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 Jusqu'à ce que la mort nous sépare ? | Kessy

Morghann Earl
L'étrange sous la normalité : Enfant cadet du Patriarche Earl, il est un héritage refusé, s'extrayant de la nécrose gangrénée de sa famille.
Tell me More : Jumeau d'Howard - Fils de Pryam
PROFESSION : Médecin Légiste
Crédits : Gustavo Krier
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Morghann Earl
Bon Lord, il avait accepté le dîner professionnel avec ses collègues de Scotland Yard. Il rentrerait probablement tard ce soir, ce genre de repas avaient tendance à durer plus que de nature. Il y avait échappé, autrefois, parti à l’étranger. Mais depuis qu’il était revenu à Last End, il aurait été mal vu qu’il échappe en permanence à ces mondanités. Ou on l’aurait confiné à un excès d’orgueil qu’on attribue à cette noblesse anglaise dont il faisait partie. Alors, il leur avait octroyé sa présence, pour toutes les fois où il avait montré de la réserve et des refus. Ronds de jambes, compliments, tout fusait et il n’y avait rien qui puisse lui permettre d’y échapper. Son nom lui donnait la place d’honneur, quand bien même il n’était nullement le manager de tout ce petit rassemblement. S’il dirigeait une petite équipe, cela s’arrêtait là. Le prestige de son doctorat suffisait à dorer le blason de sa lignée sans qu’il n’ait jamais cherché à accumuler des responsabilités et des hommes sous ses ordres. Là était probablement son premier trait de caractère qui le rendait si différent des siens. S’il était directif, il n’était pas fait pour porter la couronne qu’il préférait voir incomber à Howard, à son jumeau qui la convoitait.

Au cours de ce dîner, une femme lui avait été présentée. Une nouvelle collègue de travail. Entre les médecins légistes de l’hôpital, ceux de la police locale et ceux de Scotland Yard, l’effectif était renouvelé par mission et il n’était pas surprenant de voir de nouvelles têtes de manière régulière. Aussi lui avait-il accordé un baise-main en parfait gentleman et il aurait probablement poursuivit sa conversation comme si rien n’était. Qu’il s’attarde sur une femme, lui, l’héritier à marier, et ç’aurait été le terrain propice à bien des pronostics sur la bouille qu’afficherait leur futur enfant. Mais cette fois-ci, il n’avait pas pu détourner son regard. Non pas qu’il s’agisse d’un coup de foudre ou de ces belles histoires à l’eau de rose dont le romantisme était tant débordant qu’il en devenait écœurant… Mais pour son nom. Kessy White. Écho du passé qu’il se prenait de plein fouet sans l’avoir vu venir. Il y avait bien eu Andrew qui était revenu d’entre les morts et que Morghann avait retrouvé. Mais… Kessy. Il devait bien se douter que sa vie passée à l’étranger et cachée finisse par lui exploser au visage un jour où l’autre. Il n’était plus tant l’héritier à marier. Il était le veuf qui d’un mariage avait déjà consommé les fruits. S’il avait été une femme, sa noblesse l’aurait contraint à un veuvage définitif. Mais il était le fils de Pryam Earl. Un mâle aussi rares qu’ils puissent être dans le sang sorcier. On ne s’arrêterait pas à cela mais… En fonction de la manière dont cela venait à être utilisé, la situation pourrait devenir gênante. Et dangereuse.

Il détacha son regard, poursuivit la conversation qu’il menait avec un collègue, masquant avec aisance le trouble qui l’habitait. Le paraître était l’art des Earl et les mondanités leur terrain de jeux. S’il n’avait pas joué pendant des années, il avait été éduqué pour cela et retrouvait ses marques. Pendant le dîner, il l’avait observée, ses noires prunelles se posant sur elle longuement. Il y aurait des pronostics sur la bouille de leur enfant, c’était certain. Ses observations du dîner lui avait permis de capter l’aura démoniaque de cette femme. Un élan de compréhension lui avait alors fait quitter tout contact visuel avec elle. Pas ce soir. Il ne la rencontrerait pas ce soir. Mais il savait que cela viendrait. Qui que soit ce démon, on n’endossait pas un métier proche du sien, des collègues proches du sien, on ne choisissait pas le nom de son avatar de chair sans raison. Ce démon avait fait en sorte d’attirer son attention, il le savait. Il ignorait comment il avait pu connaître la relation qu’il avait pu avoir avec l’humaine qui était devenue sa femme… Mais ça ne sentait pas bon du tout. Ainsi quitta-t-il le repas à son terme sans chercher à se rapprocher d’elle pour l’heure. Il avait entendu son appel de sirène, mais il savait aussi se méfier des démons et il refusait de se jeter dans la gueule du loup sans y être préparé.

Ce n’est que le lendemain, au travail, qu’il prit les devants, la suivant alors qu’elle entrait dans l’une des salles d’autopsie. Il ferma la porte derrière lui et s’y adossa pour empêcher qui que ce soit de rentrer. Sans aucune autre forme de procès, il lâcha un : « Que me voulez-vous ? » En d’autres mots, que lui voulait ce foutu démon contre le silence de ce qu’il avait pu découvrir sur son ex-épouse ? Car pour Morghann, il était évident qu’il s’agissait de cela. Les démons savaient s’y prendre pour montrer combien, ils étaient de bon manipulateur. Et celui qu’il avait face à lui désirait sans nul doute le faire chanter. Et bien soit ! Qu’il parle ! On verrait bien qui chantera le mieux !

Jeu 11 Aoû - 14:55
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I can't remember what it means to be alive
will you show me? will you show me how to get inside ?

Elle n’était pas prête. Ce constat la terrifiait et la transcendait en même temps, la puissance nouvelle encore bridée par les mœurs anciennes. Heureusement, elle avait su se contenir lorsqu'elle avait été présentée, et à peine ses prunelles claires s’étaient-elles assombries à la vue de celui qu’elle désirait rejoindre avec tant de force. Entourée d’humains, son instinct grondait, furieux, sournois, bête fruste et lascive prête à festoyer. Toutes ces âmes à saisir. Toutes ces vies à écorcher vives. Non. Elle ne pouvait se le permettre. On l’avait mise en garde contre le Cénacle et les retombées de tout agissement inconsidéré. Ces mortels étaient si faibles. Elle n’avait eu aucun mal à se fondre dans la masse, passant pour l’une de leurs semblables sans qu’à aucun moment le moindre soupçon ne se montre. Risibles humains. Le  fait d’avoir été l’un d’entre eux ne la faisait que les haïr davantage. La seule exception se tenait là. Non loin d’elle. Il était aussi droit, aussi impressionnant de calme et de maîtrise que dans son souvenir, et ses traits plus émaciés, sans doute creusés par de nouvelles épreuves, ne faisaient que renforcer l’image de noblesse et de puissance qu’il avait toujours incarné à ses yeux.

I can't remember what it means to sacrifice
when I can't even feel the pain when I've been so anesthetized.

