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 Il n'y a de fin heureuse que dans les histoires

Morghann Earl
L'étrange sous la normalité : Enfant cadet du Patriarche Earl, il est un héritage refusé, s'extrayant de la nécrose gangrénée de sa famille.
Tell me More : Jumeau d'Howard - Fils de Pryam
PROFESSION : Médecin Légiste
Crédits : Gustavo Krier
Messages : 1331
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Morghann Earl
Travailler de nouveau auprès des morts avait été à double tranchant. Une part de lui se satisfaisait de cette proximité macabre dans laquelle il baignait depuis sa plus tendre enfance. L'autre part de lui même déplorait le départ de ces Voix. Il pouvait toujours les entendre certes, mais il devait user de nécromancie, sa magie devait être engagée volontairement et demandait de la concentration alors qu'autrefois, c'était un mécanisme intuitif et automatique. Il les entendait comme il entendait les vivants. C'était frustrant... Mais il tenait le cap, œuvrant pour deux missions capitales : avoir un appartement avec Howard et protéger le Secret.

Sa journée s'achevait et, en jean sombre et boots boueuses il errait dans le cimetière familial, celui où il avait passé nombre d'heures de son enfance, dormant sur les sépultures, marbre glacial contre sa peau fragile. Les choses avaient bien changé en près de vingt années. Il se laissa lentement tomber à genoux dans l'herbe humide devant un tombeau bien précis, celui d'Annabelle Earl, il caressait presque tendrement le marbre, l'appelant et un sourire prit naissance sur son visage lorsqu'elle se matérialisa à sa vue, assise sur sa propre tombe. Elle se tenait bien droite, elle avait toujours été élégante et raffinée, ses prunelles noires dans les siennes. « Comment se porte notre libraire ? » demanda-t-il, calme, ses doigts effleurant la joue vaporeuse toute en nuances de gris de celle à qui il s'adressait. Elle lui parlait, mais ce n'était que des murmures entre ses lèvres à peine ouvertes. Morghann la comprenait.

Le soleil n'était guère encore trop bas lorsqu'à l'ouest de la ville il se dirigea, vers ces falaises que certains trouvaient maudites. Anna n'avait pas tardé sur les détails. Dans l'ombre, elle apparaissait régulièrement auprès d'Ayzebel, prenant conscience de son état jour après jour. C'était cette évolution depuis trois semaines qu'elle était venue porter à la connaissance du nécromancien. Des faits peu réjouissants : la sombre femme n'avait su se relever, buvant le calice jusqu'à la lie. Il se gara près des falaises, là où débutait le sentier de promenade. La mer grondait en de violents rouleaux et claquait sa colère contre les roches. Le vacarme était ébranlant, il soulevait le cœur et masquait le bruit de ses pas lors qu’après dix bonnes minutes à la recherche de sa silhouette, il la trouva, le regard vide, tenue au vent. Elle avait maigri, son visage était marqué par la fatigue et son regard était si morne. « Ayzebel. » fit-il gravement. Elle ne s'était pas présentée, mais c'était ainsi que Damian l'avait nommée quelques semaines plus tôt.

Il retira sa veste bleue nuit aux effigies du Metropolitan Police pour en couvrir les épaules de cette triste femme, s'approcha d'elle, dans son dos, pour pouvoir lui parler et couvrir le bruit des vagues sans avoir à s'égosiller. « Je vous avais dit de m'appeler si vous en ressentiez le besoin. » Elle ne l'avait pas fait, il en ignorait le motif. Il posa ses mains sur ses deux épaules fermement, tout près d'elle sans pour autant la coller, ne serait-ce que par respect : « Pourquoi ne l'avez vous pas fait alors que tout dans votre état le réclame ? Ils vous ont demandé de vous battre. » Il poussa un soupir dans sa nuque. Tout nécromancien qu'il était, une parole donnée à un défunt était primordial, et ce qui était valable pour lui et l'était pour elle. Elle avait demandé à son mari de partir en paix : elle n'avait pas droit de le trahir ! « Je peux comprendre que vous ne vouliez pas de moi, je vous connais à peine. Mais vous devez bien avoir quelques amis ? Aller au restaurant, au théâtre, ou ne serait-ce que quelques soirées à discuter près du feu. Ou bien... Retrouver votre famille, pas cellee qui vous a fait du mal, mais vous devez bien avoir des personnes que vous appréciez. Vous ne pouvez pas ruminer leur absence indéfiniment. »

