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 Un speed dating, sérieusement ? | Terminé

Howard Earl
L'étrange sous la normalité :
Je suis l'héritier de la branche principale des Earl, je suis un Nécromant et un membre du secret. Je le protège et le soutient. C'est dans mon intérêt.

Tell me More : J'ai un jumeau, Morghann, et je suis le pupille d'Eurynome
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Howard Earl
Le Sacrifié
18 Janvier 2016


Le glas de leur retour à Last-End lui avait semblé insupportable. Avoir réussit à s'extraire de cette ville et de tout ce qu'elle renfermait lui avait fait beaucoup de bien, une bouffée d'air frais fort bienvenue, et plus que cela encore... réellement nécessaire. Un besoin presque vital de s'éloigner, de fuir ces lieux qui, instinctivement, le hérissait. Victoire plus agréable encore puisqu'il s'était avéré que le démon l'avait accompagné. Comme quoi, il n'était pas encore complètement enraciné en ce lieu de malheur. Pourtant, à présent, revenir lui semblait plus intolérable que l'idée de rester ne l'était auparavant. Il ne voulait pas vivre ici, il y était forcé. Depuis leur retour, il s'attachait à apprendre tout ce que son frère ne lui avait pas encore transmit, tout ce sur quoi il ne l'avait pas informé et qui pouvait l'intéresser. Il soignait le décalage horaire qui l'avait quelque peu malmené. La ville était en pleine effervescence, entre le début d'année rouge qu'elle avait connue, et les activités chronophages de tout début d'année, Last-End ressemblait à une fourmilière qui l'irritait plus encore qu'à son habitude. L'un dans l'autre, il n'avait pas la moindre envie d'émerger et de sortir de chez lui.

Alors il suffisait d'imaginer l'humeur dans laquelle on le plongeait lorsque son père lui envoyait un héraut officiel pour lui demander de se présenter au château. Le doute, la méfiance l'avait emplit comme un mauvais vin, mais impossible de refuser, il se devait de répondre, se rebeller contre son ordre était vain. Et puis le connaissant, mieux valait encore y aller et savoir ce qu'il préparait plutôt que de se poser volontairement un bandeau sur les yeux et avancer naïvement, en se convainquant que tout ira bien. C'était de Pryam Earl que l'on parlait, après tout. Alors il avait prit sur lui, il avait plié et s'était déplacé malgré l'envie qu'il avait de se transformer en troglodyte, malgré la souffrance diffuse qui parcourait sa jambe handicapée. Les portes de la vaste demeure de sa famille s'étaient écartées de bon matin pour le laisser passer, et une nuée de serviteurs silencieux s'étaient rassemblés pour convenir à ses désirs. Mais rien, du château de son enfance ou de l'attention dont il était le sujet ne parvint à l'apaiser quand il apprit la raison de sa venu. Rien ne le pouvait, et il lui avait fallut toute sa volonté pour dissimuler à son jumeau ce qui l'irritait.

En un sens, il aurait dû savoir que cela arriverait à un moment ou un autre. Il avait la trentaine passée, ses parents avaient été extrêmement laxistes en acceptant de le voir rester célibataire tout ce temps. A un moment ou un autre, il se devait bien de rentrer dans le rang et de faire honneur à sa famille en ayant une femme acceptable et un héritier pour sa lignée... même s'il savait que sa rébellion lui permettrait de s'éviter une telle fin, il devait jouer le jeu. D'autant plus qu'il ne savait pas du tout combien de temps il mettrait à abattre son père, et qu'une femme lui serait peut-être une bonne alliée dans sa croisade. Son frère allait en être malade, mais personne n'y pouvait rien. A lui de tirer son épingle du jeu, même si tout cela allait le mettre atrocement mal à l'aise. Et il fut encore plus mal à l'aise d'apprendre qu'en plus de devoir subir ces entrevues galantes, il allait hélas être contraint de les tenir à l'intérieur même du château, pour, selon les dires de son père 'être dans son élément et sur son terrain, montrer sa qualité et son statut'... Ce que lui traduisait par sa volonté de le surveiller. Magnifique. Qu'est-ce qui pouvait donc lui arriver de pire ?

C'était exactement la question qu'il se posait, alors qu'il entamait courageusement ces rencontres forcées. Jusque là, les femmes étaient toutes faites sur le même modèle : des héritières de très bonnes familles, nobles, de longues lignées sorcières, avec un pedigree stricte et médaillé tant il était précis et racé. Elles étaient toutes finement éduquées, parfaitement à l'aise dans l'univers de cette noblesse surannée qu'ils siégeaient. Et hélas, elles étaient toutes déprimantes. Si encore on lui avait proposé une Sihvonen, il aurait peut-être pu se consoler de la pensée des coutumes singulières de cette famille, qui auraient jalonné leur vie... mais non. De tout évidence, son père voulait du nouveau sang, et y mettait les moyens. Et dire que ce n'était que le premier jour, et qu'il devrait encore voir défiler des centaines de jeunes filles. Sa mère lui avait même soufflée qu'il était question d'élargir l'alliance potentielle à un autre pays, ce qui le laissait plus amer encore, avec cette atroce sensation qu'il n'était qu'un bout de viande ou une jolie breloque que l'on vendait. Ou pire, un étalon à faire reproduire avec la meilleure pouliche possible.

Il s'en révoltait, intérieurement alors que de visu, il se devait d'afficher le parfait comportement du Lord que l'on visitait. Il les maudissaient de leurs ambitions si différentes des siennes, il les haïssait de vouloir l'enchaîner plus encore... mais n'avait d'autre choix que d'accepter le collier qu'on lui passait, en jugulant ses sentiments pour ne pas affoler son frère pour le moment. Ils auraient tout le temps d'en discuter face à face. Pour le moment, il se levait pour accueillir l'énième prétendante qu'on lui destinait... « Milady » fit-il avec une courtoisie parfaite, mais raide, s'inclinant pour déposer sur les doigts pâles un baise-main exécuté sans la moindre fausse note. Se redressant, il rassembla son courage pour faire l'effort de s'intéresser un peu à cette pauvre fille qui faisait le voyage pour le voir et qui allait certainement perdre son temps. Bien lui en prit, la vision qu'il reçut n'était pas du tout celle à laquelle il s'attendait... Cachant sa surprise, il garda contenance en lui offrant de s'asseoir, sans pour autant la quitter des yeux. C'était qu'elle dénotait, dans le décor et par rapport à ses 'rivales'...

« Vous êtes de Last-End, n'est-ce pas ? » C'était discret mais... sa façon d'entrer en ces lieux lui soufflait qu'elle n'était pas une étrangère. Elle n'avait pas le comportement d'une étrangère...

Lun 1 Fév - 18:41
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Moïra Ní Éireann
L'étrange sous la normalité : Sous mon masque froid, je suis immortelle. Mes mains si délicates sont plus puissantes qu'elles ne le semblent. La magie m'habite et j'habite la magie.
PROFESSION : Membre du Conseil d'Administration d'un groupe bancaire et directrice du musée des civilisations
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Moïra Ní Éireann
Difficile de résister à si charmante invitation et ce d’autant plus lorsqu’elle émanait d’une illustre famille comme l’était celle des Earl. Difficile également de décliner une requête provenant directement du chef de cette maisonnée, Pryam Earl. Mais quoi que la colère ait un instant fusé en se sentant ainsi convoquée, Moïra avait finalement accepté avec amusement cette inédite situation, d’autant plus qu’elle avait toujours une dette envers cette lignée de sorciers lui ayant autrefois, agréable surprise, fait don de ce qui était devenue son musée.
A dire vrai, tout ceci l’intriguait. Courtisée, elle l’avait été bien souvent depuis qu’elle était sur Terre, mais que ce fut un rendez-vous ainsi arrangé, il s’agissait sans doute d’une première. Les mortels réussissaient toujours à la surprendre, mais elle n’aurait su dire s’il s’agissait d’une heureuse ou mauvaise découverte. Ils avaient hélas la fâcheuse habitude de rejeter leur héritage passé pour se baigner dans d’inédites et bien souvent nuisibles inventions, ne tirant de leurs coutumes passées que la part la plus ténébreuse, s’enfonçant toujours plus dans la décadence.

Ténèbres, c’était bien ce qui envahissait doucement la ville, rampantes, se glissant dans le cœur de ses habitants. Celui qui errait en semant derrière lui le chaos n’était qu’une occasion rêvée pour que tout s’accélère. Un peu plus de peur et de méfiance, un peu plus de tensions, un peu plus de colère, oui, il en manquait encore un peu avant que les esprits ne se rebellent, que les bras ne s’arment, que chacun se presse dans la rue et qu’une guerre n’éclate. Civile ou non, c’était toujours mieux que rien. Enfin, elle pouvait tout de même espérer. Tant de temps dans une paix trop étouffante, trop d’années à suffoquer dans un calme ennuyeux. Que pouvaient-ils bien tous trouver à ces pacifiques ententes ? La guerre était naturelle, elle était évidente. Elle régulait les populations, assainissait les esprits de ses bras sanglants. Plus de murmure haineux sous les sourires doucereux, plus de paroles mielleuses venant duper leur proie. Non, elle était juste et honnête, reforgeant les alliances, attisant les amours, repensant les familles. Chacun se battait pour lui-même mais surtout pour les siens et pour la terre qu’il aimait. Elle réveillait l’ardeur et la fougue, réaffirmait le courage et la loyauté. Elle révélait au grand jour tout ce qu’il y avait de perfide et sinistre, mais aussi la moindre petite lumière de bonté et de bravoure. Peut-être était-ce pour cela que ces êtres ne l’aimaient pas. Parce qu’ils n’étaient plus que façades mensongères et regards fourbes, parce qu’ils n’aimaient pas se trouver face à leur reflet le plus épuré, le plus juste d’eux-mêmes. Mais elle appréciait aussi à les observer se débattre dans leur tourmente, chasser le naturel pour tenter de n’être que des clones les uns des autres, façonner leurs identité avec un artificiel affligeant tout en tentant vainement à se distinguer parmi leurs semblables. Piètres créatures qu’elle contemplait changer au gré du saisons qui s’enchainaient. Corneille qu’elle était, elle survolait leurs vies éphémères de ses prunelles luisantes, s’arrêtant par instant pour redescendre jusqu’à eux partager leur quotidien. Jadis, les Hommes l’admiraient et la respectaient, craignant ses pouvoirs et se fiant à ses prophéties, parce que leurs cœurs étaient forts et purs. Mais tout ceci n’était plus rien d’autre qu’un lointain souvenir. Aujourd’hui, elle ne planait plus qu’au-dessus de champs dévorés par les pesticides, rongés par le poison qui torturait la terre, asservis par l’Humain qui n’avait plus de dieux que lui-même et qui dédaignait tout ce qui ne tournait pas autour de lui. Il était temps que l’époque glorieuse des conflits, internes ou externes, ne revienne changer cela, qu’elle leur rappelle qu’ils n’étaient rien d’autres que créatures inférieurs qui oubliaient leurs places. Car oui, les humains apeurés trouvaient toujours refuges auprès des dieux, quels qu’ils fussent.

Nue, la déesse observa pensivement les atours que dissimulait sa penderie avant de s’emparer d’une élégante robe de coton noir, cintrée à la taille. Pas tout à fait de saison, auraient jugé certains. Mais quelle importance, pour elle qui aimait le froid baiser de l’hiver et la caresse glacée du vent sur son corps. La Nature était ce qu’elle était et il fallait l’accepter dans son entièreté, trouver l’harmonie qu’elle offrait, se glisser en elle. La simple existence des vêtements était en elle-même une absurdité mais s’il fallait en user pour s’intégrer à leurs us et coutumes… Pivotant face au miroir, elle haussa à peine un sourcil sceptique face à cette tenue sombre qui faisait ressortir sa peau pâle, lui préférant de loin les longues robes d’autrefois quoi qu’appréciant la liberté de mouvement qu’offraient les modes nouvelles. Tournant les talons, elle attrapa finalement son manteau avant de refermer la porte du spacieux appartement derrière elle.

Le château n’avait pas changé depuis la première fois qu’elle l’avait vu. Large et impressionnant, il appartenait à un autre temps et traversait les siècles, immuable. Et, comme toujours lorsqu’elle le voyait, Moïra ne pouvait s’empêcher de le trouver apaisant, tout de mystères et de secrets, véritable bastion d’une famille incontournable. Ce n’était pas la première fois qu’elle y venait et ne serait sans doute pas la dernière, mais les habitants, eux, changeaient à mesure que s’écoulaient leurs existences. Cette fois, c’était l’un des fils qu’elle rencontrait, et elle espérait bien qu’il ne la décevrait pas. N’avait-elle pas fait le trajet en partie pour se sortir de son existence monotone ? Certes, une journée n’était rien lorsque l’éternité était devant vous, mais elle avait également apprit qu’un petit divertissement de temps à autre ne pouvait lui faire de mal.

-Milord.

Soulevant délicatement la main pour qu’il la salue ainsi qu’un homme de bonne famille se devait de faire, elle entra dans la pièce sur son invitation pour s’assoir avec délicatesse, les mains croisées sur les genoux. Elle avait l’impression de revenir quelques siècles en arrière, mondanités obligeant, mais ce n’était pas réellement désagréable. Encore que ces cérémonials manquaient parfois de sincérité.

-Aye, mais ce n’est là qu’une réponse, je suis aussi d’ailleurs.

Elle l’observa un instant avec un sérieux constant, se demandant ce qu’il pouvait songer dans de tels circonstances. Trouvait-il donc lassant ces entrevues ou les voyait-il comme l’évolution normale de sa condition d’homme ? Tout se ressemblait, finalement. Le même schéma se répétait. S’il croyait en son père, alors celui-ci aurait toute autorité sur lui, de la même façon que sa propre puissance dépendait de ses croyants. Qu’il ne commence seulement qu’à lui opposer quelques refus et il serait détaché de nombre de ses obligations. Comment supporter d’être ainsi prisonnier d’autrui ? Les mariages, quelle étrange coutume. Elle poursuivit toutefois sur une explication plus compréhensible pour son interlocuteur trop curieux.

-Voilà longtemps que j’y vis, je sais que cette ville aspire les âmes de ceux qui y habitent, les envoûtant, les liant à elle, mais j’ai appris à y survivre... et à m'y habituer. N'avez-vous donc vu que des demoiselles étrangères ?

Une légère lueur amusée s’alluma dans son regard. Il aurait été difficile pour quelle que créature que ce fut de tenter de lui dérober la sienne, puisqu’elle n’en avait pas vraiment comme les mortels l’entendait.

-Mais puisque j’ai ainsi survécu si longtemps, puis-je avoir l’outrecuidance de vous demander un thé sans risques ? A moins que vous ne préfériez partager un whisky en ma charmante compagnie ?

Sam 6 Fév - 19:13
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Howard Earl
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Howard Earl
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Elle avait des manières, il fallait bien l'avouer. Mais les autres en avaient également. Même en gardant à l'esprit que la majorité de ces oiselles n'étaient que des perruches savantes qui répétaient ce qu'on leur apprenait. Au moins, cette fois, il avait à tout le moins l'impression qu'elle s'était véritablement appropriée les codes de bienséances de la noblesse. Elle l'intriguait... Certes, elle était jeune, plus jeune que lui aurait-il dit, sans parvenir à la situer pleinement, mais elle faisait bien plus mature que les donzelles qu'il avait rencontré jusqu'ici. L'observant, il essayait sans grand succès de déterminer ce qui causait exactement cette différence pourtant criante. Peut-être étaient-ce ses mots... D'ailleurs ? Elle était de l'ailleurs ? Pendant un moment, il cru qu'elle allait se révéler être une ancienne, et l'idée le dégoûta efficacement. Que sous cet agréable visage se cachent des tentacules ne lui disait rien qui vaille. Mais il se raisonna rapidement : son père n'était pas encore assez cruel pour lui infliger un octopode pour femme. Non, ce devait être une sorcière. Mais tout de même quels drôles de termes.

Et puis en y réfléchissant, en l'écoutant, elle avait de moins en moins l'air d'être une simple fille de famille sorcière. Une simple enfant ne parlerait pas ainsi. Mais ça ne lui disait pas ce qu'elle était exactement. Est-ce que ça comptait vraiment ? Non... Non, en fait non. Et il n'avait jamais été fort pour ce genre de découvertes. Tant que ce n'était pas un octopode, ça lui allait parfaitement bien. Outre cela, ce qu'elle énonçait n'était pas faux du tout... mais ça l'étonnait. Ils étaient pu, ceux qui clamaient un tel discourt. « Oui, uniquement... une fantaisie paternelle, et le besoin de renouveler le sang » C'était sans doute beaucoup de cela surtout. Le sang. Toujours le sang. Mais il comprenait, il était après tout du même avis. Ce qu'il détestait vraiment, qui le rendait amer, c'était avant tout l'identité de celui qui le lui imposait. Se plier aux exigences de sa condition, il le faisait, toujours, mais c'était cette fois dur à encaisser. Dur à oublier. Dur de se résigner. Encore plus après un mois de Décembre comme celui qu'il avait passé.