Elle avait passé l’épreuve du dîner avec brio, s’accrochant à son rôle comme elle s’était jadis accrochée à Morghann pour tenir, puisant dans sa mémoire la force de se projeter au-delà de cet intenable moment. Il le fallait. On l’avait mise en garde et elle n’était pas revenue pour se faire remarquer et devenir l’une des cibles du Cénacle. Sa vraie nature devait rester cachée du plus grand nombre, et muselées ses pulsions meurtrières. Cette histoire dont elle n’aurait jamais pensé écrire la suite lui appartenait à présent de nouveau, à elle seule, se plaisait-elle à penser, et si d’autres étaient concernés, ce n’était pas pour autant qu’elle laisserait quiconque s’interposer. Kessy avait payé bien trop cher ses convictions de l’époque, et elle avait suffisamment patienté. La soirée se termina sans confrontation et la démone rongea son frein, plongée dans l’expectative de leur tête à tête à venir. Il viendrait, elle en était sûre, persuadée d’avoir suffisamment retenu l’attention du lord pour espérer une suite plus intime, loin de ces gens qui n’éveillaient plus rien d’autre en elle que l’envie de faire souffrir. Mille fois cette nuit-là, elle tenta d’imaginer ce qu’elle pourrait lui dire, et mille fois, les mots la fuirent.

Kiss the cold and the dark,
and say goodnight to the memories  

Lorsqu’arriva le lendemain, Kessy eut encore plus de mal à retenir les pulsions malsaines qui la poussaient sans cesse à vouloir tourmenter ses collègues. Ce travail avait beau n’être qu’une couverture temporaire, elle n’en avait pas moins besoin pour parvenir à ses fins. S’entourant d’un masque d’indifférence, la démone pris son mal en patience, se focalisant sur les tâches à effectuer sans trop approcher les vivants. Il lui était toujours aussi aisé de manipuler les corps, et la putréfaction la plus avancée ne risquait plus de la faire tressaillir. Elle ne perdit sa belle concentration que lorsque, enfin, elle sentit sa présence, tout proche, aussi palpable que les battements du cœur qui se précipitait follement dans sa poitrine d’emprunt. Joueuse, elle le laissa venir, faire ce pas qui, après le chemin parcouru, lui coutait bien plus qu’il n’aurait dû.  

The ghost of a yesterday
will hold you close to keep the hurt at bay

Morghann, souffla-t-elle en se retournant lentement, savourant le nom sur ses lèvres. Elle l’observa, bien plus attentivement qu’elle n’avait pu le faire le jour d’avant, prenant note des changements survenus sur cette physionomie qu’elle s’était targuée de connaitre par cœur. Malgré l’élan qui la poussait vers lui, elle s’avança mais se retint de le toucher. La bête en elle grondait toujours, bien qu’adoucie par la présence désirée, et elle ne se faisait nullement confiance quant aux réactions induites par son émotivité. Elle resta à quelques pas de lui, prudente, tremblant presque d’envie, de crainte, et de culpabilité mêlées. Coupable, puisqu’elle l’était, de n’avoir avoué plus tôt, de n’avoir su endiguer le flot de conséquences découlant de son acte manqué.

« Morghann… » répéta-t-elle avec plus d’assurance. «  Tu ne me reconnais pas, mais comment le pourrais-tu… Pardonne-moi... c'est si... difficile. Elle s'arrêta, marqua une pause. Puis repris, presque timidement : « C’est toi que je veux. C’est pour toi que je suis revenue

Elle le fixait avec intensité, et plus les sentiments se mélangeaient en elle, plus son regard s’assombrissait. Jusqu’à ce que ses prunelles ne s’opacifient complètement, voilant l’étincelle de vie et noyant tout reflet.

As our time transpired
we became as effigies
underneath a veil of grey
collapsing in on our own decay

Morghann. La mort, il la portait dans son nom même, et savait la tenir au creux de ses mains. Il en connaissait les vices et les secrets. Tout comme elle. Ce qu’ils avaient partagé lui paraissait toutefois bien pâle, maintenant privé du filtre d’un cœur humain. Pour autant, elle n’était pas prête à renoncer. Pas alors qu’il se trouvait juste là, à sa portée, et que se profilaient toutes les possibilités nouvelles qui s'offraient.

As I lay my heart before you
I burn in the shadow of the saint and the valentine

Jeu 11 Aoû - 22:04
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Morghann Earl
L'étrange sous la normalité : Enfant cadet du Patriarche Earl, il est un héritage refusé, s'extrayant de la nécrose gangrénée de sa famille.
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Morghann Earl
De toutes les balivernes dont on aurait pu l’accabler, il n’avait pas songé à celle-ci. Cela en faisait donc la pire et ça n’avait rien de flatteur. Les prunelles du Lord étaient terriblement sombres, grondantes comme un lion qui rugit l’ampleur de sa toute terrifiante puissance. Vil était ce démon qui plus que de connaître les bribes de sa vie menée à l’étranger semblait s’en amuser, jouer, lui faire croire ce qui s’en trouvait impossible. Farce sournoise s’il en était et dans l’expression de Morghann tout tendait à réclamer des excuses les plus plates, autant que promptes. Il ne saurait être clément face à une telle mascarade et si l’ignoble fidèle de Lucifer voulait jouer… Alors sans nul doute devait-il s’attendre à se prendre quelques coups au passage. La cadet des héritiers n’était pas d’humeur à ce qu’on prenne en amusement les cadavres d’un passé encore trop proche pour qu’on vienne s’en gausser. Ce scélérat ! Cet abominable plaisantin ! Devait-il à son ire céder quand tout semblait vouloir acquiescer en ce sens ? Était-ce alors ce que le démon voulait ? Qu’il perde patience ? Alors il aurait tord de lui concéder cette victoire. Il était un Earl et tant qu’il se trouverait à Last End, il devrait faire honneur à ce nom et à la place qu’il lui offrait dans la société, qu’elle soit de l’Endroit ou de l’Envers, la résolution était identique. Un silence, lourd, pesant, fut sa réponse première, la glace comme un marbre mortuaire. Là était l’attribut de sa maison, de son blason, son masque impassible comme muraille à ces enfantillages. Et puis, ses lèvres s’entrouvraient, pour que d’un grave et posé propos il vienne la fustiger : « Comment osez-vous vous complaire en pareille félonie ? Qu’il soit là votre nature, soit. Je l’agrée. Mais de vices vous ne devriez trop me prêter, au risque d’avoir à le regretter. » La menace était placée comme une tension latente, une corde argentine tendue à outrance qui pouvait céder avec ses regrettables conséquences si on venait un peut trop la chatouiller. « Rares sont ceux qui survivent à l’affront porté à un membre de ma famille, êtes-vous bien certaine qu’il vous plaît encore de jouer avec les dépouilles de mon passé ? »