Dim 1 Nov - 13:26
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Elle avait voulu tenir. Elle avait essayé de toutes ses forces... Mais les derniers événements furent comme si Damian et Daryn étaient mort une seconde fois. C'était plus qu'Ayzebel n'avait la force de subir. Pourtant elle n'en montra rien, chaque jour ressemblait au précédent... Chaque jour elle venait à la libraire, travaillait sans joie, attendant des clients qui ne venaient pas... Et chaque jour son silence et sa solitude devenaient un peu plus étouffants. Elle avait fini par oublier cette présence qui la suivait, la surveillait... Cette entité macabre qui était les yeux et les oreilles du fils Earl. Ayzebel avait fini par oublier beaucoup de choses en réalité... Les choses primaires de la vie. Dormir était un luxe qu'elle s’octroyait à peine quand les cauchemars ne venaient pas détruire son repos, l'appétit l'avait doucement quitté, seule la soif perdurait. Bien que l'hygiène était là par nécessité, Ayzebel n'arrivait même plus à savourer l'eau chaude d'une douche ou d'un bain, ne prenait plus de plaisir à rien... Même à la lecture, alors que les livres étaient sa plus grande passion. Oui, elle aurait dû appeler... Mais Morghann Earl avait été refoulé dans un coin de son esprit. C'était plus facile ainsi... l'oublier lui, c'était les oublier eux....

Deux semaines et demie. Des semaines qui avaient semblé être des mois pour elle... La sorcière avait vécu, simplement, répétant machinalement les mêmes gestes jour après jour, se laissant lentement dépérir. Oui, durant trois ans Damian et Daryn avaient été son pilier, même si cela fut inconscient... Mais eux à présent, la solitude prenait tout son sens. La violence de cette réalité lui faisait un mal de chien... Mais là encore, comment y remédier ? Ayzebel y avait réfléchi, plusieurs fois même. Elle s'était demandé comment arranger les choses, puis elle s'était dit que le temps ferait son affaire... Mais même le temps semblait ne pas vouloir de son âme trop sombre. C'était comme si tous la fuyaient, son aura négative se renforçant jour après jour... Seul l'entité resta là, cachée... Jusqu'au moment où Ayzebel ne se sentit réellement plus apte à faire quoi que ce soit.

Sortir... Prendre l'air, simplement. Ce jour-là Ayzebel n'avait pas ouvert la boutique, elle avait fait l'effort de marcher à travers les landes. Fébrile, son corps était aminci, plus pâle que d'ordinaire. Ce regard vert n'avait définitivement plus aucune lueur, vide de tout espoir. La sorcière trouva tout juste la force de respirer, de marcher jusqu'au bord de la falaise. Non, elle n'avait pas l'intention de sauter bien que l'idée ait effleuré son esprit... Immobile, elle observait la mer houleuse en contrebas, les vagues qui se fracassaient sur la roche et l'odeur d'iode qui lui piquait le nez. Si le ciel n'avait pas été aussi gris, cette simple vision aurait été magnifique. Mais pas aujourd'hui... Rien n'aurait pu lui apporter du réconfort... Rien, excepté lui.

Lui... Qui venait de se glisser dans son dos. Sa voix grave sonna à son oreille comme l'écho d'un passé lointain. Morghann... L'héritier des Earl avait finalement trouvé sa piste, sans aucun doute grâce à l'aide de cette entité qui surveillait la libraire comme un chien aux aguets. Et pourquoi donc ? Une promesse faite a des morts... Des morts qui ne reviendraient pas. Une promesse qui n'avait aucun sens... Alors que la veste fut posée sur ses épaules, Ayzebel resta immobile, encore et toujours. Le vent frais balaya le soupir du sorcier, ses mains chaudes sur ses épaules avaient ce petit quelque chose de réconfortant... Mais pas suffisant. Bien vite ce fut un ton accusateur, parce qu'Ayzebel n'avait pas, selon lui, trouver la force de se battre.