« Bien entendu, l'un ou l'autre, ou bien même les deux » Il n'allait pas préparer le thé lui-même si c'était ce qu'elle préférait... mais c'était par pure inquiétude de l'empoisonner sans le vouloir. Il n'était pas capable de s'occuper de ce genre de choses. Une fois sa compagne servit, lui-même doté d'un verre, il se prit à l'observer en questionnant : « Votre discourt est singulier. Peu d'habitants s'expriment ainsi. La majorité semble agréer au charme de ce nid de magie... sans jamais se préoccuper de ce qui se cache derrière cette image bucolique. Pas vous semble-t-il... » Elle avait une âme ? Donc, elle était affiliée aux humains. Cela excluait un certain nombre de créatures. Presque toutes en vérité. L'âme était l'apanage des humains. Peut-être était-elle une demi-déesse ? Ou un changeforme ? Oh qu'importait avait-il dit ! Et que soit maudite sa curiosité ! « Et si vous étiez amenée à quitter la ville ? En seriez vous attristée ? Ou bien ne serait-ce qu'un changement comme un autre ? Après tout, baigner dans la magie en permanence peut griser et faire oublier la sécheresse des lieux plus arides en ce précieux fluide... »

Etait-elle, ou serait-elle, une ombre de son père, ou avait-elle un esprit bien à elle ? Etait-ce un piège qu'on lui tendait pour le voir parler ? « Je préfère l'extérieur, personnellement » Il offrait sa propre réponse, car après tout, n'était-ce pas de bonne guerre que de faire soi-même ce que l'on attendait d'autrui ? Qu'on ne lui affirme pas qu'il ne jouait pas fair play !

Mer 10 Fév - 18:59
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Moïra Ní Éireann
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Moïra Ní Éireann
Fantaisie paternelle ? Pryam n’était pas le genre d’humain que Mórrígan imaginait agir en étourdi. Non, il faisait sans nul doute partie de ces êtres qui tenaient davantage de James Lynch, le père sans pitié et impitoyable Maire, que du leipreachán farceur, braquant sur le monde qui les entourait des pupilles froides et sans pitié, seulement motivées par des considérations matérielles et pragmatiques. Mais pour obtenir une place confortable dans la société dans laquelle ils vivaient, c’était bien souvent une meilleure approche que de baigner dans les douces rêveries. Malheureusement, cette idée d’élargir la famille avec des étrangères n’était pas ce que l’on pouvait appeler une idée lumineuse, bien au contraire.

-Peut-être les deux, bien que je ne parvienne guère à comprendre l’intérêt de mêler son sang avec celui de parfaits étrangers quand de biens meilleures perspectives demeurent ouvertes.

Elle pinça légèrement les lèvres, dédaigneuse et pas le moins du monde soucieuse de savoir si pareil propos l'avait choqué. Cela seul suffisait à lui rappeler la déchéance dans laquelle s’était enfoncé son peuple, tout comme le reste du monde. Car c’était bien de cela dont elle parlait en évoquant un lien d’appartenance. Celui d’une race à part, différente mais forte, plus forte que toutes les autres, qui faisait la fierté de ses dieux, qui donnait naissance à de splendides guerriers, à des érudits brillants et d’honorables druides, et non à l’une de ces mules méprisables dont le sang impur bridait les valeurs. Non, elle haïssait ces traitres qui se détournaient des leurs pour chercher meilleure pitance sans voir la beauté de leur univers. Toutefois pour ce qui était de la famille Earl, elle n’avait guère son mot à dire, quand bien même estimait-elle qu'ils auraient bien pu se lier avec les autres familles de sorciers de la ville plutôt que chercher ailleurs; ou bien se tourner vers des branches cousines de leur arbre généalogique. Eux faisaient comme il leur plaisait, et elle ne pouvait que rager en se souvenant de temps anciens où le métissage n’avait pas encore souillé la Terre. Les anglais devaient demeurer entre anglais, les créatures de l’occultes ne devaient s’intéresser qu’à leurs semblables, c’était ainsi depuis que l’humain s’était créé. Pourquoi cela aurait-il dû changer ? Ou plutôt, pourquoi l'avait-il fait ?

Acceptant volontiers le verre que l’homme lui tendait et l’en remerciant, la déesse leva le verre vers lui avec un courtois « sláinte* » avant d'avoir un infime mouvement d’épaules en l’entendant parler. Les autres ? Quelle importance avaient-ils ? Pourquoi devrait-elle calquer sa conduite sur la leur, ou même n’était-ce que se comparer à eux ? Ce qu’il disait n’avait pas de sens. Elle était bien supérieure à bon nombre d’entre eux. En avait-il seulement conscience, lui, sorcier ? Probablement pas. Cela avait-il la moindre importance ? Non… pas réellement, pas dans l’immédiat. Il n’avait rien fait qui ne mérite qu’elle le lui apprenne, et surtout : elle était son invitée. Les règles de bienséances avaient pour l’instant force suprême jusqu’à ce qu’il ne commette la moindre erreur, jusqu’à ce qu’il ne l’offense. Ce qui n'était jusqu'à présent pas le cas.

-Mais je ne suis pas totalement inconsciente. Aussi beau soit le fourreau, il n’en dissimule pas moins une lame aux tranchants acérés. Ne pas le voir est tout aussi dangereux que preuve d’une immense naïveté. Preuve en est des récents événements.

Et Moïra n’aimait pas la candeur. C’était une idée stupide et typiquement humain que de ne pas prêter réelle attention à ce qui les entourait, à croire que le meilleur était toujours dominant, en écartant les indices pourtant évidents qui leur apparaissaient et démontraient l’existence d’ombres malfaisantes qui se glissaient la nuit pour susurrer cauchemars et horreurs contre l’oreille endormie. Eux dont l’existence était si brève, eux qui mourraient à la moindre éraflure, eux dont le froid pouvait venir à bout avec une déconcertante facilité, n’avaient-ils pas appris au travers des siècles à prendre garde à leur environnement ? A leurs proches ? Il semblait bien que non pourtant. Et sans leur incroyable facilité à se reproduire à toute vitesse et en grand nombre, sans doute n’auraient-ils guère survécu bien longtemps.

-Partir ? Elle haussa les sourcils, sincèrement surprise. Je ne vois guère ce qui pourrait m’y contraindre, je suis là depuis bien trop longtemps pour qu’un mortel ne le puisse. Mais soit. Admettons que cela puisse arriver.

Elle prit son temps pour réfléchir, observant la délicate couleur qui paraît son verre d’élégants reflets d’un brun doré délicat. La question méritait son attention.

-Où que j’aille, je ne crois pas que quitter cette ville ne puisse me causer le moindre chagrin. Les cités naissent, grandissent et se détruisent, les Hommes changent et se transforment, les mœurs évoluent. Last End n’est déjà plus la même que voilà un an, différente également du premier jour de ma venue. Déception, aye, colère, b'fhéidir*, d’être ainsi poussée dehors, mais nul chagrin qui ne puisse m’étreindre. Je sais déjà où mes pas me mèneront et je connais d’avance la mélodie qui m’enlacera alors ; Éirinn* me fera oublier trop vite la raison de ma venue ici et je passerais encore de longues années avant de me souvenir de cette ville et de ce qu’elle offre, de ce qui m’y avait amené.

Peut-être retournerait-elle alors simplement dans le Sidh, laissant les années terrestres s’écouler sans qu’elle ne les voie. Elle prit doucement une gorgée, laissant la chaleur bienfaisante que lui procurait la boisson se répandre au creux de son être. Pas de la qualité irlandaise, mais cela restait tout à fait agréable ; malheureusement, elle avait dû s’habituer à ces fabrications de plus en plus décevantes, de moins en moins qualitatives à mesure que les années passaient. Mais si elle avait répondu pleinement à ses questions, lui-même lui devait sans aucun doute plus amples explications sur sa courte et intrigante réponse.

-Et vous, pourquoi restez-vous en ces lieux si cela ne vous cause nul plaisir ? Pourquoi ne pas partir ? Vous laissez vous séduire par la magie qui s’y trouve ou d’autres liens plus personnels vous y lient-ils ? Elle s’adossa contre son dossier avant d’ajouter, tranquillement ironique : les facéties de votre père vous envoûtent-elles à ce point ? Ou n’attendiez-vous que ma présence pour vous évader à mes côtés ?

Réellement curieuse, du moins pour les premières questions, elle le dévisagea avec intérêt, toujours aussi fascinée par les paradoxes qui pouvaient exister dans les êtres humains. Le sorcier était beaucoup intéressant qu’elle ne l’avait imaginé et sa conversation était pour l'heure agréable.


*sláinte : santé, à votre santé
*b'fhéidir : peut-être
*Éirinn : l'Irlande

Ven 12 Fév - 19:23
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Howard Earl
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Il eut un geste de la tête, mouvement à peine esquissé, légère inclinaison qui ne trahissait guère ses pensées. De meilleures perspectives ? Qu'on lui montre lesquels en ce cas, car il y était aveugle, incapable de juger quelles familles pouvaient bien avoir ne serait-ce qu'un centième de ce que Pryam exigeait d'une potentielle bru. « Le renouvellement du sang et le maintient d'une autre facette de la pureté, je gage. Après tout, il n'existe que peu de familles dignes de nous, peu ayant un rang équivalent, et aucune en ces lieux, et celles qui demeurent dans le reste de notre digne pays sont déjà toutes nos parentes d'une façon ou d'une autre...  » Mais dans sa bouche, cela ne sonnait nullement comme une fierté, uniquement comme un fait, une explication rationnelle à étudier « En acceptant notre qualité unique comme une source de dangers autant que de respect, il n'est pas inconcevable de se prêter à une certaine mixité ethnique, si elle est correctement dosée, afin de limiter le risque de voir la lignée perclus d'Oubliés  » Et non, il n'était pas entrain de défendre son père, mais c'était effectivement un raisonnement dont il voulait bien admettre la logique. C'était là le choix d'un mal pour un bien, en dédouanement d'une autre frustration, mais hélas, les lignées pures se perdaient de plus en plus, et face aux obligations de la génétique, et de la magie, même leur honneur n'était que peu de chose. Et puis, mieux valait et femme de son rang et étrangère qu'une paysanne anglaise. Pour lui, pour son frère, c'était une autre affaire... Lui ne serait pas contraint par de tels devoirs, et si ses plans fonctionnaient, il n'aurait jamais à s'inquiéter de quoi que ce soit qui ressemble de près ou de loin à des mariages arrangés et à la consécration du sang sur l'essence de l'humanité. « Ce sont de tristes obligations, qui déprécient les rangs des grandes familles  » Mais qu'en son cœur, il portait aux nues. N'était-ce pas le règne des traditions qu'il cherchait à briser ?

Pourtant, il faisait bien de ne pas l'énoncer à voix haute car le reste de ses paroles semblaient confirmer ce dont il s'était, sans vraiment le vouloir, méfié. Elle n'était donc pas mortelle... donc elle n'était pas une compagne adéquate pour lui, cela semblait aussi évident que le piège tendu par Pryam, car d'esprit, elle lui plaisait néanmoins et aurait pu être de celles avec lesquelles il s'entendrait et pourrait construire un ménage stable, si ce n'était par l'affection noué. Pourtant, c'était réellement dommage, car il aurait aspiré à plus d'honnêteté, envers celle qui se dévoilait... Il écoutait, réellement, pleinement, et avec plaisir malgré la conscience du piège tendu. Parce qu'elle était intéressante, quoi qu'il en soit, fascinante. Et lorsque ce fut son tour d'être interrogé, il se fendit de l'ombre d'un rictus : « M'évadez à vos côtés ? C'est donc une escapade que vous m'offrez ? Loin de ces hauts murs et de ces mondanités, ou bien les conservant, m'offrez-vous quelque galante chevauchée ?  » Un brin narquois peut-être, ironie à peine tissée, pimentant simplement une réponse qui ne fermait par leur échange. Un échange qui l'éveillait et lui plaisait : « Je me plie à la tradition, je ne peux le nier, mais j'ai de nombreuses raisons d'accepter. De nombreuses raisons de mettre en gage ma liberté, en un sens, mais d'aucune qui vous plairait d'entendre. D'aucune qui n'égayerait votre journée, ou vous intriguerait... Ce ne sont guère que de pathétiques résultats de choix et de situations passées, des reliquats d'un naufrage encore inachevé...  » Il s'arrêta un instant, comme s'il cherchait, pondérait, s'il devait encore poursuivre, s'il pouvait se le permettre. Au final, il ne le permettait, mais avec cette force de l'ironie, en un sens, de l'auto-dérision mordante qu'il s'infligeait sans s'en contrire : « Des débris dont l'intégralité mettra du temps à s'échouer  » S'ils le faisaient jamais en vérité.

En y repensant bien, sa vie entière n'était qu'un vaste naufrage, mais il ne voulait pas sortir de violon, il s'insupporterait lui-même. « La magie ne m'attire pas, du moins pas en elle-même, résider ici, profiter de ce nexus magique ne m'est absolument rien... La richesse que je poursuis n'est pas celle-ci. J'ai déjà vu les ravages d'un pouvoir qui assèche le cœur de toute utopie, de tout désir de réelle création... pourquoi être roi, si l'on gouverne un tas de cendre, non... Je suis là car j'ai à faire à Last-End, mais je repartirais ensuite  » Son regard sombre brillait doucement, d'une flamme insidieuse mais ferme, décidée sans être agressive ou exaltée. C'était une promesse qu'il s'était faite à lui-même, et à l'immortelle âme qu'il possédait. Une chose qu'il découvrait chaque jour plus délicate et fragile, malgré la puissance qu'elle contenait. Une âme, cela ne se nourrissait pas uniquement de la vie du corps et du vécu, mais des sentiments, s'il comprenait ce qu'il effleurait... Au milieu de son naufrage, il avait encore le désir de sauver quelque chose de lui s'il le pouvait. « Le monde est peuplé de magie et de beauté, de merveilles, pourquoi s'aveugler ? Mon souhait est de voyager, d'avaler les grands espaces et de m'emplir les yeux et le cœur... Je me laisserais porter lorsque rien ne me retiendra plus ici. Et peut-être vous croiserais-je... peut-être irais-je aussi en Irlande, je n'ai pas encore eut le plaisir de le faire. Les terres celtes sont splendides à ce que l'on en dit... mais je l'avoue sans honte, je craindrais alors quelque peu le bruit de la harpe...  » Une expression sans joie, et pourtant amusée, vint ombrer son visage, tandis qu'il l'observait « Du moins, autant qu'un Lord anglais puisse le faire sur ces terres... pensez-vous que je doive m'en prémunir ?  »

Mar 16 Fév - 20:44
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Moïra Ní Éireann
L'étrange sous la normalité : Sous mon masque froid, je suis immortelle. Mes mains si délicates sont plus puissantes qu'elles ne le semblent. La magie m'habite et j'habite la magie.
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Moïra Ní Éireann
Quel que fut l’argument, aucun ne satisfaisait réellement la déesse. Et pourtant, il était vrai qu’à mesure que s’écoulait le temps, il devenait de plus en plus difficile de trouver famille satisfaisante pour préserver la pureté d’un sang. L’évolution des civilisations était telle que le métissage était valorisé, la mixité portée aux nues. Mais il n’y avait pas que cela. Les lignées s’étendaient, se liaient aux plus proches et petit à petit l’écart entre les plus nobles et les plus bâtardes s’accroissait tandis que le nombre des premières diminuait. Difficile alors de trouver alliance convenable. Ce problème que les Earl connaissait, Mórrígan l’éprouvait depuis bien longtemps, pas seulement pour le peuple irlandais dans son ensemble mais, bien des siècles plus tôt, par la disparition progressive des clans guerriers et la lente agonie de certains sangs exceptionnels.

-Sans doute il y a-t-il bien des avantages. Pourtant c’est également ainsi que commencent l’affaiblissement d’un sang, la lente disparition d’un talent, l’amollissement d’une autorité ou d’une supériorité innée. Il est toutefois vrai que c’est un combat dont l’issue espérée n’est pas toujours accessible. A chacun d’emprunter la voie qu’il pense mener, si ce n’est à la victoire, au moins à la survie de ses troupes. Mais qu’il prenne garde de ne pas oublier où se situe son pouvoir.