Il s’approcha d’elle, d’un pas lent mais ferme et mesuré, se faisant plus grand qu’elle, la toisant, à mesure qu’il était proche. L’obsidienne nocturne de ses pupilles était perçante, transperçante, comme s’il allait frapper au cœur même de sa psyché. « Vous auriez tord de les déterrer. Leur place ne pourrait être en ce lieu et cette heure à mes côtés. Que leur âmes reposent en paix, ils n’auraient que trop souffert des contraintes d’un mariage qui n’aurait satisfait mes aïeux. Il est peut-être mieux, pour eux, qu’ils se soient effacés pour qu’à de violentes tortures, ils ne soient exposés. L’heure est grave, l’heure est à la guerre, Mademoiselle White. Plus aux enfantillages ni à une fraîche candeur auxquelles je n’ait été que trop enclin. » Il posa un index sous le menton de la femme, pour en relever le faciès solidement. « Le devoir. Mon devoir. Je crains ne pouvoir y échapper, quand bien même je pourrais le souhaiter. Comprenez qu’il est cruel de jouer de ceci, avec moi. Et que je ne saurais le tolérer. Si c’est à mon ire que vous souhaitez être confrontée... Allez-y, je vous enjoins de poursuivre. Qu’à cet avertissement, cela tienne, je ne le reformulerai pas de nouveau. Vous en supporterez les conséquences et ne pourrez prétendre ne pas avoir été prévenue. » De toutes évidences, on ne jouait pas avec son ex-femme et son enfant ! Il défendait tant leur honneur que le sien, en parfait équilibre entre le respect et sa propre sécurité. Il relâcha le menton sans s’écarter pour autant, fixant le démon avec droiture et fermeté. Il serra les mâchoires, visiblement peu enclin à traiter du sujet et pourtant, il ne devrait, il ne pouvait y échapper. Tout comme elle avait bien du se douter qu’il connaissait assez bien la nature des démons pour leur prêter pareille sournoiserie, celle de se faire passer pour sa défunte femme et lui chatouiller quelques reliquats de sentiments. Menteurs et fourbes qu’ils étaient !

D’un ton plus calme, posé, moins menaçant, il reprenait, certain d’avoir aplani la situation pour rendre leurs négociations plus saines : « Que me voulez-vous ? » Question initiale, il lui accordait une seconde chance. Il n’y en aurait pas d’autre.

Dim 21 Aoû - 19:48
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Elle restait plantée là, figée, le cœur gelé et l’esprit empli des résidus d’une attente contrariée. Il ne pouvait la croire aussi facilement, et cette méfiance à son encontre, si elle était justifiée, déployait quand même en elle les échos d’une douleur inimaginable. La sentence avait sonné, confirmant ses craintes comme ses errements.

Les mirages dansants de ce regard si sombre, si noir, ne lui offraient maintenant qu’une défiance légitime. Les choses devaient en arriver là pour évoluer, mais alors que les éléments s’enchainaient, elle se trouvait subitement à cours de ce courage candide qui jadis l’avait animée et dont il lui restait à peine à présent quelques traces succinctes.

Kessy sentait bien ses yeux s’humidifier et perdre leur opacité infernale mais pleurer était inconcevable. N’était-elle pas censée ne plus ressentir à la manière des hommes mais bien mimer à celle des démons ?

Ces larmes étaient fausses, comme l’était cette enveloppe volée qui enrobait d’un charme factice l’obscurité de sa renaissance. Le dégout, rampant, pernicieux, perçait ses défenses, s’immisçait avec la lenteur trompeuse d’un premier amour pour mieux saccager ce qu’il restait de son ancienne identité. Elle se sentait disparaitre, se fondre en cet autre chose qui avait pris possession d’elle. Le gouffre la guettait, son équilibre vacillait, entrainant sa raison et toutes ses belles résolutions.

Le visage levé de force vers celui qu’elle aimait, elle sentit sa gorge se serrer à son contact glacé et autoritaire. Il la libéra vite cependant, et les mains fines de la démone vinrent s’attacher en réponse à la taille solide de Morghann, dans une prière discrète alors qu’elle murmurait, la voix fêlée et le regard fixe :

- Suffit, Morghann. Tes menaces sont vaines et nulle mise en garde ne saura plus me tenir à l’écart. J’ai suffisamment contemplé la mort. Que puis-je faire pour adoucir ta méfiance ? Je ne peux pas… Je ne veux pas rester ce monstre que tu vois, que tu sembles décidé à chasser. Regarde au-delà. Je t’en prie. Je veux que tu me dises ce que je dois faire. Demande-moi ce que tu veux, n’importe quoi, mais ne me repousse pas, n’ajoute pas ton indifférence, ou ta colère, à l’horreur de ma condition.

Lorsqu’elle releva les yeux, prunelles givrées rencontrant la tourmente sourde occupant celles d’en face, elle hocha doucement la tête, reculant de quelques pas, comme effrayée par cette puissance qu’elle avait pourtant longtemps côtoyée. Effrayée par les mots échangés, par les conséquences de son obstination.

Voilà donc ce que cela faisait d’être de l’autre côté, d’observer d’un regard neuf ce qu’elle avait cru posséder. Jusqu’à ce que la mort, vous sépare, avait dit le prêtre. Jusqu’à ce que la mort nous sépare, avait-elle hurlé du plus profond de son âme, muette de surprise et de ravissement, innocente ne croyant pas en sa chance. Le moment était passé, le bonheur consommé, et la camarde les avait bel et bien séparés. Maintenant ? Ne restait que des cendres, reliquats fragiles de réminiscences s’estompant de jour en jour, mais c’était bien avec ces cendres qu’elle devait composer et ranimer une flamme qu’elle avait elle-même éteinte de la plus radicale des manières.

Sa meilleure carte avait été jouée, et la vulnérabilité de sa situation lui apparaissait dans tous ses terribles détails. Certes, elle était un démon au lieu d’avoir simplement cessé d’exister, mais à quoi bon pouvoir contempler la naissance et la mort d’un siècle, puis du suivant, sans autre raison que répandre mal et souffrance ? Il ne pouvait en être ainsi, et si sa demande d’aide, aussi brusque qu’imprévue, pourrait sans doute passer pour une trahison aux yeux d’Elie qui l’avait si bien guidée jusque-là, elle ne pouvait décemment renoncer et se mettre au diapason de ces autres qui idolâtraient la mort.

Eurynome, elle le sentait, était au cœur de bien des choses, et peut-être son nom suffirait-il à débloquer l’impasse dans laquelle elle se trouvait, mais vu la façon dont Morghann avait accueilli sa propre venue, rien n’était moins sûre et elle ne pouvait prendre le risque de le braquer davantage.

