis ici ? »

Bien que de prime abord on pouvait penser qu'elle se concentrait entrièrement sur le vampire, elle n'en délaissait pourtant pas l'each, le guettant du coin de l'oeil tout en retirant des poussières ou des flocons de neige de sa tenue provocante malgré le long manteau de cuir bien épais pour lui tenir chaud.

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{hrp: désolée pour le retard :/}

Le sang froid, c'était peu dire… Pouvait-on seulement parler de sang ? Le sang impliquait la vie, et Max ne se sentait pas vraiment en vie lorsque l'envie se dérobait de profiter du monde, d'en apprécier les facettes, de jouer avec lui et ses créatures, de jouer de lui et de ses créatures. Un soupir las s'échappa de l'each, qui remua la tête pour éloigner la main de Sarah de sa crinière, mollement. C'était mieux quand c'était Elie qui touchait ses cheveux. Néanmoins, un détail n'avait pas échappé à la petite tête brune: Sarah avait été sensible au changement de son attitude. Le maître l'avait-il été aussi ? Max ne l'espérait pas. Il faudrait penser à jouer la comédie…
Le petit hélicoptère vint se poser plus ou moins habilement devant le trio. Max s'en saisit, admira à nouveau ses lignes, à ses songes. Sarah avait remarqué, mais… Cela ne paraissait pas tant l'inquiéter. Il en résultait que l'each se sentait seul. Habituellement, cela ne l'ennuyait pas, mais là, c'était comme si le besoin d'avoir du soutien était plus pesant. Dos à la sorcière et au vampire, Max affichait une mine mélancolique, donnant l'impression que son hélicoptère était son seul ami. Un instant, son attention les abandonna. Ce n'était, hélas, pas le bon instant, et l'exclamation de Sarah arracha un sursaut à la monture de la mort. Que s'était-il passé ? Ça avait l'air drôle, en plus ! Nul ne plaisantait sans Max !

La révélation vint. Max afficha un air choqué. Que… Quoi ? "Compagnon de Sarah" ? Certainement pas ! Elle marchait sur deux jambes, avait un faciès tout plat, un corps sans poils… Non, elle n'était pas du tout à son goût ! Comment ce vampire avait-il pu imaginer une telle infamie ? Ah. Peut-être que le mot "each uisge" n'était pas marqué sur son front de bipède. Si l'idée d'un tel couple répugnait à l'each, le rejet de Sarah, en revanche, accentuait plus encore son sentiment de solitude. Plus encore: cela blessait son amour-propre. C'est que les each se devaient d'être séduisants, sans quoi leur façon de chasser devenait ridicule.
Sa soudaine tristesse se mua peu à peu, s'imprégnant du sentiment d'injustice, de honte, l'envie de se venger dignement. Un grognement, un plissage de nez mécontent furent les signes annonciateurs, lorsque Sarah remua ses pieds sous ses fesses. L'expression de l'each s'était changée en un air renfrogné. Les engrenages de sa cervelle tournèrent un moment, jusqu'à ce que le programme de sa réaction soit établi. Ainsi, Sarah venait tout juste de questionner le vampire lorsque Max se leva, brusquement, le regard humide, entre la colère et la blessure profonde.

"- Alors c'est… C'est comme ça que tu me jettes ? Après tout ce qu'on a vécu ensemble ? Tu me renies devant le premier pâlichon venu, et tu le dragues copieusement devant moi ?" Sa voix contenait autant de peine que de violence, accusatrice. Ses paupières masquèrent ses yeux un moment. Lorsqu'elles se rouvrirent, des larmes coulaient sur ses joues. Max aurait définitivement dû se lancer dans le théâtre, ou le cinéma. Son petit corps tremblait."Qu'est-ce que j'ai fait pour mériter ça ? Sarah, l'amour que j'ai pour toi compte si peu à tes yeux ? Je compte si peu à tes yeux ? Qu'est-ce qu'il a de plus que moi ce cachet d'aspirine ?"

Guillermain avait beau réfléchir, il ne comprenait pas ce qu’il avait pu dire d’aussi hilarant. En effet pendant l’espace d’une seconde qui lui parut être une éternité il était dans l’expectative d’une explication de la réaction de la jeune femme aux cheveux de feu plutôt qu’à une réelle réponse à sa question. L’interrogation qu’elle lui retourna lui donna l’impression d’avoir commis une faute et ce n’est qu’après son explication qu’il put enfin mettre les différentes pièces du puzzle les unes avec les autres. D’ailleurs le choix du vocabulaire de la donzelle était soit maladroit soit très ciblé. Elle aurait pu dire simplement qu’ils n’étaient pas ensembles, que c’était juste un ami mais non, elle avait dit qu’elle était « libre comme l’air ». Son sourire était-il plus enjôleur que polie ? Guillermain n’aurait pas su dire. Il prit une pose légèrement plus lascive pour répondre :

« Le plaisirs coupables m’appartient, il avait subtilement forcé l’intonation sur le mot plaisir, bien qu’ouvert en journée il n’a pas beaucoup d’activités, pour s’en mettre pleins la vue il vaut mieux venir au cœur de la nuit. »

Lorsqu’elle tourna son regard vers lui, le vampire en oublia le jeune homme assis à ses pieds. Il sentait la Faim gronder en lui, il devait vraiment trouver un moyen de s’échapper, bien qu’agréable cette conversation lui faisait prendre du retard. Il remarqua tout de même que la femme ne le fixait jamais droit dans les yeux, avait-elle deviné ce qu’il était ? Il en doutait fort, après tout personne n’est au courant de l’existence des vampires. Il devait faire attention à ce qu’il répondait. Répondre qu’on vient juste d’arriver en ville c’est louche, répondre qu’on y est depuis 50 ans c’est encore pire…

« J’ai récupéré le club suite à un appel d’offres, cela fait quelques années que je vis à Last End ».

Cette fois Guillermain en était sûr, ses gestes avait tout fait pour attirer son regard vers une zone devenue stratégique au vues de son accoutrement. Le vampire comptait entrer dans la danse lorsque le dénommé Max se leva d’un bond. Il partit dans une longue tirade larmoyante. Guillermain aurait pu lui en vouloir pour la pique qui lui était destiné mais il comprenait ce petit homme qui venait de se faire jeter sans vraiment s’y attendre apparemment. D’un certains point de vue c’était triste, mais Guillermain ne pouvait que saluer le changement des mentalités, à son époque c’était impensable…

« Hum… Et bien je pense que vous avez des choses à vous dire, je vais vous laisser en discuter calmement entre vous le temps que vous régliez tout ça. »

Tout en parlant le vampire avait glissé loin du banc sur lequel restait une carte de visite de son club. Après quelques enjambées, il se retrouva hors de vue de cette étrange couple.
Il regarda son écran de téléphone pour s’apercevoir qu’il avait eu un appel en absence d’Alix qui était aujourd’hui responsable du plaisirs coupables jusqu’à son retour. Il devait se dépêcher de rentrer.

Le « Plaisirs coupables »... Elle en avait entendu parler mais elle n'y avait pas encore été...