Il fallait parfois faire des choix, savoir que sacrifier, où placer ses priorités. Songer à l’avenir de sa tribu mais aussi au sien propre. Pryam avait décidé. Mais ce n’était pour plaire à Moïra. Les mortels avaient cependant depuis longtemps prit l’habitude de davantage la décevoir que de lui apporter satisfaction. Pourtant, pour ce cas particulier, il y avait certaines choses qu’elle pouvait comprendre. Une notion que son esprit guerrier ne pouvait refuser de voir. Comme une excuse, peut-être, bien qu’elle ne suffise pas à effacer le nuisible de telles décisions. Oui, la survie pouvait parfois justifier certains travers ; mais, malgré cela, pas la souillure d’un sang noble.

A sa réponse, son sourire fut plus sincère, bien qu’à peine plus marqué, mais bien vite elle le dissimula en portant son verre à la bouche. Ainsi donc, il entrait avec elle dans cet étrange ballet qu’elle leur avait ouvert, dansant sur l’étrange musique que créait le mélange entre les bonnes manières et la séduction. Une étincelle de plaisir s’alluma dans son regard en réponse à cette étrange joute verbale.

-Une escapade, aye, ou bien plus encore. Qu’importent les mondanités quand la terre s’ouvre devant vous ? Non, il faut savoir goûter la liberté où elle est, telle qu’elle est, sans la souiller des jeux frivoles qu’affectionnent tant les humains. Galante chevauchée, dites-vous ? Farouche cavalcade, préférais-je. Courtisez la sauvagerie, flattez la plus brute bestialité. Éveillez vos sens à mes côtés. Ignorez-vous tout de cet émoi ? N'êtes-vous donc pas tenté par cet enfièvrement ? La rousse eut un instant de réflexion avant d’ajouter d’une voix posée : Quant aux raisons dont vous me parlez ainsi… je préfère demeurer seule juge de ce qui peut ou non m’intriguer.

Et lui, dans son ensemble, la divertissait. Il était tellement banal… et délicieusement hors du commun. Son esprit était vif, ses propos réfléchis. Il n’était pas simple badaud qu’elle croisait dans la rue et son intelligence la réveillait. Pensivement, elle détaillait ses traits, étudiait son visage, observait son regard. Roi ? Oh oh ! Mais pourquoi être roi quand il était possible d’être dieu ? Non, il la décevait presque sur ce point. Mais il était mortel et réfléchissait en tant que tel. Quel ennui que ne connaitre que cette Terre. Déjà elle se noyait dans la monotonie de son existence, alors pour cet être qui n’avait connu de forme que celle d’un humain, qui n’avait voyagé que par les technologies des siens, ce devait être bien pire.

-Volez, galopez sitôt que vous le pouvez, murmura-t-elle doucement, le regard absorbé par le brun chaleureux de son verre. Nulle chaîne ne doit vous lier à votre malheur, nulle entrave ne doit stopper votre élan. Goûtez, savourez la liberté, détachez-vous pour vous appréciez sans tarder ce dont vous rêvez tant, avant que ne s’éteigne cette passion qui vous anime. Trop nombreux sont les rêves abandonnés, trop peu sont ceux exaucés. Battez-vous, défiez vos pairs, écartez tout ce qui vous lie ici.

Parce que les Hommes ne prenaient plus aujourd’hui le temps de respirer, de s’imprégner de la beauté de la nature, de découvrir quelles merveilles les dieux avaient créé, de rencontrer leurs ancêtres disparus, leurs coutumes malmenées. Parce qu’ils ne faisaient que courir sans s’arrêter, égoïstement, délaissant tout ce qui les animait auparavant, perdant leur fougue et fuyant leurs pulsions. La rage de vivre, la rage de vaincre, n’était plus qu’une étincelle trop vite étouffée par les besoins d’une société en déclin. Et s’ils ne se rendaient pas compte de la souffrance qu’ils s’infligeaient à eux-mêmes, leurs divinités n’avaient que trop conscience de leurs propres forces déclinantes. Parce que les croyances étaient devenues, comme tant d’autres choses, une perte de temps, un simple loisir, souvent considéré avec dédain. Parce que leur existence n’étant plus qu’une répétition constante de tâches identiques, ils n’avaient plus besoin des dieux, ils n’avaient plus besoin de ce qu’avaient protégé si longtemps leurs aïeuls. La vie, la vraie, faite de hurlements et de balbutiements, de sang frais et de terre humide, de peurs irraisonnées et de joies inégalées. Non, il n’y avait plus cette passion incroyable qui faisait courir à toutes jambes sur un champ de bataille, il n’y avait plus cet amour farouche qui armait le bras du faible pour défendre ses camarades.
Sans joie non plus, elle le fixa, mais sans qu’aucun amusement ne vienne déformer ses traits. Profond était son regard, ailleurs était son esprit alors qu’elle laissait d’antiques mélodies résonner dans son cœur, emplissant ses oreilles de chants guerriers qu’elle seule entendait tandis que la mélancolie qui l’étreignait faisait vibrer tout son être. Tourné, en cet instant, vers une vie qui n’existait plus. Et que lui importait le quelconque piège qu’avait pu lui tendre son interlocuteur.

-Vous prémunir ? Mais Éirinn n’est dangereuse que pour celui qui la craint ! Non, ne laissez pas la peur vous posséder si d’aventure vos pas vous mènent jusqu’à cette terre de merveilles. Allez-y, imprégnez-vous de ses chants, laissez la Clàrsach* vous envoûter de ses douceurs sans chercher à la fuir. Admirez la lame de la mer se fracassant sur le bouclier noir des falaises tourmentées, respirez le vent froid qui hurle des cantiques passées, traversez les vestiges agonisants de Cliffs of Mohr, voyez la beauté des loch ensanglantés par le soleil couchant et enivrez-vous de cette pureté oubliée, piétinée par les tambours de ce qui se nomme aujourd’hui civilisation !

Elle pencha très légèrement la tête, quittant sa transe pour reprendre une voix veloutée, mêlant l’aguichant à un étrange humour sérieux.

-Oui, allez-y, peut-être ferez-vous plus que me croiser. Je vous amènerai aux sommets les plus hauts, vous ferai découvrir le bonheur de dominer les plaines. Quelle crainte peut résister aux frissons de pareil chef-d'œuvre ? Vous oublierez vos rêves de voyage pour demeurer en ces terres, et sitôt quittées vous vous languirez de les retrouver. Prenant élégamment une nouvelle gorgée de son verre déjà à demi vide, elle ajouta avec une pointe de malice : Je veillerais sur votre âme lors de vos pérégrinations, si c’est pour elle que vous craignez. A moins que ce ne soit de moi que vous ne vous méfiez ? N’ayez crainte : je vous la rendrais intacte... lord anglais ou non.

*harpe, en gaélique

Lun 29 Fév - 18:58
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Howard Earl
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Howard Earl
Le Sacrifié

Il n'avait pas l'impression que tous deux aient la même notion de l'affaiblissement du sang. Néanmoins, la question ne l'encourageait guère à en débattre. S'il voulait avoir une discussion à ce sujet, il pouvait aller voir son père, sa mère, ou n'importe quel autre membre de sa famille, à quelques moindres exceptions près, qui lui tiendraient une tribune pendant des heures entières... mais cette femme, sensément venue pour de possibles fiançailles, n'était pas de celles avec qui il voulait discuter de telles choses. S'ils se trouvaient un temps où l'intimité était de mise, il le ferait alors sans doute, car elle serait à ce moment-là destinée à lui être liée à vie. Pour le moment, et au vu de son manque de connaissance aux sujets des principes fondamentaux qui motivaient les grandes familles sorcières, mieux valait conserver un sujet plus neutre... du moins, un sujet qui ne soit pas aussi connoté pour beaucoup d'individus. Plus tard, s'il se trouvait qu'elle était la bonne, ses avis contiendraient peut-être de quoi modifier un peu les principes fondamentaux des fondateurs. Pourquoi pas après tout ? Mais chaque chose en son temps. Avant cela il y avait encore à savoir à quel point elle pouvait être intéressante... et surtout, ce qui se passerait s'il choisissait en toute connaissance de cause de l'épouser, défiant ainsi le test soumit par Pryam. Sans doute son père ne le verrait-il pas d'un très bon œil, mais pourrait-il seulement revenir sur sa parole d'agréer au choix qui, de ces rencontres, surviendrait ? De telles questions devaient être réglées oui, et dans tous les cas, il lui faudrait certainement compter sans son géniteur pour voir leurs us rénovées. Ainsi était hélas l'état de leur maisonnée... un état transitoire, troublé, qui pouvait annoncer à ses yeux la fin de leur lignée ou sa nouvelle radiance dans un siècle enfin accepté.

D'aucun auraient-dit qu'il était à l'image de cette lignée déclinante, dont la décrépitude n'était pas encore perçue derrière la noblesse et l'austère liturgie que les siens cultivaient, et pourtant s'il se teintait des mœurs de sa maisonnée, il avait aussi cette envie, cette aspiration à un tout autre univers que les sombres sentiers jonchés de tombeaux et de secrets. « Demeurez, en ce cas, je ne pourrais vous en détourner » Pourtant la question restait : était-il de ceux qui voulaient par la violence s'exalter ? Pas vraiment. Fut un temps où il se cédait à de telles rêves, de telles envolées, mais ce temps était passé. Il n'avait plus le goût à de telles fièvres irraisonnées, voulant goûter à d'autres breuvages, expérimenter d'autres rivages. La nature lui était agréable, s'était un fait, mais non point sa violence vécue et encouragée. Il aimait à faire partie d'un tout plus noble et plus éclairé, mais ne souhaitait pas se céder aux orgiaques tourbillons... Non, il ne connaissait pas, plus, cet émoi et n souhaitait pas le trouver, pour autant que la proposition fut d'attrayante façon énoncée. On ne pouvait guère nier qu'elle parlait avec le cœur, et elle n'en était que plus convaincante. Et pourtant, à l'observer, il n'aurait pas pensé qu'elle dissimulée une telle rage exaltée, une telle faim de la naturalité. Elle semblait parfaitement intégrée à cette société policée que, par ses propos, elle dénigrait. Une femme d'autorité et de goût, à la parfaite position... mais derrière cette apparence, elle cachait des vœux piquetés de l'aura d'un autre temps. Du moins était-ce là ce qu'il lui semblait, ce qu'elle laissait entre-voir. Peut-être n'était-ce pas la vérité, peut-être était-ce un autre piège, un autre faux-semblant, il était incapable de l'affirmer. Et néanmoins, il en doutait. Que ce soit la vibration de sa voix ou le péremptoire de son questionnement, rien ne lui semblait le fruit d'un travail d'enivrement, si ce n'était celui de céder à une animalité qu'il refusait. Tous deux étaient bien différents, elle comme un feu qui couvait dans une gemme, lui un froid tombeau lentement rongé par l'eau d'un balbutiement de renouveau.

Et pourtant, malgré leurs différences, malgré son incapacité à se perdre dans ce qui semblait la faire vibrer, ils en venaient en fin de compte à une semblable conclusion : rester à Last-End n'avait guère d'intérêt. Pryam avait-il seulement conscience qu'en lui envoyant une telle femme, avec un tel discours, il ne faisait que renforcer sa volonté à s'évader ? Était-ce là son but, ou bien était-ce un coup mal placé dont l'issue n'était nullement celle qu'il avait envisagé ? Elle l'encourageait à le défier, à rompre ses chaines d'avec Last-End et tout ce qui, en elle, le répugnait. Comment douter de ses décisions, alors, comment en venir à se remettre en question lorsqu'une parfaite inconnue, peu concernée par les inclinaisons des siens, lui annonçait semblable parti, si semblable au sien que cela lui semblait presque impossible à croire ou agréer. La vérité n'en restait pas moins la même, il partirait oui... mais malgré la préciosité de ses aspirations et de ses désires, ce serait plus tard, lorsque ses devoirs ici seraient accomplis et qu'il serait délivré d'une partie du poids qui, sur ses épaules, pesait. Dans sa courte vie de mortel, il n'avait justement connu que chaînes et entraves, la lueur au fond de son âme, qui n'était ni bien ni espoir mais humanité dans sa forme de liberté, cette lueur si importante puisqu'elle participait de la complexité et de l'intégrité de leurs entités, s'était progressivement éteinte. Il n'existait plus de place pour elle en lui, et pourtant il s'accrochait désespérément à l'idée de pouvoir un jour s'établir à l'étranger sans jamais avoir à regarder en arrière, à se sentir rattaché à ce lieu. Il était même prêt, sans l'avouer, à abandonner ses pouvoirs pour vivre une vie de simple humain si cela signifiait que ce qui le hantait disparaissait. « De délicieux mots... mais il est plus moins aisé de leur donner du sens que de les prononcer » Douce exhalaison, lassée par un poids trop longtemps supporté « Je ne souhaite pas plier et je ne plierais jamais. Mais diffère l'aspiration à la survie hors des griffes décrépies et la connaissance d'une voix de salut, de soulagement d'une âme qui ne sait se reposer » Aveux difficile, que, peut-être, elle ne comprendrait, qu'importait après tout mais c'était bien la vérité : il ne savait goûter le plaisir et la liberté alors même qu'il y aspirait.

Mais tout pétri de naïve ignorance et de sombres prédictions, il ne pouvait totalement se laisser emporter par les paysages qu'elle dessinait, qui pourtant, devant ses yeux, s'animaient, vivaient et se mouvaient en des ondoiements chamarrés, mélanges de couleurs et d'impressions diffuses. Mais au milieu de cet enchanteur tableau, faite d'ombrances naturelles et d'un monde sublimé, il y avait la funeste mélodie qu'elle espérait le voir embrasser, et qui lui retournait le cœur et l'esprit en des frissons oubliés, viscéraux et sans explication. Les musiques lui étaient douces, mais pas celles-ci... les cordes pincées semblaient contenir de sourdes promesses oubliées, la suave sonorité un glas dissimulé, n'attendant que lui pour défaire les nœuds de la destinée.Oui le prémunir... de Dagda pour commencer. Il y avait quelque chose en Irlande qui l'attirait et le repoussait tout à la fois, et il aurait préféré fouler les chemins de bien des nations plutôt que de se confronter immédiatement à ce qui, en ces lieux, l'y tourmentait. Un jour il irait, mais uniquement s'il parvenait à conjurer cette épée de Damoclès qu'il sentait osciller au-dessous de sa tête. « C'est moins la peur qu'une saine méfiance » Leur monde était dangereux et il valait mieux ne pas le sous-estimer « Peut-être suis-je méfiance à l'excès, peut-être suis-je trop critique, mais j'ai appris à mes dépends que merveilles coûtait parfois énormément et j'aime à penser qu'un peu de protection n'est nullement un mal lorsqu'on désire s'imprégner de'étrangères natures et de nouveaux horizons » Les yeux cillaient, et il prit une gorgée avant de poursuivre avec tranquillité : « Néanmoins et quoi qu'il en soit, si je vous y croise sans doute aurais-je alors des raisons d'enterrer ces velléités. Vos mots sont lacés d'un languissant attrait et je ne suis nullement fermé à changer ces perceptions pourtant bien ancrées. Vous avez cependant raison, c'est pour mon âme et mon intégrité que je crains, car ce pays que vous décrivez avec tant de sublime abandon chante pour moi d'une insidieuse trahison... que je ne saurais expliquer. Je ne sais si elle a une quelconque valeur, cette âme pour laquelle je crains, si ce n'est la préciosité qui vient avec la singularité pour ceux qui ne possède ce bienfait... et si je me trompais ? » Interrogation soudaine lancée comme un presque défi « Peut-être n'est-ce pas pour mon âme que je devrais m'inquiéter, ou peut-être n'est-ce pas ces terres elles-mêmes dont je devrais me méfier mais de leur oratrice, de leur héraut inspiré... vous ? » L'ombre d'un sourire, l'ombre d'un pétillement sourd dans le regard, profond, tranquille, de celui qui contemple un destin dont une impalpable entité traçait les lignes, sachant qu'il les défierait.