Dim 28 Aoû - 18:35
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Morghann Earl
L'étrange sous la normalité : Enfant cadet du Patriarche Earl, il est un héritage refusé, s'extrayant de la nécrose gangrénée de sa famille.
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Morghann Earl
S’il n’avait pas eu l’éducation qu’on réservait à un Lord de sa lignée, Morghann l’aurait probablement giflée pour ses larmes. Pour cette moquerie et cette duperie. Qui croyait-elle tromper ? Lui, le nécromancien de si haute naissance, qui dans le monde de l’Envers avait baigné toute son enfance au point de s’y noyer si son jumeau bien intentionné ne lui avait pas maintenu la tête hors de l’eau ? Son regard sombre la fixait, la toisait avec une ire à peine retenue en leur éclat. Il recula légèrement au contact de sa main sur sa taille. Pour qui se prenait-elle ? Ah oui… Pour celle qu’elle prétendait être. Elle n’en démordait pas et le sorcier n’était pas le genre d’homme à accorder sa confiance à un démon. C’était le meilleur moyen pour être déçu ici-bas. Dans son regard dansait l’indignation d’une vierge effarouchée qui venait d’être effleurée au mollet avant que ses sourcils ne se froncent, verrouillant son visage dans une expression de fermeté. Les mots silencieux dans la composition de son faciès se répercutaient sans nul doute sur le démon qui semblait en proie à… Quel sentiment prêter à ces êtres ? Ils n’en sentaient aucun si ce n’était leur propre satisfaction. Elle reculait et il demeurait, malgré les paroles qu’elle venait de proférer tel un appel au secours, désespéré.

Morghann serra les mâchoires et une masse lourde pesa soudain sur l’atmosphère. Les chuchotis des morts résonnaient dans la pièce, l’envahissaient, se l’appropriaient à mesure que le nécromant leur laissait prendre de l’ampleur, tel le catalyseur de la volonté de l’au-delà qu’il contorsionnait selon ses besoins. Les volutes de fumée noire, tournoyantes, s’enroulaient sur elles-même et s’étendaient le long des murs, les dévorant, les recouvrant. Elles calfeutraient la pièce, empêchaient les sons de sortir, quiconque d’entrer. Il n’y aurait rien ni personne d’autre qu’eux deux dans cette pièce devenue aussi noire que les yeux de son officiant. Le sol était un tapis brumeux et les lumières au plafond, avaient été dévorées. On entendait murmurer les défunts qui avaient l’air de loger au cœur même de ces amas de ténèbres. Dans l’obscurité totale naissaient des perles de lumière, flottantes, qui répandaient un éclat vivace au cœur de cette tension formée par l’enclos du trépas. Il l’observait encore, cherchant son sort mais surtout des réponses. Des fils d’obsidienne se formaient comme la dentelle d’une toile d’araignée, raide, violent, elle vint magiquement transpercer la tête de la jeune femme comme une lame aiguisée, froide. Ça n’était pas physique, la douleur. C’était dans sa tête, dans son cortex, car c’était là qu’il pénétrait. S’il y avait des traces de trépas, si elle disait vrai… Alors il le verrait.

Il s’immisçait en elle sans grande douceur. La douleur n’était que passagère, grande certes. Mais éphémère et plus vite il aurait trouvé ce qu’il cherchait et plus tôt il pourrait la relâcher. Il ne l’écouta crier si elle le faisait, pas plus qu’il ne la vit tomber à genoux par le vertige et la souffrance. Sa magie était noire et sa vision comme chacun de ses sens, était captivée dans l’exploration du cortex de la démone comme avec un radar à trépas. Il ne prêtait pas même attention à tout le reste, la seule chose qui l’intéressait, c’était les fils de la morts, le voile de l’au-delà, les traces défuntes et il les vit. Il s’en figea, la relâcha immédiatement. Il avait saisi son esprit, il l’avait reconnue, en avait été frappé quand d’un suaire mortuaire, il la vit enveloppée. Un souffle estomaqué sortit d’entre ses lèvres alors qu’il revenait à lui et l’observait à terre. La réalité l’ébranlait comme une feuille au vent. Les morts de son passé revenaient. Il y avait eu Andrew. Maintenant Kessy. Qu’était cette blague odieuse qu’on lui faisait ? Eurynome à nouveau derrière cela ? Andrew était un enfant fou, avide de ces dangereux secrets qui vers de lourdes souffrances le conduiraient. Kessy avait connu les chiens de l’enfer, d’après son fils. Cela expliquait sa condition de démone et tout prenait enfin un sens pour le sorcier.

« Je ne peux pas. » souffla-t-il abattu, ayant largement perdu de sa prestance après ce coup. Il était l’homme, l’humain qu’elle avait pu connaître par le passé. Loin des mensonges et de la grandeur de sa famille. Il reprit de ses mouvements et, gentleman, lui tendit une main pour l’aider à se relever. Elle devait être encore un peu sonnée, comme frappée du poing d’un boxeur zélé. « Je ne peux pas t’aider… Le processus que tu as subi est irréversible. Lorsque l’âme descend en enfer, elle est torturée, délitée, mutilée, détruite. Et il n’y a rien au monde qui puisse la reconstruire. » C’était partiellement faux. Howard avait bénéficié de cette reconstitution. Mais par l’œuvre d’un puissant démon et à partir du reliquat qu’il en restait. Il n’y avait plus rien à cloner chez Kessy, pas même une maigre graine. « Pas à partir de rien. » corrigea-t-il alors. « Âme perdue, tu es descendue de la table de torture pour devenir le bourreau d’un autre. Tu es corrompue. J’ignore s’il est possible de se racheter. Seuls les exorcistes du Vatican doivent le savoir je suppose. La Bible, dans les évangiles de Jean, parle de rédemption mais j’ignore jusqu’à quel point il est possible de se racheter ni à quel prix. » Devenir un démon était une salissure si chère qu’il n’était pas certain qu’il ne faille payer de sa vie pour en être purifié. Les exorcistes savaient être d’horribles radicaux.

Il avait répondu à sa question. Ça n’était peut-être pas ce à quoi elle s’attendait pas mais à présent, c’était à elle de l’éclairer : « Pour quoi as-tu vendu ton âme ? Dans quel but ? Quelle idée folle t’es passée par la tête sans que.. Tu viennes me consulter ? » Il était toujours atterré par la nouvelle.

Jeu 8 Sep - 23:51
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Le mouvement de recul de Morghann lui fit l’effet d’une gifle retentissante, mais elle refusa de s’y attarder, d’y attacher la moindre importance. Désappointée, elle ne ratait rien des changements s’opérant chez son ancien mari, et sentait la vague se dessiner, celle qui l’engloutirait, à mesure que l’atmosphère de la pièce s’assombrissait. Face à lui, elle était vulnérable, encore trop attendrie pour bloquer quoi que ce soit de sa part ou pour dresser la moindre barrière entre elle et ce qu’elle sentait se profiler. La tension montait, et la démone attendait, résignée, que se déchaine le sort jeté.

Dur. Comme le choc du pouvoir qui la percuta. Kessy n’hurla pas, la douleur était trop vive, trop intense pour pouvoir l’exprimer par un cri. Echappant à sa volonté, son corps s’affaissa lentement jusqu’à ce que ses genoux heurtent le sol.