« Je dois dire que c'est assez tentant... Je viendrais sûrement vous rendre visite un de ces soirs... »

Charmeuse, elle lui offrit un sourire frondeur avant de se figer de surprise. Alors celle-là, on ne le lui avait pas encore faite... Si elle était en couple avec Max... On ne la lui jamais encore faite celle-ci ! Continuant de glousser en secouant la tête pour répondre à cette homme, Sarah ne s'attendit pourtant pas à la réaction de l'each. Essuyant une larme de rire, la prise de parole de son comparse lui fit hausser un sourcil alors qu'elle se demandait bien quelle mouche lui prenait de faire une aussi mauvaise comédie.

« Cesse donc de dire des bêtises Max. Te voilà bien énergique tout à coup. »

Levant les yeux au ciel, Sarah était pourtant surprise de le voir aussi vindicatif. Nous n'étions pas à la fin du mois pourtant... A moins que cela n'entrait pas en corrélation avec le cadeau de Noël... Etrange.

« Je vous présente mes excuses pour son comportement Monsieur Adama et soyez assuré que je serais plus qu'heureuse de vous revoir un de ces jours. »

Toujours souriante à son attention, elle le regarda disparaître avant d'attraper la carte pour la glisser dans une de ses poches et de redonner toute son attention à l'each qui semblait satisfait d'avoir fait sa petite crise.

« Qu'attendais-tu à faire une chose pareille Max ? Tu as été extrêmement impoli avec ce charmant jeune homme. Nous savons très bien toi et moi que tu ne peux absolument pas du tout m'apprécier. Enfin... Maintenant que tu as joué avec ton hélicoptère et que tu as fait fuir l'homme, tu te sens mieux ? On peut rentrer à la maison ? »

Toujours distinguée et tranquille, Sarah le fixait sans sourciller, nullement en colère ou émotive, comme si tout cela lui passait bien au-dessus de la tête.

« A moins que tu ais le désir de faire autre chose ? Malgré ton coup d'éclat, cela ne me gêne pas de rester encore un peu avec toi. »

Histoire de voir que la malédiction tenait bien en place... Et puis ce calme each restait agréable même si l'énergique boule de catastrophe continuait de lui manquait quelque peu.

Max avait sagement attendu que le bipède couleur lait soit suffisamment éloigné pour changer du tout au tout. Sa mine de pauvre créature blessée, offensée, devint une mine réjouie de sale gosse, maléfique, à la bêtise réussie. La fierté l'émoustillait, faisait frétiller sa frêle silhouette sous ses habits d'hiver. D'un bond et d'un "sbom" de bois dur, l'each vint aux côtés de sa chère et tendre collègue, s'asseoir sur le banc, prenant soin de prendre toute la place qu'il restait, avec un soupir d'aise. Exagération ? Un peu. Surtout en découvrant, avec grande frustration, que Sarah ne s'énervait ni ne râlait. Ehbien, elle se ramollissait, la sorcière ?
Par cette pensée, Max avait espéré se faire rire mentalement. Ce qui advint fut d'un autre acabit: de l'inquiétude pour elle. Ce n'était là qu'égoïsme: comment se divertir avec un jouet préféré qui ne marchait plus ? elle paraitssait même prête à être patiente avec lui ! Où allait le monde ?

Pas très loin, sans doute. Max se surprit à réfléchir pour savoir qui de Sarah ou de la monture d'Eurynome avait changé de comportement en première. Normalement, c'était bien l'each. Bon… Soit il était vraiment temps de se reprendre, sans quoi Sarah allait s'imaginer en vacances, soit cette dernière subissait juste un coup de fatigue. Max n'avait pas quitté son sourire, malgré ces pensées. Ses jolis doigts caressaient amoureusement les formes de son hélicoptère. L'idée de s'appuyer de tout son poids sur la sorcière lui vint… Et s'effaça sous l'effet d'un étrange manque de motivation, lequel vint ajouter une goutte de plus à ce désespoir qui le rongeait. Ça ne voulait pas partir…
Il fallut répondre. Max se fit violence pour conserver au moins son sourire, son air faussement ravi. Question de fierté. De même, pas question de se laisser faire ! Ou du moins, pas totalement.

"- Allons, Sarah, tu sais que je t'apprécie, à ma façon ! Et puis, il n'était pas charmant. Il avait le visage plat, trop peu de poils…"

Et cinq appendices au bout de chaque sabot. Max avait vraiment du mal avec cela. Ses jeux de séduction auprès des bipèdes n'étaient que théâtre et tromperie: ils ne l'attiraient pas du tout.
Sarah lui offrait vraiment sa patience ? Bon ! Il était temps de lui faire regretter ! De lui montrer ! De faire à nouveau d'elle l'aigrie qu'elle devait être ! Il fallait lui dire… Lui dire… Lui… Rah, par Lucifer ! Les idées ne venaient pas. Et quand elles venaient, elles s'accompagnaient de ce poids si lourd sur sa motivation qui empêchait de songer plus sérieusement à la mise en oeuvre de la chose, comme si elle perdait automatiquement son attrait. Mais rentrer à la maison, sans rien faire de plus, ç'aurait été pire qu'une défaite ! Peut-être était-il juste possible d'épuiser Sarah. À voir. Bon, avant qu'elle ne crie victoire, mieux valait gagner du temps.

"- Je veux… Je veux jouer ! À… À…"

Peut-être était-ce pour cela que le ton que prenait la sorcière, celui par lequel on s'adresse à un enfant, n'avait pas blessé Max. Ou peut-être était-ce juste parce que son petit cerveau ne faisait pas encore l'association de certains mots avec un certain âge. Remuant, l'each se mit à genoux sur le banc, pour murmurer à l'oreille de Sarah un Secret:

"- Au vaudou !"

Avant de s'écarter, frétillant des épaules, tout sourire, mettant bien du talent dans son jeu d'acteur, et bien de la bonne volonté aussi. Son idée commençait à lui plaire.

"- Faisons souffrir quelqu'un !" C'était un murmure, encore, mais enjoué autant que cela était possible.

Bah tiens. Qu'est-ce qu'elle disait ! Dès le jeune homme complètement disparu de l'horizon, le faux air malheureux et dépressif de l'eau se dissipa comme un mirage de chaleur, dévoilant un visage parfaitement heureux et fier de sa bêtise. Sarah se doutait bien que tout ce cirque c'était du vent, il fallait avouer que c'était n'importe quoi ce qu'il disait, aucune crédibilité. Enfin, pour ceux qui connaissait l'animal, ce qui n'était malheureusement pas le cas pour ce pauvre homme pourtant si charmant... Peut-être qu'elle pourrait davantage s'en rendre compte en aller chasser sur son territoire... Une idée à creuser en somme.

Baissant les yeux vers Max, elle se résigna à passer à autre chose, lui demandant s'il voulait faire autre chose ou s'il préférait rentrer à la maison.