« Si je n'avais pas cette force, je ne serais déjà plus de ce monde et vous auriez eu à ouvrir ce voile une fois encore. »

Le ton de la femme était froid, désagréable. Une once de dégoût dans le timbre, elle finit par le repousser d'un coup d'épaule. Qu'il ne la touche pas... Pivotant, elle arracha la veste de ses épaules et la lui jeta avec force, avec colère alors que ses yeux humides et fatigués le toisaient avec dédain.

« Et pourquoi vous aurai-je prévenu ? Pour une promesse inutile que VOUS avez faite . Redescendez sur terre monsieur Earl... Vous et moi n'évoluons pas dans la même sphère. Nous ne nous connaissons pas, ce n'est même qu'une question de temps avant que vous n'oubliez mon nom et mon visage. Votre pitié, gardez-la, j'ai mieux à faire. »

C'était un gros risque qu'elle prenait. Il était un Earl bon sang ! Il fallait être fou pour oser faire cela! Et alors ? Après tout, elle n'avait plus rien à perdre... Une erreur de plus ou de moins, quelle différence cela ferait-il ? Aucun. Absolument aucune.

« Tout le monde n'a pas la chance d'avoir des amis... Ma famille et moi avons coupé les ponts quand j'ai décidé d'épouser Damian... Mon commerce est au bord de la faillite et ma rivale à tuer mon mari et mon enfant... Alors dites-moi, petit génie... C'est quoi votre solution pour ça, hein . »

Poussant un cri, elle tendit les bras, écartant les doigts et d'une pression télékinésique l'envoya voler sur le sol. C'était injuste, mais elle avait ce besoin viscéral de faire mal à quelqu'un... Il était le seul sur lequel elle pouvait le faire. Dans sa tête, Morghann le méritait, en un sens. Injuste pour l'aide qu'il avait offert, sans rien demandé en retour... Mais Ayzebel s'en fichait éperdument. Alors que des larmes ruisselaient sur son visage, elle fit un pas en avant, titubant et cheveux aux gens, siffla contre lui tel un serpent furieux.

« Je veux que vous disparaissiez de ma vie, Morghann Earl. »

Dim 1 Nov - 14:31
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Morghann Earl
L'étrange sous la normalité : Enfant cadet du Patriarche Earl, il est un héritage refusé, s'extrayant de la nécrose gangrénée de sa famille.
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Morghann Earl
La réponse fut froide, l'Earl baissa les yeux par respect pour ses propos. Au moins elle ne songeait pas au suicide mais son état aujourd'hui l'y conduisait pourtant. Elle se laissait mourir, peut-être n'était-ce pas mieux que de se jeter du haut de la falaise. Elle dépérissait, progressivement, laissant la douleur la ronger comme s'il s'agissait d'une bien vilaine maladie dont elle refusait le moindre remède. Il retira ses mains lorsqu'il fut repoussé, attrapa sa veste lorsqu'on la lui rendit avec force, la fixant avec les mêmes prunelles d'une sombre noblesse qu'il affichait. Le dédain qu'elle lui portait était aisé à sentir, il fronça les sourcils à son propos, sans nul doute agressé. Son père aurait très mal réagi à autant de manquements, autant d'insultes à sa famille. Morghann se contenta de ce regard posé, presque inébranlé par ces cris du cœur. Il l'était pourtant. Il n'avait pas pour habitude de se faire de la sorte rejeter, surtout lorsqu'il venait porter une aide, mais Ayzebel ne le voyait définitivement pas de cet œil là.