Silence pourtant, soudainement, confortable dans cet espace tandis qu'ils échangeaient. Lueur jouant dans l'ambré de son verre tandis qu'il l'observait. Le temps n'avait plus d'importance soudainement, alors qu'ils échangeaient et qu'il se laissait aller à bien plus de prolixité qu'il n'en montrait au quotidien. C'était sa capacité d'une année à parler qu'il dilapidait sans s'en troubler. « A quoi rêvez-vous, lorsque votre être s'élève pour atteindre ce pays qui vous charme tant... à cette mer d'encre, à ces falaises et ces monts, ces lacs et landes ? Tendez-vous parfois l'oreille pour saisir des fragments de ces anciens chants pour vous bercer, votre cœur ailleurs que dans votre poitrine, battant loin dans l'herbe et l'humus ? Imaginez-vous vos vœux par le vent porté pour atteindre d'anciens tertres, des caers et des tumulus dans les matins gris ? » Sa voix semblait se perdre dans le silence douillet des lieux, enlaçant des ombres assoupies comme les flammes dans l'âtre « Moi mes racines sont celles des guerres de la rose, de l'Albion naissante au temps du mur d'Hadrien et des invasions obscures. Et pourtant mes rêves se parent peu de rosiers et de trônes étincelants, je n'aspire nullement à Camelot, et aux profondes forêts... Non, lorsque j'aspire réellement à quelque étrangère vision, que mon esprit m'échappe pour arpenter de tortueux et impalpables sentiers, c'est le bruit de la haute mer que j'entend et qui me berce, le roulis sous la large pontée de bois, le claquement des voiles et des cordages dans le vent hurlant, et l'odeur de l'iode, si riche et si puissante qu'elle emplit vos narines et oblitère les souvenirs de la terre » Intonation douce, par instant essoufflée, et par instant tout à la fois vibrante et lassée, contemplative « L'océan immense, à perte de vue, ni attaches ni cachettes sous l'oeil du soleil, fouetté par le vent salin. Les vagues d'huile de l'arctique et le gel qui s'insinue et vous fait vous sentir vivant et mort tout à la fois, qui agrippe à votre cœur de serres cruelles alors que le ciel se fait si blanc qu'il n'existe plus de délimitation entre le sol et le ciel... un nef voguant sur l'infinie d'un autre monde »

Il s'interrompit, comme si quelque chose en lui s'était accroché, avait attendu la conclusion de sa diatribe à l'aune de sa survie. Son souffle revint, presque douloureux, alors qu'il se rendait enfin compte qu'il avait à peine respiré pendant tout ce temps. Il se dévoilait bien trop pour une première rencontre, mais c'était une part de son cœur qu'elle avait laissé à sa portée et le retour semblait terriblement équilibré. Son visage se peignit d'une expression tourmentée, et pourtant languissante de cet univers qu'il ne pouvait approcher que dans des rêves troublés. Et alors même qu'il ressentait une étrange réalisation à avoir donner, ne serait-ce qu'un instant, corps à ses souhaits, à ces images qu'en lui-même il peignait, il prenait également, terriblement, conscience de la lourdeur de son corps, de la faiblesse de ses os et de sa chair, et il se haïssait pour cela... Son verre vide vint se poser sur la table basse plus sèchement qu'il ne l'aurait voulut, mais il n'y accorda pas la moindre attention. Un soupire lui échappa et il reporta son regard de la surface transparente mais souillée de whisky à son interlocutrice. « Les concepts mortels doivent paraître si fade, n'est-il pas ? » Ironie et cinglante auto-dérision, conscient du pathétique de sa condition en comparaison de l'écho immémorial qui le portait...

Jeu 3 Mar - 19:11
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Moïra Ní Éireann
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Moïra Ní Éireann
Il y avait des notions qu’une divinité pouvait difficilement comprendre. La famille, entre autres, du moins celle dans le sens où l’entendait les humains. Mórrígan n’avait jamais eu ce rapport si particulier avec ses géniteurs qu’avait la plupart des mortels avec les leurs. Pour elle n’existaient que le clan et le peuple ; que les clans et son peuple. Et si le clan était une famille, si la famille était un clan, les deux étaient cependant deux concepts suffisamment différents en eux-mêmes pour qu’elle ne parvienne pas à saisir toute la subtilité que ce mot de famille possédait. Ce n’était ni de la mauvaise volonté, ni même la manifestation de son mépris. Notion inconnue, dont la portée lui semblait par trop éloignée de sa réalité personnelle, qu’elle ne pouvait qu’effleurer quand bien même avait-elle vécu tant d’années avec les humains, quand bien même avait-elle consacré une partie de son musée à la famille Earl, quand bien même devait-elle veiller sur ces êtres. Quelles que fussent ses connaissances, certains domaines lui restaient profondément étrangers, aussi agaçant cela puisse être. Et le fait que la famille chez laquelle elle se trouvait à l’instant présent n’était pas n’importe laquelle, aussi bien dans sa gestion interne que dans son rapport à la société externe, ne jouait pas forcément en sa faveur afin qu’elle comprenne les rapports entre ses membres, leurs désirs, leurs souhaits pour le futur. Que sa vision de la pureté ne soit donc pas exactement la même pour elle que pour eux.

Pas plus elle ne comprenait que celui qui pouvait aller où il le voulait ne le fasse pas. Elle, qui était liée à Last End pour les besoins de sa propre survie, qui avait besoin de sa magie pour ne pas sombrer comme le mythe oublié qu’elle était déjà, ne pouvait admettre que quiconque puisse se museler ses désirs de la sorte, se priver de la concrétisation de ses vœux inavoués. Elle craignait, sans doute, cet instant qui viendrait où les pages des livres ornées de son nom demeureraient fermées à jamais, où les enfants ne connaitront d’elle que quelques vagues et grossières représentations de jeux vidéos, où elle se sentirait si décalée de ce monde sur lequel elle devait veiller qu’elle n’aurait d’autre choix que de le quitter ; car c’était là sans doute les seules raisons qui la retenait en ces lieux. Et elle souffrait, souffrait tant de l’éloignement de sa terre, de ne savoir quand elle la retrouverait, celle dont elle avait été la grande reine et dont elle n’était aujourd’hui plus rien. Oui, la passion la dévorait, une passion que rien ne pouvait éteindre, une passion que rien ne pouvait alléger, une passion vorace et brûlante de retrouver tout ce qui lui était cher pour apaiser les tourments qui étaient siens. Une passion non pas pour un être, mais pour une entité finalement beaucoup plus vaste. Comment Howard aurait-il pu le savoir, le comprendre ? Comment aurait-il pu seulement pu effleurer cette idée qu’elle, cette femme d’apparence si humaine sans doute, appartenait réellement, du plus profond de son être, à un pays et réciproquement ? Elle en faisait tout simplement intégralement partie, et elle sentait son intégrité mentale se déliter à mesure que s’écoulaient ses trop solitaires décennies. Sans port d’attache, sans plus d’horizon qu’une ligne grise et monotone.

-Quelle étrangeté que l’esprit humain. Alors même que cette âme aspire à davantage de liberté, à se détacher de ce qui l’entrave, à se repaître de ce qui la satisferait, elle demeure prisonnière d’obligations prosaïques, sans que rien ne lui permette d’atteindre ses désirs par trop refoulés. Tant de raison, autant d’aveuglement…

Simple constat de ce qu’elle voyait, elle le fixait pensivement, le regardant ainsi qu’elle l’aurait fait avec un bocal contenant quelque mystère qu’elle chercherait à percer. Quelle tristesse sans doute que ces êtres éphémères qui dilapidaient en vain le peu de temps qui leur était imparti, se pliant à des règles qu’ils ne comprenaient pas eux-mêmes. Quand avaient-ils donc cessé de rêver ? Quand avaient-ils délaissé, dédaigné ainsi qu’ils le faisaient leur nature humaine ? Quelques-uns, parfois, se lançaient dans l’inconnu, plongeant dans l’exaltation des sens au détriment de tout le reste, se laissant porter par leur désir de l’inconnu et de l’aventure. Sur eux, Moïra n’avait nul jugement, nulle opinion si ce n’était qu’ils avaient cette capacité trop rarissime de ressentir l’appel de la nature et de plonger vers lui. Mais ils étaient peu nombreux et bien souvent les espoirs secrets de leurs vies s’éteignaient avec leur dernier souffle, sans jamais avoir pu se réaliser. Et il ne restait d’eux qu’une âme terne et sans attrait, insipide et si semblable aux autres.

-Je vous effrayerais donc ? Elle le fixa pensivement, le regard triste en songeant à une autre époque, avant qu’une esquisse de sourire moqueur ne se dessine sur ses lèvres ourlées, réponse à celui si léger d’Howard. Sage décision ou peur irraisonnée ? Voilà bien longtemps que pareil sentiment ne s’est pas éveillé chez les humains à mon encontre, quelle qu’en fut la raison. Mais sans doute ne devrais-je trop me réjouir si même envers ma terre vous avez quelques craintes. Vraiment, puis-je espérer une telle chose ? N’était-ce point un doux espoir que vous me faites miroiter ? Mais que craignez-vous de moi alors, que je ne brise l’entièreté de votre âme ou que je ne vous rappelle des désirs par trop refoulés, des songes éloignés qui reviennent vous hanter ? Craignez-vous donc de céder à la tentation, en dépit de votre méfiance exacerbée ?

Il avait parlé de trahison mais comment Éire pourrait-elle seulement faire ressentir pareil sentiment ? Oui, pour elle, en un sens elle existait bien, cette douloureuse déloyauté, cet amer rejet. Cela faisait bien longtemps, trop longtemps qu’elle en avait subi l’abandon, trop longtemps que ce poignard aiguisé meurtrissait son cœur qui n’existait pourtant que pour ceux qui désormais la rejetait. Mais lui, que pouvait-il savoir de cela ? Comment pouvait-il prononcer de telles paroles, tout sorcier qu’il était ? Il était trop jeune, trop ignare. Il n’avait rien, rien pour justifier ses propos ! Il ne pouvait comprendre à quel point cette terre était belle, il ne pouvait saisir que cet abandon ne provenait que des humains, que si insidieux et sournois murmure il ressentait, alors cela ne provenait que de lui. Et pourtant, s’il avait vu l’éclat de ces êtres tels qu’ils étaient autrefois… S’il avait connu la fierté la fierté qu’elle avait-même ressenti à voir ses soldats, ses « glands » ainsi qu’elle les appelait parfois, fouler cette terre superbe sur laquelle ils étaient… Non, il devait comprendre que jamais son âme ne pourrait souffrir de découvrir telle merveille, beauté si sauvage. Parce que la nature ne pouvait trahir, parce qu’elle était incapable de paraître ce qu’elle n’était pas, parce qu’elle était elle-même par trop déchirée par la bêtise humaine. Parce que les mortels créaient pour briser sans se soucier des dommages qu’ils causeraient, oubliant la sagesse qui avait été leur en des temps plus anciens. Les dieux leur avaient pourtant montré ce qu’il fallait savoir, avaient pointé du doigt ce qui devait se préserver, s’étaient dévoilés pour le bien de cette espèce sans laquelle ils ne pouvaient vivre. C’étaient eux, les traîtres, qui avaient balayé ces enseignements d’un revers de la main ! Ils n’avaient encore fait que détourner le regard de leurs responsabilités, oublier ce qu’ils voulaient pour ne conserver que ce qui pouvait les arranger. Oh certes, cette vie que beaucoup pouvaient désormais posséder était plus confortable en bien des points qu’autrefois. Mais ils l’avaient découvert au détriment de tout sentiment, de toute passion, ils avaient sacrifié le cœur de leur être pour devenir faibles et pitoyables. Que restait-il des guerriers d’antan, si ce n’était quelques cendres voletant dans les nuées, parcourant inlassablement les terres où s’étaient effondrés leurs corps ?

Mais malgré tout cela, malgré cette rancœur, malgré cette douleur, elle demeurait. Mórrígan observait, patience infinie qui était sienne en ces temps troublés. Tout comme elle écoutait, avec plus d’attention qu’elle ne l’aurait sans doute pensé en passant le pas de cette porte, l’écho des paroles du sorcier qui s’attardait dans la pièce. Elle le laissait écouler le long fleuve de ses pensées, remontant avec lui, ombre silencieuse, jusqu’à leur source. Elle vibrait en silence, solitaire, plongée dans l’eau noire se fracassant sur les rochers, envoûtée par le murmure glacé du vent automnal, glissant le long des collines d’herbe drue que ses pieds nus effleurés en secret. Pas d’attaches, mais des caches loin du soleil, sans doute. Une mer toute grise se perdant dans le ciel anthracite annonciateur de tempêtes. Les branches tortueuses d’un arbre cherchant en vain à monter vers les cieux. Sentiers perdus, chemins cachés, se faufilant en secret sous les forêts épaisses. Ruisseaux délicats bordés de fleurs pâles, parcourant tranquillement la route qui était sienne. Et le fier navire, tout empli de guerriers dont les rugissements transperçaient les nuages, qui voguait librement en bravant les lames d’eau. Ô, douce nostalgie, ô, triste mélancolie. Quelle langueur terrible qui la saisissait à pareilles pensées. Elle en aurait pleuré, sans doute, si elle l’avait pu. Mais elle était déesse, et déesse du combat. Jamais elle n’aurait toléré pareille faiblesse, jamais de telles larmoyantes lamentations ne devaient provenir d’elle. Non, son verre se vida, plutôt, tandis qu’elle laissait l’alcool se répandre en son corps et que ses yeux farouches étincelaient sous l’émotion qui était sienne. Sans répondre, elle se pencha pour attraper elle-même la bouteille de whisky, emplissant le récipient vide de son interlocuteur avant de faire de même avec le sien. Dans un geste que l’habitude rendait inconscient, Moïra effleura son pendentif d’argent qu’elle s’était fait faire, bijou unique au monde, bien des années plus tôt. Lune, épée et louve hurlante, chacun reposant délicatement sur une triskèle au centre incrusté d’un petit rubis sombre.

-Fade ? Aye, sans doute. Mais moins que vous ne semblez le penser. Mon existence ne dépend que des mortels, ils sont ma raison d’être, tout comme la source de mon déclin. Vos concepts sont à l’aune de ma présence en ces lieux. Non, je comprends nombre d’entre eux, pourtant… certaines de vos émotions, de vos réactions me semblent parfois bien lointaines, quelques aspirations paraissent incompréhensibles. Que ressentez-vous tandis que vos enfants grandissent, que vos parents périssent ? Qu’éprouvez-vous au premier amour, au premier voyage ou au premier baiser ? Comment comprendre ce qui lie une famille, ou ce qu’est un corps vieillissant ? Quelles sont les souffrances que causent vos maladies, quelles sont les peurs de vos petits, les espoirs de vos aînés ? Pourquoi votez-vous pour ces humains égoïstes qui n’ont d’autre aspiration que celle de leur satisfaction personnelle ? Que gagnez-vous à refaire, chaque jour, la journée de la veille ? Pourquoi brider vos instincts, renier votre nature pour vous plier aux désirs de vos géniteurs ? Quels sont les rêves que vous parcourez la nuit, les cauchemars dont vous vous abritez ? Tant de mystères que je ne puis connaitre… Et pourtant… Elle releva son verre, laissant l’alcool être océan portant ses embruns à son visage, pourtant vous me parlez de hauts cordages et de vent hurlant, et il me semble alors que je pourrais être humaine à mon tour si de telles aspirations suffisaient à définir ma condition. Si vos rêves sont de voiles courbées par le fouet du ciel, alors il n'y a rien de fade en eux.

Dim 13 Mar - 21:12
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Howard Earl
L'étrange sous la normalité :
Je suis l'héritier de la branche principale des Earl, je suis un Nécromant et un membre du secret. Je le protège et le soutient. C'est dans mon intérêt.

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Howard Earl
Le Sacrifié

Éphémère expression, mi perplexe mi amusée, de cette saveur d'une taquinerie pleine d'ironie. Étrange était l'esprit humain, certes, en effet, peut-être parce que l'intégrité de ces créatures qu'autrement on nommait était triple et non double, figée et non malléable. Sans doute était-ce difficile, pour une créature, de comprendre la complexité de ce qu'était le cheminement d'une pensée humaine, avec ses travers et ses logiques propres, avec son objectivité et sa partialité, son paradoxe, tout simplement. Mais en tout et pour tout, le problème était souvent prit par le mauvais bout, abordé par le mauvais concept. Lui aussi s'y trompait la majeure partie du temps, de sorte qu'il était ensuite très difficile de concilier l'erreur des instants de lucidité. Peut-être y avait-il également une part de chaque être, humain et non humain, qui ne voulait absolument pas comprendre. Ce ne serait pas totalement incompréhensible, dans l'absolue, qu'un instinct quelconque refuse de se plier à un exercice qui demandait justement de le dépasser. C'était e partie ce mystère, ce domaine d'étude si peu abordé, qui l'avait poussé à effectuer ses études de neurologue, l'autre raison étant la recherche d'une curabilité de son affliction. Ses études pourtant le poussaient souvent à se plonger autant dans la philosophie et la rhétorique, la psychologie, que l'étude médicale pure. « Je comprend votre perplexité, pourtant elle naît en partie d'un flou dans la définition de ce que vous contemplez. Cette étrangeté est également un mécanisme simple à observer, lorsque l'on sait exactement ce que l'on a décidé d'examiner. Si cela vous intéresse, il ne m'est pas impossible de tenter de vous expliquer au moins les impondérables de cette curieuse condition humaine  » Penchant la tête, il dédia un regard posé, quoi que pensif, à la créature qui, avec lui, conversait si tranquillement. Le mélange quelque peu chaotique tendait à l'amuser, oui, même lorsqu'il en était lui-même la victime. Les concepts se rencontraient, se confondaient ou s'annulaient dans un ensemble possédant sa propre partition bien ordonnée, la mise en abîme de ce qui pourrait paraître n'avoir aucune cohérence, et qui, finalement, lorsque l'on s'y perdait, commençait à paraître plus clair. Parfois même plus clair que des concepts roidement établis, auxquels il restait pourtant, en conclusion, un 'pourquoi' impossible à effacer. Et s'il on osait y ajouter le concept de création divine de l'être humain, comme la bible le présentait, alors l'ingénieur céleste qui avait conçu l'humanité devait davantage tenir de Lewis Caroll que de Morgan Freeman.