Enténébrée, mise à nue comme jamais, la démone perdit toute emprise, s’abandonnant entièrement à celle qu’exerçait Morghann. Le pouvoir du sorcier, brut, la cernait de toute part. Et si la douleur la fouillait sans trêve, elle ne pouvait s’empêcher d’en apprécier chaque variation, de savourer l’attention dont elle était soudain l’objet. Elle resta là, prostrée, lorsqu’il en eut terminé, le souffle court et le cœur affolé, encore marquée par la déflagration intérieure qu’elle venait de subir. Fréquenter les Earl n’était décidément pas de tout repos, se dit-elle encore avant de prendre la main tendue, laissant échapper un hoquet surpris lorsque son corps ramassé sur lui-même se déplia un peu trop rapidement à son gout.

Elle glissa vers lui un regard interrogatif, peu sûre de ce que pouvaient désormais receler les prunelles d’obsidienne. Acceptation ? Doute ? … Dégout ? Bien sûr, elle attendait beaucoup, lui demandait beaucoup, ce qui la forcerait à avouer ses propres défaillances, mais les enjeux n’en valaient-ils pas la peine ? Si une quelconque rédemption lui était possible, elle se sentait prête à l’impossible pour y accéder, chose qu’elle s’était bien gardée d’ébruiter. L’espérance n’a pas sa place en enfer, et Elie, s’il s’était montré conciliant, ne verrait sans doute pas d’un bon œil ses envies d’évasion, de reconversion, de retour à la normale.

La voix de Morghann glissait sur elle, comme la plus douce des caresses, entêtante, entraînante, mais ses mots s’infiltraient dans l’esprit de la démone comme le plus insidieux des poisons. Elle n’aurait donc pas de seconde chance. Ses choix la poursuivraient, et elle en paierait sans cesse le prix, enchaînée à cette nouvelle existence.

Processus irréversible. Âme Perdue. Vatican. Corrompue. Les mots dansaient devant ses prunelles comme autant de flashs indélébiles. Il devait pourtant exister une solution, quelque part, se dit-elle en serrant les poings avant de prendre une profonde inspiration. Que devait craindre un démon, sinon l’annihilation par plus fort que lui ? Kessy craignait bien des choses en raison de sa dualité toujours présente et les peurs humaines bien qu’assourdies par le noyau de la démone refaisaient surface lorsqu’elle se sentait trop exposée. Son humanité avait vécu Morghann comme une plongée en eaux troubles, profondes, et ce sentiment d’impuissance lui revenait en pleine figure maintenant qu’elle lui faisait de nouveau face. Il attendait des réponses qu’elle ne se sentait pas prête à offrir, mais elle se lança tout de même, désireuse de rétablir, sinon un climat de confiance, au moins une preuve de sa bonne volonté.

« C'était nécessaire. Pour nous. Pour toi. Pour les pouvoirs, le pouvoir ? Par amour. Pour cette sensation d’inéluctable chaque fois que je te regardais, comme une malédiction. Je craignais tant que tu ne me sois enlevé si je n’accomplissais pas mon devoir d’épouse et si je ne te donnais pas ce que tu attendais. Une descendance digne de toi. Digne de cette famille. De mon vivant, tu as changé mon existence, tu es devenu le centre autour duquel j’ai fait graviter toutes mes préoccupations. Est-ce si étonnant de comprendre ce qui m’a poussée à agir ? J’étais aveuglée. Terrifiée. T’en parler n’aurait fait que repousser l’échéance, je me savais condamnée, je n’imaginais simplement pas… ça ? » Elle se désigna lentement d’une main hésitante, englobant ce corps étranger à ses souvenirs et cette psyché maladroite et martyrisée, puis repris d’un ton sourd.

« Il me fallait te revoir. Toi et Andrew êtes mes seuls liens tangibles avec ce que j’ai laissé derrière moi lorsque j’ai franchi le pas. Je ne suis pas encore prête à embrasser les ténèbres Morghann, et à tourner le dos à tout ce que j’ai connu, même s’il semble que ce soit trop tard. Quand bien même, à qui pourrais-je bien m’adresser pour mesurer mes chances ? D’autres démons ? Ces créatures, si semblables à ce que je suis, mais qui pourtant me paraissent si éloignées en même temps. Je navigue d’un côté puis de l’autre, je suis esclave de pulsions qui me tirent sans cesse vers le fond. Je refuse de n’avoir aucune porte de sortie. Mais sois assuré que je ne suis pas venue te torturer. Le temps diffère tellement ici et … là-bas. Tout ce que j’ai pu vivre en tant qu’humaine me parait risible, dépassé. L’amour que je te porte est toujours là, intact. Je le sens. Mais cela mérite-t-il toujours le nom d’amour ? Ou n’est-ce qu’une nouvelle déchirure à venir ? Un désir malsain que ce que je suis éprouve pour ce que tu es ? »

Elle se mordit les lèvres, comme pour retenir, bien trop tard, le flot de paroles lui ayant échappé. Devant lui, sous son regard d'ébène, celle qu'avait été Kessy se débattait furieusement contre les inclinaisons qui rythmaient maintenant ses prises de décision. Elle avait dit tout ce qu'elle pouvait se permettre de dire, tout ce qui avait pesé sur sa vie durant dix longues années, mais la libération espérée se faisait attendre.

Sam 1 Oct - 17:11
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Morghann Earl
L'étrange sous la normalité : Enfant cadet du Patriarche Earl, il est un héritage refusé, s'extrayant de la nécrose gangrénée de sa famille.
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Morghann Earl
La culpabilité. C’était ce qui rongeait Morghann lorsque le silence retomba au terme des révélations. Le nécromancien entrouvrit les lèvres pour les refermer presque aussitôt, regard d’ébène posé sur le charmant minois du démon. La claque était assez monumentale et il en avait déjà été la proie au début du mois de mars. Kessy était alors l’exemple de plus de l’impact nocif que le cadet Earl avait sur son entourage, les condamnant à la perdition. Il y avait eu Ayzebel. Morghann avait tant cherché à l’aider qu’il l’avait lentement massacrée. La jeune femme était plongée en exil quelque part en Chine, cachée, en quête d’un moyen de vivre malgré la blessure que le nécromancien lui avait follement infligée. Les portes ouvertes sur l’Ailleurs n’étaient que trop lourde à porter pour une sorcière Tenak. Howard avait été contraint à protéger son jumeau et d’un rituel allant bien au-delà de ses capacités pourtant fort élevées était devenu un nouvel Icare. Il en avait payé le prix, corps, âme et esprit torturés, annihilés et extrémiste sauvés.