« Je n'éprouve aucune pitié à votre égard. Je suis un allié de la mort. Je la sers et elle me sert en retour. Cela n'a rien d'une promesse inutile, c'est un pacte primordial et j'ignorais que vous aviez si peu d'amour pour votre défunt époux pour ainsi bafouer la parole que j'ai auprès de lui scellée. » A peine avait-il le temps de terminer son propos qu'il se faisait éjecter au sol sans aucune autre forme de procès. Peut-être aurait-il pu, à défaut de contrer, au moins atténuer sa chute mais n'ayant que peu vérifié les environs, il aurait été malvenu de révéler le Secret. Si elle désirait se mettre en danger : soit. Mais il ne l'imiterait pas et il ne la laisserait pas mettre le Secret dans son entièreté en danger par sa faute. Il percuta lourdement de sol dans un grondement sourd, son dos intégralement éraflé par les gravillons du sentier. Elle aurait pu l'envoyer dans l'herbe qu'il s'en serait bien mieux sorti : en lieu et place de cela, sa chemise blanche avait été salie et légèrement percée dans son dos. Quelques gouttes fines de sang imbibait le tissu en tâches pourpres.

Il se redressait, Annabelle s'était à ses côtés matérialisée, à genoux au sol, nonobstant l'état de sa robe de jersey. Elle avait l'air inquiète mais sa présence lui indiquait qu'ils étaient seuls dans les environs sans quoi l'esprit ne serait pas apparu. Au moins le Secret n'était pas mis en danger. « Pas étonnant que vous soyez seule... » pesta-t-il, tant acerbe que cynique. C'était la deuxième fois qu'elle le rejetait, et elle ne devait pas agir de la sorte uniquement avec lui. Il porta un coup d’œil sur l'ombre fantomatique à ses côtés, pour la rassurer sur son état : il s'en remettrait. Il n'avait pas invoqué Annabelle, elle était venue seule, preuve une fois encore qu'elle n'avait rien qu'une défunte ordinaire. Elle était bien plus que cela aux yeux de Morghann. Au fil des ans, elle était devenue son ange gardien, si tant est qu'on puisse être gardé par un ange lorsqu'on était un nécromancien.

Annabelle tourna lentement la tête vers la libraire, son regard déjà noir s'assombrit plus encore, les ténèbres venant la dévorer jusqu'à ses sourcils et ses pommettes. Ses traits se tiraient par la colère et l'envie de vengeance, elle était laide, par la haine déformée : « Anna ! » s'écria-t-il, voyant bien vite clair dans ce qu'elle s'apprêtait à faire. Rapidement, il œuvrait à la matérialiser physiquement et la saisit par derrière, l'enserrant d'une main par la taille et l'autre autour de ses épaules. L'ancêtre Earl avait déjà envoyé Ayzebel par télékinésie s'écrouler au bord de la falaise, dangereusement, si proche de la chute. « Chhh... Calmez-vous, douce amie. » soufflait-il à son oreille, pour l’apaiser. Le visage d'Annabelle reprenait difficilement forme, sa respiration soulevait intensément sa petite poitrine. Il lui fallut plusieurs longues secondes pour qu'elle ne ferme les yeux au creux de son étreinte et que ses traits se détendent. « Rentez Annabelle. Ce monde n'est pas fait pour vous, il vous épuise. Je vous en prie, tout ira bien. » Annabelle était extrêmement fatiguée par son acte et s'endormait. Morghann la congédia et elle s'effaça de ses bras jusqu'à disparaître complètement.

Après avoir retenu son chien de garde, il lâcha un nouveau soupir, se releva péniblement. Il n'osait l'approcher encore, cette femme sombre, il ne voulait pas l'effrayer ou se retrouver encore à terre. « Ayzebel, cessez ces caprices. Vous agissez comme une enfant. Je comprends votre douleur. Je la comprends, je vous l'assure. » Il insistait, peut-être un peu trop pour ne pas paraître louche. Il était lui-même veuf et avait perdu son fils. Il savait parfaitement ce qu'elle ressentait. Plusieurs jours durant il s'était retrouvé dans un état léthargique similaire à celui d'Ayzebel, mais il s'était repris en main et était rentré à Last End. « Ce n'est pas de la pitié que j'éprouve à votre égard, Madame. C'est de la peine. Ce n'est pas de mon chef que je viens à vous. C'est SA volonté que j'exécute. Celle de votre époux, la mission dont il m'a investi. Vous ne sauriez comprendre les liens que nous, nécromanciens, avons avec les défunts. Je vous en dispense. Mais je vous en prie, ne vous opposez pas à lui. »