En un sens, il était bien plus complexe de disserter des mécanismes de la vie et de l'intellect humain que de parler des aspirations que la magie pouvait faire naître. Et pourtant en un sens, même la magie était une question humaine, car qui en connaissait véritablement le cœur et le fonctionnement ? Tout comme les hommes étaient fruit d'une création sans visage et inconnue, qu'ils ne comprenaient pas, et dont la finalité leur échappait, les créatures semblaient être enfants de la magie, mais dans un but tout aussi inconnu. Pourquoi ? Oui pourquoi ces différences, cette diversité, à quoi rimaient les magies et dons, et du sang la pureté, qu'est-ce qui faisait vraiment qu'un Oublié naissait dans une famille de longue et pure lignée ? Qu'est- qui donnait sa force à telle ou telle végétation ? Pourquoi tel dolmen était-il lieu de magie et pas un autre ? Pourquoi tel lapin pour la magie vaudou ? Pourquoi oui… cette question qui irritait tant d'instructeurs, de professeurs et de parents à travers le monde entier était pourtant, à son sens, l'une des seules questions pertinentes lorsque l'on tentait de comprendre le monde dans lequel on existait. « Vous jouez de pléonasmes, Madame. Et pourtant, plus que de briser mon âme, je gagerais sur un désir de vous l'approprier. Je ne gage certes de sa qualité, mais elle reste pareille à ses semblables, n'est-il pas, une énergie à utiliser, à consumer. Peut-être, pourtant, à l'aune de cette complexité humaine qui est également mon fardeau, je signifiais autre chose que cette seule considération pourtant saine et sincère. Je tairais pourtant l’entièreté de ma pensée, ne vous en vexez pas, si vous le pouvez, car cela serait me mettre plus encore en danger  » Il ne souhaitait nullement voir se réaliser ces sombres prescience avec lesquels il vivait. Hors il craignait sensiblement qu'elles ne prennent corps si à voix haute il les énonçait. Mortelle incarnation qui alors risquait de l'achever, lui qui déjà avait bien du mal à survivre dans l'état déplorable qu'il supportait. Peut-être voulait-il aussi voir si elle tenterait d'en apprendre davantage sur tout cela ou si sa curiosité avait quelques limites.  Une déesse curieuse… voilà qui n'était pas commun. Du moins, il ne s'était jamais imaginé les déesses comme ayant un sens de la curiosité comme les mortels pouvaient en développer. Mais peut-être s'était-il fourvoyé après tout….

Il l'écoutait, se demandant comment elle se définissait et ce qu'elle vivait, qui puisse tant différer de ce que les humains étaient. Elle se reconnaissait dans le récit qu'il tissait, et en un sens, il ne pouvait qu'apprécier… « Vivace est ce songe qui me poursuit  » convint-il d'une voix lointaine « Je sentais parfois l'iode emplir mon odorat en m'éveillant dans mes jeunes années, le bruit des vagues aux oreilles. Avec le temps ce qui me restait de cette viscérale inspiration a changé. Mes lambeaux de souvenirs éphémères s'attachaient à la blancheur du ciel, à cette sensation d'éternité et d'infini qui m'appelait…. Lorsque je m'éveillais, j'avais mal, mon âme tambourinait contre mon corps, contre sa cage de chair, du moins était-ce ce que j'imaginais. La sensation du roulis me manquait, et bientôt, la douleur physique à ce manque conjugué faisant, je ne parvenais plus à dormir, ou si peu...  » Un soupire mourut sur ses lèvres alors qu'il tournait la tête de droite à gauche, en un geste lent de dénégation ou de lassitude « Ce n'est pourtant pas mon humanité qui ainsi se définit, et bien que je ne puisse affirmer connaître ce qui se love dans le noyau de mes pairs mortels je sais néanmoins que ces visions de mers australes et du bout du monde ne sont pas du fait de ma condition mais d'une langueur étrangère, qui toujours m'a habité. Depuis l'instant où je vis ce navire haut et fier dans le port de Last-End lorsque j'étais tout jeune garçon, je ne puis plus jamais l'oublier. Il me hantait comme me hante la recherche de cet espace où tous les angles, toutes les formes et les dimensions se joignent pour ne former qu'un océan de blancheur  » Son regard tomba sur sa main, dont il examina les longs doigts, les pliant légèrement tandis qu'il fronçait les sourcils dans sa contemplation. « Plus d'une fois j'ai trempé la main dans une eau froide, naturellement fraîchis par l'hiver et pourtant rien ne se compare jamais à la morsure de l'aqueuse étendue qui dans mes songes siège maîtresse incontestée. Un froid comme le baisé de cette mort que je côtoies et que je courtise  » Ombre d'une lippe s'ourlant « Pourtant oui, cela n'a vraiment rien à voir avec l'humaine entité… je pourrais vous faire découvrir certaines choses, vous conter et tenter de vous communiquer ce que l'on peut ressentir, lorsqu'humain l'on fait face à ce monde étranger  »

Œillade à son verre, qu'il refusa pourtant de toucher en l'instant, préférant à la place offrir du mouvement à son corps fourbus et souffrant, la parole après un instant, comme une pensée retardataire dans ce silence posé. « Voudriez-vous donc que je vous conte plus avant ces épopées qui peuplent mon inconscient ? Sans doute sont-elles plus attrayantes qu'une question de philosophie quelconque sur la condition des mortels. Peut-être suis-je également trop prolixe et aimeriez-vous plutôt me conter vos propres souvenirs  » Souvenirs et non songes, et pourtant il ne savait pas ce qui l'avait poussé à user de ce terme précis. Il paraissait simplement adéquat et l'idée lui plaisait. « Allons allez… contez moi donc une journée de pluie dans les landes de votre pays. Dites moi la musique de l'eau et des embruns au bas des rocheuses falaises déchirées… les nuées orageuses au son des tambours des forêts  » Le feu dans la cheminée crépitait, en un écho de grandes flambées dans des âtres gargantuesques et des forges vives aux girons ignés, dont les créatures autant que les mortels tiraient l'acier fondu de leurs épées. Car n'était-ce pas de violence qu'elle se paraît, dans cette passion consumée ? Lui aussi songeait aux armes, mais des armes de givre ornés, crissantes comme des instruments d'un chœur singulier, par les grincements des codages, le claquement des voiles et le craquement du bois accompagné. Finalement, il prit son verre pour l'écouter, voulant s'occuper les mains autant que la langue, qu'il avait apparemment si bien déliée pour une telle journée…

Jeu 17 Mar - 23:00
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Moïra Ní Éireann
L'étrange sous la normalité : Sous mon masque froid, je suis immortelle. Mes mains si délicates sont plus puissantes qu'elles ne le semblent. La magie m'habite et j'habite la magie.
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Moïra Ní Éireann
Complexe, oui, les humains l’étaient parfois. Souvent même. Tout comme ils pouvaient être d’une simplicité affligeante. Toujours le même problème, cette dualité mystérieuse, cette agaçante contradiction perpétuelle entre les individus certes mais aussi au sein d’un seul être. Leurs esprits étaient sans cesse mouvants pourtant ils pouvaient se figer sur des concepts anciens, s’ancrer en des traditions ancestrales en ne supportant pas le changement qui venait. Rêver puis brider ses envies, chanter pour mieux se taire, hurler et chuchoter. Peut-être parce qu’elle était déesse, il y avait certaines choses que Moïra ne parvenait pas à comprendre totalement. Des sentiments, des sensations qui ne pouvaient se vivre ainsi qu’eux le faisaient. Cela tenait-il à l’essence même de son être ? Tel un ordinateur, même les mises à jour ne parvenaient pas toujours à rendre complètement opérationnel son fonctionnement, la laissant avec des vides, des incompréhensions que rien ne pouvait combler, ni la lecture philosophique, ni l’étude psychologique, et pas même le contact réel. Oui, elle s’habituait, oui, elle découvrait à mesure que les choses se créaient, et pourtant, c’était comme s’il lui manquait certains logiciels malgré l’indéniable adaptation dont elle faisait preuve ainsi que nombre de ses semblables. D’un autre côté, il suffisait de prendre l’exemple de Windows 10, qui correspondait parfaitement aux nouvelles générations d’enfants humains, pour remarquer que les nouveautés n’étaient pas toujours les plus performantes. Elles étaient parfois même totalement aliénantes… ou aliénées.

-Pourtant, des années parmi vous n’ont pas suffi à me faire prendre entière connaissance de votre race, à vous comprendre dans votre complexité. Mais après tout, bien que vous ne sembliez être un humain lambda, pourquoi ne pas tenter ; si vous parvenez à me faire comprendre le fonctionnement de certains rouages humains les plus obscurs, je vous ramènerais une bouteille de Whisky de ma réserve personnelle.

Se comportait-il seulement comme ceux qui devaient être ses semblables ? Et quand bien même, comment pourrait-il parvenir à expliquer, non, à faire comprendre une telle chose, à une créature qui malgré les ressemblances était si étrangement différente sur d’infimes points pourtant tellement importants ? D’autant qu’à en juger des philosophes humains, l’humain était non seulement complexe en lui-même mais aussi dans son rapport avec ses semblables. Si l’enseignement de leur espèce leur posait difficulté, à eux-mêmes, comment pourrait-il décortiquer de façon réellement compréhensible le problème à Mórrígan ?

-L’approprier ? La consumer ? Que nenni, Milord, nulle intention de ce niveau. Peut-être ne souhaiterais-je faire de vous qu’un héros des temps anciens ? A moins que le moment de venir la cueillir ne soit pas encore arrivé ? Mais il est vrai que vous m’intriguez, et votre âme aussi par là-même. Elle lissa un pli imaginaire de sa robe avant de reprendre calmement. Loin de moi l’idée de vous voir en quelconque danger, toutefois je ne peux qu’espérer qu’au travers de votre propre fonctionnement, je puis peut-être percevoir et approcher de la pensée humaine. N’acceptiez-vous pas plus tôt de me l’apprendre ? Ou n’est-ce que l’expression du paradoxe de votre condition qui vous fait taire ainsi ce dont j’éprouvais le désir de comprendre ?

De l’aider à les appréhender, tous, et lui davantage à cet instant précis. Car si la connaissance était nécessaire pour affronter l’ennemi, elle l’était tout autant envers l’inconnu. Nulle guerre ne gagnait jamais sans une base minimale de savoirs sur son adversaire. Lui, si sibyllin n’était pas son adversaire, pourtant tout comme elle cherchait à comprendre certaines conceptions humaines du monde, Moïra souhaitait la même chose pour lui. Elle qui déjà avait perdu son don de prédiction n’aimait rien moins que ne pas comprendre le présent alors même que le futur la fuyait.

Elle le contemplait, pensive, écoutant patiemment chacun de ses mots, les laissant venir à elle sans en troubler le paisible cheminement. Il lui parlait sans se cacher et pourtant il avait craint quelques instants plus tôt de s’exposer. Mystérieux jusqu’à dans ses rêves.

-Bien étranges semblent vos songes, si de songes ils peuvent avoir le nom. Cette mer parait enchanteresse mais prenez garde à ne pas vous y noyer.

Dans cette mer, dans ce rêve, dans cette imaginaire inaccessible ; qu’est-ce qui pouvait attirer un humain de la sorte ? Énigme étrange s’il en était. Étaient-ils en nombre à songer de tels paysages ?

-Je préfère vos paroles à mes récits et vos contes à mes souvenirs ; mais soit, il n’est que justice qu’à votre tour vous en souhaitiez plus.

Elle renversa la tête en arrière, fixant le plafond sans le voir, l’éclat chaud du feu faisant scintiller le bijou d’argent qui pendait à son cou tandis qu’elle rassemblait ses pensées, ne sachant par où commencer. Une journée, une seule ? Voilà qui semblait bien difficile, d’autant que le temps humain n’avait pas la même valeur pour les êtres éternels. Peu à peu, les réminiscences d’un passé lointain se firent plus nettes, plus précises, et les mots qui se bousculaient à ses lèvres semblaient chanson voulant s’envoler jusqu’aux nues, poème aux accents de tristesse.

-Je me souviens de ce souffle de vent, à l’aube. De cette brume qui monte petit à petit, impalpable coton blanc et humide. Les oiseaux alors ne sont qu’ombres fugaces, si peu visibles dans le ciel encore sombre, le chant de leurs petits n’est qu’écho lointain alors que le soleil peine à s’éveiller. Plus bas, dans la plaine, la rosée se dépose sur l’herbe tendre, sur l’herbe verte. Je connais par cœur la douceur de l’air pur, je savoure sur mes lèvres la tendresse du pays endormi. Sous les pieds nus, se couchent les ajoncs, et l’eau des lacs paisibles clapote timidement. D’or et de sang frais se pare l’horizon, mais les vagues et l’écume suivent leur propre raison. Et jamais vraiment le ciel ne s’éclaircit, il demeure chagrin tandis que tombe la pluie. Perle après perle, éclat d’argent qui se fend sur terre, chaque goutte se meurt jusqu’à l’humus tendre. La fleur si fragile ploie sous le poids de l’eau, tentant bien vaillamment de rappeler le soleil. Et jusqu’ici pourtant parvient tout doucement le parfum insolite des embruns marins, qui traversent les vallées, qui se fondent jusqu’aux petits bois. Il glisse entre les branches tourmentées des arbres torturés, il effleure, amant transi, les feuilles tendres du lierre. Il chemine toujours et descend le tertre d’émeraude, lui qui ne connaissait que les falaises brisées. Il courtise la fragrance délicate des pins qui saignent à leur tour, et l’aubépine musquée l’attire jusqu’à elle. Et plus loin les montagnes, jalouses, ne peuvent que contempler les nuées assombries. L’éclair frémit, l’air frissonne, le camaïeu de vert se ternit sous le gris de ce ciel maussade, et bientôt se fait entendre le grondement sonore de l’orage qui approche. Cet éclat de lumière qui surgit soudainement observe son portrait distordu par les ruisseaux, qui courent et s’écoulent, fuyant toujours plus rapidement alors que monte leur niveau. Les prédateurs se terrent, les oiseaux font silence et il n’y a plus de maitre que l’horizon si bas. Puis tout aussi soudainement qu’est venue la tourmente reparaît la lumière ; l’ouragan redevient paisible ruisselet et les feuilles argentées tintent, légères, tout en s’entrechoquant. Le sable encore trempé des petites îles cachées scintille faiblement tandis les falaises noires se ornent d’argent étincelant et d’ocre rouge. Eire toute entière fleure bon la terre humide et prudemment sortent félins méfiants et insectes bourdonnants, jusqu’à ce que le sein rond de la lune, perle de la nuit, ne vienne jeter ses premiers rayons blafards sur le paysage qui s’endort. Elle vida par moitié son verre d’une seule gorgée avant de conclure, mélancolique. Mais ce n’est plus rien d’autre que songerie lointaine et douloureux mirage. Par-delà ces fantasmes les journées ne sont rien d’autres qu’heures perdues dans des bureaux et autres salles de conseil, à regarder les matins naitre pour mieux s’éteindre.

Redirigea son regard vers lui, la déesse retint un soupir. Il avait souhaité qu’elle lui parle de sa terre par une journée de pluie, et elle s’était exécutée de bonne grâce. Mais elle avait été soulagée de ne parler que de cela. De n’avoir compris dans sa demande qu’ode aux paysages sauvages de cette contrée si proche mais trop lointaine. Souvenirs, peut-être, mais dans sa mémoire demeurait plutôt le fracas des épées et la vaillance de ses guerriers. Mais de cela sans doute elle ne souhaitait pas parler.