A peine Morghann avait-il retrouvé foi en l’avenir que l’aveu de Kessy le détruisait. C’était ce qu’il était qui avait mené son épouse à un choix tel. Elle s’était vendue et il l’avait perdue, elle ainsi que son fils. S’il s’était contenté d’être un Earl, droit et rude, il n’aurait pas condamné Ayzebel, pas plus qu’Howard, Kessy ou Andrew. Ces quatre personnes avaient payé le prix de sa liberté à lui, du droit qui lui avait été offert de jouir d’une vie différente à laquelle il avait été, de naissance, destiné. Et même s’ils avaient payé de leur plein gré, cela devait-il, pouvait-il lui ôter la culpabilité ? Au nom de cette responsabilité, pouvait-il lui dire qu’il avait tourné la page à leur histoire ? Qu’il avait pris réconfort dans d’autres bras avant de les perdre ? Devait-il lui dire qu’il adorait son jumeau, qu’il le vénérait et l’aimait ? Devait-il briser ce qui lui restait de cœur ? Cela lui ferait-il seulement mal ? Si elle n’en ressentait rien, pourrait-il se retenir d’avoir mal pour elle ? Pour ce qu’il lui avait infligé ?

Morghann serrait ses mâchoires l’une contre l’autre : « J’ignore… L’essence de ce que tu peux ressentir ou… croire ressentir. Je suppose que si ton désir est de fuir ce que tu es, alors tu es parfaitement en mesure de croire sincèrement en ces sentiments connus par le passé. On peut se mentir à soi-même par complaisance, pour réduire les dissonances entre ce à quoi on aspire et… Ce qu’on est réellement. Plus que par vice ou convoitise envers moi. J’aime à espérer que ça n’est que cela. » Et non pas l’acte pernicieux d’un démon avide de le tourmenter en clamant le contraire. Sa culpabilité lui donnait envie de la croire. Et si tel avait été le but de Kessy : en ce sens, elle le manipulait pleinement et d’une main de maître.

« Je n’attendais pas cela de toi. Si c’était le pouvoir ou je ne sais quel auguste descendance qui m’intéressaient, je me serai tourné vers une sorcière du Concordat. Mon père n’aurait eu que l’embarras du choix. Comme il l’a aujourd’hui. » Fils prodigues de retour, l’annonce de fiançailles ne faisaient que trop tarder. Les déboires du Réanimateur avait repoussé l’échéance, mais Morghann ne se leurrait : elle tomberait. « Quoique tu aies pu faire, cela n’aurait jamais été suffisant pour eux. C’était égoïste de ma part que de t’infliger cela. J’aurai aimé que tu ne l’apprennes nullement mais tu l’as su. Très tôt. Je regrette... » Il déglutit difficilement, regard flou, tête secouée de gauche à droit en négation. « Je n’ai fait que… Qu’essayer de contourner l’inéluctable pour finalement retomber dedans, inévitablement, délaissant derrière moi une traînée de sacrifiés. Parce que ça ne me plaisait pas, j’ai sacrifié mon entourage pour ma propre liberté. Toi, Andrew… Howard. » Ayzebel. Mais il ne prononça pas ce dernier nom. Il ne le pouvait.

Les regrets ne servaient à rien mais il n’avait que cela. Il ne pouvait pas remonter le temps pour ne jamais la rencontrer, pour ne jamais s’écarter de ce que les Earl attendaient de lui. Il n’avait pas la moindre idée de comment il pouvait à présent lui venir en aide. « Je ne sais pas ce que je peux faire... » Il avait juste envie d’aller de cacher, se recroqueviller dans un coin de sa chambre, mais apparences obligeaient, il restait là, debout et droit malgré l’humanité et la fragilité de ses mots. « J’ai tourné la page Kessy. Je suis revenu auprès des miens. » Et les siens n’attendaient pas à ce qu’il traîne avec un démon, ou n’éprouve le moindre sentiment à son égard. Y compris de la compassion.

Mar 25 Oct - 16:47
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Les aveux s’enchainaient, achevant lentement le processus de destruction émotionnelle qui se jouait au cœur de la démone. Son essence nouvelle reprenait le dessus sur le simulacre d’humanité qu’elle s’était forcée d’imiter, qu’elle avait cru pouvoir maintenir, et si l’humaine, si sensible, si fragile, sentait son cœur se briser, la démone ricanait intérieurement. Son être tout entier se nourrissait de la douleur infligée, sans qu’il importe qu’elle en soit la cible. Son visage restait exempt de toute émotion alors que son sang bouillonnait. Elle avait l’impression de le perdre une seconde fois. D’une manière bien plus définitive, plus cruelle puisque c’était lui qui partait.

C’était la colère plus que la tristesse qui l’animait maintenant, et le dépit de n’être pas capable de retourner ce sentiment indésirable contre celui qui l’avait provoqué. Les derniers mots lui semblaient irréels. Tourner la page. Comment était-ce possible alors qu’elle n’avait cessé, du plus profond des enfers, de penser à lui et à ce que cela pourrait faire de le retrouver ? N’avait-elle été qu’un réceptacle ? Une mère, une épouse, mais jamais un amour ? Elle en tremblait, les poings serrés, le regard baissé vers le sol comme si elle pouvait, d’un simple coup d’œil, l’embraser et tout faire brûler.

Morghann était incapable de lui venir en aide et de lui fournir ce soutien qu’elle avait espéré de toutes ses forces. Pire, il dévoilait enfin ce qu’elle avait pressenti sans oser le croire. Leur relation avait toujours été vouée à l’échec et peu importait le sacrifice qu’elle avait consenti. Il lui fallait se reprendre, reconsidérer ses options et envisager l’avenir, son devenir, et ce qu’elle comptait en faire.

Comment sortir du cercle dément qui entraînait chaque jour davantage dans des ténèbres dont elle avait vu le pire sans réussir à le craindre ? Elle en sentait la caresse en elle, l’appel incessant qui l’incitait à renoncer tout simplement à tout ce qu’elle avait pu être pour mieux embrasser ce qui s’offrait à sa nouvelle forme. Elle ne s’y était pas livrée, trop imprégnée de souvenirs, d’envies lointaines et du besoin viscéral de retrouver ceux qui avaient compté. Maintenant, ce serait différent. Morghann venait de la libérer des liens factices qui l’attachaient encore à lui.

Engourdie, elle releva la tête, cherchant ses yeux pour y planter les siens. Ses prunelles redevenues d’un noir de jais, Kessy finit par sourire, un sourire aussi froid que la pierre tombale qu’elle possédait sûrement quelque part. Parce que rien ne lui restait d’autre que cette force malsaine qui lui parcourait les membres. Cette détermination purement démoniaque d’obtenir quand même ce qu’elle se savait interdit. Elle trouverait ailleurs de quoi pallier à ses faiblesses.

Il existait sûrement sur cette terre, au cœur de ce monde surnaturel, un moyen de recouvrer ce qu’elle avait perdu, mais voulait-elle vraiment regagner quoi que ce soit maintenant que s’ouvrait sous ses pieds la perspective d’une solitude infinie ? Pourquoi ne pas plutôt profiter pleinement de ce qui lui avait été offert.