« A ta façon oui, on va dire ça comme ça... Et selon mes critères personnels, il me convenait très bien... C'est même le genre de proie que j'affectionne profondément. »

S'il espérait être crédible, il pouvait se gratter, c'était Sarah qui avait la palme d'or du faux semblant et de l'hypocrisie après tout. Levant les yeux au ciel en le laissant continuer de s'y croire, elle croisa ses jambes dans l'autre sens en attendant qu'il cesse de réfléchir pour agir et prendre une décision. Dire qu'elle était sur le point de chasser... Mais bon, le but de cette sortie restait l'each, il ne fallait pas perdre l'objectif de vue. N'empêche que son manque de motivation était déstabilisant et long ! S'il ne voulait pas continuer de jouer, ce n'était quand même pas si dramatique après tout, il suffisait simplement de rentrer à la maison et puis on en parlait plus. Bien qu'elle devait avouer que de le voir bredouiller et réfléchissant pitoyablement, c'était juste tout simplement magnifique...

Elle eut un sourire moqueur aux lèvres avant de le perdre quand il lui fit part de sa nouvelle envie de jeu.

« … Pardon ? Du vaudou ? »

Déjà que de le sentir un peu trop dans son espace personnel, son haleine douteuse chatouillant le lobe délicat de son oreille, c'était... C'était.... Brrrr ! Mais alors sa lubie chuchotée... Ça venait d'où ça encore ? Qu'est-ce que ça cachait surtout ? Bizarre... Sceptique, Sarah haussa un sourcil en le fixant avec surprise, méfiante et prudente, avant de hausser les épaules. De toute manière, c'était un art dans lequel elle excellait aussi ne ferait-elle pas la difficile, sans compter que c'était quand même son héritage et sa passion.

« Et bien si ça t'amuse, pourquoi pas oui. Tu veux viser quelqu'un en particulier ? »

Autant savoir si elle possède déjà une réserve de sang ou s'il fallait partir en chasse.

« Si tu choisis un parfait inconnu, il va nous falloir un prélèvement sinon ça ne marchera pas correctement. »

Toujours détendue et calme, Sarah attendit que Max poursuive sur son idée. A moins qu'il ne renonce parce que ça impliquait trop de choses à faire et penser avant de jouir de la douleur de la personne ? On verrait bien jusqu'à quel point il est motivé pour se distraire avec la rousse...

Ah, un jeu ! Voilà qui ravivait un peu les flammes qui brûlaient dans le coeur-océan de l'each. C'était d'autant plus excitant et amusant en devinant qu'un humain allait y souffrir. Max trouvait toujours délectable la souffrance de ces bestioles. Les cris, les gesticulations, les regards emplis de peur… C'était hilarant !
La monture du Maître frétillait donc, sur le banc, l'impatience l'agitant. Suivant les indications de Sarah, son regard balaya son environnement, à la recherche d'une nouvelle proie. Pas lui, pas elle, non, pas lui non plus… Etrange comme tous ces gens paraissaient avoir EXACTEMENT la tête de gens avec lesquels cela ne serait pas amusant. Si Max continuait à ne pas trouver chaussure à son pied, ils allaient bientôt devoir piocher au hasard des passants ! Ce pouvait être intéressant aussi. Une sorte de roulette russe… Sans russes. Savoir que la victime n'était choisi selon aucun critère autre que le hasard avait néanmoins un côté particulièrement jouissif.

L'each uisge en était là de ses réflexions lorsque, d'un coup, d'un bond, sa silhouette s'écarta de celle de Sarah. Au galop humain la monture d'Eurynome traçait une ligne droite entre elle et un humain. Arrivé à la hauteur de cette humain, à bonne vitesse, un nouveau bond la projeta sur son dos, envoyant le malheureux rencontrer le sol contre sa volonté.

"- AAAANDREW !"

Et ceci était le cri puant de joie de l'each, tout heureux d'avoir retrouvé son apprenti, son camarade de jeux. C'était un air triomphal qui s'était dessiné sur ses traits et dans son attitude. Le dos droit, le menton haut, Max profitait du fait de chevaucher enfin quelqu'un. Car en l'état actuel des choses, sa position était à califourchon sur le dos de l'affidé de son maître.
Après qu'elle se fut ainsi pavanée, veillant à ce que Sarah ait bien vu son exploit, la monture s'attacha à ébouriffer en bonne et due forme les cheveux de son support, veillant à ce qu'aucun ne reste à la place qu'il avait initialement. Là, voilà qui était bien mieux ! Sauvage, authentique…

"- Comment ça vava le drewdrew ? Ca vava ? Il a pas trop froid ?" Nan parce que la neige, ça devait lui changer de la chaleur douillette des enfers. L'instant suivant, l'each était en tailleur, fesses contre neige, à parler en ricanant à moitié: "Tu tombes à pic, p'tit drew ! On va jouer, là, avec Sarah !" Max se pencha vers lui, pour lui murmurer à l'oreille, tout sourire: "On veut jouer au vaudou. Il faut qu'on prélève des cheveux ou du sang de quelqu'un !" S'écartant, sa bouche rieuse ajouta: "Le second est plus difficile à obtenir… Normalement. Mais dis, eh, t'es pas en médecine ? Tu peux pas trouver un truc pour nous aider ?" Papillonage d'yeux. Mais, toujours avant qu'Andrew ait pu répondre, l'each lui offrit une brève étreinte, avant de vivement se lever, et l'aider à se relever. Ou plutôt, le forcer à se relever. "Merciii ! Je savais que tu accepterais. Tu es vraiment un excellent apprenti ! Alors, on vise… Cette personne !" Du bout du doigt, ladite personne fut pointée.

----------Un drap blanc de fausse innocence posé sur le monde, cachant les péchés de chacun et leur donnant l'impression d'avoir une vie heureuse... Ils déambulaient dans les rues, s'émerveillaient de ces petits cristaux d'eau glacée tombant des cieux, jouaient avec, oubliant tout leurs fardeaux, leurs peines, leur haine. La période hivernale avait chez les humains un effet remarquable, et les observer ainsi était une chose étonnement amusante. Ces enfants qui couraient en se lançant des boules de neiges, tandis que quelques mètres plus loin la neige n'était plus que boue à cause du passage des voitures. Pourtant, de l'autre côté de cette même rue, un enfant goûtait la neige, ou du moins essayait, alors que sa maman lui sommait de poser cette neige sale, ennuyée d'une telle idiotie de la part de son fils. La vie menait au final son cours, avec autant d'actes stupides et contradictoires dans les agissement des gens. Un jour comme les autres, qui allait se dérouler et se terminer comme tout ses frères...

----------Ainsi avait commencé la journée du sorcier, alors qu'il avait observé quelques minutes la rue depuis son balcon. Oui, il avait un balcon à son appartement, le petit veinard. Bien qu'il s'empressa de le quitter pour aller se promener dehors, et surtout pour aller rejoindre la bibliothèque. Il lui manquait des livres, encore, et il allait bien falloir qu'il les lise s'il voulait apprendre et réussir son année. Non seulement il le souhaitait, mais le maître désirait son succès, l'erreur n'était permise.