-Point d’étendue silencieuse et immense, miroir d’un firmament laiteux, pourtant je ne connais nulle beauté à celle-ci pareille. De contes et d’épopées, elle ne manque pas non plus, bien que ceux-ci n’aient peut-être point la folie de ceux qui sommeillent en vous.

Les légendes de ces terres n’étaient pas ce qui manquait et elles n’étaient rien face à celui qui les vivait.

Ven 1 Avr - 21:24
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Howard Earl
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Le Sacrifié

Il ne pouvait qu'écouter et agréer, incapable de décemment nier, et ne le voulant pas. Pourquoi l'aurait-il fait ? Il était intéressé par ce qu'elle confiait, d'autant plus que les créatures n'étaient pas connues comme étant des plus humbles… hors c'était bel et bien une preuve d'humilité qu'elle lui offrait, éclairant sa vision de la personne qu'elle était, pas totalement, mais juste un peu, juste assez pour qu'il accepte sans rancune aucune de remettre un peu son opinion en question. Il appréciait, une fois de plus, ce qu'il pensait observer, ce qu'on lui accordait, aussi humblement qu'il pouvait espérer l'être lui-même… Pour l'effort qu'elle semblait faire, lui se devait aussi d'en fournir un, non par sens de la compétition, mais parce qu'il le lui devait. Oui, il le lui devait bien. Avec un léger, très léger mouvement de la tête, il répondit : «Peut-être est-ce parce que je suis un humain comme les autres que je peux vous parler quelque peu de nous. Et puis, comment puis-je ne pas essayer, s'il y a une bouteille à la clef ?  » Taquinerie presque cordiale, presque amicale en vérité, mais il y avait chez elle quelque chose qui l'y poussait. Un petit quelque chose, en plus de ce qu'ils échangeaient, qui lui disait qu'il le pouvait malgré la méfiance caractérisée qui l'habitait à tout instant. Un petit grain de folie, peut-être mais qu'importait après tout ? N'était-ce pas une forme de folie qui dictait aux grandeurs les plus respectées et admirées ? Si bien entendu, et il écouterait sa folie cette fois, là où, en d'autres temps, il ne le faisait pas… Impossible de savoir ce qui résulterait vraiment de sa tentative, peut-être rien de bon, mais en un sens, ce n'était pas le résultat qui comptait, c'était bien cette tentative. Comme l'était, en un sens, leur discussion, du moins l'imaginait-il. Que valait vraiment ces prétentions, il l'ignorait pour le moment mais aurait bien le temps de les jauger plus tard, tout arrivait en son temps.

En attendant, il l'observait toujours, ballotté par ces étranges sentiments et se demandant sur quel sentier il avait posé le pied. Lui, un héro ? Non, il ne pouvait l'être, il n'en avait pas l'étoffe.. il ne nierait pourtant pas que l'image était plaisante, mais pour qui ne le serait-elle pas ? C'était une image dorée, de celles pour lesquelles on retrouvait un peu de son âme d'enfant. De celles qui pouvaient vous tourner un peu la tête mais que vous saviez impossible même si parfois, une part d'orgueil soufflait que l'on pouvait y accéder. Il en conçu de l'amusement, en un sens, et à ses mots rétorqua : « Je ne peux que vous déconseiller de voir en mon corps un outil d'observation… mais ne vous troublez pas, je n'ai nullement changé d'avis et je tâcherais. Cette étude que vous désirez entreprendre pourrait bien m'apporter des choses à moi aussi. Une autre vision de mon propre état, de nouvelles hypothèses et pourquoi pas quelques réponses ? Sait-on jamais...  » Comme un secret scientifique qui, lentement, se dévoilerait, se faisait jour petit morceau par petit morceau. Sans jamais se livrer aisément, obligeant l'étudiant à revoir constamment ses idées, ses points de vue, à revenir sur ses pas et compléter son cheminement, s'introvertir pour trouver les meilleures questions à se poser, celles qui dérouleraient naturellement la voie qui menait aux rouages des vérités dissimulées. Des vérités qui, pourtant, ne se dérobaient pas sous les doigts inquisiteurs, peut-être l'une des raisons qui avait poussé les humains à se détourner de la magie au profit de la technique et de la science. La facilité n'était pas totalement à l'oeuvre en cela, même si elle avait quelques 'mérites', il y avait également une part d'affect et de psychologie importante dans tout cela…

Qui en arrivait à définir, même, une part de ce que pouvait avoir possiblement été l'incompréhension des anciens de la magie au revirement des humains. Peut-être…. Là n'était néanmoins pas la question à l'heure actuelle. « J'y prendrais garde  » Quoi que voir ses profondeurs serait sans doute une expérience magnifique et unique. Ne se serait-il pas déjà noyé, en un sens ? Silencieux une fois de plus, il se laissa porté par sa voix et en lui-même plongea à la recherche des ondoiements de ses rêves glacés, les reliquats qu'il conservait à son réveil et qui se ravivaient avec férocité chaque fois qu'il y pensait, comme l'action d'un soufflet sur d'ardentes braises. L'iode sembla lui emplir la bouche un long instant, et une certaine lassitude, de même qu'un long frémissement, le prirent… l'eau sombre, presque noire, huileuse et profonde, dont on ne voyait rien et pourtant l'imagination courait sur les mystères qui pouvaient se terrer sous la surface d'encre. L'imagination oui, à la fois l'amie et l'ennemie du genre humain qui se perdait bien trop facilement dans l'égarement lorsque par accident, en ce siècle athée, l'imagination refaisait surface, brisant la morne routine imposée par un monde devenu sans doute aussi étrange pour les créatures qu'elles-mêmes aux hommes le paraissaient. En un sens, peut-être vivaient-ils tous dans un monde qui ne se comprenait plus lui-même, tout simplement… mais c'était trop pessimiste pour qu'il admette le regarder en face, même lui. Il préférait davantage écouter ses récits, ne refusant pas ce qu'ils pourraient lui apprendre, d'elle comme de ce qu'elle contait. Il l'observa un long moment, lèvres scellées, pensif dans son écoute bercée…

Finalement pourtant, il prit la parole, toujours pensif et d'une voix qui le trahissait, lente et mesurée : « Certains affirment que le temps n'est pas un flot fluide et ininterrompu, tel un long fleuve prenant sa source au commencement. Ils pensent que le temps est permanent, que le passé, le présent et le futur ne sont que différents espaces d'un continuum circulaire qui n'avance ni ne recule. Dans leurs esprits, ce sont les créatures qui passent d'une phase à l'autre… et qui pourraient retrouver leurs passés aisément s'ils avaient les perceptions nécessaires à cela, à retrouver ces espaces permanents continuant d'exister. Si c'est le cas, si cette conception possède la moindre justesse… alors peut-être pourriez-vous retrouver ces temps passés auxquels vous aspirez » Ce n'était qu'une vague hypothèse, mais après tout pourquoi pas ? Qui pouvait réellement affirmer connaître tout des secrets de la magie ? Du monde ? Lui non plus n'en savait pas tout, loin de là bien entendu, mais il refusait de se restreindre à une seule vision, et surtout, il voulait saisir les opportunités qu'il entrevoyait. Lointaines ou non, qui pouvait donc dire d'où provenait la lumière ? «  C'est également là une hypothèse pouvant en partie expliquer l'immortalité de certaines créatures… mais c'est en cela un tout autre sujet, sur lequel il ne serait sans doute pas judicieux de s'aventurer » Non, ou du moins pas pour le moment. Peut-être en d'autres temps et lieux. Et d'un mouvement simple de la tête poursuivit autrement : « Mais la folie ? La folie pourrait n'être alors qu'une de ces perceptions, incompréhensible pour le commun. Une autre façon de rêver et d'appréhender le monde…»

Le rêve de tout homme sans doute : appréhender le monde. Était-ce seulement possible ? Et désirable ? Acceptable ? Il ne le pensait pas, en doutait profondément. « Vous êtes… conservatrice du musée ? » Cela lui disait vaguement quelque chose, bien que le musée de Last-End ne soit clairement pas son lieu de plaisance de prédilection. Pour de nombreuses raisons, qui au final n'avaient pas tant à voir avec le bâtiment en question. Un paradoxe certes peu équitable en soit, mais hélas parfaitement humain à son endroit. « Avez-vous déjà envisager de conserver vos propres mémoires ? Ne serait-ce pas là un moyen de toucher à nouveau une part de cette humanité qui s'est éloignée ? De toucher en eux quelque chose, d'apporter de nouveau, au moins à ceux qui pourraient se montrer réceptif ? » Pourquoi pas après tout, qu'est-ce qu'elle y perdrait…

Sam 16 Avr - 4:28
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Moïra Ní Éireann
L'étrange sous la normalité : Sous mon masque froid, je suis immortelle. Mes mains si délicates sont plus puissantes qu'elles ne le semblent. La magie m'habite et j'habite la magie.
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Moïra Ní Éireann
Il y avait de la moquerie dans sa phrase, dans sa voix peut-être aussi un peu. Pourtant elle ne s’en sentait pas offensée ‒après tout, il n’avait probablement pas même voulu la fâcher‒ ni même concernée, comme s’il n’avait jamais été là, comme si ses paroles n’avaient été que souffles de vent bien vite disparus. A moins qu’elle ne soit simplement paisible, endormie presque, dans cette pièce doucement chauffée par le feu de cheminée crépitant, enfoncée dans un fauteuil bien trop confortable, trop loin de ce qui faisait vibrer sa nature de guerrière. Comment Mórrígan pouvait-elle demeurer assise ainsi, devisant calmement sur la nature humaine, buvant à petite gorgée l’alcool des mortels comme si elle était l’une des leurs ? Où donc avait-elle fait le faux-pas qui l’avait mené ici, insulte comportementale à ce qu’elle était vraiment ? Calme, oui, elle l’avait toujours été loin des champs de bataille, tandis que ses semblables se chamaillaient, se querellaient ou s’interpellaient bruyamment ; sa nature était ainsi faite, et, heureusement ou malheureusement, elle ne pouvait en changer ; mais faible, non, jamais aussi vulnérable qu’à cet instant. Peut-être était-ce cette taquinerie infime, cette légèreté dans le ton de son interlocuteur, qui lui faisait prendre conscience de cette étrangeté. Peut-être se rendait-elle d’autant plus compte qu’elle s’effaçait ainsi qu’un trait de crayon lentement gommé, effaçant la crainte respectueuse qui aurait dû animer celui face à elle. Sa place n’était pas ici, cette mascarade était fausse, absurde. Absurde, et pourtant, elle s’entendit répondre avec l’automatisme que procure les années, les décennies, les siècles passés à vivre parmi ces êtres qui auraient dû la vénérer, répondre avec l’aisance et l’assurance qui ne la quittaient jamais :

-Prenez garde, je suis difficile en affaire, j’espère que vous saurez me satisfaire si vous souhaitez cette boisson dont Undry lui-même, le chaudron de Murias, ne pourrait produire pareille saveur.

Mais non, tout cela était normal. C’était sa vie, ou plutôt sa survie. Elle reviendrait grande et forte, elle redeviendrait la Reine que le monde avait connue. Jusqu’à là, il lui faudrait être humaine ; ou du moins le paraître autant que ce qu’elle était le lui permettrait. Ce ne serait pas compliqué, pour elle qui avait grandi ‒ non, qui avait appris à grandir ‒ dans ce monde trop bruyant, trop bétonné, trop pressé. Trop civilisé, si civilisation était usé dans le sens qu’utilisaient le commun des mortels. Qui s’était adaptée, faisant de son mieux pour s’insérer parmi eux, créature éternelle que rien ne pourrait jamais changer, pas même le temps. Non, si chacun de ceux qu’elle croiserait était semblable à celui qui lui faisait face, elle pourrait continuer à jouer de cette étrange comédie que l’Histoire terrestre lui imposait, sans s’ennuyer. Mais tout bon côté à sa face obscure et Howard avait sans doute l’esprit trop vif, trop acéré pour la déifier ainsi que l’avaient fait pendant trop peu de temps les humains. La modernité leur avait aussi enseigné la méfiance, le scepticisme continuel, un désabusement perpétuel de ce qui les entourait. Ils ne croyaient plus, ils regardaient simplement. Ils contemplaient, ils doutaient. Parfois d’une naïveté impressionnante, d’autres fois si incrédules que c’en était frustrant. Mais quelles questions peuplaient donc leurs esprits trop rationnels ? Quelles interrogations pouvaient donc les tenir éveillées alors que leurs corps si faibles ne demandaient qu’à replonger dans le sommeil ? Humains, mystérieuses créatures que le temps ne parviendrait jamais à rendre tout à fait compréhensibles pour ceux qui ne l’étaient pas. Ces questions, peut-être, étaient dignes d’intérêts ; mais les réponses ne venaient jamais, peu importait combien de fois Mórrígan les cherchait.

Elle l’observa en silence, détaillant les traits de son visage, glissant sur son corps, remontant jusqu’à ses yeux, le dévisageant sans lui répondre, une moue amusée très clairement inscrite sur ses lèvres. Cette fois, son regard avait un tout autre éclat et c’était en toute conscience qu’elle le provoquait, sincère pourtant. C’était plus fort qu’elle, sans doute, et l’idée même de retenir ces impulsions ne lui étaient jamais venues à l’esprit. D’ailleurs, pourquoi aurait-elle dû changer ?

-Pensez-vous que je saurais me contenter d’une simple observation de votre corps ? Mais j’attendrais de voir où me mèneront mes études, et les vôtres si vous le souhaitez, avant de pousser les travaux.

Elle pourrait peut-être s’en contenter ; ne croquer la récompense qu’une fois le travail terminé, n’était-ce pas ainsi que fonctionnaient nombre des mortels ? Voilà une idée tout à fait séduisante. Après tout, elle aussi aimait jouer, parfois différemment de ce que pouvaient imaginer ses fréquentations extérieures, mais qui n’en demeurait pas moins amusement à ses yeux. Le plaisir de la chair n’était qu’un parmi tant d’autres, mais qui pouvait en toute bonne foi affirmer n’en avoir jamais eu envie ? Pas même ces êtres incompréhensibles qu’étaient les religieux consacrant leur vie, et leur chasteté, à leur dieu, quel qu’il soit. En cet instant toutefois, il n’était pas celui qui primait. Plus sérieuse, non moins sincère était devenue la discussion. L’hôte voulait entendre le chant de l’Irlande, Moïra lui conta ses merveilles, avec la passion de l’amoureuse ayant perdu trop tôt un être cher. Elle lui évoqua une douce journée sur cette terre de merveilles, taisant le fracas des armes et les cris des guerriers qui l’avaient tant fait être. Comme un secret, la déesse gardait en elle ce frisson magique qui la faisait vibrer et dont elle rêvait encore, tout comme elle tût tout ce qui avait autrefois constitué une « journée » sur Terre. Et la réponse du jeune Earl la laissa pensive tandis qu’elle poursuivait la quête qu’était sienne de terminer son verre à petites gorgées.

-B'fhéidir*. Mais encore faudrait-il que cette vision ait la moindre véracité. Si certains voient dans le temps une roue qui tourne et recommence, et alors pourrais-je trouver ce passé trop présent en l’arrêtant au bon moment. S’il est fleuve impétueux, alors ce temps ne pourra jamais s’arrêter vraiment, il saura forcer le barrage édifié ; je peux attendre encore, cette espérance demeurera vaine. Ne devrais-je pas plutôt alors chercher à le recréer moi-même ?

Cette fois, la provocation n’était pas aussi amicale et chaleureuse que la précédente. Non, cette fois, ses yeux verts l’étudiaient ainsi qu’un roi observe celui qui tient les rênes d’un royaume voisin, vifs et attentifs, ou ainsi qu’une mangouste face au cobra, cherchant les signes. Avec, sous le sérieux apparent, une pointe d’ironie. Le Cénacle était toujours présent, trop présent, cette assemblée d’êtres aigris par leurs minables pouvoirs, ces serpents rampant dans l’ombre en tentant de tout contrôler, tout manipuler. Elle voulait voir sa réaction, sonder son esprit ; demeurerait-il toujours aussi impassible pour ensuite prévenir ce cercle de manipulateurs qu’il soupçonnait une certaine Moïra de faire renaître un passé trop violent pour ces pauvres petites créatures sensibles et faibles qu’étaient les humains du XXIème siècle ? Serait-il choqué, montrerait-il ses pensées ? Non, il semblait bien trop intelligent, il comprendrait sans doute de suite la bravade un peu pernicieuse, presque moqueuse, à peine déguisée.