Il remit sa veste d'uniforme, masquant ses blessures pour le cas où quelqu'un passerait. « Que savez-vous de la sphère dans laquelle j'évolue ? Vous ne savez rien de moi. Vous ignorez parfaitement si nos univers peuvent s'entendre. » Il ne le savait pas d'avantage mais au moins il ne partait pas catégorique et laissait place au doute. « Et non. Je ne peux ni oublier votre nom, ni votre visage. Ils ont scellé mon serment. Je ne peux disparaître de votre vie, même si je le voulais. Ce n'est pas un choix. Raisonnez-vous. » Des larmes sur le visage de cette femme, il y en avait tant. Le masque Earl de Morghann s’effritait : il n'était pas l'un des leurs. « Je n'ai pas de solution miracle, je suis désolé, il n'y a pas marqué Seigneur sur mon front. Je ne voulais pas être intrusif, mais peut-être aurais-je du dès le début. A présent, je n'ai pas d'autres options. » Elle allait devoir faire avec lui car il lui collerait comme une abeille près d'un pot de miel.

Dim 1 Nov - 18:27
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L'entité se montra agressive, n'acceptant pas de voir son maître ainsi jeté au sol. Sans doute pensait-elle Ayzebel ingrate, sans comprendre que celle-ci ne désirait tout simplement pas l'aide du Earl, encore moins lui imposer son chagrin. Était-ce donc si dur à voir ? Promesse ou pas, qu'est-ce que ça lui apporterait à lui ? Si ce n'est bonne conscience . Et elle alors, son opinion ne comptait pas . Ayzebel n'avait as besoin d'être protégé, certes elle était mal... . Mais elle était forte. Décollant brutalement du sol, Ayzebel gémi par la force invisible qui la heurta de pleins fouets avant de la pousser au bord du précipice. Le souffle coupé, l'esprit dans le vague... La sorcière retrouva difficilement ses esprits, jonchant dans la terre et les cailloux. Relevant le visage, elle porta sur l'entité et le jeune Earl un regard sombre... Au sens propre du terme. Lentement le vert de ses yeux se voila d'une encre opaque alors qu'elle serra les dents, folle de rage... Si seulement elle avait pu envoyer cette chose par la voile comme Morghann l'avait fait avec Damian... Si seulement Morghann... N'avait pas existé... Si seulement... C'était elle qui n'avait pas existé.

L'entité épuisée disparut, écroulée dans les bras de son maître. Une chose de fait, ça de moins à supporter. Ne restait que lui... Qui s'accrochait comme une moule à un rocher, plus tenace que la vérole aux jupons d'une catin. Lui et ses belles paroles... Abject qu'il était ! Se relevant difficilement, la sorcière tituba, le souffle rauque et le visage crispé sous la haine alors que son regard de jet le toisant... Deux gouffres béants comme ceux d'un démon... Sa longue robe sombre flottait dans le vent, ses boucles brunes ondulant, encadrant un visage excessivement pâle alors que la sorcière ouvrit la bouche, crachant sa haine à nouveau.

« Et que ferais-je votre peine ?! Cette promesse vous l'avez faite, non moi ! Je n'ai pas à la subir sous prétexte que votre lien avec les morts vous permet de les comprendre ! Vous ne pouvez entacher mon libre arbitre Morghann Earl ! Ma vie, je la mène comme je le désir... Et si je ne craignais pas les représailles de votre famille, je vous aurai déjà arraché la tête pour la planter sur une pique ! »

Trouvant enfin la force d'avancer, c'est vers lui qu'Ayzebel se dirigea. Son souffle haletant crachotait des nuages de fumée, trahissait son état de nerf. Elle non plus n'était pas jolie... Elle avait presque l'air morte à cet instant...