----------Seulement, c'était sans compter sur certains aléas... enfin, un aléa en particulier, dénommé Max. Ce cheeeer each uisge ! Oh, il était adorable, pour sûr oui ! Et d'une grande aide ! Tant que cela ne l'ennuyait point... Apparemment, à en attendre le cri qu'il émit, l'hommivore avait l'air de s'ennuyer, et Andrew allait, semblait-il, devoir le contenter. Il s'en rendit très vite compte bien entendu, entraîné sans pouvoir protester ne serait-ce un instant contre l'enthousiasme débordant.. bouillonnant.. explosif, de Max... Dans ces situations, seule l'écoute et le silence étaient permis, ou du moins, étaient possibles. Ce que le jeune "apprenti", ainsi que souhaitait le penser l'each uisge, avait très vite assimilé.

----------Meureusement, ces jeux étaient bien souvent très amusants, tant qu'on en étaient pas la cible. Aujourd'hui paraissait être l'une de ces fois: Andrew allait pouvoir participer du bon côté de la partie.

----------La nature du jeu ne fut pas une si grande surprise lorsqu'il aperçut la belle rousse qu'était Sarah... Oui, forcément, avec pareille compagne de jeu, forcément, le vaudou devenait des plus attrayant. Quoi de mieux qu'un maître en la matière pour s'y amuser pleinement ? Alors oui, c'était contre l'idée de maintenir Le Secret... secret. Seulement, c'était Max. Max et Andrew... l'un complètement insouciant, l'autre totalement influençable... Que faire contre ça ? Obéir au maître, certes, c'était capital, évidemment. Mais c'était si tentant comme jeu, du vaudou ! Et puis, Sarah n'acceptait jamais de leur montrer comment elle s'y prenait !

"Saraaaah... Quel plaisir, c'est, surprenant, de vous voir ici..." tenta Andrew en guise de bonjour, se retenant de suggérer qu'elle ressemblait à une baby-sitter en l'occasion. Il l'aurait très certainement regretté...

----------Ce n'était pas qu'il avait peur d'elle, non... bien sûr que non ! Seulement.. elle était quelque fois légèrement effrayante. Les succubes et autres démons faisaient souvent pâle figure comparé à la demoiselle, c'est pour dire ! Peut-être n'était-ce qu'une impression, et peut-être que non, demeurait qu'irriter la secrétaire du maître était bien la dernière chose que souhaitait faire le petit sorcier. Et ce quel que puisse être l'opinion de la dite Sarah le concernant.

----------Mais là n'était pas à se questionner sur l'attitude à avoir face à cette, harpie. Pour le moment, il fallait contenter le désir insatiable de l'équidé pour son jeu de la journée, ou du moins, de l'heure. Le petit garçon désigné par ce dernier se balançait en ce moment même innocemment à une balançoire, attendant inconsciemment que son destin vienne le saisir. Dans les circonstances du moment, le destin portait le nom d'Andrew White. Plutôt que de simplement prélever ce que désirait Max, l'apprenti joueur avait saisi le bambin,l'apprenti joueur avait approché le bambin, profitant que sa mère discute vivement avec une amie pour lui proposer de venir jouer avec lui.

"On fait un bonhomme de neige avec mon ami, tu veux venir nous aider ? Ce sera marrant tu verra ! On a même des bonbons..."

Comment refuser telle offre ? Impossible, bien évidemment. Dommage qu'il n'y ait ni bonhomme de neige, ni bonbons cela-dit...

Empêcher le gosse de protester et de repartir en voyant le mauvais tour qui lui était joué allait être la première chose à faire, une main pleine de neige dans sa bouche devrait suffire en partie à cela.

"Si on allait dans un lieu plus discret ?" Proposa alors Andrew, dont le visage ne dissimulait que maladroitement la fierté de son geste ou l'idée qu'il avait en tête. Il enlaçait d'un bras l'enfant, lui mettant de temps en temps une main remplie de neige dans la bouche, autant pour l'empêcher de protester que pour le plaisir.

"Tu veux bien m'aider oncle Max ? Tu aimes bien les enfants il me semble !"

----------Avec deux sorciers et une créature tout droit sortie de cauchemars d'enfant, on allait avoir de quoi s'amuser avec l'esprit de ce petit bout d'innocence ! Elle allait bien vite devenir cendres.

Faire du vaudou, en voilà une nouvelle idée... D'où est-ce qu'elle venait, ça Sarah n'en avait aucune idée. Mais ça restait des plus raisonnables et puis c'était sa passion donc elle savait comment faire. Et puis bon, si ça pouvait l'amuser elle et le faire sortir de son apathie... Finalement, la malédiction n'était peut-être pas une aussi bonne idée. Ou, au moins, pas un mois entier parce que passer deux semaines, l'ennui commençait à se faire douloureusement sentir : ne plus crier après l'each et ses bêtises... Un sport qui la détendait tellement.

Le départ de Max et son hurlement strident la firent sursauter et Sarah haussa un sourcil en le voyant bondir et s'étaler de tout son poids sur... Andrew ? Que faisait-il ici ? Enfin, le voilà devenu la proie du quadrupède, pour un peu elle le plaindrait presque. Mais, c'était quoi le rapport entre lui et le nouveau jeu de Max ? Est-ce qu'il voulait profiter de ses études ? Toute curieuse mais sans pour autant quitter son banc, toujours très digne et royale, les jambes langoureusement croisées, la rouquine ne les quitta pas pour autant du regard, les fixant en attendant de voir ce qu'ils mijotaient tous les deux.

« Bonjour Andrew. Je sortais Max,il avait besoin de prendre l'air... Et toi ? Tu te promenais ou tu partais étudier ? »

Sarah savait que le maître tenait à cœur les études de son autre petit protégé. Elle le dévisagea avec attention avant de se tourner vers Max : ce dernier avait sans doute expliquer au nouvel arrivant ce qui allait se passer par la suite. La rouquine comprit bien vite ce qu'ils mijotaient tous les deux et elle plissa les yeux de désapprobation, se levant pour les suivre alors qu'ils s'éloignèrent avec un petit garçon.

Ça ne sentait pas bon...

Soupirant, elle se leva et épousseta son long manteau avant d'aller les rejoindre, fouillant dans ses poches pour sortir un petit bol en marbre gris perle, versant un peu de poudre d'amazonite et de l'huile de sauge dedans.

« Poussez-vous les garçons. »

Autoritaire, polaire même, elle les fusilla du regard avant de brûler le contenu de son bol, soufflant sur la fumée pour que l'enfant la respire. Lorsqu'elle vit son regard se faire vitreux, Sarah nettoya le récipient dans la neige avant de le ranger dans son manteau, souriant tendrement à l'enfant, très chaleureuse et maternelle.

« Oublie ce que tout ça, tu es tombé dans la neige. Tu devrais faire attention mon cœur, tu en as plein sur le pantalon. Relève-toi et va voir ta maman d'accord ? Elle est prêt des balançoires. Va t'amuser et oublie ce qu'il vient de se passer. »

Un peu perdu, il hocha la tête avant de lui sourire, de les saluer et de trottiner jusqu'à sa mère qui partie avec lui, sûrement pour prendre le goûter à la maison. D'ailleurs, Sarah devait dire deux mots à certaines personnes... Se levant, elle les toisa avant d'attraper l'oreille de Max et de la tirer douloureusement, attrapant le menton de Andrew pour qu'il la regarde bien.