-Aye, conservatrice du musée des Civilisations de Last End, dont le bâtiment fut vendu par votre famille. Elle pencha la tête en laissant une mèche rousse lui effleurer la joue. Croyez-vous ? Mais les humains ne croient plus en rien si ce n’est en l’argent. La littérature est pleine de récits héroïques, de sagas épiques, d’histoires sur les divinités du monde entier. L’Histoire se mêle allègrement aux fictions les plus farfelues, la vérité devient contes fantasques sous la plume des écrivains. Croyez-vous vraiment que quiconque verra dans mes mémoires autre chose que le fruit d’une imagination parmi tant d’autres, autre chose qu’une alliance entre les écrits des peuples celtes et les caprices de mon esprit ? Autrefois sans doute cela aurait-il été possible, mais aujourd’hui, quand l’incrédulité est monnaie courante, cette approche n’est sans doute pas la plus rentable.  L’irlandaise sembla se perdre un instant dans ses pensées puis croisa les jambes, dévoilant un peu plus de chair pâle, avant de reprendre : les divinités ne sont plus que des créatures étranges et fantastiques, sorties de quelques idées étranges des humains d’un autre temps, à leurs yeux. Bien nombreux sont ceux qui peinent à croire en un seul dieu, alors même que les religions monothéistes ont pour elles plus de fidèles que nous n’en avons, comment pourrais-je espérer leur faire croire en cette vérité qu’ils refusent obstinément, se réfugiant derrière des raisons faussement scientifiques et parfois tordues ? Ils nieront mon, notre, existence. Et d’autant plus s’ils doivent apprendre que ce qu’ils considèrent comme créatures mystiques, païennes même ainsi qu’ils les nomment, se trouvent parmi eux, vivent avec eux. Elle lui jeta un regard de biais, sincèrement intriguée par la réponse qu’il allait lui fournir : pensez-vous sincèrement qu’il y ait la moindre chance pour qu’ils y voient autre chose qu’un conte étrange et divertissant, empli de magie mais totalement irréaliste ?


*Peut-être

Ven 29 Avr - 12:32
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Howard Earl
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Howard Earl
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On pouvait tant faire, rien qu'avec un corps, et qui mieux qu'un nécromant pour l'affirmer haut et fort ? Les yeux par exemple, étaient les miroirs de l'âme, et bien plus que cela, recelant tant de secrets… il n'était pas rare, par exemple, que la dernière image vivante perçue par l'être s'imprime dans la rétine, comme une gravure qu'un observateur attentif pourrait ensuite déchiffrer. Alors si une image pouvait ainsi s'imprimer, si une âme pouvait être capturée par une surface réfléchissante, que pouvait-on faire d'autre avec les yeux, ou toute autre partie du corps ? Il n'avait pas exactement eut cela en tête, pas aussi littéralement mais après tout pourquoi pas ? Il était pourtant trop méfiant, prudent, ou paranoïaque pour proposer qu'elle puisse user de sa personne avec une totale liberté, encore moins l'inviter à plonger dans les tréfonds des rouages qui le constituait… Une telle proposition serait la porte ouverte à toutes les déviances et les altérations, même si elle s'avérait la plus droite des créatures, ce qui n'était sans doute pas le cas. Et puis, une telle offre ressemblerait bien trop à… à quelque chose qui le mettait extrêmement mal à l'aise et qui provoquait déjà chez lui des sueurs froides. Il n'aurait pas pu, même s'il l'avait voulut, c'était bien plus fort que lui. C'était viscéral. Il n'aurait même pas… il n'avait même pas confiance en son propre frère pour cela, la chair de sa chair. Mais cela faisait aussi partie de ce qui faisait les impondérables humains : la faiblesse, et la défiance. On faisait avec ce que l'on avait, toujours. Quand à ce qu'elle découvrirait par elle-même, il ne le craignait pas, au contraire. Il ne craignait pas son esprit, ni ce qu'il pouvait engendrer. Oh certaines créatures lui étaient effectivement une crainte mais pas toutes, les hommes étaient souvent aussi terribles sinon plus encore qu'elles.

L'amusement subit qu'il ressentait s'accentua encore. Il l'observait sans rien dire, la laissant avec sa bravade. Elle pouvait essayer. Mais si le temps était fleuve, alors tenter de créer quoi que ce soit sur lui ne marcherait pas non plus, encore moins recréer quelque chose provenant du passé… c'était comme vouloir jouer les castors avec de vieilles branches vermoulues. Ça ne fonctionnait pas. Mais ça ne devait pas l'empêcher d'essayer, ce n'était pas lui qui allait l'en empêcher… et si le Cénacle accordait crédit à son désir, alors il agirait par lui-même, mais pourquoi lui devrait lever le petit doigt pour quelque chose en quoi il ne croyait pas, puisque la croyance était le fondement de tout. « Le devriez-vous ? » demanda-t-il simplement, lui renvoyant la balle, lui renvoyant le concept et le fil de pensées, d'interrogations. Ce n'était d'ailleurs pas tant la question réelle qui se posait. Mais ce n'était pas grave, ça n'avait aucune importance puisque ça ne changerait que très peu le résultat final qui en résulterait. Qu'elle essaye pourrait également être… instructif, pour d'autres, lui y comprit. Mais ce n'était là qu'une pique, une perche tendue, aussi n'y avait-il pas lieux de jeter trop d'huile sur le feu pour le moment. S'ils s'étaient tous deux arrêtés à cela, ils n'auraient pas avancé, et s'ils n'avaient pas avancé alors ils ne seraient pas encore entrain d'échanger. De deviser en un sens. Et sans doute auraient-ils regretté d'avoir manqué cette occasion. Peut-être. Il secoua légèrement la tête, son regard bondissant d'un détail de la pièce à l'autre avant de revenir sur elle, puis de repartir. Elle était aussi sceptique que les humains qui l'abandonnait, la différence entre sa désillusion et la leur était la source dont elle était issue.

« Bien sur » fut finalement la réponse qu'il donna « Si vous savez vous montrer convaincante » Finalement, ses yeux s’arrêtèrent sur une décoration murale gravée dans le bois d'une colonnade. Un bras au travers de ses genoux, doigts fins jouant par instants dans le vide, il gardait le regard lointain, alors même que sa voix était claire et posée. « J'ai mes propres hypothèses sur ce qui a provoqué la chute des anciennes religions, et sur ce qui, dans la relation à l'humanité, dans ce qui la compose, a été une part des rouages inéluctables ayant conduit la chute de l'ancien monde. Je ne prétendrais pas qu'il s'agit d'une vérité absolue, ni même d'une vérité tout court, ce sont simplement les nombreux éléments auxquels j'ai été confrontés et qui m'ont fait réfléchir. Mais au final, très peu d'individus en ce monde sont capables de lever le voile sur les véritables raisons qui ont formé le socle de ce nouveau siècle. Aucun ne le fera, certainement. Ce qui ne nous laisse que nos esprits pour imaginer, décrypter... » Soupirant un instant, il se redressa, quittant le canapé en récupérant sa canne, et fit quelques pas difficiles dans la pièce. La question était tellement vaste qu'on aurait pu la comparer à un océan, en se trompant encore. « En fait, la question de la croyance pour les humains est plus compliquée qu'il n'y paraît. Beaucoup ne croit plus en rien, pas même en l'argent, voilà mon avis. Ils sont broyés par la société dans laquelle ils vivent, perdant peu à peu leurs illusions jusqu'à ce qu'il ne reste rien, seulement la survie. Trimer pour avoir juste de quoi survivre. En regardant chaque jour des individus mieux nantis qu'eux, aux cœurs tout aussi vides… ils ont l'argent mais il ne peut rien pour eux »

Nouveau mouvement de la tête, dos à elle « Ils peuvent affirmer à voix haute qu'il leur est encore précieux, que c'est le seul pouvoir qui fait tourner le monde. Mais au fond de leur cœur, les choses sont toutes autres. Pourtant parfois, un de ces morts vivants expérimente quelque chose, dans sa petite vie terne, une odeur, une couleur, un paysage, une lecture, quelque chose, qui pendant un bref instant… fait vibrer sa petite âme cornée d'une émotion sincère et surprenante, inattendue. Pendant un instant, le mort vivant redevient vivant. Et pourtant il retombera dans l'apathie, avec le souvenir de cet instant étrange qui lui a rendu son authenticité. Un vide déjà présent auparavant mais qu'il ignorait, et qu'il ne pourra plus jamais oublier » Un vide que lui aussi avait ressentit, qu'il n'était pas certain d'avoir comblé… Peut-être qu'il ne voulait pas savoir s'il l'avait comblé, car si ce n'était pas le cas, que lui faudrait-il ? « Ce que l'on affirme et ce qui croit en nous est souvent très différent. Il y a bien des choses dont nous n'avons pas conscience, à propos de nous-mêmes, d'autres que nous ignorons volontairement. En vérité je pense que… l'être humain est de plus en plus sourd envers lui-même. Ce n'est pas la reste du monde qu'il ne comprend plus, en ce siècle, c'est lui… Et pourtant ils ne sont pas les seuls. » Là-dessus, il s'arrêta, pour se retourner vers elle, haussant les épaules après un instant, comme pour signifier son impuissance face à de telles idées et de tels états de faits. Le monde magique aussi avait évolué, est-ce que lui-même savait encore vraiment ce qu'il cherchait et sa place destinée ? Tout l'Envers ne pouvait-il être, en fin de compte, qu'une succession d'habitudes répétées indéfiniment sans que personne ne se pose la question de savoir si c'était bien ou pas.

Pensif à nouveau, il laissa son esprit vagabonder un bref moment avant de rompre à nouveau le silence : « Pourquoi voudriez-vous qu'ils croient à nouveau ? » Parce qu'au final, la question ne se posait-elle pas réellement ? Pourquoi ? Quelle était la finalité ? Le but ? Quelles seraient les conséquences ?

Dim 8 Mai - 12:17
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Moïra Ní Éireann
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Moïra Ní Éireann
- Peut-être, murmura-t-elle en souriant avec amusement à son égard, clôturant ainsi le sujet.

Peut-être, qu’importait donc pour lui de le savoir vraiment, de le comprendre tout à fait. Mystères, secrets, l’Histoire était de cela, de cachotteries constantes, de non-dits, de mensonges, de dérobades incessantes. Alors quoi, qu’aurait-elle dû dire, dû reconnaitre, à cet étranger, à cet hôte brisé ? Qu’aurait-elle dû avouer, pourquoi l’aurait-elle fait, seulement ? Non, point de révélations, non, juste un peu d’amusement, dans cet échange, dans cette joute qu’arbitrait seul le silence. Elle le fixait comme s’observe ami devenu ennemi, un ennemi devenu ami ; prudence, intérêt et peut-être sympathie. Elle le fixait pour l’écouter, ou l’écoutait en l’observant. Lui parlait, et Moïra se laissait bercer, doucement, par le murmure qui flottait sur l’air ambiant pour venir se déposer au creux de son oreille. Elle l’écoutait, qu’il ait tort ou raison ; cela n’avait pas d’importance. Seuls les dieux possédaient la vérité mais il n’y avait plus personne pour les entendre. Elle l’écoutait, parce que ses paroles faisaient écho à quelques dissonances qu’elle ressentait dans ce monde où tout allait trop vite, où tout se détruisait et se jetait avant même d’être usé. Où chercher à effleurer l’âme des mortels devenait une guerre de tout instant, un combat perdu d’avance alors qu’ils s’enfonçaient dans leurs songes sinistres et dépourvus de la moindre étincelle. Elle le suivit un instant du regard, observant cette silhouette bancale qui un jour proche, sans doute, finirait elle aussi par s’effondrer pour ne plus laisser place qu’à un squelette blanchi aux os usés. Et qui pourtant croyait, peut-être naïvement, que quelques mots gravés sur du papier mat pourrait lui amener les fidèles recherchés. Puis, regard à la dérive comme esprit qui navigue, elle tourna son regard vers la cheminée tout près, sans répondre, écoutant simplement celui qui dévoilait ses conceptions sur cette race qui s’oubliait.

Chaleur envoûtante, douceur enivrante. L’âtre brûlant répandait sa lumière, sa clarté dans la pièce trop sombre. Le craquement du bois résonnait doucement pour qui prêtait l’oreille, et les cendres voletaient tout autour des flammes hautes pour qui savait les voir. Feu d’une cheminée, feu d’un cœur mortel. Feu rugissant, comme le feu de la passion, de la ferveur, de l’expression de son ardeur. Feu rouge, tel une larme de sang vive, une tâche éclatante, une lumière carmine sur le fond de pierres sombres. Feu pur, feu simple immaculé, feu de la vérité. Feu qui brûle et qui soigne, feu qui détruit et répare, feu qui protège et effraie. Feu, feu comme l’humanité, qui se brûle par elle-même, qui se meure doucement, qui palpite puis s’éteint, qui grandit pour disparaitre. Feu, d’un espoir mourant, de croyances éperdues, qui se cherchent, qui s’effacent. Feu, tout semblait soudain en lui, comme lui. Chaque être de ce monde, inconnu, invisible, trop voyant, créatures recherchant l’ombre ou la lumière. Chacun d’eux en son cœur connaissait cette flamme, brûlante et dévorante, qui n’aspirait qu’à grandir, s’épanouir. Pourtant, trop de cendres en ces âmes, trop de cendres en ces êtres, qui fanaient peu à peu, oubliant tout le reste, se perdant dans le gris de leurs vies. Rejetant ces étincelles qui ne pouvaient donc que s’éteindre, enfermées, emprisonnées, écrasées sous le poids de leur apathie. Adieu, rires et douces chansons, cris de guerre cris de l’âme ; adieux, regards qu’animent la passion, sourires béats de joie, fureur de vivre. Tout était sombre à présent, tout s’effaçait trop vite.

- Pourquoi ? Retrouver ma puissance, retrouver mes fidèles, voilà pourquoi. Quant aux humains… Lorsque s’approche la tourmente, lorsqu’ils sentent venir la mort, qu’ils comprennent qu’ils sont en guerre, ou qu’ils souffrent, simplement, d’esprit ou bien de corps ; alors, ils retrouvent la foi, ils se confient aux dieux, ils cherchent un pardon, implorent une pitié divine. Ils tremblent, ils ont peur de se perdre, que leurs âmes se brisent tandis que pourrissent leurs cadavres. Ils supplient, ils allument les bougies, chuchotent des prières cachées sous leurs pleurs. Ils sont là, eux infidèles eux félons, qui soudain se raniment, cherchent l’espoir où ils peuvent. Ils voient dans chacun de ces gestes l’espérance qu’un dieu les veille. Ils croient, ils se renforcent, ils se soutiennent, ils se rassurent. Alors pourquoi, pourquoi attendre tant, attendre d’être mal, attendre d’être brisé pour se tourner de nouveaux vers les divinités ? Pourquoi ne pas chercher la paix, pour leurs âmes tourmentées, sitôt qu’ils naissent ? Pourquoi donc perdre cette passion, perdre ces envies, qui jadis les animaient, par simple refus de croire en nous ? Non, s’ils cessaient de douter, s’ils ouvraient leurs cœurs, alors, aye sans doute, pourraient-ils voir de nouveau le monde se colorer. Ils pourraient apprécier la beauté de la fleur qui s’ouvre, lourde de rosée, le coucher du soleil inondant le ciel de ses tâches de sang. Ils comprendraient enfin combien il peut être doux de sentir la caresse du vent sur sa peau nue, profiter de la pluie qui tombe goutte à goutte en emplissant le monde de son doux murmure. Sans doute, croire de nouveau leur permettrait enfin de cesser de ne penser qu’à eux, qu’à leurs désirs égoïstes incapables de les satisfaire. Ils ont peur, peur d’eux, peur des autres, peur de s’autodétruire, mais sont impuissants à changer cela, à se changer eux-mêmes. Alors pourquoi pas ne pas croire, encore, en ceux qu’ils ont délaissés ?

Qu’avaient-ils à perdre, que pouvaient-ils craindre ? Vengeance peut-être de ceux oubliés qui renaîtraient ? Mais hélas, toute divinité était finalement bloquée par ce qu’elle était. Mouvement fluide, éclats roux tandis que son visage se tournait cette fois vers l’humain, le détaillant fixement, sans gêne, sans honte, sans même plus prêter attention au respect des conventions à cet instant précis.

- Et vous, en qui, en quoi croyez-vous vraiment, qui avez de l’Envers plus de connaissance que ne peut seulement l’espérer le commun des mortels ? En l’argent ? En l’amour, peut-être ? Au devoir ? Ou en une entité qui vous observe, mystérieuse ou connue, paisible ou furieuse ? Les connaissez-vous, ces couleurs, ces odeurs, ces paysages qui font vibrer et soulagent, vous qui restez en ces lieux sombres, otage de votre méfiance ? Ressentez-vous parfois ces frissons qui raniment et tiennent éveillé ?