« Pas de solution miracle ? Je ne vous en demande pas. Ma vie ne vous concerne pas, quant à Damian... Il est mort et hors de portée. C'est fini, Morghann, l'histoire s'arrête là. »

Qu'il cesse de parler, de se justifier ! Tout ce qu'elle voulait c'était le calme, le silence... Plaquant ses mains sur ses oreilles, la sorcière voûta le dos. Les sanglots reprirent et lentement, elle se laissa tomber à genoux devant lui. Spectacle pitoyable... Mais qu'y pouvait-elle après tout ? C'était trois longues années de tristesse, de colère qui sortait brusquement... Elle avait cet intense besoin de vider son sac... Même si Ayzebel l'aurait voulu, ses larmes auraient continué de couler... Le trop pleins d'émotion était d'une rare violence.

« Je vous en supplie, partez Morghann... Rien que voire votre visage me donne envie de l'arracher. Si seulement j'avais la force de vous tuer... Je vous hais tellement Morghann Earl... Tellement. »

C'était vrai... Mais pas pur la raison qu'il croyait. Elle le haïssait parce qu'il faisait sortir chez elle ce qui était bon, il faisait ressortir son humanité... Elle devenait cette femme faible et éprouvée par un deuil sans fin... Comment pouvait-elle battre Lucinda dans cet état ? Retirant ses mains, Ayzebel releva le visage pour fixer le sorcier dressé devant elle. Le noir de ses yeux diminua jusqu'à disparaître, laissant à nouveau ses orbes d'un vert magnifique se poser sur lui. Non, même le haïr elle n'en avait pas la force... Ayzebel ne savait plus dans quoi trouver cette force à présent... Où ? Comment ? Se battre c'était bien, mais ensuite . Sa vie se résumait à ses livres, il n'y avait pas de quoi se battre. Pas d'amis, pas de famille, pas d'amour... Juste une solitude pesante. Et elle doutait que l'Earl soit quelqu'un qui serait apte à lui donner tout ça. C'était stupide, rien que le fait d'y penser. Ils n'étaient même pas du même monde... IL était là juste pour la promesse à Damian, sans ça, jamais il ne se serait tourné vers elle. Ayzebel n'aurait été que cette sombre femme cachée derrière des piles de livres qu'il aurait croisée une fois et dont il aurait oublié le visage... Et c'était peut-être tout ce qu'elle méritait.

« Je...ne sais pas... Où trouver … la force de vivre, Morghann? J'ai tellement mal... J'ai tellement peur... »

Dim 1 Nov - 23:11
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Morghann Earl
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Morghann Earl
Ayzebel se montrait aussi têtue qu'une mule. Morghann, lui, savait qu'il n'avait pas le droit d'abandonner. Voilà qui s'en trouvait fort déplaisant, il n'avait pas pour habitude de se faire repousser. La situation s'en compliquait. Elle était faite de ténèbres, robes et cheveux au vent, et même rongée par elles. Il voyait en elle tout ce qu'il avait évité en me mettant pas son cœur entier dans son amour pour Kessy White Earl. Mais à coup sûr, c'était dans cet état, sinon pire, qu'il se retrouverait si son aîné gémellaire venait à ne plus être. Le fils Earl roula des yeux lorsqu'elle indiqua craindre de représailles. A vrai dire, ce n'était pas tant les Earl dans leur entièreté qu'elle avait à craindre. Nul doute qu'ils la tueraient par vengeance mais... Ce ne serait rien comparé à croiser la route d'Howard. Son aîné ne pardonnerait jamais un tel affront, Morghann en était persuadé. Toutefois, il y avait du vrai dans les propos d'Ayzebel, il était protégé par une famille de renom. Tout ennemi se devait d'y réfléchir à deux fois avant de lui faire la moindre égratignure. « On m'a toujours dit que je finirais par perdre la tête. » répliqua-t-il, cynique, bien qu'il n'eut jamais pensé que ce serait au sens propre du terme. Ces Voix qu'il avait entendu depuis sa plus tendre enfance, malédiction même s'il l'ignorait, il aurait pu en devenir fou si à elles, il n'avait pas accepté de concéder une part de son existence. Il avait été au plus près des morts, démêlant leur cacophonie redoutable pour parvenir à les écouter, un par un, dans leur macabre histoire. Et Annabelle l'avait aidé à ne pas finir dans un hôpital psychiatrique, retenu par une camisole de force pour ne pas faiblir au suicide.