« Recommencez une seule fois une chose pareille dehors et je peux vous assurer que vous allez très vite le regretter. Si je vous avais laissé continuer, vous auriez rompu le secret et le maître n'aurait absolument pas du tout aimé cela... Et nous savons tous les trois qu'il ne fait pas bon de décevoir le maître n'est-ce pas les garçons ? »

Enfonçant légèrement ses ongles dans la peau tendre de Andrew, elle pinça plus fort l'oreille de Max pour qu'ils comprennent bien qu'ils avait fait une erreur avant de leur poser un doux baiser velouté sur leurs joues, de nouveau douce et en apparence inoffensive.

« Nous ne dirons rien au maître mais nous ferons attention à l'avenir. »

Elle les fixa avec attention avant d'épousseter son manteau.

« Si vous voulez faire du vaudou, il faut faire ça à l'abri des regards et seulement avec des échantillons, et non un cobaye entier. »

"- Ouais, Parfait !"

Max n'avait jamais été difficile à ravir en matière de bêtises. Une bêtise à moitié fête valait mieux que pas de bêtises du tout ! Un demi-rire valait mieux qu'aucun rire. L'each avait pouffé comme une collégienne en voyant Andrew baffrer le gamin de neige, et le visage tout rouge et déformé de ce dernier sous la brûlure et l'étouffement de celle qui avait été sa compagne de jeu. Les humains avaient tant de façon de tordre les traits de leur faciès ! Celui-là était vraiment moche. Même pour les équidés et leur notion toute spéciale de la beauté, il était moche. Le rire de Max était un rire moqueur, incisif, mais bigrement franc.

Aucun inconvénient, plus qu'à passer à l'action ! Ses pas emboitèrent ceux d'Andrew, sans souci, l'esprit allégé par son euphorie précédente, et cette sensation divine que provoquait le rire humain. La voix glaciale d'une Sarah pré-colère interrompit néanmoins leur oeuvre. Sage, et surtoout sous couvert d'une malédiction, Max s'immobilisa, observant la sorcière faire son oeuvre alors qu'ils venaient tout juste de se glisser à l'abri des regards. Ce fut presque de la jalousie qui émana de l'each sous forme humaine en voyant la fumée. C'était toujours rigolo, la fumée ! Au vu de la tête que fit le gamin, celle-ci devait être plus que drôle: elle avaitt l'air bonne. Allez, il pouvait bien partager, non...?
L'incompréhension se dessina sur son plat faciès devant les mots de Sarah. N'avait-elle pas dit vouloir jouer au vaudou ? Ce n'était pas ainsi qu'ils allaient pouvoir s'amuser ! Ils n'avaient pas même saisi l'échantillon ! Néanmoins, les protestations se bloquèrent dans sa gorge, au souvenir de la voix gelée de celle qui était, la plupart du temps, son each-sitteuse, sa professeure en manières dans ce monde peu civilisé. Pourquoi donc ce manque de rébellion ? Pourquoi ce manque d'envie en son petit être ? La peine revint, et manifestations physiques furent surtout la moue brusquement triste de la créature. Dire que c'était presque passé...

Le gamin repartit avec sa mère, laquelle s'était visiblement fait du mourron. Pas le temps de les observer plus longtemps. Une vive douleur à l'oreille vint surprendre l'each, qui eut un sursaut peut-être un peu trop violent, et un couinement de protestation. Les premiers mots de Sarah lui échappèrent, les suivants non: c'est que, de toutes façons, c'était là l'unique perception autre que le pincement qui parvenaient jusqu'à l'intérieur de son crâne. Mais ! Mais Max savait déjà tout ce qu'elle racontait ! Bon, Andrew peut-être pas... Mais Max, si ! Pourquoi le leur rappeler ? Et pourquoi aussi violemment ?

Le bisou n'était pas un bisou magique. La douleur resta, et Max essaya de l'apaiser en portant sa main froide contre l'oreille molestée, la lippe boudeuse. Ses justifications commencèrent par un grognement, avant de prendre davantage l'allure de mots:

"- Mais personne n'nous auraitt vu ! On aurait juste pris l'échantillon ! J'irais jamais oser décevoir le maître, tu le sais bien !" Un signe de promesse, observé chez quelques enfants humains: "Le secret en premier !"

Se tournant vers son "neveu" adoptif, Max examina sa manche, son col.

"- Et il t'aurait pas laissé un échantillon, le gamin, à tout hasard ?" Se penchant à l'oreille d'Andrew, Max murmura, s'imaginant de discrétion: "Eh, t'es chiche d'enterrer Sarah dans la neige ? Sans magie, comme à la plage !" Une idée qui venait tout droit d'un livre illustré, l'each s'en souvenait tout juste. Pourquoi ne pas essayer ? Pourquoi ne pas s'accrocher à ce dernier ersatz d'espoir qui lui restait de sortir de son apathie ? Libération d'Andrew, et ses lèvres s'étiraient en un sourire, ayant fait fi de sa bouderie. "On devrait retourner au parc, non ?"

"Un peu des deux ? Je pensais aller à la bibliothèque, et un petit détour me semblait être une bonne idée, à croire que je ne m'étais pas trompé..." Répondit d'une voix polie et quelque peu timide le jeune sorcier.

----------Il détestait sa manière qu'elle avait de traiter Max, le considérant uniquement comme la monture du maître, alors qu'il était aussi compétent qu'une autre personne, même s'il appréciait particulièrement gaspiller son temps à s'amuser... Ce n'était après tout pas un mal, il était jeune après tout, il en avait le droit ! Il passait sa vie à servir le maître en tant que monture et à s'occuper d'Andrew depuis que celui-ci était arrivé, il avait bien le droit de ne plus être sérieux quand il avait du temps libre ! Même si, en effet, s'occuper d'Andrew n'impliquait pas vraiment d'être sérieux...
----------Andrew avait ainsi froncé légèrement les sourcils lorsqu'il avait entendu Sarah dire qu'elle ... "sortait Max".

----------Et ce n'était que le début d'un sentiment de rancune envers leur... hum... délicieuse tortionnaire, ainsi qu'il se mettait à le penser lorsque Andrew la vit les écarter du petit bout d'humain. Qu'est-ce quelle pensait faire, à le libérer ainsi ? Pourquoi les empêcher de jouer avec ce garçon ? Il n'y aurait eu aucune séquelles ! Personne n'aurait rien su oui ! Max avait raison !
----------Impuissant, il ne pu qu'écouter les remontrance de Sarah, ses rappels envers leur fidélité à Elie le poussant alors aux regrets. Une petite boule glaciale semblait se former dans sa poitrine, animant une douleur qui n'attendait que de croître. Décevoir le maître ? Non, bien sûr que non ! Ils n'auraient jamais voulu ! Ce n'était pas ce qu'ils allaient faire, ils n'aurait jamais utilisé de magie si ils savaient qu'on les voyait. Il n'y aurait eu aucun risque, personne n'aurait jamais rien su ! Le bambin aurait tout oublié, n'est-ce pas ? Il n'aurait pas eu de séquelles, Sarah venait de le montrer, elle pouvait manipuler son esprit, ils ne craignaient rien ! N'est-ce pas ? N'est-ce pas qu'ils n'avait rien fait de mal ? N'est-ce pas ?