Elle sentait le pouvoir affluer, se concentrer, la réchauffer et l’enlacer dans une étreinte secrète. Comme aurait dû le faire Morghann. L’idiot. Qu’il était beau pourtant, enfermé dans ses excuses, sa déchéance offerte en pâture. Jusqu’à quel point pouvait-elle profiter de ce qu’il daignait enfin lui montrer ? Elle l’ignorait.

Lorsqu’elle revint vers lui, le noir n’avait pas quitté ses yeux. Ni la volonté son esprit. Elle ferma les paupières et entoura le visage de Morghann de ses paumes avec fermeté, puisant dans sa force surnaturelle pour éviter tout refus de proximité, approchant ses lèvres des siennes jusqu’à pouvoir sentir son souffle s’en échapper. Elle resta là quelques secondes, tout contre lui, enivrée, avant d’articuler d’une voix glacée

« Souhaites-tu que nous parlions d’Eurynome  ? Ou de ce que tu prévois pour Andrew ? Car tu prévois certainement quelque chose pour notre fils, les Earl n’ont pas pour habitude de se laisser surprendre, n’est-ce pas ? »

Elle ne le relâcha pas cette fois, bien peu soucieuse de la manière dont il pourrait la repousser maintenant que les choses sérieuses commençaient. Dans tous les cas, elle ne se laisserait pas écarter sans des adieux dignes de ce nom.

Hrp:

Sam 12 Nov - 23:50
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Morghann Earl
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Morghann Earl
Son cœur était rongé de culpabilité lors qu’il vit son ancienne épouse ainsi baisser la tête au coup qu’il lui portait. Mieux valait peut-être maintenant que de lui réserver une déception plus grande encore. Il se sentait cruel et bienfaiteur à la fois. C’était comme être l’arme d’un mal pour un bien et pourtant, Morghann ne pouvait ignorer le danger que ce démon représentait pour son honneur. Il n’osait imaginer la colère de Pryam s’il apprenait son mariage clandestin et sa paternité souillée. Au fond, Morghann venait de vendre l’âme du Patriarche à Eurynome pour sauver la vie de son jumeau adoré. Ça n’était pas le moment de mettre de l’huile sur le feu. La solution la plus simple aurait été de la tuer, là et maintenant. Éliminer la menace tant qu’elle était encore faible mais sa culpabilité l’empêchait d’agir. L’observation lui fendait le cœur et il aurait voulu la rassurer, la consoler, trouver n’importe quoi pour réchauffer son âme… Mais d’âme elle n’avait plus et le constat était plus sinistre encore. Les yeux complètement noirs lui glacèrent le sang. Il l’avait détruite. Elle avait crié au secours et il avait détourné le regard. Il n’avait faite choir. Une chute inéluctable, mais une chute tout de même. Ça n’était pas parce qu’elle aurait fini par apprendre, tôt ou tard, que d’amour, il n’y avait eu aucun qu’il avait le droit de la précipiter dans le vide. Il serra les mâchoires l’une contre l’autre et ne chercha pas à échapper à son emprise alors qu’elle approchait contre lui, blasphémant les lois de la bien-séance. Son souffle chaud heurta les lèvres sans vie de la démone, ses noires prunelles s’étaient closes par douleur.

Il vint poser ses mains sur sa taille pour l’enserrer, appeler l’humanité par la douceur de ses gestes. La mémoire de ce sourire glacial ne lui annonçait rien de bon. Danser avec un démon, c’était accepter de voir la lumière d’un feu qui nous brûlerait le visage, un jour, par inadvertance. Elle n’attendrait que cela pour frapper. Une faiblesse, une confiance. Elle était un démon et elle jouait avec sa culpabilité. Et lui était un humain, son petit jouet. Un jouet qui pouvait tout aussi mordre s’il le décidait, s’il se défaisait du poids de sa faute. Encore fallait-il qu’il en soit capable. « Est-on obligés d’en arriver là, Kessy ? » souffla-t-il avant d’ouvrir les yeux, venant prendre solidement les mains qui lui tenaient le visage pour l’en défaire, ses poignets lourdement maintenus, de magie accompagnés. « Cesse cela… C’est du suicide. » Si l’esprit de Morghann pouvait être torturé par un démon avisé, celui d’Howard était plus solide et moins impliqué. Son jumeau était son protecteur et il ne pouvait que trop prévenir la démone du risque qu’elle encourait. « Je ne suis pas seul, si tu peux m’atteindre… Ça ne sera pas sans conséquences… Réfléchis-y à deux fois. » Il recula d’elle, s’éloignant, et lâchait ses mains. Il se déroba jusqu’à s’adosser contre la porte et pousser un soupir. « Eurynome a ressuscité notre fils. Mais tu as l’air d’être déjà au courant. » Il n’avait pas parlé de lui, ni d’Eurynome. Il ne l’avait pas même sous-entendu. Elle était au courant de quelque chose.

« Il a pris mon fils parce que ça l’amuse beaucoup de jouer avec les Earl. Je ne veux pas qu’il le mette en pâture devant mon père. Je vais le récupérer et le confier à quelqu’un en qui j’ai une pleine confiance. » Il pensait à Anthony, son frère. Il ne pouvait pas garder Andrew à ses côtés. Il ne pouvait pas non plus le laisser aux griffes du Prince Démon qui lui avait redonné vie. Même si fugitif, son frère représentait encore une bien meilleure piste que de le laisser grandir encore avec Eurynome. « Pourquoi me demandes-tu cela ? » Elle n’avait plus aucun attachement pour sa progéniture si ce n’était l’intérêt qu’elle pourrait tirer à lui mettre des bâtons dans les roues. Lentement, il venait croiser ses bras contre son torse, la toisant sombrement.

Lun 21 Nov - 20:29
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Étaient-ils obligés d’en arriver là ? La question se posait en effet et, à mesure que la démone contemplait les émotions traversant le visage de Morghann, elle sentait sa colère refluer. Oh, elle lui en voulait encore, et ne cesserait peut-être jamais d’éprouver à son endroit un mélange de honte et de ressentiment, mais pas au point de basculer et de lui faire du mal finalement.

Elle avait été sur le point de porter le premier coup, plusieurs fois, puisque une par une, les barrières tombaient en révélant la vilaine farce que représentait l’attachement côté démoniaque : un grand vide, que seuls les sentiments négatifs pouvaient combler. Pour autant, elle n’avait aucune envie de se servir de son ancien amour, parfaitement consciente que ce n’était pas d’ennemis qu’elle avait besoin pour affronter sa nouvelle vie. Le feu coulant dans ses veines sembla s’apaiser quelque peu à ce constat, et son regard retrouva la clarté de sa fausse apparence.