« Vous avez accepté mon aide à l'instant même où vous avez voulu les aider, eux. Ma mission ne s'arrête pas à les renvoyer d'où ils viennent. Je suis le bras de leur volonté. » Il la regarda approcher, sans rien faire pour la repousser : mieux valait qu'elle ne reste pas trop près du bord de la falaise, un accident était si vite arrivé. Elle avait un visage tellement déformé par la peine, elle avait presque l'air morte. Il poussa à soupir à ses nouveaux propos puis, gravement, sa voix claque une sombre réalité telle une menace : « Les morts ne sont jamais hors de  ma portée, Madame. » Damian n'était pas totalement parti, il pouvait le ré-invoquer, la forcer à regarder ce qu'il était devenu après trois années à la soutenir au péril de son propre existence. Il pouvait l'obliger à affronter son regard alors que lentement, elle se laissait sombrer, négligeant son corps jour après jour. Il pouvait lui faire beaucoup de mal, alors non, ça n'était pas fini et l'histoire en s'arrêtait pas là. Il pouvait la lui refaire vivre si elle ne se pliait pas à son aide.

Elle s'écroula en sanglots, à genoux, à ses pieds. Un position qui aurait fort convenu à son frère mais... Morghann était plus du genre à être celui qui se jetait à ses pieds. Toutefois, il devait lui accorder que ça n'était pas désagréable de la surplomber, d'avoir son existence entre ses mains. Il pouvait faire d'elle ce qu'il voulait. Elle n'était pas assez forte pour combattre un héritier de la famille Earl, il pouvait la contraindre... Peut-être n'avait-il d'ailleurs pas le choix. Elle se lamentait, le détestait et abjurait. Il poussa un soupir et, impérieux, ordonna : « Relevez-vous immédiatement, Madame. » C'était sans appel. Si ce n'était pas elle qui le faisait, c'était par magie qu'il la contraindrait. « Vous ne mangez pas. Vous ne dormez pas. Vous en avez tous les symptômes et je ne vous donne pas plus d'un mois à vivre à poursuivre dans cette voie. Je ne vous laisserai pas faire. Que vous le vouliez ou non. Vous allez vous lever. Nous allons aller à ma voiture et je vous conduirai chez moi. Je vous donnerai un repas et vous mangerez. Je vous coucherai et vous dormirez. Et si vous ne m'accordez votre gré, je vous y contraindrai. Je me moque de vos états d'âmes : vous êtes en danger. Je suis navré, il est bien trop tard pour que je me conduise en gentleman avec vous mais... » Il lui tendit une main pour l'aider à se relever : « Je ne perds pas l'espoir de pouvoir faire tomber ce masque autoritaire si vous acceptiez d'y mettre du vôtre. Je ne vous veux aucun mal Ayzebel, je veux vous sortir de là et même si vous semblez en être intimement persuadée.... Vous ne pourrez vous en sortir seule. Vous avez besoin de moi. » Ses prunelles noires s'appuyait sur elle : « Et je suis là. Ne m'obligez pas à vous soumettre. »