----------Andrew avait baissé la tête, son menton touchant son torse. Il leva timidement les yeux vers Sarah, comme en train de chercher son pardon.

"On aurait fait attention, on aurait jamais osé, jamais... On ne se le permettrait pas de... décevoir.. Papa."

----------Certes, ce n'était le père d'aucun d'entre eux, mais pour Andrew, il était tout comme, et de son avis, il était un peu leur père à tout les trois. Bien que, à juger la manière dont il considérait Max et Sarah, il aurait plutôt été son grand père, puisque ces deux là étaient pour lui un oncle et une tante. Compliquées ces histoire de famille, d'autant plus lorsque rien, que ce soit le sang ou la race, ne lie ces personnes...

----------Serrant sa main derrière son dos, la petite boule de culpabilité se mit à grossir un peu au creux de l'estomac du sorcier, alors que les paroles de Max se mettaient à résonner dans son esprit. Il allait le regretter... Il allait définitivement le regretter, c'était certain. Max avait déjà failli au maître, il était déjà dans le collimateur du Cénacle, le suivre était surement une mauvaise idée... mais... il en avait de bonnes des idées ! Enfin, bonnes, non, au contraire, mais elles étaient sacrément amusantes, c'était ça qui les rendaient bonnes pour Andrew.

----------Le fait que Max ait été, pendant ce qui fut plusieurs années, son mentor ne faisait que rendre le choix plus difficile. Après tout, il avait eu tout le temps de voir à quel point ces jeux avaient pu les mettre dans des situations compromettantes, mais à chaque fois, ils s'étaient diablement amusés ! Et chaque fois ce n'était que de bons souvenirs qui en ressortaient, en grande partie. Ne pas vouloir jouer à l'un de ses jeux jusqu'à la fin était alors, en quelque sorte, une trahison à son égard. Pour Andrew, c'était pareil que de trahir Elie.

----------Tendant lentement sa main devant lui, vers Sarah, il l'ouvrit, découvrant alors quelques cheveux - deux ou trois - qu'il avait sournoisement arraché au bambin.

"Comment on verra ce que fait notre proie si on ne l'a pas sous les yeux ? Ce n'est pas tout aussi risqué ?" Demanda-t-il presque timidement, alors qu'il jetait un air désolé à Max.

----------Il n'avait pas pu se résoudre à être aussi sournois avec elle. Après tout, ils n'auraient fait que lui apporter des ennuis à ignorer ses avertissements. Il y avait trop de vérité dans ce qu'elle avait dit.

Il n'empêchait que, malédiction ou pas, il avait quand même le don de prendre la mauvaise décision pour la réalisation de ses jeux. Mais où est-ce qu'il avait vu qu'il fallait piéger un gamin et le terroriser dans le parc, un simple buisson le séparant de la mère qui ne se doutait de rien pour le moment ?! Ce qu'ils étaient stupides ! Tellement de bons plans beaucoup plus subtile pour réussir à mener à bien leur objectif mais non ! Ça aurait été tellement moins drôle ! Exécutant rapidement un rituel pour qu'il oublie la peur qu'il venait d'avoir, elle le renvoya avant de coincer les garçons pour leur faire comprendre que c'était tout sauf judicieux comme idée fumante !

Max qui protestait... Tiens, un bref regain d'énergie l'each.

« Sois sérieux une minute : tu aurais fait comment après l'échantillon ? Et si quelqu'un nous avait vu ? Max un peu de sérieux et de jugeote par l'Enfer ! Il n'y a que de simples buissons autour de nous. »

Sarah se retourna vers Andrews en soupirant, frottant doucement son pouce sur sa joue pour effacer la trace de rouge à lèvre qu'elle avait laissé sur sa peau, faisant de même sur la joue de Max. De les baby-sitter alors que l'each était dans une période de faiblesse, ça lui donnait un de ces instincts maternels horripilants... Seules ses sœurs, ses jumelles, avaient le droit à un tel traitement... Tssss.

« Je te pensais quand même avec davantage de matière grise Andrew : aucune magie pour nous dissimuler au regard des gens, seulement de l'imprudente improvisation et aucune garantie que personne ne nous aurait attrapé. »

Elle leva les yeux au ciel en soupirant, regardant autour d'eux alors que Max décida de triturer Andrew dans tous les sens pour voir s'ils pouvaient quand même jouer un peu. Celui-là... Malédiction ou non, son envie de jouer n'avait aucunement disparu, comment pouvait-elle le prendre au sérieux une seconde ? Seule sa loyauté et son amour envers leur maître la rassurait parce qu'il était d'une telle imprudence et négligence... C'était affolant par certains moments.

Se retournant pour voir ce qu'ils fabriquaient, les trouvant trop calme, Sarah haussa un sourcil en voyant Andrew lui montrer sa main avant de sourire légèrement, malicieusement.

« C'est quand même beaucoup plus discret que ce que vous alliez faire... »

Regardant autour d'eux, elle trouva une petite table à l'écart et s'y assit, sortant de son sac à main du chanvre et du sang, ainsi que de petites fioles.

« Ils doivent sûrement jouer un peu plus loin dans le parc donc nous pourrons les surveiller et moi je tâcherais à ce que vous ne fassiez rien de suspect avec cette poupée... »

Sarah les regarda avec attention avant de la coudre grossièrement mais rapidement, y nouant les cheveux en murmurant d'une voix rauque et gutturale le rituel pour lier la poupée au possesseur des cheveux.

« Attention à vous : au moindre écart ou inconscience, je vous dépèce vivant tous les deux et je vous transforme en descente de lit, c'est clair. »

Plissant les yeux en les fixant avec méfiance, elle préféra tendre la poupée à Andrew qui était censé être le plus raisonnable des deux.

----------Il arqua un sourcil, peu certain de comprendre ce que Sarah tentait de leur expliquer. Non, finalement, il avait bien compris. Il arqua l'autre sourcil, fixant Sarah avec une légère déception.

"Je ne prévoyais pas vraiment de rester ici enfait... Je pensais qu'on pouvait l'emmener ailleurs..."

----------Le mal avait été fait de toute manière, cela ne servirait à rien de tergiverser là dessus pour essayer de repartir sur l'idée de base, elle était en effet trop risquée vis à vis du Secret et de la promesse faite au Maître. N'empêche que... la tentation de le voir révélé était grande. Folle, certes, mais vivace en l'esprit du jeune sorcier. Et pourtant, il ne pouvait s'empêcher de faire attention à ne pas faire faux bond à ses engagements. Autant par respect et dévotion que par peur des conséquences qu'il en découlerait de la part d'Elie.

"Et puis au moins, je n'avais pas utilisé de magie, je ne pouvais pas être plus discret."