Sam 28 Mai - 14:45
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Howard Earl
L'étrange sous la normalité :
Je suis l'héritier de la branche principale des Earl, je suis un Nécromant et un membre du secret. Je le protège et le soutient. C'est dans mon intérêt.

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Howard Earl
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Et voilà, les morsures du piège se refermaient dans le claquement sinistre du destin qui se répétait. Elle voulait retrouver sa puissance et ses fidèles. C'était naturel, évidemment, mais cela posait un problème majeur et évident : l'humanité avait grandie, et désormais, elle n'offrait rien si elle n'avait pas quelque chose en retour. Si elle ne voulait que reprendre ce qu'elle pensait lui appartenir, sans imaginer devoir également donner de sa personne, alors elle ne pourrait que courir à la catastrophe. Le temps n'était plus, où les humains se dévouaient aveuglément pour les êtres magiques. Une autre ère avait établie sa domination, une ère plus complexe… et pourtant moins riche en imagination. Observer la situation était bien triste, quel que soit le point de vu que l'on adoptait. Les dieux n'arrivaient pas à avancer, les humains cédaient totalement à leurs mauvais aspects… qui avait réellement le dessus, dans cette guerre illusoire ? Peut-être une bien une force encore inconnue, se tapissant pour grappiller avidement chaque miette de pouvoir, jusqu'à en détenir la totalité, faisant danser humains comme divinités entre ses doigts comme de vulgaires marionnettes. Comment en être certain ? « Peut-être au devoir. Fut un temps j'en aurais été absolument certain. Fut un temps, le devoir été tout pour moi. J'ai voulu incarné les parfaits espoirs de mon père. Puis j'ai ouvert les yeux. Le devoir compte toujours pour moi, mais je me le suis approprié… pour autant, il ne régit pas le monde entier, seulement le mien à l'heure qu'il est » Il secoua la tête légèrement, lentement, désabusé envers son propre comportement « J'ai déjà vibré. Et j'ai déjà ressentis la perte. Elle était poignante et elle m'a fait souffrir d'une toute autre manière que mon corps ne me fait souffrir. Je l'ai ressenti avec d'autant plus de force que mes liens sont solides » Sans mal, il reconnaissait ne pas être atteint par la grâce de la liberté intérieure. Peut-être ne le serait-il jamais. Ses chaînes étaient si fortes… Elles étaient pesantes, et s'alourdissaient encore davantage avec l'âge. Il le savait, elles s'alourdiraient jusqu'à ce qu'il soit trop vieux, trop rouillé pour les chasser, et il mourrait dans sa cage comme un oiseau aux ailes coupées.

« Oui, je ressens ces frissons. Ils sont une inconcevable torture… Ils me ressuscitent continuellement pour me laisser mourir dans la cangue de mes devoirs, à l'ombre de cette haute demeure. Ils viennent murmurer à mon oreille sans que jamais je ne puisse les toucher du doigt. Et je meure à petit feu, un peu plus amer à chaque souffle jeté sur les braises de l'espoir, que je vois lentement s'éteindre. » Pincement de lèvres tandis que son sombre regard se faisait plus obscure encore et pourtant voilé par le poids de ces vérités. « Je ne sais quel pantin je fais, sur la scène de ce monde. L'argent je l'ai eu dès ma naissance et il n'est qu'un outil à mes yeux, le devoir est la tombe dans laquelle je serais déposé à ma mort, et pourtant taillée bien avant celle-ci. L'amour… l'amour m'est un poison, l'amour m'est une intolérable notion. Je l'exècre si fort, si viscéralement, elle et tout ce qu'elle fait miroiter. C'est une inique tromperie, un bienfait affabulé que je voudrais voir périr… que je voudrais étouffer de mes mains si seulement je le pouvais, et si seulement c'était la bonne chose à faire mais je ne le puis et ne le voudrais en vérité… car ce n'est pas la chose à faire, justement. Quant à une entité... » Sa voix se perdit, s'étiola dans le silence confortable et les craquements du feu et pendant un temps infini et pourtant déterminé, il contempla le jeu des flammes sans rien ajouter. Sa prise sur le pommeau de sa canne était une serre aigrie, et pourtant son port n'en était pas diminué « La foi n'est pas une grâce dont je suis doté. Ni la foi en une quelconque entité, ni même en un pouvoir, encore moins en l'humanité. Je suis trop désabusé... » Pensif, il s’interrompit, semblant ne plus tant tenir à ce qu'il comptait ajouter, et haussant très légèrement le ton, comme s'il changeait de marche sur l'escalier de sa pensée, il reprit plutôt « Mais si je devais nommer une seule chose en laquelle j'aimerais croire, en laquelle j'aimerais n'avoir aucun doute, bien que ce soit le cas : c'est la justice. Oui, j'aimerais croire en la justice »

Mais c'était là tellement difficile, bien qu'il s'efforça de le faire. Parce que la justice était une notion extrêmement lointaine pour le monde actuel, à son humble avis. « Mais c'est aussi parce que je désire croire en la justice que je ne peux pas croire en une quelconque entité... » Parce qu'il lui restait encore à en trouver une qui soit JUSTE. Et aucune ne l'était à ses yeux. Il n'en connaissait aucune qui possède ce simple trait qui était pourtant à ses yeux à lui si important. Sans lui, il n'y avait rien d'autre. « Voilà ce que je pense. Moi aussi je doute et j'ai peur, mais en mon cas, j'assume parfaitement mon manque d'accessibilité… J'ai trouvé une forme de paix malgré cela, malgré beaucoup de choses. Elle est faible et fragile, mais elle est là et je m'y accrocherais fermement jusqu'à ce que je trouve ce que je veux trouver…Je vis avec la douleur de ressusciter chaque fois, mais si un jour, par miracle, je trouvais cette source de justice inébranlable alors l'on verra en moi le plus fervent des croyants. C'est ce qui me bloque. Bien que je souhaite être optimiste je ne le suis pas, et j'aimerais trouver une réelle lueur d'espoir en ce monde, une lueur si brillante que rien ne viendrait la souiller. Elle n'existe pas pour le moment et n'existera sans doute jamais. Mais si elle venait à être, oui… je l'adorerais elle »

Mer 1 Juin - 2:36
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Moïra Ní Éireann
L'étrange sous la normalité : Sous mon masque froid, je suis immortelle. Mes mains si délicates sont plus puissantes qu'elles ne le semblent. La magie m'habite et j'habite la magie.
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Moïra Ní Éireann
Elle l’observait, silhouette frêle et bancale qui se découpait dans l’encadrement de la fenêtre, voyant déjà son corps se rabougrir et trembler, imaginant sa peau se dessécher sur ses os qui ne tarderaient pas à tomber en poussière. Il n’était qu’un mortel parmi tant d’autres, parmi tous ceux qui étaient, pourtant, responsable de la faiblesse de toutes les divinités qu’ils avaient autrefois respecté. Malgré cela, Moïra attendait sa réponse, comme si en elle, elle trouverait ce qu’elle cherchait vraiment, comprendrait toutes les absurdités humaines ou leurs inexplicables comportements, comme s’il pouvait lui expliquer tout ce qui demeurait mystère. Songeuse, elle baissa les yeux sur ses mains en entendant ses propos. Le devoir ? Il avait régi et régissait encore la mentalité de ces mortels, il n’était pas étonnant qu’il soit donc évoqué. Et pourtant, il pouvait prendre bien des formes. Devoir conjugal, devoir professionnel, devoir liant parents et enfants, devoir créé par la religion… Il fermait les esprits et brisait les cœurs, imposant son respect aux plus faibles ou aux plus forts, à ceux qui avaient par malheur dû naître dans un univers trop fermé. Malgré cela, c’était aussi lui qui permettait de grandes et belles choses, qui restreignait certaines folies, certaines envies dévastatrices, qui poussait à la réalisation d’œuvres superbes. Il n’était pas mauvais de le respecter, mais le déifier n’était sans aucun doute pas non plus la meilleure chose à faire. Non, il y avait mieux à respecter.
 
La suite, cependant, lui tira un haussement de sourcil sceptique. Qui donc était cet homme qui reniait l’amour quand d’autres le vénérait et parcourait le monde à sa recherche, qui souffrait de son devoir tout en l’accomplissant ? Les humains de plus en plus observaient leur environnement avec cette vision désabusée qu’il avait, cyniques et rejetant cœur comme raison. Et pourtant, il mettait en avant quelque chose de presque absurde, une notion qui minait les humains depuis maints et maints siècles, une idée qui hantait leurs esprits en créant conflits et discorde. Une insaisissable chimère qui rendait ceux qui ne pouvaient l’atteindre amers et chagrins.
 
La justice ? Quelle étrange idée que de croire en elle. C’est une notion bien vaste et subjective ; vous et moi n’avons sans doute pas la même, pas plus que le passant de la rue voisine. Et chacune est sans doute bien loin de ce que vous appelez LA justice étatique. Je doute que vous ne trouviez jamais cette entité si juste que vous recherchez. Même Briggid pourrait ne pas vous convenir, elle vénérable mère et défenderesse de cette idée. Elle posa un doigt blanc sur sa lèvre inférieure, éternelle aguicheuse mais sincère dans sa conclusion.  C’est dommage, je vous aurais volontiers accepté comme l’un de mes fidèles.
 
Elle se leva, s’approchant de lui. Jetant un coup d’œil par la fenêtre, Moïra observa les branches qui s’agitaient doucement, bercées par un vent qu’elle ne sentait pas. Visage impassible, elle ne pouvait pourtant s’empêcher d’être contrariée. N’était-elle pas assez bien pour être vénérée ? Justice, justice, à quoi cela rimait-il ? Il n’y avait de justice que dans le sang versé en réparation des fautes commises, que dans le duel qui décide du juste et dans la bataille qui offre la victoire au plus méritant. A quoi servaient les sermons, les décisions pathétiques qu’un tribunal pouvait rendre, lui qui était fait par des mortels et donc par nature jamais impartial ? D’ailleurs, pourquoi justice devrait donc signifier équité ? Ah, ces humains, ils étaient sources permanentes de contrariété. Peut-être était-ce aussi pour cela que les divinités les aimaient.
 
Je vous souhaite de trouver plus vite épouse qui vous comble que l’entité que vous semblez rechercher. Et si vous vous ennuyez… n’hésitez pas à passer me voir. Je saurais peut-être vous convaincre de croire en moi.
 
Certes, il semblait d’un entêtement incroyable et très peu influençable, mais l’irlandaise avait l’éternité devant elle pour lui insuffler cette idée. Qu’elle s’éloigne aujourd’hui ne signifiait pas pour autant qu’elle abandonnait l’idée d’en faire l’un de ses enfants. Après tout, il était… intéressant, dans sa façon de concevoir les choses et d’appréhender le monde. Et son appartenance à la famille Earl en faisant un sujet d’importance, pouvant influencer ses semblables et son entourage. Comment pourrait-elle le faire céder ? Pour l’heure, il n’avait donc pas d’autre divinité à prier, mais si la guerrière tardait trop, cela ne saurait tarder. Il était intellectuel plus que soldat, mais elle avait aussi besoin d’êtres intelligents pour reconquérir doucement et silencieusement le monde.
Absorbée un instant dans ses réflexions, elle s’en sortie toutefois rapidement pour lui faire face, lui présentant sa main la tête haute. Cette entrevue se devait de se terminer ainsi qu’elle avait commencé : dans le respect des bonnes manières.
 
A présent, vous me pardonnerez sans doute si je vous dis que je dois vous laisser. Je vous remercie pour cet entretien, milord.
 
Absorbée un instant dans ses réflexions, elle s’en était sortie toutefois rapidement pour lui faire face, lui présentant sa main la tête haute. Cette entrevue se devait de se terminer ainsi qu’elle avait commencé : dans le respect des bonnes manières. Un insaisissable sourire passa toutefois sur ses lèvres tandis qu’elle concluait doucement, ne laissant derrière elle qu'un verre vide reposant sur la petite table basse :
 -Slán agat, a caraid.*

*Au revoir, mon ami

Dim 26 Juin - 14:58
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Howard Earl
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Howard Earl
Le Sacrifié

La justice était effectivement une chose étrange, et peu y croyaient encore. Mais elle n’était pas si subjective que cela, quoi qu’elle fût en effet vaste. Tout comme la vérité, et tant d’autres concepts et réalités, la justice était un monument dont l’humain ne percevait qu’une toute petite partie, un angle. C’était cela qui amenait la subjectivité, la tendance de l’humain, et d’autres créatures terrestres, à ne se fier qu’à ce qu’ils en voyaient et en comprenaient, en oubliant que leurs existences et leurs sens, leur capacité à appréhender étaient limités. Mais la justice ne se définissait pas parce qu’en voyaient les humains, comme le monde ne se définissait pas non plus ainsi. Même les œuvres d’art des grands maîtres échappaient inévitablement à leur compréhension d’une façon ou d’une autre pour vivre par elles-mêmes. Ce qu’il recherchait n’était pas l’interprétation de la justice par les hommes ou toute autre créature. Ce qu’il voulait trouver était la Justice elle-même. Sans filtre, sans le biais d’un avis. Sans rien pour en troubler la vision. La Justice, simplement, à son essence véritable. Et tant pis, s’il ne la comprenait pas, tant qu’au moins une fois dans sa vie, il pouvait baigner en elle, s’assurer qu’elle n’était pas une chimère déjà longtemps décédée. Qu’elle était encore là, quelque part, et qu’elle était, simplement, hors de portée, comme une montagne qu’on ne pouvait grimper. Mais il voulait la grimper, même s’il n’arrivait jamais à son pic. Et s’il ne trouvait nulle entité capable de l’y mener, alors il irait seul. « Et bien… si je ne trouve nulle entité capable de combler mon souhait… il ne me restera plus qu’à devenir cette entité » dit-il, calmement mais avec détermination, la voix tranquille, comme si rien ne pouvait changer cela. Et il se para d’un sourire. « Mais je suis flatté » L’observant, il ne put s’empêcher de se sentir amusé de l’avoir mis en but face à ses idées. Et elle ? Qu’est-ce qu’elle comprenait de la justice ? Quelle vision en avait-elle et que comprenait-elle de ses mots ? S’il voyait soudain par ses yeux à elle, quel angle du monument apercevrait-il ? Serait-il différent ? Serait-il opposé ou complémentaire ? Serait-il même totalement absent ? Il était curieux de le découvrir, et plus curieux encore du fait qu’il ne pouvait pas voir à travers ses yeux justement.

Son sourire se transforma en rire chaud, pendant un bref instant « Je crains d’être aussi difficile à combler maritalement que je le suis idéologiquement, mais je ne manquerais certainement pas de vous rendre visite… je m’ennui aisément » Se sentait-elle le défi de le convertir ? En un sens c’était plus flatteur encore, bien qu’il doute de sa capacité à y parvenir. Il n’était pas vraiment fait pour la vénération. Le défaut de son caractère et d’une éducation de prince. Mais l’idée, le fragment infime de possibilité, était autant un attrait, intellectuel, que le plaisir de la discussion qu’elle apportait. Les créatures étaient peut-être majoritairement inférieures, mais il y avait toujours des exceptions… elle semblait en être une. La raison qui l’avait admise ici peut-être. Toujours de bonne humeur, il vint déposer sur sa main d’albâtre un galant baisemain, sans cesser de l’observer, ses yeux sombres piquetés d’amusement. « Et je vous remercie de votre visite, Milady » Il la laissa aller, toujours amusé. Pour une fois, il semblait qu’accepter les exigences paternelles ne lui avait pas valu qu’un indicible ennui. Cette femme lui plaisait définitivement, par sa stature et son esprit. Par sa dignité, même dans l’agonie. Elle venait de gagner son sincère respect, un exploit que si peu en ce monde avaient accompli même parmi sa propre famille. Oui, il irait certainement la revoir, la retrouver. Et si le plaisir ne suffisait pas, il restait la curiosité de savoir comment elle tenterait de le convaincre. Apres un long instant, il s’admit intérieurement qu’elle venait d’égayer son humeur comme personne n’en avait été capable ces derniers temps, pas même Eurynome. Jamais auparavant il n’avait parlé de ce qu’il lui avait confié. Pourquoi l’aurait-il fait après tout ? Il n’y avait pas de divinités dans son entourage, cela aurait été inconvenant… et les autres étaient tous focalisés sur les voies de son père. Quant a sa mère… il ne lui faisait pas confiance.

Etait-ce faire preuve de trop de naïveté, de croire que pendant quelques heures, ils avaient partagé une forme d’unique promiscuité ?
 

Mar 5 Juil - 16:48
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