Mar 3 Nov - 16:20
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Invité
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L'ordre tomba comme un couperet prêt à trancher une tête.
Se relever? Si seulement elle en avait la force. C'était indigne pour Ayzebel d'être ainsi face à lui, à genoux... soumise. La soumission... Elle n'avait jamais aimé cela, elle aimait sa force et sa liberté... Mais à l'heure actuelle, les deux semblaient l'avoir quitté. Et l'Earl était là, debout à citer ses symptômes... À l'entendre elle était au bord de la mort... Et maintenant qu'elle y pensait, c'était peut-être vrai. C'était-elle donc laisser aller à ce point ? Sans même s'en rendre compte . La faiblesse de son corps la frappa de pleins fouets alors que son regard émeraude scrutait intensément celui de Morghann. Il voulait l'aider, bien que cela parte d'un bon sentiment, en réalité ce n'était pas ce qu'il souhaitait... Il voulait juste honorer sa promesse... Il voulait avoir bonne conscience. La croyait-il sotte pour croire à ses paroles ? Ou bien était-ce elle qui était trop bornée et trop méfiante pour vouloir y croire... Ayzebel se sentait incapable de se laisser aller, de lui faire confiance... C'était triste, surtout pour elle écrivez ici...

Observant la main tendue, la jeune femme déglutit alors que ses larmes ne coulaient pus. Elle était juste là, à genoux dans la boue à fixer cette main qui attendait une poigne. Ayzebel inspira longuement et elle se souvint... Son jumeau. Cet homme froid et amer obligé de se déplacer avec une canne, qui refusait tout lien avec qui que ce soit. Si Ayzebel prenait cette main, si elle le suivait chez les Earl, alors il y avait fort à parier qu'elle croiserait cet homme à nouveau. Comment pouvaient-ils se ressembler si fort et être à ce point si différent ? Car si Morghann cherchait à l'aider, Howard l'aurait laissé se traîner ici, dans la boue. Peut-être même l'aurait-il lui-même pousser de la falaise, ou bien l'aurait encouragé à le faire. Cette idée lui arracha un frisson... Quand l'on voyait cette famille, Ayzebel se demandait si faire confiance à Morghann était une bonne chose. Pourtant, au fond d'elle la solitude piquait son cœur avec force... Elle n'avait qu'une envie, accepter cette demande, le suivre et simplement profiter, se reposer. Mais à quel prix ? Là était toute la question. Levant la main, elle la glissa dans celle de Morghann et se releva doucement, difficilement. Son corps entier était engourdi.

« J'accepte... Mais je n'oublie pas que l'on n'a rien sans rien monsieur Earl... Que vous refusiez cette évidence, peu m'importe... Mais je sais qu'un jour je devrais payer pour avoir accepté votre main tendue. »

C'était la règle de base dans la magie, toute chose à un prix... Parfois très coûteux. Retirant sa main de la sienne, Ayzebel soupira et crocheta le bras du fils Earl pour se servir de lui comme d'un soutien alors qu'elle le suivit simplement à travers le sentier de terre. Elle n'avait toujours pas fin, mais très envie de dormir et vu son état, une douche ou un bon bain lui ferait le plus grand bien.

« Vous avez l'air d'un homme bon Morghann Earl... Mais avez l'air, seulement. Je me demande bien ce qui peut vous animer... Qu'est-ce qui vous pousse à agir ainsi. Vous êtes un mystère pour moi... Et je crains le jour où je percerais ce mystère. J'ai la désagréable sensation que je n'aimerais pas ce que je pourrais découvrir. »

Une fois face à la voiture, la femme observa son reflet dans la vitre de la portière. Quelle mine abominable... Elle qui était déjà loin d'être la plus belle des femmes, cette fois faisait vraiment peur à voir. Pitoyable... Dans un soupir, Ayzebel ouvrit la portière et s'installa, tant pis si elle salissait le siège passager, après tout c'est lui qui avait voulu l'emmener.

« Bien... Je doute que votre famille accepte que le petit peuple vienne fouler le sol de son château. Vous êtes sûr que cela n'aura aucune conséquence? Je ne m'inquiète pas pour vous, mais surtout pour moi... Je n'ai pas envie de subir les foudres de qui que ce soit, là-bas. »


Comment-il dit déjà, ce Howard ? Ah oui, la plèbe... Prions à présent pour que cette crevette d'Howard ne croise pas la route de la sorcière qui, au vu de son état, ne pouvait promettre de garder son calme face à ses piques acerbes.

Mar 3 Nov - 20:13
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Il n'y a de fin heureuse que dans les histoires
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