----------La mine renfrognée, Andrew laissa Sarah prendre les cheveux sans rien dire, l'écoutant sagement. Son regard allait vers la balançoire, où s'y trouvait quelques instants plus tôt le gamin. Où était-il allé celui-là ? Pourvu qu'il ne soit pas trop loin...

"Oui mademoiselle Sarah, on fera attention, cessez donc de vous inquiéter..." Répondit d'une voix légère le jeune sorcier, levant presque les yeux au ciel avant de saisir la poupée d'un geste désinvolte. Après tout, c'est sa magie, pas celle d'Andrew, ni de Max, ils ne craignent rien eux... Si ?

----------Pressé de voir les effets qu'ils pourraient tirer de cette poupée vaudou, Andrew empoigna la main de Max et s'en allant avec entrain vers la balançoire, espérant que le jeune garçon y serait au moins visible depuis ce lieu. Mais apparemment... ce n'était pas le cas.

"On dirait qu'on va devoir jouer à cache-cache !" s'exclama l'adolescent en adressant un grand sourire digne d'un clown psychopathe à Max.

Max avait penché la tête sur le côté, un peu perplexe. Une... Descente de lit ? Dans sa tête, cela signifiait que Sarah viendrait les réveiller en les faisant tomber du lit, ce qui effectivement n'était pas très intéressant. Andrew, au moins, pouvait se sentir protéger de ne pas vivre chez le maître, par rapport à cette menace.
L'each fit comprendre d'un signe de la main à son humaine de compagnie qu'elle n'avait pas à s'en faire. Ils géraient ! Ils savaient exactement doser ce qu'il fallait ou non faire, et ils allaient le lui prouver ! Ils avaient plus de "matière grise" que ce qu'elle imaginait.

Sa papatte prise par Andrew l'entraîna à la suite de ce dernier, sans qu'acucune résistance ne soit offerte. Arrivés sur les lieux du crime, Max jeta de vifs coups d'oeil alentours, à la recherche de la bestiole avec laquelle ils voulaient s'amuser. Mais cette dernière était... Eh bien... Pas là. Ou peut-être n'étaient-ce que ses yeux qui fatiguaient ?
L'annonce d'Andrew et le sourire de ce dernier lui arrachèrent un rictus, et un sincère sentiment de... Satisfaction ? Avec un copain, et un jeu, l'each se sentait bien. Mieux. Davantage de joie et de motivation.

"- Allons-y ! Ça tombe bien, à ce jeu, je suis trop fo..."

S'arrêtant dans sa phrase, l'each remua ses naseaux, à la recherche des odeurs qui normalement faisaient tout son talent. Ah. Oui. Ce corps-là était plus capricieux... Eh bien, qu'il en soit ainsi ! Un petit rire lui échappa. Eh bien, ce serait une contrainte supplémentaire, mais parfois les contraintes faisaient partie du jeu ! Tant qu'elles ne l'empêchaient pas de gagner -et ce serait le cas-, elles étaient source d'amusement supplémentaire. Mais pour mettre encore plus de piment, il y avait autre chose encore:

"- Le premier à le trouver gagne un dessert supplémentaire !"

Eh bien ? Ce n'était pas parce que l'on était une créature anthropophage que l'on ne pouvait apprécier le reste de la nourriture qu'offrait ce bas-monde ! Et là-dessus, Max avait une grande ouverture d'esprit, goûtant à tout et de bon coeur. Beaucoup d'aliments lui plaisaient mais, naturellement -à son âge !-, le sucré obtenait une bonne place dans son coeur. Alors les desserts étaient des moments précieux, la récompense à la fin du repas !

Ses propres mots suffisaient à motiver l'each, qui s'élança en courant dans une direction, après avoir pris son précieux hélicoptère contre son coeur. Chacun pour soi ! Et les deux autres jouaient, bien entendu. Max ne prit pas même le temps de vérifier ce point. À toute allure, les environs furent fouillés, reniflés, Les arbres furent contournés avec soin, les buissons furent analysés, les maisons alentours passées au peigne fin... Il ne pouvait pas être allé bien loin ! En plus, les enfants humains émettaient un bruit insupportable: s'il était dans les environs, le son aurait dû passer avant même l'image ! Mais rien ne venait. Quelle tragédie, quelle misère... Et son dessert s'éloignait, s'enfuyant sur ses petites papattes de dessert vers... Qui savait ? Une personne avec un dessert supplémentaire, sans doute.

Un peu dépîtée, la monture revint s'assoir auprès du banc sur lequel ils avaient rencontré le futur cinquième mari de Sarah. Ou sixième, difficile à savoir. En tailleur, l'encolure basse, les yeux mi-clos, Max caressait délicatement son jouet, la mine tristoune. Le gamin n'était pas là, c'était sûr. Les deux autres n'allaient peut-être pas tarder à revenir, s'ils n'étaient déjà là.

Alors qu'elle venait de planter un baiser sur l'une de leurs joues, Sarah entreprit d'effacer avec son pouce les traces de rouge à lèvres qu'elle leur avait laissé sans cesser de les fustiger pour autant. Et Andrew qui lui annonçait avec une apparente innocence déçue qu'il voulait emmener l'enfant avec eux... Bien sûr chéri et on se retrouverait avec des avis de recherches dans tous les sens et un Cénacle au bord de l'apoplexie si jamais ils apprenaient que cela avait un rapport avec la magie ! Décidément... Y'en avait pas un pour rattraper l'autre !

Plissant de contrariété son petit nez en trompette, Sarah finit par lui sourire en attrapant les cheveux qu'il avait quand même réussit à attraper. Peut-être qu'elle pourrait leur faire la poupée finalement...

« Je cesserais de m'inquiéter quand vous aurez assez de jugeote. Quoique votre développement soit ralentit par votre genre... Mais nous ferons avec. Andrew, je vais me répéter et je sais que tu seras prudent : si vous faites quoique ce soit de travers, je m'assurerais que votre mort soit lente et douloureuse mon chéri, à tous les deux... Amusez-vous bien. »

Ce fut dit, bien entendu, avec un sourire chaleureux et pleins de fossette, et une voix très douce et charmante. Magnifique n'est-ce pas ? S'accoudant sur la table, elle croisa les jambes et balança doucement son pieds en essayant de les garder dans sa périphérie visuelle : avec deux zoulous pareilles, il valait mieux être en VIGILANCE CONSTANTE comme dirait un borgne plutôt célèbre.

Sauf que le temps de chasser une feuille de sa cuisse, voilà que les environs furent désertés ! On ne pouvait décidément rien faire ! Plissant le nez de contrariété, Sarah se leva sur ses talons aiguilles et commença à parcourir les environs à la recherche des deux autres, regardant partout en soupirant. Allons bon ! Ils n'ont pas pu se volatiliser comme ça tout de même ! Où est-ce qu'ils étaient par Eurynome... Se mordant les lèvres de nervosité, la rousse ne put s'empêcher de soupirer profondément en apercevant l'each de retour sur leur banc, levant les yeux au ciel en le voyant de nouveau si misérable.