Morghann l’avait fuie, encore une fois, échappant à son contact. Tant pis. Elle pouvait accepter la défaite pour cette fois et brider les émotions résiduelles qui encombraient son esprit. Elle hocha la tête puis croisa les bras, méditant les informations qui venaient de lui être livrées, puis fronça les sourcils avec une petite moue :

« Es-tu certain de pouvoir le protéger ? Ne risques-tu pas le courroux d’Eurynome à te mettre ainsi en travers de son chemin ? Je ne pourrais pas choisir, cette fois, je ne pourrais dénigrer ce qui me lie à lui en souvenir de ce qui me liait à toi, aussi… sois prudent. » Les deux derniers mots s’échappèrent dans un murmure à peine audible comme si déjà, elle regrettait ses paroles.

« L’attachement existe toujours, tu sais ? Peut-être pas le même que celui que je pouvais éprouver en tant que mère, ou en tant que femme, mais je vous considérerais toujours comme miens, d'une certaine manière… je ne peux faire comme si vous n’aviez jamais existé. »

Il lui faudrait creuser du côté de Pryam Earl, et peut-être également d’Howard, si elle osait, sans aucun doute, mais elle n’avait aucune intention de faire part de ses plans futurs à celui qui pourrait tenter de les contrecarrer. Trop de secrets dans cette famille, trop d’existences entremêlées, et pas pour les meilleures raisons, songeait-elle tout en réfléchissant à la manière de prendre congé. Jouer les prolongations dans cette situation la desservirait plus qu’autre chose, elle avait déjà frôlé les limites de l’inacceptable en poussant Morghann à lui rappeler le danger que lui ou sa famille pouvait représenter. De plus, le rejet avait laissé en elle une saveur amère qu’elle goutait for peu.

« Je vais quitter ce travail Morghann, la proximité de toutes ces âmes ne m’aide pas à garder le contrôle et ta présence ne fait que compliquer les choses. Nos chemins se séparent encore une fois, mais nous partageons le même monde désormais, et nous nous y recroiserons sans doute, ne t’en déplaise. »

Elle lui adressa un sourire à la chaleur retrouvée comme si aucune mauvaise parole n’avait jamais été échangée, le contempla encore quelques secondes, puis ajouta, son sourire s’élargissant

« En tout cas, si tu souhaites un jour partager quelques expériences… démoniaques, fais-le moi savoir, perdre son âme aide à la désinhibition. »

Elle lui tourna le dos, se dirigeant vers la porte avec l’intention de la franchir, mais ralentit considérablement une fois qu’elle eut la main sur la poignée, toujours sans regarder. Peut-être allait-il la retenir ?

Mar 29 Nov - 10:07
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Morghann Earl
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Morghann Earl
La vue des yeux humain fut le premier signe auquel Morghann s’accrocha pour se replier dans un soulagement. Il n’avait pas envie d’une confrontation, mais c’était à celle-ci que Kessy l’avertissait. La signification était des plus claire pour l’héritier trop habitué aux sous-entendus. Elle travaillait pour Eurynome et si le nécromancien œuvrait à arracher à son maître l’enfant, ils viendraient à s’opposer. Le cadet des enfants de Pryam ne la craignait qu’en moindre mesure. Il savait sa puissance magie capable de la terrasser en un claquement de doigts, tout en étant incapable émotionnellement de lui ôter encore l’existence qu’il lui avait volée. Mais s’il ne le faisait, son jumeau le protégerait là où Morghann en deviendrait incapable. Il s’en était remis à lui. Il ne répondit nullement à sa question pour autant. Bien sûr qu’il craignait Eurynome, tout en étant assuré que les liens entre le Prince Démon et le Cénacle étaient assez étroits pour ne laisser qu’une médiocre marge de manœuvre à Elie. Une situation tendue pour une assise entre deux chaises, un inconfort quotidien.

Il aimait croire que l’attachement existait toujours. S’il avait changé, leur vie commune ne pouvait être balayée en si peu de temps. Il y avait ce souvenir, fugace et douloureux. Un souvenir qui ne pourrait jamais faire d’eux des ennemis autant que leurs camps respectifs le nécessitaient, pas plus que des alliés. C’était un nouvel entre deux qui s’instaurait, un inconfort qui le satisfaisait sans le rassasier, perdu entre le soulagement et la frustration. Leur lien avait un goût d’inachevé, de bras tendus l’un vers l’autre sans pouvoir se toucher. Elle était un démon, d’Eurynome l’affidée, et lui un Earl à la noblesse à prouver. Il aurait voulu l’aider. Il aurait voulu la sortir de là où il l’avait fourrée, mais… Une part de lui-même espérait, ravi par le caractère de cette femme qui avait su apprécier, qu’il avait épousée. Son retrait était un gage de bonne foi qu’il agréait mais lorsqu’elle lui tourna le dos, il avait prit son bras avant de la ramener vers lui. Il poussa un soupir contre sa nuque, gardant le dos de la jeune femme contre son torse le temps d’une respiration qu’il tâchait de rendre profonde.

« Je ne suis plus le maître de mon âme. Elle appartient à Howard depuis quelques mois : je n’étais plus en mesure de mener ma propre existence sans heurt. » Ça n’était pas une surprise, les démons les plus avisés sauraient voir le lien qui unissait à présent les âmes jumelles. Il serra les mâchoires l’une contre l’autre avant de poursuivre : « Andrew et toi, vous étiez mon bonheur… Un bonheur comme une illusion. Comme on s’enferme dans un rêve pour fuir une réalité. J’ai essayé de me persuader que tout cela me rendait heureux et je te jure que j’ai voulu y croire… Tellement y croire… Que lorsque la bulle dorée a explosé, je ne savais plus qui j’étais. » Il marqua une pause, relâchant lentement son bras sans s’éloigner : « Je ne t’ai pas choisie pour partager ma vie au hasard, Kessy. Tu es une femme forte. Aujourd’hui encore, tu es admirable et digne. Je te remercie pour cela et je suis certain que tu sauras mener ta barque dans cette nouvelle vie, que tu sauras faire face aux obstacles, au moins le temps que je reprenne notre fils. » Car il était le plus vulnérable, humainement vulnérable. Il devait s’occuper de lui avant tout. Avant elle.

« Il est facile de combler le vide par la haine et la rancœur. Tu es au-delà de cette facilité Kessy, tu dois être au-delà. Tu as le choix. Certains sont plus aisés que d’autres mais ce n’est pas parce que des voies sont obscures et laborieuses qu’elles n’existent pas. Tu n’es pas obligée d’accepter ta nature, pas plus que tu n’es obligée de suivre Eurynome… Ou moi. Tu peux te battre et j’espère que tôt où tard tu le feras. » Il déposa un baiser sur sa tête, dans ses cheveux, près de sa tempe. Ce n’était pas parce qu’aucun démon n’était redevenu humain, à sa connaissance, que cela statuait du fait que ce soit possible ou impossible. Il n’appartenait qu’à elle de définir ses croyances. Il se détacha d’elle et quitta la pièce.

Sam 17 Déc - 16:43
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Jusqu'à ce que la mort nous sépare ? | Kessy
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