… Il n'y avait pas à chipoter : vivement la fin de la malédiction parce qu'elle n'en pouvait tout simplement plus.

S'avançant tranquillement vers lui, Sarah s'assit élégamment à côté de lui, croisant de nouveau les jambes en fixant devant eux, restant silencieuse, hésitant surtout à ouvrir la bouche pour dire quelque chose.

« Où est Andrew ? Pourquoi tu n'es pas resté avec lui ? Tu n'avais plus envie de jouer ? »

Elle continuait de fixer l'horizon, très douce et sereine, assise à côté de lui. Presque gentille en fait.

----------La frontière entre le bien et le mal est parfois bien mince, à vrai dire, la différence est bien souvent une simple question de point de vue. Nombreuses sont les situations où pour faire le bien, on envisage de supposées mauvaises actions, que l'on justifie ensuite par un but final bénéfique. Tout est dans la manière de présenter les choses, dans la manière de faire comprendre aux autres que pour agir de la meilleure des manières, certaines actions possiblement jugées néfaste doivent être prises. Le bien, le mal, ce ne sont que des mots, que des termes qui font sens pour certains, et qui pour d'autres sont juste un moyen de qualifier les actions à entreprendre, l'angle sous lequel ce qui va être fait sera vu par les autres.
----------Les menaces de mort, les tortures, sont du même ressort. De mauvaises choses ? Non, pas vraiment, simplement un moyen comme un autre d'obtenir ce que l'on souhaite. Des informations, du plaisir... de l'obéissance. Sarah était merveilleusement douée à cela, tant et si bien qu'elle parvenait tout le temps à faire frissonner le jeune sorcier, même si celui-ci savait pertinemment à quoi s'en tenir. Il ne mourrait pas, jamais de la main de Sarah, il le savait. Mais ce qu'il savait aussi, c'était que ce qu'il craignait de subir si jamais il lui venait à l'esprit, ne serait-ce qu'une fois, de faire de nouveau quelque chose de travers, la mort deviendrait une chose merveilleuse à désirer.

----------C'était à tout cela qu'Andrew pensait alors qu'il écoutait le dernier avertissement de Miss Whiteman, son expression hésitant entre la profonde admiration allant jusqu'aux yeux pétillants et la peur de son destin avec les gouttes de sueur perlant du front qui en découlaient. Ce sourire sublimement mortel de même que les trois derniers mots que prononcèrent Sarah mirent fin à cet état tangible dans lequel s'était trouvé Andrew, lequel avait alors filé sans quémander son reste vers la balançoire, accompagné de Max.

----------L'idée qu'une part de dessert supplémentaire puisse lui être offerte en signe de récompense s'il remportait la partie de cache-cache à laquelle leur petit humain semblait vouloir prendre part était allègrement alléchante, et si Max était partis en trombe, hélicoptère en main, à la poursuite de leur trésor sur pattes, Andrew en avait fait de même avec la poupée vaudou qu'il serrait de la même manière que son compère contre son cœur.

"Pas de magie, pas de tricherie, qu'il en soit ainsi !" s'exclama-t-il avant de filer, pouffant légèrement de rire lorsqu'il vit Max essayer de renifler l'air.

----------Malgré la terreur que lui avait inspiré l'avertissement de Sarah, la liberté avec laquelle vivait l'each suffisait à lui faire oublier cela. Presque toute les fois qu'il était en sa compagnie dans le monde des humains, il parvenait à récupérer une part de son enfance, poussée par l'innocence et la bêtise de son ami et amusant tonton factice.

----------Courant à travers le parc, Andrew suivit les chemins, regardant si il ne voyait pas la mère et son fils. Il cherchait plus une mère qu'un gamin en effet, puisque la première était assurément plus visible. Bousculant quelques ignorants (tant du secret que du jeu en cours), il se trompa à plusieurs reprise lorsqu'il surgit devant une mère et son enfant, s'arrêtant subitement devant eux, accroupi en face du petiot, l'examinant comme un gamin devant une vitrine de pâtisserie. Malheureusement, il obtint plus de remontrances et de cris injuriés que de satisfaction... Il pensait abandonner, mais... voilà qu'il constata qu'il n'était plus dans le parc. Il ne savait pas vraiment quand il en était sortit, apparemment trop pris dans sa chasse, mais demeurait que le parc se trouvait de l'autre côté de la rue où il était.
----------Attendant ainsi que le feu repasse au vert - il devait bien l'être à son premier passage, car à moins d'une chance extraordinaire, il se serait rendu compte que des voitures menaçaient de le renverser - Andrew se mit à regarder à droite à gauche, l'air un peu dépité de ne pas avoir réussi ni à retrouver le gamin, ni à revenir rapidement près du banc... Il vit alors, l'espace d'un instant, le visage de l'enfant, se retournant de devant un stand de glace de l'autre côté de la rue - le long du parc donc - pour s'arrêter en face de lui, de l'autre côté du passage piéton. Se cachant derrière un passant, Andrew l'observa manger sa glace, vanille menthe caramel, assurément, à en juger la couleur des boules de glace dans le cornet. Il allait retourner au parc, abandonnant ainsi son but, mais, l'envie était trop forte, il lui fallait le suivre, après tout, les autres le retrouverait surement ! Ses pas emboitèrent ceux de la mère et de son fils, séparés d'une dizaine de mètres, et il se mit ainsi à les suivre, lentement, discrètement, sournoisement...

----------Ne restait plus qu'à prévenir les autres ! Un p'tit sms, et l'affaire serait réglée ! Aaaaaah... la technologie ! Quelle magie fabuleuse ! Et quelle tristesse d'être ainsi égalé par quelques subterfuges d'humains... Si le secret était révélé, ils pourrait enfin leur montrer à quel point leur technologie et leurs médiocres essais pour s'élever étaient insuffisant. À quel point ils étaient impuissants devant la puissance des gens de l'Envers, à quel point ils pouvaient s'estimer chanceux de ne pas être écrasés, simplement parce qu'ils étaient des cobaye et de la main d'œuvre utile pour toute les tâches ingrates qu'il exécutaient.
----------Et pourtant, alors qu'ils étaient de plus en plus nombreux, voilà qu'ils se montraient de plus en plus néfastes et inutiles... Préférant leurs sciences aux Dieux qu'ils vénéraient, plongeant ces derniers dans l'oubli, les rendant aussi vulnérables que des simples mortels. Il devraient avoir honte de renier ainsi leurs mythes et leurs passés, pour n'y préférer que ce que leur regard obstrué leur permettait de voir et de comprendre, de prouver, de démontrer par cette chose qu'ils appelaient la science. Oh bien sûr, dans certains aspects, elle était utile, mais c'est comme tout, il ne faut pas en abuser, seulement en consommer avec modération ! Une notion que les humains avaient toujours eus bien du mal à appréhender...
----------Enfin bref... pour le moment, un texto était nécessaire, et bien plus discret qu'un parchemin téléporté.

"Trouvé mais sortit, pas loin, chui prudent tkt !! Sortie côté manoir Whiteman ! tétou !" Pianota sur le clavier de son smartphone le jeune White.

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